8: Acrosyndromes Vasculaires

Chapitre 8 Acrosyndromes Vasculaires



Le Phénomène de Raynaud





Historique


Le 25 février 1862, Maurice Raynaud soutient sa thèse de doctorat en Médecine intitulée « De l’asphyxie locale et de la gangrène symétrique des extrémités ». À l’occasion de ce travail, l’auteur introduit dans sa réflexion et pour la première fois le concept de vasomotricité : « l’ischémie ne peut s’expliquer que par un spasme des vaisseaux capillaires, n’est-il pas plus simple d’admettre que la gangrène peut survenir primitivement, causée par la persistance du spasme capillaire qui a occasionné au début l’état exsangue des extrémités ! … L’asphyxie n’est qu’un stade plus avancé de la syncope ». En 1874, Maurice Raynaud fait le lien entre la phase syncopale et la complication nécrotique en affirmant que l’asphyxie et la gangrène sont deux degrés d’une seule et même maladie. La notion de vasospasme était née, mais les patients de la thèse de Maurice Raynaud ayant presque tous une gangrène, le lien de cause a effet dans ce travail est faux. C’est à un anglais, J. Hutchinson, que l’on doit, en 1893 le terme de « phénomène de Raynaud », constatant que l’acrosyndrome correspondait à plusieurs entités étiologiques différentes. Il suggérait notamment « de ne pas se hâter à invoquer l’influence de la moelle ou du cerveau car le froid peut agir directement ».


En 1932, Allen et Brown [1] rédigent les critères diagnostiques cliniques permettant d’individualiser dans le vaste cadre du phénomène de Raynaud, les phénomènes ischémiques liés à un mécanisme vasomoteur directement et exclusivement en rapport avec une hyperréaction vasomotrice au froid, des artériopathies distales oblitérantes. Ces six critères nécessaires et suffisants sont :








Deux ans plus tard, en 1934, Léo Langeron propose le terme de syndrome de Raynaud pour définir les seuls acrosyndromes admettant une étiologie particulière. Depuis cette date, la terminologie est restée inchangée : le terme de phénomène de Raynaud est le symptôme pour tous les acrosyndromes paroxystiques ischémiques digitaux, spontanément réversibles, favorisés par le froid, quel qu’en soit le mécanisme étiopathogénique. Le terme de maladie de Raynaud s’applique aux seuls acrosyndromes primitifs et le terme de syndrome de Raynaud aux acrosyndromes dont le mécanisme étiologique a pu être individualisé (acrosyndromes secondaires). À partir de 1976, la capillaroscopie s’impose comme un outil diagnostique très performant pour individualiser les formes syndromiques [1-2-3]. Afin d’identifier les formes primitives, un septième critère est donc ajouté à ceux d’Allen et Brown : la normalité de la capillaroscopie périunguéale qui confirme l’absence de microangiopathie organique. Il y a maintenant consensus international de grade A : la capillaroscopie détecte les sclérodermies débutantes mieux et avant la clinique seule, la capillaroscopie est donc indispensable au bilan [5].


Si le phénomène de Raynaud reste un acrosyndrome de diagnostic clinique relativement facile, l’enquête étiologique reste une étape fondamentale dont le bilan minimal est loin d’être consensuel. L’examen clinique en reste la pierre angulaire.




Physiopathologie


Le seul constat clinique permet de rapporter la physiopathologie du phénomène de Raynaud à un dysfonctionnement vasomoteur de la régulation thermique. Son mode de survenue au froid et son amélioration à la chaleur en sont les témoins. C’est donc au niveau même du dysfonctionnement de la thermorégulation que l’on doit rechercher l’explication physiopathologique de cet acrosyndrome vasculaire.


Le maintien chez l’homéotherme de la température à 37 °C impose une production de chaleur appelée thermogenèse.


