« Création signifie avant tout émotion. C’est elle qui pousse l’intelligence en avant… C’est elle surtout qui vivifie… les éléments intellectuels avec lesquels elle fera corps […] »
Bergson
Les pensées et les actions de l’être humain résultent de la mise en œuvre des fonctions cognitives et des processus émotionnels dont le déploiement s’interpénètre. La manière de vivre et d’exprimer nos émotions, les choix existentiels qu’elles appellent, sont à la base de la personnalité. Étymologiquement, l’émotion est un mouvement ; l’effervescence émotionnelle, quand elle parcourt l’individu, éveille son attention, colore positivement ou négativement ses sentiments, induit des modifications autonomiques (accélération du pouls, rougeur ou pâleur du visage…), endocriniennes, musculaires (crispation du visage, sourire…), comportementales (agitation, évitement ou rapprochement…). On peut considérer que les émotions se structurent autour de trois dimensions essentielles : la valence (avec le paradigme positif–agréable/négatif–désagréable), l’alerte (calme/tendu), le contrôle (possible ou impossible comme lors d’une frayeur intense).
Si l’émotion est un mouvement, son déclenchement s’enracine dans la motivation qui donne en quelque sorte le potentiel énergétique à la mise en œuvre des comportements. Certains, chez l’être humain – comme chez l’animal –, sont animés par des pulsions instinctuelles liées à ses besoins biologiques fondamentaux, c’est-à-dire à ceux qui fondent sa propre survie et la survie de l’espèce : ainsi en est-il de la nourriture, de la boisson, de la sexualité, de la défense. Ces pulsions s’inscrivent ainsi dans une dynamique motivationnelle sous-tendue par l’alternance du « manque », qui induit le comportement, et de la « satisfaction », l’« apaisement », induits à leur tour par le comportement. Les fonctions instinctuelles ont donc partie liée avec la vie émotionnelle (voir infra). Mais, de manière générale, la résolution d’une tension, la quête d’une satisfaction expriment les liens qui unissent les composantes motivationnelle et émotionnelle des comportements. Car l’énergie motivationnelle ne se limite pas à la déclinaison des besoins biologiques fondamentaux : elle stimule aussi les comportements les plus élaborés. La cognition est donc liée au Systèmemotivationnel–émotionnelsystème motivationnel–émotionnel (Buck, in Borod, 2000). En outre, des anticipations (conscientes) et des évaluations émotionnelles (conscientes et inconscientes) interviennent dans les événements qui s’imposent à l’être humain comme dans les prises de décisions : c’est ce qu’illustre le syndrome de Sociopathieacquisesociopathie acquise décrit par Damasio (voir chapitre 13, p. 162) qui montre comment l’émotion (par l’activation de « Marqueur somatiquemarqueurs somatiques ») fonctionne comme levier décisionnel et du même coup est directement impliquée dans les processus cognitifs.
Les émotions : bases neurobiologiques
Le Systèmelimbiquesystème limbique (figure 17.1 et voir chapitre 1: tableau 1.I, 1.2 and 1.3) est le support des réactions émotionnelles en lien avec la substance réticulée (modulant l’alerte) et avec les structures corticales permettant les représentations (visuelles, auditives…) ainsi que les évaluations (lobe frontal) et adaptant le comportement émotionnel en fonction de l’histoire et de l’environnement propres à chaque individu. Le comportement émotionnel s’inscrit aussi dans la communication interhumaine : il existe donc un versant réceptif (identifier les émotions d’autrui) et un versant expressif qui constituent les pôles habituels de tout système de communication.
Figure 17.1 |
L’Amygdaleamygdale est considérée comme un élément central du puzzle des structures impliquées dans la gestion émotionnelle. Il faut dire qu’anatomiquement, l’amygdale, située en profondeur dans la partie antérieure du lobe temporal, est le pivot de connexions multiples. Elle reçoit ainsi des afférences corticales somesthésiques et sensorielles, elle est connectée directement ou par le thalamus avec le cortex orbito-frontal (ventral) médian (dont on a vu le rôle dans les prises de décision, voir p. 309), mais aussi à l’Hippocampehippocampe (relais essentiel des circuits de mémoire), les noyaux gris centraux, les noyaux septaux. Ses efférences hypothalamiques ainsi que sur d’autres structures du tronc cérébral (voir infra) attestent de son rôle dans le déclenchement des manifestations neurovégétatives et neuroendocriniennes des émotions. Ainsi l’amygdale, par ses connexions, serait le lieu d’intégration de la composante émotionnelle des informations véhiculées par les voies sensitives et sensorielles dont elle permettrait en lien avec la mémoire d’en dégager la signification et de moduler les réponses biologiques et comportementales. Les expériences animales et les observations de malades atteints de lésions amygdaliennes permettent de mieux cerner les fonctions émotionnelles de l’amygdale.
Ainsi l’illustration la plus spectaculaire des fonctions émotionnelles de l’amygdale est réalisée par lesyndrome de Klüver-Bucy. Dans sa forme complète, ce syndrome, décrit chez le singe ayant subi une double lobectomie temporale (intéressant les régions temporo-polaires : amygdale, hippocampe antérieur et cortex), se manifeste par ce que les auteurs ont appelé une « Cécitépsychiquecécité psychique » : il s’agit d’abord d’une perte de la signification émotionnelle des informations sensorielles et tout particulièrement visuelles. Ainsi les animaux tentent de manger des substances non comestibles, tentent de copuler avec tout autre congénère quel que soit son sexe mais aussi avec des animaux d’autres espèces, perdent toute peur à l’égard des êtres humains et des serpents. Mais ce terme de cécité psychique indique aussi une agnosie visuelle comportant un déficit perceptif lié à l’atteinte du néocortex temporal latéral et qui s’associent à des troubles de la mémoire incapacitant l’apprentissage et liés à l’atteinte hippocampo-parahippocampique. Le comportement se caractérise par une docilité, une placidité par hypoémotivité, une hyperoralité, les objets étant, quelle que soit leur nature, portés à la bouche. Cette hyperoralité est telle qu’elle a pu être décrite comme un « grasping oral », la lésion temporale induisant, mutatis mutandis, ce que la lésion frontale crée pour l’activité manuelle. Il existe aussi une hypersexualité, une Hypermétamorphosehypermétamorphose, ce qui veut dire une attention portée à tout stimulus visuel avec besoin irrésistible, « compulsionnel », de le toucher. Ce syndrome peut être interprété comme lié aux lésions limbiques (et donc amygdaliennes) ou comme une disconnexion entre le système limbique et d’autres aires corticales en particulier visuelles. Chez l’homme, quelques cas de syndrome de Klüver-Bucy ont été décrits ; les éléments du syndrome étaient présents soit de manière complète soit le plus souvent de manière incomplète, en règle accompagnés de troubles de la mémoire et du langage. La liste étiologique est longue et encore ouverte : traumatismes crâniens avec lésions bitemporales, kystes arachnoïdiens bilatéraux, gliome multicentrique, encéphalite herpétique, déterminations encéphaliques de la shigellose, après hernie transtentorielle, lupus érythémateux aigu disséminé, leucoencéphalopathie postintervallaire de l’intoxication oxycarbonée, céroïde-lipofuscinose, démence sémantique, démences fronto-temporales, démence d’Alzheimer (Rossitch et al., 1989 ; Gocinski et al., 1997). Le syndrome peut être observé après résection temporale antérieure bilatérale et très exceptionnellement après résection unilatérale (Ghika-Schmid et al., 1995).
