Sténoses canalaires dans les déformations rachidiennes de l’adulte
Lumbar spine stenosis combined with spine deformities in adults
- – optimiser la qualité de l’arthrodèse lombosacrée par des montages sacro-iliaques et des greffes intercorporéales L5-S1 par cages ;
- – adapter la technique de correction en zone lombaire pour restituer un équilibre sagittal suffisant (ostéotomies étagées type Smith-Petersen ou ostéotomie transpédiculaire en L4) ;
- – diminuer les complications peropératoires par une sélection rigoureuse des patients ayant des comorbidités multiples et par l’utilisation du monitorage médullaire et radiculaire peropératoire).
- – adapter la technique de correction en zone lombaire pour restituer un équilibre sagittal suffisant (ostéotomies étagées type Smith-Petersen ou ostéotomie transpédiculaire en L4) ;
The surgical strategy should combine three elements:
- – optimize the quality of the lumbosacral fusion by using robust sacro-iliac constructs and intercorporeal cages (L5-S1 level),
- – adapt the surgical technique in the lumbar area in order to restore the sagittal balance (either multi level Smith-Petersen osteotomies or transpedicular substraction osteotomy at the L4 level)
- – decrease the risk of peri-operative complications through a rigorous selection of patients with multiple comorbidities and use of neurophysiological monitoring of the spinal cord and nerve roots during surgery.
- – adapt the surgical technique in the lumbar area in order to restore the sagittal balance (either multi level Smith-Petersen osteotomies or transpedicular substraction osteotomy at the L4 level)
Les grandes périodes de la chirurgie des sténoses lombaires
Verbiest en 1949 et 1954 a décrit l’association entre sténose lombaire et compression des structures nerveuses [36]. Ses travaux ont établi des données anatomiques qui précisent que la distance antéropostérieure sagittale normale est de 15 mm, qu’entre 10 et 12 mm il s’agit d’une sténose relative et au-dessous de 10 mm d’une sténose absolue sévère ; mais le maximum de la sténose siège au niveau du disque et des articulations postérieures, il s’agit du diamètre sagittal constitutionnel mobile. Le plus souvent existe une sténose latérale créée par des articulations arthrosiques et hypertrophiques, aggravée par un glissement pur antéropostérieur ou par une déformation rotatoire.
Dernier point : il existe une composante vasculaire de la sténose lombaire avec une atteinte intermittente de la microvascularisation ou la circulation veineuse [34]. Durant une longue période, il existera donc une instabilité segmentaire provoquant une sténose foraminale étagée qui aboutira ensuite à une sténose sévère fixée et globale.
C’est sur la période des années 1960 à 1980 qu’ont été précisées les bases du traitement chirurgical de la sténose lombaire (Deburge, Verbiest) et les conditions d’une décompression des racines symptomatiques, l’objectif majeur étant alors d’améliorer la douleur radiculaire ; les premiers résultats publiés ont posé la question de la déstabilisation secondaire en cas d’arthrectomies étagées et du problème de la lombalgie ; pour Deburge [12], chez 128 patients revus à plus de 2 ans, la lombalgie était inchangée dans 52 % des cas et aggravée dans 7 % des cas. La notion de déséquilibre frontal ou sagittal n’était pas à cette époque intégrée dans les résultats fonctionnels ; Grubb [17] a décrit seulement 30 résultats favorables sur la lombalgie parmi 68 opérés, en particulier s’il existait une scoliose associée.
Les années 1980 à 1990 ont permis de faire une analyse critique des décompressions isolées et des échecs secondaires en cas de déformations associées. Charafeddine [7] a retrouvé de moins bons résultats après laminoarthrectomie s’il existe une dislocation rotatoire et une scoliose dégénérative, avec un risque d’aggravation associé à un résultat fonctionnel médiocre. Ceci a été confirmé par Grubb [17]. Durant cette période, d’autres auteurs ont confirmé clairement le mauvais pronostic en cas de laminectomie seule réalisée sur des scolioses dégénératives [14].
