2. Échocardiographie Doppler normale de l’enfant
Y. Dulac and P. Acar
L’échocardiographie 2D est devenue l’outil indispensable dans le diagnostic des malformations cardiaques de l’enfant. L’échocardiographie 2D, couplée aux modes TM, Doppler (pulsé, continu et couleur) permet un diagnostic précis de l’architecture et/ou de l’hémodynamique cardiaque. Elle ne remplace pas l’examen clinique qui reste indispensable dans le dépistage et l’appréciation de la tolérance des cardiopathies. L’échocardiographie, examen totalement non invasif, permet dans la très grande majorité des cas d’éviter le cathétérisme cardiaque diagnostique [1]. Nous traiterons les particularités techniques de l’échocardiographie de l’enfant avant d’aborder les applications de la technique. L’échocardiographie fœtale sera traitée dans un chapitre séparé tout comme l’ETO et l’écho 3D.
Matériel et méthode
L’enfant, en comparaison de l’adulte, offre une échogénicité transthoracique excellente mais celle-ci peut se heurter à la compliance de l’enfant à l’examen. Le choix du matériel utilisé, tout comme les conditions dans lesquelles sont réalisées l’examen, sont autant de facteurs essentiels.
Équipement
Les échocardiographes de nouvelle génération sont munis des sondes adaptées à l’examen pédiatrique. La faible profondeur de pénétration des ultrasons chez le nouveauné permet d’utiliser de hautes fréquences d’émission (jusqu’à 12MHz). L’ergonomie des sondes (figure 2.1) permet de réaliser des examens chez des enfants de très faible poids (prématuré < 1kg). Elles s’adaptent parfaitement au creux suprasternal ou souscostal, voies d’abord privilégiées chez le nouveau-né. La tachycardie physiologique du petit enfant impose de travailler avec des cadences images élevées, tant en imagerie 2D qu’en Doppler couleur. Chez le nourrisson, des fréquences d’émission allant de 5 à 8MHz sont utilisées. Chez le plus grand enfant, la fréquence d’émission se rapproche de l’adulte (2 à 5MHz). En cas d’échogénicité difficile (enfant multi-opéré, obésité), l’utilisation de la seconde harmonique est très utile car elle rehausse le contraste de l’image. L’échocardiographie de contraste ou le mode Doppler tissulaire n’ont pas montré jusqu’à aujourd’hui leur intérêt en cardiologie pédiatrique. Les échocardiographes de nouvelle génération offrent un système de stockage numérique des images sur format DICOM. Un trans fert intranet ou disque magnéto-optique permet une relecture sans perte d’informations.
Figure 2.1 |
Échocardiographie 2D
Incidences 2D
→ Incidence parasternale
L’enfant est en décubitus dorsal ou en latéral gauche pour les plus grands. La sonde est placée le long du bord gauche du sternum entre le 3e ou 4e espace intercostal.
• Incidence parasternale grand axe
L’incidence parasternale grand axe (figure 2.2) est pratiquée en utilisant un plan de coupe orienté vers l’épaule droite et aligné avec le grand axe longitu dinal du cœur. Cette coupe permet d’étudier l’OG, la valve mitrale avec ses deux feuillets, le VG avec sa paroi postérieure (myocarde et péricarde), le septum interventriculaire musculaire dans sa portion antérobasale, le septum interventriculaire membraneux, la voie sousaortique, deux des sigmoïdes aortiques (antéro-droite et non-coronaire).
Figure 2.2 |
• Incidence parasternale petit axe
L’incidence parasternale petit axe perpendiculaire grand axe utilise trois plans de coupe passant par :
– la base des gros vaisseaux. La coupe transaortique est centrée par l’orifice aortique. La valve aortique est analysée en dynamique : les trois feuillets en diastole (antérodroit, antéro-gauche, non-coronaire formant un Y) et l’ouverture des commissures en systole (avec effacement des feuillets sur la paroi) (figure 2.3). Les ostia coronaires sont localisés au dessus des sigmoïdes et leur segment initial est bien visualisé (1er segment de la coronaire droite, tronc commun et bifurcation de la coronaire gauche). En position antéro-gauche, l’AP s’enroule autour de l’AO avec ses feuillets valvulaires, son tronc et sa bifurcation en deux branches pulmonaires (figure 2.4). En avant et à droite de l’AO, le VD déroule sa chambre d’admission (avec les feuillets antérieur et septal de la valve tricuspide) et sa chambre d’éjection (infundibulum). En arrière de l’AO, les deux oreillettes sont séparées par le septum interauriculaire.
Figure 2.3 |
Figure 2.4 |
– La valve mitrale. La coupe transmitrale montre les deux feuillets antérieur et postérieur et les 2 commissures dessinant un sourire en diastole (figure 2.5).
Figure 2.5 |
– Les muscles papillaires. La coupe transventriculaire est obtenue par bascule de la sonde vers l’apex. Elle visualise les deux piliers, postéro-médian et antéro-latéral, le septum trabéculé surplombé par le VD. Cette coupe permet également une analyse de la fonction segmentaire du VG. En systole, la cour bure septale est arrondie, témoin du rapport de pression entre les deux ventricules (figure 2.6).
Figure 2.6 |
→ Incidence apicale
La sonde est placée au niveau du choc de la pointe (4e espace intercostal chez le petit enfant). L’enfant plus grand est placé en décubitus latéral gauche.).
Figure 2.7 |
– La coupe 4 cavités est essentielle pour l’étude de la jonction AV (point de croisement des septa auriculaire et ventriculaire avec les valves AV, aussi dénommé « croix du cœur «). La valve tricuspide se reconnaît par son insertion plus apicale que la valve mitrale. Le VD a de nombreuses trabéculations s’insérant sur le septum. Le VG est lisse et n’a pas d’attache septale (figure 2.7)
– La coupe 2, obtenue par rotation de 90° du capteur par rapport à la coupe 4 cavités, permet une analyse des parois antéroseptales et postérieures du VG.
→ Incidence sous-costale
Très utilisée chez le nouveau-né, l’incidence sous-costale est obtenue en plaçant la sonde sous la xiphoïde. Toutes les incidences précédemment décrites sont réalisables avec une excellente résolution chez un enfant calme : longitudinales (4 et 5 cavités) ou transversales (transventriculaire et transaortique). Elles sont irremplaçables pour l’analyse du septum interauriculaire (flux Doppler parallèle et non perpendiculaire à la sonde), ainsi que pour l’analyse des retours veineux pulmonaires et systémiques (incidence sagittale des oreillettes montrant les deux veines caves et les veines sushépatiques, figure 2.8).