Le rôle de l’amygdale dans la réactivité émotionnelle a été confirmé par des expériences de lésions sélectives des noyaux amygdaliens qui entraînent des troubles comportementaux (placidité, soumission, hyperoralité) moins sévères que les lésions provoquées par aspiration qui lèsent aussi les fibres reliant les amygdales au cortex temporal, ce qui est le cas du syndrome de Klüver-Bucy.
Le rôle de l’amygdale dans le Conditionnementà la peurconditionnement à la peur a été particulièrement étudié : l’amygdale est chez l’animal nécessaire à l’acquisition des comportements conditionnés à des stimulations aversives (Le Doux, 1996). Ainsi des rats normaux peuvent apprendre à associer un son (stimulus conditionnant) et un choc électrique au niveau du plancher de leur cage de telle sorte qu’une fois conditionnés, le son suffit à déclencher des modifications neurovégétatives et une agitation. Cet apprentissage conditionnant est impossible chez le rat amygdalectomisé. Des constatations analogues ont été faites chez l’être humain en testant la réponse galvanique cutanée à une stimulation conditionnante (par exemple, une diapositive bleue) couplée à une autre stimulation aversive (un bruit intense qui déclenche une émotion attestée par le réflexe cutané sympathique). Ce type de conditionnement que l’on obtient chez le sujet normal ne peut être obtenu en cas de lésions amygdaliennes bilatérales ou unilatérales (Labar et al., 1995; Adolphs et Damasio in Borod, 2000). Les enregistrements électrophysiologiques effectués chez le singe suggèrent que les neurones amygdaliens interviennent dans le traitement de l’identité des visages, des expressions faciales, des mouvements corporels et du regard, toutes ces informations étant des signaux potentiels pour le déclenchement des réponses émotionnelles et sociales à l’égard des autres individus (voir pour revue Aggleton, 2000). Chez l’être humain, les lésions amygdalienne survenues tôt dans la vie (comme la malade S.M. étudiée par l’équipe de Damasio avec calcification bilatérale de l’amygdale – Syndromede Urbach-Weithesyndrome de Urbach-Weithe) entraînent un déficit de la reconnaissance des expressions faciales de peur mais aussi à un moindre degré d’expressions émotionnelles proches comme la colère, la surprise, le dégoût. Le déficit intéresse aussi les connaissances conceptuelles sur les émotions et notamment sur la peur (par exemple, à partir de mots ou d’histoires) et ce, d’autant que les lésions amygdaliennes surviennent précocement dans le cours de l’existence. Même si les lésions amygdaliennes ne donnent pas toujours la placidité régulièrement observée chez l’animal, il a pu être constaté que des sujets avec lésions amygdaliennes n’avaient aucune méfiance à l’égard de visages non familiers jugés non fréquentables et indignes de confiance par des sujets témoins (Adolphs et al., in Borod, 1998). En outre, l’amygdale favorise la mémorisation déclarative d’informations à contenu émotionnel : il a pu ainsi être montré que les sujets normaux apprennent mieux les informations à contenu émotionnel que les informations neutres, alors que les sujets avec lésions amygdaliennes ont des performances similaires pour le matériel à contenu émotionnel et le matériel neutre (Adolphs et al., 1997). L’amygdale favoriserait l’encodage comme le rappel en Mémoireépisodiquemémoire épisodique à contenu émotionnel. On peut inférer de ces constatations que l’amygdale a pour fonction de lier les informations sensorielles aux systèmes permettant l’acquisition des connaissances sur les émotions et les réponses à déployer. Son intervention dans les situations générant un éveil émotionnel élevé comme la peur suggère le rôle qu’elle joue dans la perception du danger et donc dans la préservation de la vie. Les stimulations entraînent surtout peur et agressivité, hallucinations complexes et sentiment de déjà-vu.
L’aire septale (voir tableau 1.I, p. 5), contrairement à l’amygdale, serait impliquée dans le renforcement positif des émotions, sa stimulation induisant des sensations agréables à composante sexuelle, tandis que les lésions de cette région peuvent entraîner irritabilité, agression, voire comportement de rage.
L’hypothalamus joue un rôle important dans les fonctions instinctuelles et contribue à générer les manifestations neurovégétatives et neuro-endocriniennes des émotions. L’hypothalamus reçoit des afférences de nombreuses structures limbiques et paralimbiques, tout particulièrement de l’amygdale ; cette dernière se projette aussi directement sur le Noyaudorsaldu vaguenoyau dorsal du vague donc sur le système parasympathique mais aussi sur le Noyaubasal de Meynertnoyau basal de Meynert (pierre d’angle du système cholinergique dans le « Cerveauantérieur basalcerveau antérieur basal » ou basal forebrain), lelocus cœruleus (noradrénergique), la Substancegrisepéri-aqueducalesubstance grise péri-aqueducale (noyaux sérotoninergiques du Raphéraphé), les noyaux dopaminergiques du Mésencéphalemésencéphale.
Si l’amygdale est la structure privilégiée de contrôle des manifestations végétatives et viscérales des émotions (figure 17.2), la stimulation d’autres structures comme le cortex fronto-orbitaire et l’Insulainsula peuvent aussi entraîner des modifications végétatives et ces structures comme l’amygdale reçoivent des afférences du néocortex.
Figure 17.2 (et en particulier à la peur) |
Mais les modifications « somatiques » qui accompagnent les émotions font retour en « rétroaction », essentiellement par le vague qui aboutit au noyau du faisceau solitaire dans le bulbe pour se projeter sur l’amygdale et l’insula et à partir d’elles sur les lobes frontal, temporal et pariétal avec sans doute une prévalence pour l’hémisphère cérébral droit qui serait ainsi particulièrement sensible aux modifications viscérales (Luria et Simernitskaya). Il faut à ce sujet rappeler que le caractère parfois intense des manifestations « périphériques » des émotions (tremblements, sueurs, tachycardie, etc.) avait conduit certains auteurs et en particulier William James à postuler que ce sont les modifications viscérales provoquées par un stimulus (la vue d’une bête sauvage, par exemple) qui induisent le vécu émotionnel : en leur absence, on pourrait prendre la fuite sans ressentir de frayeur. William James avait vu juste en montrant ainsi l’importance des modifications somatiques dans le vécu émotionnel, mais il n’avait pas envisagé le rôle joué par le cerveau dans la perception des modifications neurovégétatives « périphériques ». Il est certes possible d’admettre, comme le souligne Damasio, qu’il existe des émotions « primaires » ou « primitives », génétiquement programmées, appartenant au registre des fonctions instinctuelles, liées essentiellement à la survie de l’espèce, comme la mise en présence « visuelle » d’un animal sauvage, et qui dans l’enfance (mais aussi chez l’animal) induisent de manière automatique, après activation par les afférences sensorielles des amygdales, des réactions neurovégétatives qui à leur tour induiront la prise de conscience du vécu émotionnel et surtout les comportements de fuite ou de défense. Mais ces émotions primaires seront peu à peu l’objet par le cerveau de démarches évaluatives qui viendront modifier le vécu et le comportement émotionnel, ce qui fera en sorte, par exemple, que la vue inopinée d’un animal sauvage en pleine nature et sur une piste de cirque n’induisent plus les mêmes émotions ni qualitativement ni quantitativement. Mais il existe en outre des émotions « secondaires » que l’on pourrait appeler des émotions « apprises » et non innées. Ainsi les émotions ressenties quand on apprend la guérison ou a contrario le décès d’un être qui nous est cher proviennent bien de l’activation de représentations mentales propres à l’identité de chacun et qui convergent vers le cortex frontal en particulier le cortex fronto-médian qui, par l’intermédiaire de l’amygdale, déclenche les modifications neurovégétatives et endocriniennes des émotions. Ces dernières sont à leur tour perçues par le cerveau et modulées dans une boucle de rétroaction. On comprend ainsi que les modifications viscérales accroissent l’intensité du vécu émotionnel. Mais ce rétrocontrôle est finalement d’importance secondaire : ainsi l’injection d’épinéphrine qui reproduit un certain nombre de modifications végétatives des émotions ne crée pourtant pas de vécu émotionnel mais renforce le vécu émotionnel quand l’injection est associée à une stimulation émouvante.
