sacro-iliaques

Chapitre 11 Articulations sacro-iliaques


Depuis Ambroise Paré, le premier à avoir affirmé leurs mobilisations au cours de l’accouchement, les articulations sacro-iliaques n’ont cessé d’intriguer et sont loin d’avoir livré tous leurs secrets.


Leur fonctionnement et leurs implications pathologiques ont donné lieu à de multiples hypothèses et suscité des controverses passionnées, aussi bien au sein des diverses écoles manipulatives, notamment ostéopathiques, que parmi les praticiens mettant en doute ou rejetant ces traitements.


Comment se présente une articulation sacro-iliaque et en quoi diffère-t-elle des autres articulations ? Comment fonctionne-t-elle et quelles sont ses contraintes ? Comment détecter sa souffrance ? À quelles manœuvres faire appel pour traiter son dysfonctionnement ?


Autant de questions importantes justifiant ce chapitre, pour tenter de répondre le plus objectivement possible à ce sujet « mythique » dans le monde des manipulateurs, et plus particulièrement dans les milieux ostéopathiques.



Rappel anatomique


Malgré les modifications entraînées par l’âge, tous les auteurs s’accordent pour reconnaître la nature diarthrodiale de ces articulations et leur situation particulière dans l’organisme humain en raison de la forme de leurs surfaces articulaires, de l’orientation de celles-ci et surtout de l’importance de leur système ligamentaire, le plus puissant de l’organisme.


Les surfaces articulaires ont grossièrement la forme d’une oreille inversée, d’où le nom d’auricules qui leur a été donné. Elles comportent deux jambages, un supérieur plutôt vertical, un inférieur plutôt horizontal, disposés presque à angle droit.


L’auricule sacrée est située à la partie supéro-interne de la face latérale du sacrum. Sa surface est plutôt concave avec une dépression à la jonction des deux jambages.


L’auricule iliaque se trouve en arrière de la fosse iliaque interne et de la ligne innominée, à la partie inféro-interne de la tubérosité iliaque. Sa surface est plutôt convexe avec une petite tubérosité répondant à la dépression de l’auricule sacrée.


Jusqu’à la puberté, elles sont recouvertes d’un cartilage trois fois plus épais au niveau sacré qu’au niveau iliaque.


Planes au début de la vie, elles subissent des modifications à partir de la puberté sous la forme de rugosités ou d’adhérences. Ces dernières sont nettement plus prononcées chez les hommes, et aboutissent à partir de 50 ans à immobiliser les sacro-iliaques, dans une proportion de 87 %, selon les conclusions de R. Brooke, au terme de 200 dissections effectuées sur des bassins de tous âges.


La capsule articulaire est habituellement difficile à individualiser du système ligamentaire sacro-iliaque, sauf chez le sujet jeune.


Le système ligamentaire associé à cette articulation est particulièrement complexe et remplit une double fonction : celle de maintenir fermement le sacrum contre les deux os iliaques, tout en le suspendant vis-à-vis d’eux (fig. 11-1a, b et c). Schématiquement, il comprend une partie antérieure relativement mince, contrastant avec l’importance des ligaments postérieurs. Ces derniers se répartissent sur trois plans :






Ce système postérieur est lui-même renforcé par les grand et petit ligaments sacrosciatiques.


Au côté de ce système ligamentaire sacro-iliaque proprement dit, il faut aussi prendre en considération les ligaments iliolombaires, allant de la crête iliaque aux apophyses transverses de L5 et de L4, et qui sont également sollicités lors des mouvements.


Il y a d’ailleurs tout lieu de penser que l’une des explications de l’efficacité des manipulations dites sacro-iliaques se situe à leur niveau.



Examen des sacro-iliaques


De multiples tests ont été proposés pour objectiver les dysfonctionnements des articulations sacro-iliaques. Beaucoup sont sujets à caution, en raison de leur subjectivité et de la très faible mobilité de ces articulations. Quelques-uns paraissent difficilement contestables, ne serait-ce qu’en raison de leur positivité en cas de pelvispondylite rhumatismale.




