Immunomodulateurs

4 Immunomodulateurs





Ciclosporine




Grâce à ses propriétés immunosuppressives et sélectives, la ciclosporine A (CsA) est sans doute l’une des molécules actuelles qui semble avoir l’avenir le plus prometteur en dermatologie vétérinaire. Elle est commercialisée en médecine vétérinaire sous forme micro-émulsionnée en capsules (Atopica, AMM chien).




Mode d’action



Actions sur les cellules immunitaires


La CsA agit sur plusieurs types cellulaires de la réponse immunitaire, mais son action majeure s’exerce sur les lymphocytes T auxiliaires (LTa, LTh, lymphocytes T CD4). La CsA inhibe de façon réversible et sélective la phase initiale de l’activation des LTa par l’antigène et ainsi la production de nombreuses cytokines, notamment l’interleukine 2 par les lymphocytes Th1 activés, en bloquant la transcription de leurs gènes. La CsA inhibe ainsi la synthèse d’autres cytokines comme les interleukines IL-3, IL-4, l’interféron γ le TNFα. En revanche, certaines d’entre elles comme, l’IL-10, l’IL-15, le TGFβ qui jouent pourtant un rôle important dans la régulation de la réponse immunitaire, sont peu ou pas inhibées.


Contrairement aux autres immunosuppresseurs, la CsA n’a qu’une faible action sur les autres cellules intervenant dans la réponse immunitaire. Les lymphocytes T suppresseurs ne sont pas inhibés ; au contraire, ils peuvent être stimulés. À de faibles concentrations, la CsA ne pertube pas la phagocytose, ni la synthèse des cytokines par les macrophages, les monocytes et les granulocytes. Par contre, la CsA inhibe la survie des mastocytes dans la peau, leur réponse sécrétoire après stimulation, le relargage de l’histamine mastocytaire, la production de prostaglandines et la sécrétion de cytokines (IL-4, IL-5, TNFα). La CsA agit également sur le recrutement et l’activation des granulocytes éosinophiles au sein des sites allergiques ; elle inhibe leur survie dans la peau, le relargage des granulations toxiques et la sécrétion des cytokines. Son action au niveau des cellules de Langerhans est non négligeable ; en effet, la CsA diminue leur nombre dans l’épiderme et inhibe leur fonction principale de présentation d’antigènes. La CsA exerce aussi une action sur les kératinocytes en inhibant la synthèse des cytokines kératinocytaires. Enfin, la CsA inhibe l’infiltration cellulaire IgE dépendante et mastocytaire au sein des sites inflammatoires en empêchant les réactions d’hypersensibilité retardée.





Effets secondaires – toxicité


Les études toxicologiques sont bien documentées dans de nombreuses espèces.




Effets secondaires et toxicité chez le chien


La toxicité et les effets secondaires observés chez le chien sont très différents de ceux décrits chez l’homme.


L’absence de toxicité rénale et d’hypertension artérielle induite est à signaler en priorité. Celle-ci est due à une absence de l’activation du système rénine–angiotensine–aldostérone chez le chien.


Les effets secondaires majeurs sont d’ordre digestif avec des vomissements, des ramollissements de selles ou des diarrhées fréquentes. La prise conjointe d’anti-vomitifs, le fractionnement de la posologie ou sa réduction momentanée permettent d’éviter l’apparition de ces vomissements.


Parmi les autres effets secondaires moins fréquents, il convient de signaler des cas d’hypertrophie gingivale, d’hypertrichose, des contractures musculaires et beaucoup plus rarement, des troubles du comportement (prostration, convulsions, agressivité).


Le risque d’infections cutanées opportunistes semble très faible surtout aux posologies usuelles. Une papillomatose cutanée atypique a été rapportée chez un chien recevant de la CsA. Récemment, une phæohyphomycose a été aussi signalée sur un chien ayant reçu précédemment de la CsA dans une indication de dermatite atopique, mais il est difficile dans ce cas, d’établir une relation nette de cause à effet.


Quant aux tumeurs induites, aucun cas n’a été confirmé avec certitude jusqu’à présent.


Notons que la toxicité de la ciclosporine n’a été évaluée qu’à moyen terme et que les conséquences sanitaires de l’utilisation de cette molécule à long terme chez le chien restent à établir.



Indications


Les indications de la CsA en dermatologie canine sont récentes, peu nombreuses pour l’instant et doivent être bien cernées.



Dermatite atopique


Le contrôle très insuffisant du prurit et des lésions cutanées par les traitements antiprurigineux habituels (corticoïdes) dans certains cas de dermatite atopique, alors que les complications infectieuses (pyodermite, dermatite à Malassezia) sont bien contrôlées, les effets secondaires liés à l’utilisation des corticoïdes et aussi l’efficacité de la CsA dans des cas de dermatite atopique réfractaires aux traitements habituels chez l’homme ont conduit à utiliser la CsA dans cette indication.


Diverses études ont déterminé la posologie minimale efficace dans cette indication qui est de 5 mg/kg SID par voie orale, 2 heures avant ou après les repas. Généralement, la réduction du prurit est de 60 % en 1 mois et de 80 % en 2 mois. Il est ensuite nécessaire de prescrire un traitement d’entretien à la même posologie tous les 2 à 3 jours.


La prescription de la CsA doit s’inscrire dans une logique thérapeutique. Elle doit être réservée aux cas de dermatite atopique sévères pour lesquels l’infection est bien contrôlée. Il ne faut jamais oublier que le suivi à long terme d’une dermatite atopique passe d’abord par la lutte contre les infections bactériennes et fongiques, la restauration et le maintien du film lipidique de surface, un contrôle antipuce draconien (que le chien soit ou non allergique aux piqûres de puce) et permanent, une alimentation hyperdigestible ou hypoallergénique et, dans certains cas, une immunothérapie spécifique.



Fistules péri-anales


Les fistules péri-anales constituent toujours un véritable défi thérapeutique.


L’utilisation de la CsA, dès 1997, a révolutionné le traitement médical des fistules péri-anales. Diverses études ont permis de préciser la posologie et la durée de ce traitement. La posologie varie de 2 mg/kg à 10 mg/kg SID ou BID pendant plusieurs semaines. Une amélioration clinique et une régression des lésions cutanées commencent à s’observer à partir de 2 semaines, mais il est nécessaire de poursuivre ce traitement pendant 6 à 8 semaines pour obtenir une guérison. Ce traitement doit être maintenu pendant 4 semaines au minimum après guérison pour limiter le risque de récidives. Chaque cas traité est un cas particulier et le protocole doit être adapté en fonction de celui-ci. Le risque de récidives est d’environ 30 à 50 %. Parfois, une absence de réponse thérapeutique ou une réponse insuffisante même à des posologies plus élevées sont notées.


La CsA peut être utilisée en association avec un traitement chirurgical de fistulectomie. En effet, un recours préalable à la CsA à une posologie de 5 mg/kg SID pendant 4 à 6 semaines permet d’obtenir une amélioration des lésions qui facilite l’intervention chirurgicale dans un second temps.


Enfin, la CsA demeure la seule solution thérapeutique lors de l’impossibilité du traitement chirurgical (cas de sténose anale sévère ou d’incontinence fécale).


Récemment, une crème à base de tacrolimus à 0,1 % appliquée une à deux fois par jour pendant 16 semaines a permis une amélioration notable. Une guérison des lésions est obtenue dans 50 % des cas et une nette amélioration dans 90 % des cas.





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May 4, 2017 | Posted by in DERMATOLOGIE | Comments Off on Immunomodulateurs

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