Le striatum ventral (essentiellement représenté par le Noyauaccumbensnoyau accumbens unissant la partie antérieure et ventrale du Noyaucaudénoyau caudé et du Putamenputamen) serait « l’interface entre la motivation et l’action » (Mogenson), convertissant « les processus motivationnels en outpout comportemental » (Apicella). Cette structure « dopaminergique » est en effet le lieu de connexions avec l’amygdale (qui évalue la charge émotionnelle), l’hippocampe (et ses références mnésiques), les noyaux gris centraux (qui gèrent l’initiation et la fluidité des mouvements). Elle est incluse dans une « Bouclelimbiqueboucle limbique » striato-pallido-thalamo-corticale qui peut être conçue comme le « Systèmede la motivationsystème de la motivation » (Habib et Bakchine) et dont les lésions en l’un ou l’autre point de son trajet donneraient le Syndromede perte d’auto-activation psychiquesyndrome de perte d’auto-activation psychique de Laplane ou Syndromeathymormiquesyndrome athymormique de Habib et Poncet associant Apragmatismeapragmatisme (en règle réversible sous stimulation externe), Apathieapathie et vide mental (voir 13 and 20).
Le rôle des aires corticales paralimbiques et notamment du gyrus cingulaire (aire 24) et du cortex orbito-frontal caudal a été envisagé au chapitre 13 (p. 162). Rappelons ici le rôle du gyrus cingulaire dans la motivation et l’action, le rôle du cortex orbito-frontal dans les prises de décision et les conduites sociales. Les fonctions émotionnelles de l’Insulainsula sont encore mal connues, mais on sait que cette structure noue des connexions multiples avec l’amygdale, le cortex orbito-frontal, le gyrus cingulaire ainsi qu’avec les régions corticales voisines et en particulier celles impliquées dans la communication verbale (partie operculaire du cortex sensori-moteur et aires auditives du cortex temporal supérieur ; Habib et Bakchine).
Restent les débats suscités par les travaux tendant à circonscrire le rôle de chaque hémisphère cérébral dans la régulation émotionnelle. On connaît l’opposition devenue historique entre l’indifférence des hémiplégiques gauches (Anosodiaphorieanosodiaphorie) à l’égard de leur déficit moteur (qui peut aussi être nié : anosognosie ; Babinski, 1914) et les Réaction de catastropheréactions de catastrophe décrites par Goldstein (1939) au cours des aphasies. Jackson en 1932, dans ses travaux sur la Dissociationautomatico-volontairedissociation automatico-volontaire avait noté que les aphasiques non fluents pouvaient exprimer leurs émotions par des plaintes émises avec une intonation (prosodie émotionnelle) adaptée. Si l’on ajoute un certain nombre de travaux décrivant la dépression plus fréquente au cours des lésions gauches, on comprend que l’hypothèse ait pu être émise d’une prévalence (voire d’une spécialisation) de l’hémisphère cérébral gauche pour les Émotionpositiveémotions « positives » et d’une prévalence de l’hémisphère droit pour les émotions « négatives ». Cette hypothèse pouvait aussi se trouver confortée par d’autres travaux opposant les effets de l’injection d’amytal sodique dans la carotide entraînant à gauche une réaction de catastrophe et à droite une euphorie. On peut aussi citer la constatation dans une série de patients cérébrolésés appariés en fonction de leur âge et de leur déficit cognitif et moteur d’une élévation au MMPIMMPI de l’échelle de dépression dans la seule population ayant des lésions de l’hémisphère gauche (Gasparrini). Les Émotionnégativeémotions « négatives », préférentiellement représentées au niveau de l’hémisphère droit, correspondraient aux émotions les plus primitives tandis que les émotions représentées au niveau de l’hémisphère gauche correspondraient aux formes phylogénétiquement les plus évoluées (Ross, 1994). On a pu aussi proposer que le rôle de l’hémisphère droit ne concerne en fait que la communication non verbale émotionnelle. S’il n’est pas question de nier l’importance de l’hémisphère droit dans l’expression et la compréhension des comportements émotionnels (voir infra), il est plus difficile de dire que cette fonction s’exerce sans modification du vécu émotionnel lui-même. En effet, l’évaluation de l’éveil attentionnel (« arousal ») par le Réflexecutané sympathiqueréflexe cutané sympathique ou par les modifications du rythme cardiaque suscitées par des stimulations à contenu émotionnel montre des réponses altérées lors des lésions droites (Gainotti), ce qui suggère donc une modification du vécu émotionnel lui-même. L’hypothèse la moins contraignante est sans doute celle d’une dominance de l’hémisphère cérébral droit dans la régulation des émotions quelle que soit leur valence. En séparant les orages émotionnels de catastrophe des états dépressifs durables, Gainotti ne trouve pas pour ces derniers une plus grande fréquence des lésions hémisphériques gauches : ceci permet de faire l’hypothèse que les Réaction de catastropheréactions de catastrophe sont des réactions appropriées à une situation dramatique à laquelle le sujet ne trouve légitimement pas d’issue et devenant ainsi des réactions émotionnelles adaptées aux circonstances grâce à l’intégrité de l’hémisphère droit. Au contraire, les comportements euphoriques des lésions droites sont des comportements inadaptés par la désorganisation des fonctions émotionnelles de l’hémisphère droit. Il reviendrait ainsi à l’hémisphère droit d’être plus engagé dans la communication émotionnelle, les réactions végétatives de l’émotion (voir supra) ainsi que dans le vécu émotionnel. De manière encore plus nuancée, il a pu être proposé un rôle complémentaire de chaque hémisphère cérébral dans le contrôle émotionnel, l’hémisphère droit étant plus impliqué dans les composantes automatiques (expressives et végétatives) des émotions, tandis que l’hémisphère gauche serait impliqué dans les processus hiérarchiquement les plus élevés, à savoir la conceptualisation et le contrôle émotionnel (Gainotti, in Borod). Mais la réalité est sans doute plus intriquée : ainsi les lésions en miroir de l’aire de Wernicke au niveau de l’hémisphère droit peuvent entraîner une Aprosodieaprosodie (voir supra) mais parfois aussi des troubles comportementaux qui peuvent réaliser soit une Confusionagitéeconfusion agitée avec pleurs, gémissements, soit un état d’indifférence et d’euphorie.