Ces premières analyses ont précisé que l’existence d’une scoliose lombaire est un facteur de mauvais pronostic en cas de décompression isolée. Par ailleurs, certains auteurs ont évoqué le retentissement d’une perte de lordose lombaire sur les résultats fonctionnels (48 % des cas pour Grubb [17]).
Épidémiologie des compressions radiculaires associées à une déformation lombaire
La fréquence des scolioses lombaires est de 10 % à l’âge de 65 ans [2] ; d’autres études ont retrouvé un angle supérieur à 10° chez 30 % des patients âgés de 50 à 84 ans [26-36] ; ces auteurs ont précisé une aggravation moyenne de 3° par an, surtout si l’angle est supérieur à 30° et si la vertèbre L5 est encastrée sous la ligne des crêtes iliaques.
Tassin et Guillaumat [35] ont parfaitement décrit deux types de dislocation. D’abord, la dislocation ouverte entraînant une translation et un bâillement discal, sources d’une rotation intervertébrale supérieure à 10° autour de l’axe des articulaires postérieures ; il peut exister alors une compression intermittente à l’origine d’une sténose dynamique. L’autre type est la dislocation fermée avec une dégénérescence majeure des articulaires postérieures, qui entraîne un équivalent de spondylolisthésis dégénératif unilatéral ; il peut exister une compression foraminale au niveau de l’articulaire convexe à un stade plus avancé.
Ces données ont été confirmées par différents auteurs [24,25] qui retrouvent ce mécanisme de translation et de glissement rotatoire pouvant fermer le foramen ; toutefois, ces études réalisées à partir de scanner ou de résonance magnétique nucléaire (RMN) sous-estiment la composante dynamique.
L’aggravation de l’angle de Cobb et de la subluxation rotatoire pourra retentir sur les foramens ; aussi, il est important de disposer de critères prédictifs d’une accentuation de la scoliose. Kobayashi [19] a mené une étude prospective durant 12 ans chez 60 patients et a démontré que l’apparition d’une scoliose secondaire était liée à certains signes radiologiques : une diminution de plus de 20 % de la hauteur discale de façon unilatérale ou un ostéophyte de longueur supérieure à 5 mm d’un côté sont prédictifs d’une évolution significative de la scoliose dégénérative.
La fréquence des compressions radiculaires associées à une scoliose est très variable mais apparaît sous-estimée ; Morin et Deburge [21], parmi 202 sténoses lombaires opérées, ont retrouvé près de 25 % de scolioses associées ; ceci a été retrouvé par Pritchett [25]. Grubb [17], dans deux groupes de scolioses, l’un de courbures idiopathiques (24 cas) et l’autre de courbures de type dégénératif (27 cas), a retrouvé une sténose chez tous les patients porteurs d’une scoliose secondaire et dans 13 % des cas dans le groupe des courbures idiopathiques.
Les formes anatomiques des scolioses dégénératives ont été parfaitement décrites par Chopin [9] avec des formes à début lombaire entraînant une dislocation rotatoire autour de L2-L3, des formes à début lombosacré comprenant une dégénérescence discale asymétrique (obliquité de L4), et des formes pseudomalformatives avec un aspect en hémi-branche de chandelier (déséquilibre clinique majeur).
Récemment, Schwab [28] a bien corrélé les douleurs lombaires et radiculaires avec l’importance du glissement latéral, l’obliquité des plateaux de L3 et L4, la lordose lombaire et la cyphose thoracolombaire (tableau 1).