Celle-ci dépend du métabolisme basal (40 à 45 W/m2), de l’activité musculaire et de la thermogenèse métabolique provenant du métabolisme oxydatif mitochondrial. Un deuxième impact de la thermorégulation est le contrôle de la déperdition thermique, que ce soit par convection, par radiation ou par évaporation. C’est à ce niveau que la vasoconstriction, dans des zones privilégiées riches en shunts artérioveineux, intervient. Les localisations préférentielles en sont les extrémités (mains et pieds) et le visage. C’est sans doute au niveau de la diminution de la thermogenèse qu’il faut situer les phénomènes de Raynaud observés au cours des amaigrissements rapides et importants, la diminution du panicule adipeux participant également pour une grande part à une limitation des déperditions thermiques. C’est par contre au niveau d’une hyperréactivité sympathique centrale qu’il faut situer la grande majorité des mécanismes physiopathologiques du phénomène de Raynaud. La vasoconstriction est la résultante de deux forces opposées, l’une centripète, dépendante du tonus vasomoteur, l’autre centrifuge dite de contrainte, dépendante du débit sanguin et des conditions hémorrhéologiques sanguines locales. Les facteurs conditionnant l’état vasomoteur basal sont multiples et complexes, neurospastiques, endothéliaux, humoraux, plaquettaires et génétiques.


Trois types de dysrégulations vasomotrices peuvent être discutés dans la physiopathologie d’un phénomène de Raynaud, le premier directement imputable au nerf sympathique, le second impliquant une hyperréactivité vasomotrice locale, et une troisième à médiation essentiellement humorale.


Le nerf sympathique, en tant qu’agent modulateur de la vasomotricité, a été le premier incriminé via l’action de la noradrénaline sur les récepteurs alpha-2 vasculaires. L’inefficacité à long terme de la sympathectomie comme alternative thérapeutique du phénomène de Raynaud prouve que ce seul contrôle neurologique est loin d’expliquer à lui seul la physiopathologie du phénomène de Raynaud.


L’hypothèse d’une hyperréactivité sympathique locale a longtemps été débattue s’appuyant sur la démonstration que le froid augmentait la réponse des récepteurs alpha2 et non pas celle des récepteurs alpha 1 [9]. Inversement, cette hyperréactivité disparaît au réchauffement. Edward a par ailleurs rapporté une augmentation des récepteurs alpha-2 sur les plaquettes de patients atteints de phénomène de Raynaud [10]. Au-delà d’une simple sensibilisation sympathique locale, il a été plus récemment mis en évidence le rôle prépondérant de l’endothélium dans la régulation de la vasomotricité locale C’est de l’équilibre subtil entre l’action vasoconstrictrice de l’endothéline 1 agissant sur les récepteurs ET1 d’une part et celle vasodilatatrice de l’EDRF, à savoir le monoxyde d’azote, et de la prostacycline que dépend l’état hémodynamique distal de vasoconstriction ou de vasodilatation. Cet état vasomoteur s’opère avant tout sur les shunts artérioveineux, éléments cibles de la régulation hémodynamique et vasomotrice. Les études concernant le taux des récepteurs ET1 au cours des phénomènes de Raynaud primitifs et secondaires sont nombreuses et malheureusement souvent contradictoires. Au cours de la maladie de Raynaud, Zamora observe une augmentation du taux sérique de l’endothéline [11]. D’autres auteurs observent a contrario qu’après stimulation au froid, le taux d’ET1 est plutôt plus faible chez les patients atteints de maladie de raynaud que chez des volontaires sains [12].


Le troisième type de dysrégulation vasomotrice possible est d’ordre humoral. L’angiotensine II et la sérotonine sont deux puissants vasoconstricteurs, à condition, pour la sérotonine, qu’elle agisse sur endothélium lésé exposant son récepteur 5HT2. L’adrénaline et l’histamine ont a contrario une action vasodilatatrice de même que la sérotonine, lorsqu’elle a pour cible un endothélium sain, en favorisant la sécrétion de NO. Le rôle local des plaquettes, notamment en cas d’effraction endothéliale, est à prendre en considération par la sécrétion de thromboxane A2 dont les actions vasoconstrictrice et proagrégante plaquettaire s’opposent point par point à celles de la prostacycline et de la sérotonine. L’enquête familiale des phénomènes de Raynaud prouve bien que l’ensemble de cet équilibre très subtil est sous la dépendance de gènes. Ce phénomène héréditaire semble très hétérogène, vraisemblablement transmis selon un mode autosomique dominant. Les études en cours ont permis de focaliser la recherche sur quelques locus potentiels mais jusqu’à présent la recherche de mutation est restée négative [13]. Le concept d’une dysrégulation vasomotrice est encore étayé par la notion de maladie spastique au sens large, incluant l’angor de Prinzmetal et la migraine [14,15]. Par ailleurs, il a été constaté au cours de tests de stimulation au froid chez des patients atteints de phénomène de Raynaud, des réactivités vasomotrices pulmonaires [16] et rétiniennes [17].