Manœuvres dignes de foi


Parmi celles-ci, il convient de citer la pression verticale sur les deux épaules, en appui monopodal alterné ; l’écartement ou le rapprochement des deux ailes iliaques, le patient étant en décubitus dorsal ; et l’appui vertical sur la face postérieure du sacrum, le patient étant en décubitus ventral.


Quatre manœuvres surtout s’avèrent particulièrement intéressantes :


l’étude comparative du mouvement des épines iliaques postérosupérieures lors de l’élévation à l’horizontale de la cuisse. Le patient étant debout, le praticien se place derrière lui et pose ses deux pouces respectivement sur l’une des épines iliaques postérosupérieures et sur la crête sacrée en regard (fig. 11-2). Normalement, lors de l’ascension de la cuisse, l’épine iliaque postérosupérieure du même côté s’abaisse (fig. 11-3). En cas de fixation sacro-iliaque, elle s’élève au fur et à mesure du soulèvement de la cuisse. Ce test est très utilisé dans les milieux anglo-saxons. Ces derniers prônent également l’étude des conséquences engendrées par le même mouvement de la cuisse entre l’ischion et la pointe sacrée ;










Biomécanique des articulations sacro-iliaques


La nature véritable de la fonction biomécanique des articulations sacro-iliaques reste encore une énigme, même si tout le monde s’accorde pour souligner leur situation stratégique entre la colonne vertébrale qu’elles supportent et les membres inférieurs, ainsi que le rôle d’amortisseur protecteur de leur système ligamentaire particulièrement puissant lors des mouvements des membres inférieurs.



Mobilité sacro-iliaque


La mobilité des articulations sacro-iliaques est extrêmement faible, sauf au cours de l’enfance et de la grossesse. Elle devient problématique au-delà de 50 ans.


Elle est quasi invisible à l’œil nu et imperceptible au palper direct, ainsi que nous avons pu le constater1 lors d’une étude effectuée en 1971 sur huit bassins de sujets âgés entre 30 et 75 ans, solidement maintenus par un étau au niveau iliaque pendant que le sacrum était mobilisé dans le sens antéropostérieur grâce à une barre de fer recourbée introduite dans le canal sacré.


Jamais l’amplitude du mouvement des pavillons des sondes cannelées fichées perpendiculairement sur chacune des berges sacro-iliaques n’a excédé 4 mm de part et d’autre de la position de repos. Elle se situait généralement entre 1 à 2 mm.


La section de la symphyse pubienne multipliait ces chiffres par trois.


À titre comparatif, le mouvement animant les pavillons de ces mêmes sondes était dix fois plus important au cours de la flexion–extension de la charnière lombosacrée effectuée avec la même force, lorsqu’elles étaient plantées sur les faces antérieures de L5 et S1.


Ces chiffres concordent avec ceux obtenus par Colachis en 1963 et surtout avec les mesures effectuées par Sturesson et son équipe en 1988, in vivo, par stéréophotogrammétrie sur 25 patients. Le mouvement mis en évidence comportait à la fois une faible rotation d’environ 2,5 ° (0,8–3,9 °) et une translation minime d’environ 0,7 mm (0,1−1,6 mm).


La manière dont cette mobilité sacro-iliaque s’effectue est controversée. De nombreuses hypothèses ont été avancées, celle d’une rotation autour d’un axe de rotation situé au niveau de l’auricule (E. Bonnaire) (fig. 11-6a) ou bien derrière lui (L. Farabeuf) (fig. 11-6b). Celle d’une rotation et d’une translation associées défendue par S.C. Colachis et M. Beal semble la plus crédible (fig. 11-6c), l’axe de rotation se situant en arrière des auricules au niveau du ligament axile. E. Rageot2 émet une autre hypothèse, celle d’un mouvement de cisaillement se produisant au niveau de la sacro-iliaque, comme il l’a constaté en 1995 sur un cadavre frais, en tirant sur le membre inférieur vers le bas de la table. Cela expliquerait l’efficacité de la traction brusque sur la jambe dans cette pathologie.


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May 16, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on sacro-iliaques

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