Chapitre 78 Réseaux de santé périnatale Fédérer les professionnels autour de la naissance
Introduction – Historique
Les réseaux de santé périnatale ont tout d’abord existé sous une forme très informelle : les réseaux de correspondants. La notion de filière de soins est issue de la crise des années 1970-1980 avec comme objectif le contrôle de la forte croissance des dépenses de santé, dans un contexte de crise économique et de concurrence nouvelle avec le système de santé privé. Sailly présentait la filière comme un mode de soins particuliers [1]. En fait, comme pour les réseaux de santé, les définitions concernant les filières de soins ont été nombreuses selon les caractères qui déterminaient la population, les limites du champ, les caractéristiques des lieux de soins et les objectifs des filières. Il existe d’ailleurs un flou sémantique entre les termes filière de soins et réseau de soins. Le terme filière a été intégré avec celui de régionalisation des soins et avait d’ailleurs fait l’objet en 1996 d’une table ronde à un congrès national [2]. Au cours des années 1990, le concept de réseau ville-hôpital émerge avec la problématique de l’époque qui était la prise en charge des personnes infectées par le VIH et en partie sous la pression des associations de patients.
Avec les décrets périnatalité de 1998 déterminants des types de maternités en fonction du niveau de soin, des réseaux de santé interétablissements se sont peu à peu organisés. Ces décrets de 1998 précisent le principe d’une organisation régionale des structures d’obstétrique et de néonatalogie, notamment le développement des réseaux. Cette organisation tend à favoriser la prise en charge du couple mère-enfant dans un niveau de soin adapté au niveau de risque de la mère et/ou de l’enfant (ou des enfants) à naître. En effet, l’augmentation des transferts in utero est un élément déterminant dans la sécurité de la naissance et l’avenir des nouveau-nés à risque. Il faut noter qu’en 1998, le Collège national des gynécologues obstétriciens français (CNGOF) publiait une recommandation de pratique clinique intitulée « Prise en charge de la femme enceinte, de l’accouchement et du nouveau-né selon leur niveau de risque » [3].
En pratique, nous pouvons définir le niveau de soins périnatal de la façon suivante :
La différence entre le niveau 2A et 2B est la présence d’un pédiatre sur place 24 heures sur 24.
Entité géographique des réseaux/des hommes
Aire géographique du réseau
Elle doit correspondre à une certaine logique de population sans respecter obligatoirement une organisation administrative de département ou de région. Un découpage purement administratif ne correspond souvent pas à l’ancienneté des relations entre certains professionnels, de certaines zones géographiques et est contredit par les faits. En effet, la facilité (ou difficulté) des transferts en fonction de l’état du réseau routier (type de routes, temps de circulation) ou des conditions climatiques (col enneigé, etc.) prévaut sur une logique purement administrative. Tout réseau devrait pouvoir s’articuler avec les réseaux voisins dans un objectif de rationalisation évident des soins. Par exemple, certaines technologies ne sont pas disponibles partout, comme le laser nécessaire à la prise en charge des syndromes transfuseurs-transfusés de certaines grossesses gémellaires.
Des réseaux et des hommes
Professionnels
Régulation des transferts
Selon la taille des réseaux, la régulation des transferts est le fait d’un ou plusieurs niveaux 3 ou d’une cellule de régulation. Selon le cas de figure, différents protocoles de transferts sont possibles. Une cellule de régulation peut être fort utile. Celle de la région Rhône-Alpes se situe dans les locaux du Samu au CHU de Lyon pour bénéficier de toute l’infrastructure et de son savoir faire. Une sagefemme régule 24 heures sur 24 les appels de la région. Une fiche de transfert est utilisée pour faciliter la coordination de la prise en charge, ce qui permet de fournir, par ailleurs, des statistiques annuelles [4]. La réflexion nationale actuelle n’a pas été d’imposer quatre à cinq cellules de régulation qui auraient été suffisantes, semble-t-il sur le territoire national. En revanche, chaque réseau doit réfléchir à un mode de régulation des transferts qui doit être clair et explicite pour l’ensemble des professionnels concernés.
Fonctionnement des réseaux
Constitution d’un réseau
Elle repose sur trois documents juridiques indispensables qui sont :
Statut juridique
Il est important que tout réseau ait un statut juridique quel qu’il soit pour assurer la pérennité de celui-ci, le mode informel n’est actuellement plus recommandé. Le choix d’une structure juridique adaptée permet, en effet, d’apporter des garanties aux financeurs, donc un support à la gestion et au financement des réseaux (circulaire 2002610 du 19 décembre 2002). Le guide d’évaluation des réseaux de 2004 relève comme indicateur qualitatif le statut administratif du réseau évalué [5]. La plupart des réseaux ont adopté les formes juridiques suivantes :
Coordination
Il n’existe pas de réseau qui fonctionne de façon efficace et efficiente au long cours sans une coordination préalablement définie. Celle-ci doit reconnaître les particularités et contraintes des différents modes d’exercices au sein de chaque réseau. Pour autant, une coordination ne se décrète pas a priori, elle découle de l’histoire des liens relationnels entre les professionnels de l’aire géographique d’un réseau. La coordination est facilitée par l’existence d’un statut juridique et l’existence d’une charte décrivant les conditions d’adhésion au réseau, les engagements et les droits des professionnels qui en découlent. Cette charte de réseau est un document contractuel qui doit être une référence claire, explicitée et partagée par les professionnels d’un réseau [6]. La coordination est indispensable pour assurer la gestion du réseau (réunions du Conseil d’administration ou du bureau selon le statut juridique, relation avec les financeurs, rédaction du rapport d’activités annuel, formations et enseignements, etc.), mettre en place et accompagner les activités spécifiques du réseau, c’est-à-dire mettre en place les objectifs spécifiques du réseau (par exemple déployer un système d’information régionale informatisé, mettre en place des évaluations de pratiques professionnelles, rédiger des protocoles et procédures, etc.). Tout réseau devrait avoir dans ses instances un représentant des usagers qui est apte à participer à l’amélioration de la prise en charge des usagers du système de santé, en pratique [7].
Information des patients et des professionnels
C’est un point essentiel qui doit requérir l’attention des professionnels des réseaux. C’est un point important aussi pour l’HAS puisqu’en 2004, dans son guide d’évaluation, l’évaluation de l’intégration des usagers et des professionnels dans le réseau constitue le chapitre 2 de ce guide [5].
Information des patientes
L’information à donner aux femmes est abondante et concerne plusieurs domaines. Tout d’abord, toute femme doit être informée de l’existence du réseau (obligation légale). Pour ce faire, l’Auvergne a choisi la réalisation d’un poster à afficher dans les salles d’attentes des lieux prenant en charge des femmes enceintes et a réalisé une plaquette d’information à remettre à chacune d’elles lors de leur première consultation de grossesse (figure 78.2 voir cahier couleur en fin d’ouvrage). D’autres documents sont disponibles sur le site grand public du site web de l’Auvergne (www.auvergne-perinat.org). Il est important de se rappeler que le message doit être court et clair [8], en veillant à ce que tout document d’information soit revu par des représentants des usagers avant impression.
Enfin, les usagers doivent aussi être informés sur le déroulement d’une grossesse, la préparation à l’accouchement [9], etc., et sur la nécessité de réduire les facteurs de risque interférant avec la grossesse ou le bien-être physique et psychologique des mères (prévention concernant les conduites addictives, violences conjugales, etc.).