Dans une optique clinique, la neuropsychologie des émotions vise donc à :
▪ repérer les désordres de l’identification et de l’expression des aspects moteurs et prosodiques des comportements émotionnels en rapport avec des lésions cérébrales ;
▪ identifier les désordres du comportement et du vécu émotionnels en rapport avec des lésions cérébrales ;
▪ mieux reconnaître ainsi les régions du cerveau impliquées dans la régulation des émotions.
Séméiologie des fonctions instinctuelles (émotions « primitives »)
Définitions
Le concept d’Instinctinstinct est composite. L’instinct concerne les animaux et les êtres humains ; il désigne une pulsion, une tendance innée commune à tous les êtres vivants (comme l’instinct alimentaire ou sexuel) ou restreinte à une espèce (comme l’instinct migratoire). L’instinct induit ainsi un comportement (manger, boire, etc.) parfois organisé chez l’animal dans un savoir-faire qui à lui seul constitue une deuxième acception du mot instinct. Il en est ainsi de la confection du nid chez l’hirondelle, ce qui montre que l’instinct se distingue de ce qui est appris et est une conduite stéréotypée même si elle enchaîne des actions complexes ; l’instinct est ainsi opposé au caractère adapté donc flexible et appris des comportements suscités par l’intelligence encore que, même entendue au sens de savoir-faire, l’activité instinctuelle ne soit pas dépourvue de toute capacité adaptative.
Les comportements instinctuels conduisent donc l’être humain à agir dans le milieu qui l’entoure, qu’il s’agisse du milieu « naturel » ou du milieu social, et à interagir avec ce milieu. Ces comportements, s’ils ont des caractéristiques communes à tous les êtres humains, ne sont pas stéréotypés : ils peuvent donc varier d’un groupe culturel humain à un autre groupe culturel mais aussi d’un individu à un autre individu. En outre ces comportements ne sont pas irrépressibles, ce qui leur permet d’être gérés donc adaptables. La manière de manger varie ainsi d’un groupe culturel à un autre ; l’acte de manger peut ne pas être satisfait dès que l’individu ressent la sensation de faim. Il en ressort que les comportements instinctuels peuvent être contrôlés.
Il reste enfin que les comportements instinctuels ne peuvent être considérés comme la satisfaction « linéaire » d’un besoin biologique fondamental et tout se passe comme si l’être humain avait la capacité d’utiliser la satisfaction d’un besoin biologique fondamental à la survie de l’espèce ou encore de retrouver son autonomie par rapport à un besoin biologique fondamental pour accroître ou affiner les frémissements émotionnels liés aux fonctions dites instinctuelles. La mémoire, la personnalité interviennent ainsi dans le tissage de ces comportements chez chaque être humain. Le besoin de nourriture peut ainsi culminer dans la gastronomie tout comme dans l’apprentissage des saveurs et des odeurs qui conduisent à « apprécier » (donc à retirer de la satisfaction de) telle ou telle confection culinaire, tel ou tel vin. La sexualité offre l’exemple le plus typique de l’autonomisation du plaisir par rapport à la réalisation de son but « fondateur » qui est la pérennisation de l’espèce. Mais l’autonomisation est un phénomène complexe qui illustre bien l’enchevêtrement de la cognition et de l’émotion. L’être humain est en effet capable d’inclure le comportement instinctuel dans un réseau de significations et de symboles qui peuvent le transfigurer : on pourrait ainsi citer les attributs symboliques attachés au pain de même que ceux qui sont attachés aux boissons (par exemple, « le verre de l’amitié ») tout comme la création artistique qui depuis des millénaires s’inspire entre autres thèmes de la sexualité et de l’amour humains.
La régulation des fonctions instinctuelles est assurée par le système limbique dont les différentes structures sont étroitement interconnectées et qui est lui-même étroitement connecté au cortex associatif hétéromodal (Mesulam, 1985). Ainsi s’expliquent les liens entre la régulation du milieu intérieur (équilibre hydro-électrolytique, glycémie, sécrétions endocriniennes), les fonctions dites végétatives ou autonomes (cœur, respiration, sudation…), l’effervescence émotionnelle et motivationnelle, la mémoire donc l’identité de chaque être humain.
Neuropsychologie de la faim
Deux structures sont particulièrement impliquées dans la régulation du comportement alimentaire : l’Hypothalamushypothalamus et l’Amygdaleamygdale.
Le centre de la faim est situé dans l’hypothalamus dorso-latéral dont la stimulation électrique déclenche un comportement de quête alimentaire (tandis que sa destruction induit une aphagie), alors que le centre de la satiété est situé dans l’hypothalamus ventro-médian dont la stimulation interrompt la prise alimentaire alors que sa destruction provoque Polyphagiepolyphagie et Obésitéobésité. Le rôle de l’amygdale, elle-même intégrée dans l’appareil olfactif, tient à ses connexions étroites avec l’hypothalamus : ainsi les lésions bilatérales de l’amygdale stimulent la prise alimentaire ; la stimulation a au contraire un effet inhibiteur qui disparaît si l’hypothalamus est préalablement détruit. Les résections temporales antérieures entraînent chez le singe une hyperoralité, l’animal portant indistinctement tout stimulus à sa bouche : ce trouble est associé aux autres éléments du Syndromede Klüver-Bucysyndrome de Klüver-Bucy (voir supra). Le contrôle comportemental dévolu de manière générale au cortex orbito-frontal intéresse aussi le comportement alimentaire. Ainsi, la destruction du pôle orbito-frontal du chat comme du singe stimule les prises alimentaires alors qu’une destruction frontale plus étendue les réduit.
La régulation de l’absorption alimentaire s’organise à court et à long terme par l’intermédiaire de paramètres s’exerçant sur l’hypothalamus. Ainsi la glycémie, et plus précisément la différence artérioveineuse de la glycémie, stimule la sensation de faim. Le taux sanguin d’acides aminés, la température centrale, la réplétion gastro-intestinale, la mise en jeu des phénomènes moteurs (mastication, déglutition) mais aussi la mise en jeu de l’activité sensorielle gustative, la salivation déclenchent, selon les cas, satiété ou prise alimentaire, tandis que la concentration d’acides gras libres (rendant compte des réserves nutritives lipidiques) influe sur la régulation à long terme de la prise alimentaire.
