Radioprotection des patients : niveaux de référence, guide des procédures et des indications des examens d’imagerie


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Radioprotection des patients : niveaux de référence, guide des procédures et des indications des examens dimagerie



Lusage des rayonnements ionisants (RI) dans le domaine du diagnostic médical ne peut se voir appliquer de limites réglementaires car le bénéfice quils apportent est très supérieur à leurs potentiels effets néfastes, à condition que lexamen soit justifié et dune qualité suffisante au diagnostic.

Niveaux de référence diagnostiques


Lobligation légale de reporter les indicateurs de dose sur les comptes rendus dexamens radiologiques doit amener les techniciens et les médecins radiologues à prêter une attention permanente à lexposition de leurs patients. La connaissance de valeurs dexposition, PDS ou PDL pour les principaux examens leur permet également de situer leur pratique par rapport à la pratique médiane, grâce à la confrontation avec les niveaux de référence diagnostiques nationaux (NRD).

Les NRD se substituent, dans le domaine de lexposition médicale, au principe de limitation dans le domaine de lexposition professionnelle. Ils permettent d évaluer le niveau de dose dun examen donné dans la pratique nationale afin que chacun puisse situer sa pratique et la corriger en cas de dépassement régulier.

Par ailleurs, ont été mis en place des guides concernant la réalisation et les indications des explorations utilisant les rayonnements ionisants.

Origine et signification des NRD


La directive Euratom 97-43, relative à « la protection des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants lors dexpositions à des fins médicales » a imposé lusage dun référentiel proposé par la CIPR en 1996. La directive stipulait à larticle 4 (optimisation) : « les États membres favorisent l élaboration et lutilisation de niveaux de référence diagnostiques ». La transposition de cette directive en droit français a imposé la détermination de NRD en radiologie médicale et en médecine nucléaire. Larticle R. 1333-68 du Code de santé publique dispose que : « Pour les examens exposant aux rayonnements ionisants les plus courants et pour les examens les plus irradiants, des niveaux de référence diagnostiques de dose sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé, pour des examens types sur des groupes de patients types ou sur des matériaux simulant le corps humain. Ces niveaux de référence sont constitués par des niveaux de dose pour des examens types de radiologie et par des niveaux de radioactivité de produits radiopharmaceutiques en médecine nucléaire diagnostique. Le médecin ou le chirurgien-dentiste qui réalise un acte exposant aux rayonnements ionisants à des fins de diagnostic prend les mesures nécessaires pour ne pas dépasser les niveaux de référence diagnostiques. » Nous verrons que cette formulation est incorrecte car ces niveaux devront parfois être dépassés dans lintérêt du patient.

Selon la définition de la directive Euratom 97-43, les NRD sont « des niveaux de dose dans les pratiques radiodiagnostiques ou, dans le cas de produits radiopharmaceutiques des niveaux dactivité, pour des examens types sur des groupes de patients types ou sur des fantômes types, pour des catégories larges de types dinstallations. Ces niveaux ne devraient pas être dépassés pour les procédures courantes se conformant aux bonnes pratiques normales et utilisant des matériels performants ». Ces niveaux doivent être établis prioritairement pour les examens fréquents et les examens de dépistage ainsi que pour les examens délivrant des doses élevées (tomodensitométrie, radiologie interventionnelle). Il ne sagit pas de limites, car les médecins utilisant les rayonnements ionisants doivent conserver la possibilité de délivrer en cas de besoin les doses nécessaires au but recherché dès lors que lemploi des RI est justifié. Ainsi, chez un patient obèse, le radiologue pourra être amené à délivrer des doses supérieures au NRD dun examen donné, établi sur des patients types, afin davoir une qualité dimage suffisante pour ne pas compromettre le diagnostic. De même, un radiologiste interventionnel pourra prolonger un examen si le résultat nest pas atteint et que la survie du patient en dépend (exemple dune hémorragie ou dun anévrisme). Lassujettissement à une limite de dose pourrait ainsi faire subir un grave préjudice pour le patient. La notion de niveau de référence est tributaire de la qualité informative des images. Délivrer des doses inférieures aux NRD nest un critère de bonne pratique que si les examens réalisés répondent à la question posée.

Les NRD sont donc des repères dosimétriques permettant au radiologiste de situer sa pratique pour lensemble des examens quil réalise, par rapport à celle de lensemble de la profession et de prendre ainsi conscience de possibilités éventuelles de diminution de dose. Cest le préalable à toute démarche doptimisation. Ces repères permettent dapprécier la qualité des équipements et des pratiques lors des contrôles internes et externes, et dengager, en cas de dépassement injustifié, des actions de correction. La formulation du Code de santé publique est donc incorrecte, car cest lexposition moyenne, pour un acte donné, qui doit se situer en dessous du NRD et non lexposition de tous les actes. En effet on ne peut exiger, pour un acte, que lexposition se situe sous le NRD, car les circonstances (corpulence du patient, nécessité de réitérer une acquisition, etc.) peuvent amener à dépasser occasionnellement le NRD.

Élaboration des NRD


Elle suppose le choix de grandeurs dosimétriques appropriées, qui doivent être clairement définies et mesurables, refléter limportance de la dose délivrée aux patients, dépendre directement des paramètres techniques de lexamen et être adaptées au matériel radiologique courant. Ces grandeurs on fait lobjet dun accord international. En radiologie conventionnelle, on utilise la dose à la surface dentrée du patient (De) exprimée en milligrays (mGy) et le produit Dose.Surface (PDS) exprimé en Gy.cm2 ou en cGy.cm2.