Critère significatif | Critère non significatif |
---|---|
Glissement | Angle de Cobb |
Obliquité du plateau de L3 | Age |
Obliquité du plateau de L4 | Niveau de glissement |
Lordose lombaire | Version pelvienne |
Cyphose thoracolombaire |
Paramètres radiographiques
L’équilibre sagittal est bien entendu un élément clé à prendre en compte. Les indices lombopelviens seront essentiels à définir, avec de grands clichés intégrant la boîte crânienne et les hanches. L’équilibre global est mesuré à partir de la verticale abaissée de C7 qui passe par le milieu du plateau sacré ; le paramètre majeur est l’incidence pelvienne associée à la version pelvienne et à la pente sacrée. Roussouly [27] a décrit quatre types de forme de dos, dont deux types à pente sacrée faible (< 35°), un type à pente sacrée moyenne (compris entre 35 et 45°) et une forme à pente sacrée forte (> 45°) avec une lordose forte.
L’équilibre global est important ; en effet, Glassman [16], sur 752 patients, a retrouvé une augmentation significative des douleurs corrélées avec l’importance de la flèche positive de la verticale tracée à partir de C7 ; la restauration d’une flèche négative sera un élément déterminant pour la qualité du résultat fonctionnel.
- • Le cliché de face doit impérativement inclure l’ensemble du rachis et le bassin en charge ; sur ce cliché, les éléments essentiels sont :
- – la verticale du centre de C7 doit couper le centre du sacrum : ceci permettra de quantifier en centimètres le déséquilibre frontal droit ou gauche ;
- – l’angle de Cobb et la vertèbre apicale ;
- – l’obliquité du plateau inférieur de L3 et de L4 ;
- – le glissement intervertébral et la subluxation rotatoire ;
- – les contre-courbures structurales en cas de scoliose thoracolombaire idiopathique évolutive à l’âge adulte.
- – l’angle de Cobb et la vertèbre apicale ;
- • Au total, dans le plan frontal, nous observerons différentes situations :
- – forme équilibrée : la verticale de C7 passe par le milieu du plateau sacré ou à moins de 1 cm de la ligne sacrée ;
- – formes déséquilibrées :
- – formes déséquilibrées :
- • Pour l’analyse du profil, il est impératif de disposer d’un grand cliché incluant le rachis cervical, le bassin avec les hanches en charge ; les paramètres indispensables à mesurer sont les suivants :
- – la verticale de C7 doit passer 2 à 4 cm en arrière du corps de S1 ou 1 cm en arrière du disque L5-S1. Si la ligne passe en avant, cette valeur est positive et quantifie le déséquilibre global du rachis en avant. Et inversement si la ligne passe en arrière, cette valeur est négative et définit un rachis équilibré (figure 1) ;
- – les paramètres lombopelviens : incidence pelvienne, version pelvienne et pente sacrée seront toujours mesurés ; en effet, l’importance de la lordose lombaire (L1-L5) est représentée à 80 % par l’inclinaison sacrée et l’incidence pelvienne chez le sujet âgé [19] et deux tiers de la lordose lombaire se situent au-dessous de L4 ;
- – la cyphose thoracique mesurée entre T3 et T12 ou L1.
- • Nous pourrons observer :
- – un rachis équilibré avec une verticale de C7 qui tombe derrière le disque L5-S1 malgré une perte de lordose L1-L5 ;
- – un rachis déséquilibré avec une ligne de C7 qui passe en avant du sacrum, soit avec une cyphose thoracolombaire avec lordose lombosacrée et dos plat (compensation possible), soit avec une cyphose thoracique se prolongeant en lombaire avec un mauvais contrôle postural.
- • Il peut exister une grande cyphose totale jusqu’en lombosacré avec rétroversion pelvienne, la flexion des genoux permettant temporairement de retrouver l’équilibre ; dans ce cas, un patient avec une grande incidence pourra assumer plus longtemps une compensation à ce déséquilibre (figure 2).
- • L’évaluation de l’incidence sera un facteur déterminant pour la stratégie chirurgicale ; en effet, une incidence élevée (supérieure à 70°) nécessitera de rétablir une importante lordose pour retrouver l’équilibre sagittal [figure 3].
- – la verticale du centre de C7 doit couper le centre du sacrum : ceci permettra de quantifier en centimètres le déséquilibre frontal droit ou gauche ;