Sur le plan neurochimique, les influences cholinergiques issues de l’amygdale stimulent le noyau ventro-médian de l’hypothalamus, inhibant ainsi la prise alimentaire, tandis que les neurones cholinergiques amygdaliens sont soumis aux influences inhibitrices de neurones adrénergiques qui dépriment ainsi la stimulation qu’ils exercent normalement sur l’hypothalamus ventro-médian ce qui stimule la prise alimentaire. Néanmoins les influences neurochimiques s’exerçant sur l’hypothalamus sont innombrables et si l’on y ajoute la multiplicité des récepteurs, on comprend que le rôle des neuromédiateurs paraît parfois contradictoire. Ainsi la Noradrénalinenoradrénaline peut être orexigène par stimulation des α-récepteurs du noyau paraventriculaire de l’hypothalamus médian et anorexigène par l’intermédiaire des β-récepteurs de l’hypothalamus latéral et l’on sait le rôle anorexigène des Amphétamineamphétamines qui se fixent sur des récepteurs hypothalamiques. La Dopaminedopamine est plutôt considérée comme orexigène, cette action stimulante pouvant être intégrée dans la stimulation motivationnelle voire hédonique attribuée à ce neurotransmetteur et l’Aphagieaphagie observée après lésion de l’hypothalamus latéral pourrait au moins en partie être liée à la destruction des fibres dopaminergiques qu’il contient. Les souris rendues incapables de synthétiser la dopamine par inactivation du gène de la tyrosine hydroxylase deviennent hypoactives, aphagiques et adipsiques quelques semaines après leur naissance (Zhou et Palmiter, 1995) tandis que les lésions induites par la 6-hydroxydopamine au niveau du Systèmedopaminergiquesystème dopaminergique nigrostrié induisent akinésie, aphagie et adipsie. Mais les agonistes dopaminergiques inhibent plutôt la prise alimentaire alors que les neuroleptiques provoquent prise de poids voire obésité. Les peptides opioïdes endogènes stimulent l’appétit (en stimulant l’hypothalamus latéral). La sérotonine qui excite le noyau para ventriculaire favorise la satiété. Les Cytokinecytokines seraient responsables en particulier de cachexies et d’anorexies cancéreuses mais il est difficile de faire la part des effets centraux (anorexigènes) et périphériques (par activation du catabolisme).
Des processus lésionnels multiples (tumoraux, inflammatoires, infectieux, vasculaires, etc.) impliquant l’hypothalamus peuvent entraîner obésité (et Hyperphagiehyperphagie) ou amaigrissement (et Hypophagiehypophagie voire Aphagieaphagie) comme le Syndromeadiposo-génital de Babinski-Frölichsyndrome adiposo-génital de Babinski-Frölich observé au cours de tumeurs de la région sellaire ou encore l’obésité induite par une localisation sarcoïdosique hypothalamique. Le Syndromede Prader-Willisyndrome de Prader-Willi est un syndrome hypothalamique lié à une délétion d’une bande du chromosome 15 qui se manifeste par une hyperphagie avec des manifestations auto- et hétéro-agressives compulsives (crises de colère, automutilation). Des prises de poids sont observées avec certains médicaments comme les neuroleptiques ou le valproate, parfois associées à un net effet orexigène comme avec le pizotifène. On connaît aussi des formes cachectisantes de tumeurs hypothalamiques notamment chez le tout jeune enfant et des formes vomitives avec cachexie de tumeurs de la fosse postérieure siégeant sur la ligne médiane (vermis et IVe ventricule). Mais de telles pathologies relèvent davantage de la médecine interne et de la neurologie que de la neuropsychologie. La neurologie comportementale montre des exemples de troubles des conduites alimentaires intégrés dans d’autres troubles comportementaux. Des comportements de Gloutonneriegloutonnerie (avec éventuellement prise de poids) sont plus souvent le fait des Démencefronto-temporaledémences fronto-temporales que de la Démenced’Alzheimerdémence d’Alzheimer ; l’Hyperoralitéhyperoralité qui désigne la tendance à tout porter à la bouche qu’il s’agisse ou non d’aliments entre dans le cadre d’un Klüver-Bucy et s’observe dans les deux types de démences. L’appétence pour les sucreries avec grignotage entre les repas est plus particulière à la démence d’Alzheimer. Des comportements de gloutonnerie sont aussi observés dans les syndromes fronto-orbitaires quelle qu’en soit l’étiologie et entrent dans le cadre de la désinhibition comportementale générale. Des rituels alimentaires peuvent être observés dans les syndromes frontaux en général et les démences fronto-temporales en particulier. Malgré les nombreuses données expérimentales, le comportement alimentaire des parkinsoniens reste peu étudié même si l’on sait l’amaigrissement parfois observé dans la maladie : l’amantadine (et tout particulièrement le sulfate utilisable par voie intraveineuse) améliorerait l’aphagie qui peut accompagner les akinésies parkinsoniennes sévères.
Quant au concept de Palatabilitépalatabilité qui détermine le taux d’ingestion des aliments en fonction de leur goût, du plaisir procuré et de l’état ponctuel du milieu intérieur, il a fait l’objet de beaucoup d’études expérimentales dont les applications cliniques ne sont qu’empiriques et balbutiantes.
Neuropsychologie de la soif
La soif et la faim sont deux sensations distinctes même si certains produits aptes à étancher la soif ont aussi une valeur nutritive.
La sensation de soif est provoquée par l’élévation de l’osmolarité plasmatique (engendrant une déshydratation intracellulaire) qui stimule des osmorécepteurs hypothalamiques, ce qui induit et une sécrétion d’hormone antidiurétique et la réponse comportementale de prise de boisson. Il est important de constater que le sujet cesse de s’abreuver avant la correction de l’osmolarité qui est en quelque sorte anticipée tant sur le plan comportemental que sur le plan endocrinien puisque la sécrétion d’ADH est elle aussi suspendue dès l’absorption de liquides. Cette rétroaction naît donc de la stimulation d’afférences buccopharyngées et gastriques. D’autres facteurs et en particulier l’hypovolémie déclenchent aussi la soif.
Le rôle central de l’hypothalamus a été démontré par de nombreuses expériences animales de destruction, de stimulation ou encore de microinjections (modifiant in situ l’osmolarité) qui déclenchent selon les cas Polydipsiepolydipsie ou Adipsieadipsie accompagnées ou non de modifications parallèles de l’absorption alimentaire. Plusieurs structures du système limbique et en particulier l’amygdale interviennent aussi dans le comportement dipsique.
Des Syndromepolyuro-polydipsiquesyndromes polyuro-polydipsiques peuvent être observés au cours du diabète insipide, du diabète sucré, de l’insuffisance rénale chronique, de l’hypokaliémie et doivent être distingués des Potomaniepotomanies. Des adipsies avec hypernatrémies neurogènes, qui sont très particulières par leur tolérance clinique, peuvent être observées lors de souffrances hypothalamiques provoquées par des processus tumoraux (gliome hypothalamique, adénome hypophysaire, pinéalome ectopique, kyste arachnoïdien du troisième ventricule), infectieux, hémorragiques, ischémiques (par exemple, après clampage d’un anévrisme de la communicante antérieure), au cours de la maladie de Hand-Schüller-Christian comme au décours de traumatismes crâniens. L’adipsie n’est toutefois pas un fait constant au cours des Hypernatrémie neurogènehypernatrémies neurogènes ; le comportement est qualifié d’hypodipsique quand la soif n’est pas en proportion de la sévérité de l’hypernatrémie et il n’est donc pas possible de considérer que l’hypernatrémie est une simple conséquence de la baisse des apports hydriques (Gil et al., 1973). Une Adipsieadipsie avec hypernatrémie peut aussi s’accompagner d’un diabète insipide. Il existe chez l’enfant des dysfonctionnements hypothalamiques idiopathiques avec adipsie, obésité, altération des capacités de thermorégulation, perturbations des fonctions hypophysaires voire mydriase aréflexique. De rares cas familiaux d’hypernatrémie adipsique ont aussi été observés.