En scanner, les indicateurs dosimétriques caractérisant une procédure sont lindice de dose de scanographie pondéré (IDSP ou CTDIw) et le produit Dose.Longueur (PDL). Pour l établissement des valeurs numériques des NRD, la Commission européenne conseille une méthode empirique, partant de la réalité des pratiques médicales pour aller vers une réduction progressive des doses délivrées aux patients. Cest la méthode statistique dite du 75e percentile, déjà mise en œuvre par plusieurs pays européens, dont la Grande-Bretagne, depuis une vingtaine dannées.

Les NRD initiaux sont mesurés pour une procédure courante, sur des groupes de patients types (en théorie, 70 ± 3 kg de masse corporelle, 20 ± 2 cm d épaisseur de torse, en pratique patients de corpulence normale, soit un indice de masse corporelle (IMC) compris entre 19 et 25 ou sur un fantôme anthropomorphe standard. On adopte comme niveau de référence la valeur du 75e percentile des doses mesurées pour une procédure donnée, sur un grand nombre de patients répartis dans un grand nombre de centres, représentatifs de la pratique radiologique dun pays (fig. 12-1 ). Il ne sagit donc pas dune moyenne mais, pour chaque pratique, dune valeur en dessous de laquelle se situent 75 % des mesures. Ceci revient à considérer que le quart des examens correspondant aux doses les plus élevées ne sont pas optimisés.

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Figure 12-1 Niveau de référence diagnostique. Cest le 75e percentile dune distribution de doses.
Les valeurs de dose pour un examen donné ont une distribution gaussienne. Le niveau de référence retenu pour cet examen ne sera pas la moyenne (M) mais la valeur en dessous de laquelle se situent 75 % des mesures.

Les niveaux de référence proposés par la Commission européenne découlent de la mise en œuvre de cette méthode, à partir de mesures effectuées dans une sélection de services de radiologie représentatifs des différents États membres de la Communauté. Les valeurs retenues en France ont été actualisées dans larrêté du 24 octobre 2011, pour les examens les plus courants en radiologie (tableau 12-1 pour ladulte et  12-2 pour lenfant) et en scanographie (tableaux 12-3 pour ladulte et  12-4 pour lenfant) ; soulignons que, par définition, ces niveaux sont appelés à se modifier avec une meilleure collecte des niveaux nationaux et la diminution des doses permises par les améliorations techniques (notamment les capteurs plans en radiologie conventionnelle et les techniques de reconstruction itérative en scanographie).


Tableau 12-1


Niveaux de référence de la dose à lentrée du patient, De, et du produit Dose.Surface en radiologie chez ladulte (arrêté du 24 octobre 2011)




















































Examen De en mGy pour une incidence PDS EN cGy.cm2
pour une incidence
Thorax de face (postéro-antérieur) 0,3 25
Thorax de profil 1,2 100
Abdomen sans préparation 8 700
Bassin de face (antéropostérieur) 9 700
Hanche (face ou profil) 9 300
Rachis cervical (face ou profil) 4 75
Rachis dorsal de face 5 175
Rachis dorsal de profil 7 275
Rachis lombaire de face 10 450
Rachis lombaire de profil 25 800
Orthopantomographie Sans objet 20


Tableau 12-2


Niveaux de référence de la dose à lentrée, De, et du PDS en radiopédiatrie (arrêté du 24 octobre 2011)













































































Examen poids (kg) âge De en mGy pds en cGy.cm2
Thorax face (antéro-postérieur) 3,5 0-1 an 0,08 1
Thorax face (antéro-postérieur) 10 1 an 0,08 2
Thorax face (postéro-antérieur) 20 5 ans 0,1 5
Thorax face (postéro-antérieur) 30 10 ans 0,2 7
Thorax de profil 20 5 ans 0,2 6
Thorax de profil 30 10 ans 0,3 8
Pelvis antéropostérieur 10 1 an 0,2 3
Pelvis antéropostérieur 20 5 ans 0,9 20
Pelvis antéropostérieur 30 10 ans 1,5 40
ASP 20 5 1 30
ASP 30 10 1,5 70




Tableau 12-3


Niveaux de référence en scanographie chez ladulte pour une acquisition




























Examen IDSV (mGy) PDL (mGy.cm)
Encéphale 65 1 050
Thorax 15 475
Thorax-abdomen-pelvis 20 1 000
Abdomen-pelvis 17 800
Rachis lombaire 45 700

Fantôme de 16 cm pour les examens de lencéphale, 32 cm pour les autres examens.



Tableau 12-4


Niveaux de référence IDSV et PDL en scanographie pédiatrique (arrêté du 24 octobre 2011)





































Examen 1 an (10 kg) 5 ans (20 kg) 10 ans (30 kg)

IDSV (mGy)/PDL (mGy.cm)
Encéphale 30/420 40/600 50/900
Massif facial (sinus) 25/200 25/275 25/300
Rochers 45/160 70/280 85/340
Thorax 3/30 4/65 5/140
Abdomen-pelvis 4/80 5/120 7/245

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Apr 26, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on Radioprotection des patients : niveaux de référence, guide des procédures et des indications des examens d’imagerie

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