Neuropsychologie de l’instinct de défense et de l’agressivité
Il est possible de considérer que la perception d’un danger déclenche selon les cas la fuite ou l’attaque, de même que la prédation est la condition de survie de certaines espèces animales et dire que l’homme préhistorique est prédateur signifie qu’il vivait grâce à la chasse et à la pêche (Larousse, 1985). On comprend ainsi les liens qui unissent l’agressivité (étymologiquement « attaque ») à l’instinct de défense en particulier et à l’instinct de survie (de soi-même donc de l’espèce) en général. Mais l’agressivité n’est-elle qu’un comportement « défensif » ? La simple observation des comportements humains montre qu’il existe aussi une agressivité « offensive » qui ne semble pas relever d’une nécessité de survie et qui a conduit à considérer l’agressivité comme une « pulsion spontanée… une énergie endogène qui doit se décharger » (Lorenz cité par Karli, 1996) donc un instinct « autonome », parfois au service de l’instinct de survie. Pour Freud, deux instincts du moi cohabitent : l’instinct sexuel ou de vie du moi libidinal et l’instinct de mort du moi. À ces deux instincts du moi répondent deux groupes d’instinct « objectaux » : un instinct sexuel objectal (instinct de vie) et un instinct de mort objectal qui s’exprime par l’agression. Ainsi Freud « fait dériver l’agression de la projection au-dehors, sous la pression des instincts de conservation de l’individu, des instincts de mort originels qui l’habitent » (Marie Bonaparte, 1951). Ces pulsions doivent être socialement gérées. Ainsi la conscience morale naîtrait selon Freud du renoncement à la satisfaction des instincts. Par ailleurs, la destinée pulsionnelle peut être le refoulement ou la sublimation, ce qui veut dire que « l’instinct s’emploie dans un autre domaine où des réalisations de valeur sociale se trouvent possibles » (Marie Bonaparte, 1951). La soif de connaître pourrait ainsi être une sublimation de l’instinct d’agression.
Neurobiologie de l’agression
L’agression ou la fuite sont provoquées par une émotion déclenchée par une situation que l’individu ressent comme une menace à son intégrité. On comprend ainsi les liens qui existent entre la douleur et les réactions agressives. Toutefois les expériences animales ont montré que l’effervescence émotionnelle précédant et accompagnant l’agression peut être d’une intensité très variable ; ainsi les stimulations de l’hypothalamus latéral déclenchent chez le chat une attaque « froide » du rat mis en sa présence, alors que les stimulations médianes entraînent un comportement agressif accompagné d’un orage émotionnel intense. La mise en jeu d’un comportement agressif ne se fait pas de manière stéréotypée dans une espèce donnée et pour un stimulus donné : elle dépend de multiples facteurs et notamment l’expérience antérieure parfois dotée d’un renforcement motivationnel de nature appétitive et d’une réduction de l’expression émotionnelle (voir en particulier les expériences chez les rats muricides : Karli). L’environnement, la position de dominant ou de subordonné, l’état endocrinien interviennent aussi dans le déclenchement du comportement d’agression. Certaines expériences militent pour un substratum différent aux agressions offensives et aux agressions défensives (les premières mais non les secondes sont réduites par des lésions hypothalamiques latérales du rat).
Le Systèmeneuronal d’aversion« système neuronal d’aversion » (Karli) comprend la Substancegrisepéri-aqueducalesubstance grise péri-aqueducale et l’Hypothalamushypothalamus médian dont les stimulations électriques ou neurochimiques induisent des comportements de fuite ou de défense et même des comportements visant à interrompre les stimulations électriques portées sur ces régions. Des comportements de « Pseudo-ragepseudo-rage » (sham rage) de caractère défensif avec d’intenses manifestations végétatives (pupillaires, cardiaques, respiratoires, pilo-érection), et motrices (dos arqué, babines retroussées) désignent des manifestations stéréotypées obtenues chez l’animal décortiqué par stimulation de l’hypothalamus médian. Il a été montré que l’amygdale facilite la pseudo-rage déclenchée par la stimulation hypothalamique et que cette facilitation est transmise par un circuit dans lequel des acides aminés excitateurs agissent sur des récepteurs NMDA de la substance grise péri-aqueducale : le blocage de ces récepteurs par l’AP7 inhibe en effet ces influences facilitatrices. Les lésions du septum, des Noyaudu raphénoyaux du raphé facilitent aussi le déclenchement des comportements agressifs.
On a vu que l’amygdale joue un rôle central dans la régulation émotionnelle. Les lésions amygdaliennes bilatérales entraînent chez le singe une placidité émotionnelle caractéristique du Syndromede Klüver-Bucysyndrome de Klüver-Bucy (voir supra) ; l’activité amygdalienne enregistrée par radiotélémétrie chez des singes se déplaçant librement est exacerbée lors des rencontres sexuelles et des agressions ; la destruction du septum produit chez les rats une hyperréactivité exacerbant la probabilité d’agression : cette facilitation de l’agression est nette quand le rat est mis pour la première fois dans sa cage en présence d’une souris mais ne s’observe plus quand le rat a été préalablement familiarisé avec la présence d’une souris. Il est frappant de constater que cet effet préventif de la familiarisation disparaît quand la familiarisation est effectuée avec un rat porteur de lésions bilatérales de la portion cortico-médiane des amygdales. La « gélification » comportementale du rat vaincu à l’égard du rat vainqueur s’estompe après lésions des amygdales. Ces quelques constatations expérimentales confirment le rôle joué par l’amygdale dans l’interprétation affective des informations sensorielles grâce en particulier aux liens qu’elle permet de tisser entre l’émotion « actuelle » et ses dimensions cognitives inséparables de l’histoire de chaque individu. Enfin, et de manière schématique, l’amygdale est soumise au rôle régulateur et plus précisément inhibiteur du cortex préfrontal.
Sur le plan neurochimique, le GABAGABA et la Sérotoninesérotonine sont plutôt des inhibiteurs de l’agressivité de même que les Endorphineendorphines. La facilitation agressive provoquée par les lésions du raphé s’accompagne de la destruction de neurones sérotoninergiques qui se projettent et sur le système limbique et sur le système nigrostrié. Les drogues antipsychotiques inhibitrices des récepteurs 5-HT2 de la sérotonine ont des propriétés agressivolytiques. Des microinjections de bicuculline qui bloque les transmissions gabaergiques entraînent, lorsqu’elles sont effectuées au niveau de la substance grise péri-aqueducale de l’animal, un comportement agressif de défense. Les Catécholaminecatécholamines se comportent comme des stimulants de l’agressivité : il s’agit de la noradrénaline et surtout de la dopamine, neuromédiateur de la voie nigrostriée (dont on connaît le rôle dans la motricité) mais aussi des voies mésolimbique (qui intervient dans la régulation de l’humeur) et mésocorticale (qui intervient dans la mise en jeu des capacités d’attention et de planification). Les neuroleptiques qui bloquent les récepteurs dopaminergiques sont donc des substances agressivolytiques.
Les manifestations agressives sont observées dans nombre de pathologies psychiatriques et neurologiques.
Agressivité et psychiatrie
La fréquence de l’agressivité observée en pathologie psychiatrique (entendue au sens commun de pathologie ne répondant pas à des souffrances lésionnelles du cerveau) explique le développement d’échelles destinées à mieux qualifier et mieux quantifier les comportements agressifs. On peut ainsi citer l’échelle d’agressivité et de dysfonctionnement social et l’Échelled’agressivitééchelle d’agressivité manifeste de Yudofsky (Overt Agression Scale). La première qui doit être remplie au terme d’un entretien non structuré distingue l’agressivité tournée contre soi (humeur dépressive, impulsions suicidaires, dégoût de soi-même…) et l’agressivité tournée vers l’extérieur (en particulier irritabilité, actes provocateurs perturbant les conduites sociales, agressivité verbale, violences physiques à l’égard d’objets ou de personnes). La seconde, qui peut être remplie par l’équipe infirmière, a pour but d’améliorer la qualité de l’observation des malades agressifs hospitalisés ; elle ne comprend que cinq items : l’agressivité verbale, l’agression physique envers les objets, envers soi-même, envers autrui, et un item intitulé intervention qui regroupe la thérapeutique déployée et les conséquences physiques de l’agressivité (Guelfi, 1996). Des conduites agressives peuvent ainsi être observées dans les syndromes psychotiques, dans les états d’arriération mentale, dans les états d’addiction qu’il s’agisse d’un effet secondaire d’une substance psycho-active, d’un syndrome de sevrage, ou d’actes engendrés par le désir de se procurer de la drogue. L’absorption exagérée d’alcool, le sevrage ou les troubles du caractère accompagnant l’Alcoolismealcoolisme peuvent aussi expliquer des manifestations agressives et cette liste est loin d’être exhaustive. Le DSM isole des « troubles de l’adaptation » (réactionnels à des facteurs de stress) s’accompagnant de « perturbation des conduites » comprenant une violation des normes sociales (actes de délinquance, rixes, vandalisme, conduite automobile imprudente, etc.). Le DSM comme la classification internationale des troubles mentaux et du comportement (CIM-10) isolent aussi une « Personnalitéantisocialepersonnalité antisociale » (dite encore amorale ou Psychopathiepsychopathie) caractérisée notamment par l’instabilité dans les relations et la profession, l’intolérance à la frustration avec « abaissement du seuil de décharge de l’agressivité » expliquant les bagarres, les actes délictueux, les violences au conjoint ou à l’enfant. Ce diagnostic est réservé aux adultes (après l’âge de 18 ans) et si un trouble des conduites (voir infra) est apparu avant l’âge de 15 ans. Le DSM isole, dans le cadre des « Troubledu contrôle des impulsionstroubles du contrôle des impulsions », un « Troubleexplosif intermittenttrouble explosif intermittent » (dyscontrol syndrome) débutant habituellement entre 20 et 40 ans, caractérisé par des épisodes isolés et répétitifs de perte de contrôle des impulsions agressives aboutissant « à des voies de fait graves ou à la destruction de biens » alors qu’entre les épisodes n’existe aucune manifestation d’impulsivité ou d’agressivité. Ce trouble doit donc être distingué de la Personnalitéémotionnellement labile type impulsifpersonnalité émotionnellement labile type impulsif avec accès de violence et de colère et intolérance à la moindre critique (CIM-10). Chez l’enfant, peuvent être observés des troubles des conduites (parfois associés à une hyperactivité avec déficit de l’attention) caractérisés (DSM et CIM-10) par des manifestations agressives sévères (vols, incendies, cruautés envers les animaux…), débutant habituellement en période péripubertaire, un début précoce accroissant le risque d’évolution vers une personnalité antisociale ; une instabilité des figures parentales, l’absence du père ou l’alcoolisme du père constitueraient entre autres des facteurs favorisants. Ce trouble doit être distingué du Troubleoppositionneltrouble oppositionnel avec provocation : le comportement qui n’a pas la gravité du trouble des conduites se caractérise par une contestation régulière des paroles et des actes des adultes avec une impulsivité libérant des colères, des mots orduriers, une opposition aux demandes formulées par les adultes (DSM et CIM-10).
Certaines conduites agressives (vol, homicide, etc.) peuvent ne pas être attribuées à une personnalité antisociale ni d’ailleurs à aucun trouble mental : le DSM les qualifie de « Comportementantisocial de l’adultecomportement antisocial de l’adulte ». On peut à ce sujet signaler que des études en tomographie à émission de positrons ont pu montrer un hypométabolisme temporal chez des sujets ayant des comportements particulièrement violents (Seidenwurm et al., 1997).
Agressivité et neurologie
Généralités
La multiplicité des cibles lésionnelles suggérées par l’expérimentation animale, l’architecture des conduites agressives centrée par le système limbique et régulée par le néocortex tout particulièrement frontal expliquent la fréquence des manifestations agressives observées lors des atteintes organiques du cerveau.
Ces états d’agitation ne facilitent pas l’examen clinique donc le diagnostic étiologique qui pourtant ne doit pas être occulté au profit d’une démarche symptomatique visant par l’administration de neuroleptiques à abolir l’agitation en oubliant de rechercher des arguments anamnestiques et cliniques en faveur d’une hypoglycémie, d’une hémorragie méningée, d’une méningoencéphalite. Ledelirium tremens est une cause classique de confusion agitée qui peut cacher une pathologie associée (voir infra).
L’agressivité observée dans les autres atteintes organiques du cerveau a de multiples présentations cliniques et n’est qu’exceptionnellement envisagée de manière autonome dans les études ; il faut en effet distinguer :
▪ les décharges agressives entrant dans le cadre d’une Labilitéémotionnellelabilité émotionnelle : c’est ainsi que l’on peut observer pour une « contrariété » minime, une réaction de catastrophe avec pleurs et cris ou une réaction de colère avec injures ou agressivité gestuelle ;
▪ les manifestations agressives accompagnant des Conduited’oppositionconduites d’opposition à l’égard des sollicitations de l’entourage ;
▪ les états d’agitation mêlés de manifestations agressives : elles peuvent exprimer un état psychotique avec délire ou hallucinations « légitimant » l’agitation accompagnée ou non d’anxiété ; elles peuvent aussi témoigner d’une hyperactivité psychomotrice avec déambulation, errance, voire fugues comme d’une akatisie sévère source d’anxiété et d’irritabilité accrues par les invigorations à l’immobilité sollicitées par l’entourage. Il faut aussi réserver une place à part aux agitations accompagnant une confusion mentale, qui peuvent soit relever de l’obscurcissement de la conscience et exprimer la réaction du patient à un environnement qu’il vit comme menaçant, soit relever de la thématique du délire onirique ;
▪ des conduites de désinhibition (de type frontal) au cours desquelles des propos grossiers à thème érotique ou des gestes déplacés peuvent être interprétés comme des manifestations d’agression ;
▪ le qualificatif d’Accèsde rageaccès de rage est parfois donné à des manifestations agressives déclenchées par des stimulations non spécifiques, d’une grande violence, dépourvues d’un but précis et ne pouvant être contrôlées par la volonté. Ces accès de rage relèvent de lésions (par exemple tumorales) temporales (amygdalienne), préfrontales orbitaires, hypothalamiques, de la région septale, du thalamus antérieur et peuvent aussi être observés après stimulation cérébrale profonde pour maladie de Parkinson, régressant à l’arrêt du stimulateur. Elles peuvent par leur violence et le caractère stéréotypé de leur déroulement et des comportements moteurs (hurlements, morsures…) rappeler la pseudo-rage expérimentale (voir supra). La qualification d’accès de rage est parfois donnée aux manifestations du Troubleexplosif intermittenttrouble explosif intermittent quand elles sont particulièrement violentes mais s’intègrent dans les critères du DSM : il en est ainsi des deux cas de craniopharyngiome rapportés par Tokonogy et Geller (1992) au cours desquels ces troubles ont été imputés à un envahissement hypothalamique.
Des améliorations comportementales ont été observées après traitement bêta-bloquant (voir infra).
L’agressivité peut aussi s’exprimer dans le cadre d’un trouble de la personnalité ressemblant à la « personnalité antisociale » du DSM (voir supra : agressivité et psychiatrie) en particulier lors de lésions fronto-orbitaires (Meyers).
La multiplicité des situations cliniques pouvant inclure de l’agressivité est illustrée en particulier par les items de l’Inventaireneuropsychiatriquede Cummingsinventaire neuropsychiatrique de Cummings et al. (1994) au cours duquel sur les dix items proposés l’agressivité est explicitement recherchée dans deux d’entre eux (agitation/agression et irritabilité) mais peut aussi être une conséquence des manifestations recherchées dans quatre autres items (délire, hallucinations, désinhibition, comportement moteur aberrant).
Quelques étiologies
La confusion est une grande pourvoyeuse d’agitations agressives dont le mécanisme n’est pas univoque (voir supra). Le problème est que le confus agité se laisse difficilement examiner et que la démarche diagnostique se voit occultée au profit du seul traitement symptomatique de l’agitation. Il faut pourtant rechercher des antécédents similaires, une notion d’alcoolisme, de fièvre, de diabète, de traumatisme crânien, d’épilepsie, d’interventions chirurgicales multiples qui guideront le diagnostic étiologique. Il faut aussi savoir se méfier du diagnostic trop rapide de delirium tremens qui peut faire méconnaître une autre pathologie comme une hémorragie méningée.
Le syndrome psycho-organique est une appellation qualifiant les manifestations « psychiques » de souffrances cérébrales lésionnelles ou métaboliques et qui dans son acception initiale désignait non seulement les troubles de la personnalité mais aussi les manifestations cognitives centrées par une lenteur de l’idéation, des troubles de l’attention, du jugement, du raisonnement, de la mémoire. Le DSM comme la CIM-10 individualisent les manifestations affectives des atteintes cérébrales organiques sous le nom de psycho-syndrome organique pour le premier, de Troubleorganique de la personnalitétrouble organique de la personnalité pour la seconde. Parmi les caractères de ce syndrome, l’accent est mis sur les désordres émotionnels avec labilité, le sujet passant rapidement de l’euphorie à la jovialité, de l’apathie à la colère agressive mais aussi sur des comportements antisociaux (vols ou avances sexuelles, précise la CIM-10). Le DSM considère le « type explosif » comme une présentation particulière du psycho-syndrome organique quand sa caractéristique dominante est représentée par des accès d’« agressivité ou de colère ». La liste étiologique est inépuisable. Elle mêle des lésions focales frontales (révélation ou signes séquellaires d’une tumeur) plutôt responsables de désinhibition avec impulsivité, des lésions temporales et notamment des lésions de la partie antérieure et inférieure du lobe temporal détruisant l’amygdale ou les structures qui l’entourent et dont la séméiologie peut mimer un trouble explosif intermittent, des lésions diffuses ou multifocales comme dans la sclérose en plaques, le lupus, les séquelles de traumatisme crânien ou d’accidents vasculaires cérébraux, les encéphalopathies métaboliques en général et les encéphalopathies anoxiques en particulier. L’agressivité observée dans la maladie de Huntington peut aussi s’intégrer dans un trouble explosif intermittent (voir chapitre 16).
L’agressivité est fréquente au cours des syndromes démentiels. Dans la Démenced’Alzheimerdémence d’Alzheimer, la série de Reisberg et al. (1987) faisait état de 48 % de sujets agités, 30 % de sujets violents et 24 % de sujets présentant des accès d’agressivité verbale, tandis que Mendez et al. (1990) rapportent une proportion de 24,9 % de sujets présentant des actes agressifs. L’agressivité peut être la conséquence d’idées délirantes et d’hallucinations et s’accompagnerait alors d’une évolutivité plus sévère de la maladie et d’un déficit de la compréhension du langage. Des gestes agressifs peuvent émailler des états d’agitation (parfois à prédominance vespérale) qui relèvent de désordres psychotiques mais aussi d’une hyperactivité motrice avec déambulation voire errance. L’agitation est souvent un motif d’institutionnalisation par épuisement du conjoint ou de l’aidant. L’Akathisieakathisie peut être la conséquence d’un traitement neuroleptique. Les comportements de déambulation posent des problèmes importants tant au domicile que dans les institutions. Des perturbations du sommeil s’accompagnent de déambulation nocturne au cours desquels l’agressivité peut s’intégrer dans des comportements confusionnels. Les agressions sexuelles sont rares. L’agressivité gestuelle ou verbale au cours de la maladie d’Alzheimer peut aussi s’intégrer dans une labilité émotionnelle avec accès de colère ou de violences gestuelles. Il reste difficile de faire des corrélations précises entre l’agressivité, a fortiori ses diverses formes cliniques, et les sites lésionnels de la maladie d’Alzheimer dont on sait toutefois qu’ils intéressent le système limbique, en particulier l’amygdale et qu’ils n’épargnent pas le néocortex et le cortex frontal aux stades avancés de la maladie. Sur le plan neurochimique, on sait que les déficits ne concernent pas que les seuls systèmes cholinergiques et que les taux de sérotonine, de GABA et de norépinéphrine sont aussi diminués mais les liens avec les conduites agressives restent à préciser. Une augmentation des récepteurs adrénergiques, et en particulier des récepteurs α2, a été mise en évidence dans le cortex cérébelleux d’un groupe de patients atteints de maladie d’Alzheimer et agressifs comparés à un groupe ayant le même degré de déficit cognitif et non agressifs (Russo-Neustadt et Cotman, 1997). Les conduites agressives tendent à être plus fréquentes quand la détérioration cognitive progresse mais il ne s’agit pas toutefois d’une loi générale ; ainsi les désordres psychotiques peuvent certes provoquer une institutionnalisation plus précoce indépendamment du degré de détérioration cognitive ; ils procéderaient en effet de localisations lésionnelles électives en particulier dans l’aire temporo-prosubiculaire médiane et dans le cortex frontal moyen et s’accompagneraient de taux plus élevés de norépinéphrine dans le locus niger et de taux plus bas de sérotonine dans le prosubiculum.