Si la majorité des phénomènes de Raynaud admet comme mécanisme physiopathologique dominant une majoration du tonus vasomoteur, certains s’expliquent plutôt par une diminution des forces de contrainte liée à un hypodébit par artériopathie oblitérante ou à des anomalies hémorrhéologiques. Il existe donc trois grands cas de figure sur le plan hémodynamique : un spasme exagéré sur une artère avec une pression normale (maladie de Raynaud), un spasme normal sur une artère à pression basse (syndrome du marteau hypothénar) et un spasme exagéré sur une artère à pression basse (maladie de Buerger).


La complexité de l’approche physiopathologique du phénomène de Raynaud explique en partie tout l’intérêt que lui porte le clinicien, cet acrosyndrome s’affichant comme un symptôme révélateur de nombreuses pathologies, de mécanismes physiopathologiques variés, pathologies qu’il convient de diagnostiquer précocement et dont l’enquête devra être abordée de façon très rationnelle et surtout très clinique.


Le diagnostic clinique est basé avant tout sur l’interrogatoire, l’acrosyndrome ayant disparu au moment de la consultation et étant très difficile à reproduire. De ce fait, le diagnostic peut être porté par excès si l’interrogatoire est trop imprécis et basé sur la simple recherche de « doigts blancs et morts lors de l’exposition au froid ». La majorité des patients répondra positivement à cette question non discriminante ainsi formulée. Il convient donc de bien faire apparaître la notion de doigts morts, exsangues, couleur bougie, avec une limite très nette entre la ou les phalanges en phase d’ischémie et les phalanges normales (le recours à une photographie peut parfois aider dans les diagnostics difficiles).


Classiquement, cette phase clinique dite « syncopale » de doigt blanc est suivie, lors de la levée du vasospasme, de deux autres phases évolutives souvent douloureuses, d’abord cyanique puis érythermalgique secondaire.


En fait, ces trois phases ne sont pas obligatoirement observées; la phase de recoloration pouvant survenir de façon progressive sans cyanose ni érythermalgie secondaire.


Afin de faciliter l’étape étiologique, il est important de s’enquérir des modalités de survenue : s’agit-il d’un acrosyndrome exclusivement déclenché par le froid ou le patient décrit-il des déclenchements spontanés voire même l’été. Dans les formes les plus banales et donc primitives, les phases syncopales touchent de façon symétrique les doigts médians, les plus longs. Dans les formes plus sévères, le cinquième doigt voire le pouce peuvent être également touchés, parfois avec une fréquence tout aussi importante. Une localisation plus inhabituelle touchant les deux derniers doigts de la main ou les premiers doit faire évoquer en premier lieu, comme nous le reverrons, une étiologie focale vasculaire.


Si le phénomène de Raynaud touche préférentiellement les mains, il peut également toucher toutes les extrémités, notamment les pieds, mais aussi plus rarement le nez ou les oreilles voire même la langue.


Le principal diagnostic différentiel du phénomène de Raynaud est facile : il s’agit de l’ischémie digitale, facilement reconnue par son caractère non réversible spontanément ou après réchauffement, et dans ce cas la pression systolique digitale est basse. L’acrocyanose est un acrosyndrome permanent : les extrémités sont froides et cyaniques. Cependant l’acrocyanose s’associe très fréquemment à un phénomène de Raynaud. La survenue sur fond d’acrocyanose permanente d’une phase paroxystique cyanique, spontanément résolutive, doit être considérée comme un phénomène de Raynaud même s’il n’y a pas à proprement parler de phase syncopale blanche. Nous le verrons, cette présentation est assez évocatrice d’une maladie sclérodermique.


L’acrorighose est également un acrosyndrome permanent où les extrémités sont froides, pâles, mais sans le caractère exsangue propre au phénomène de Raynaud. Il s’agit d’un acrosyndrome banal, particulièrement observé chez la femme, et qui ne mérite aucun bilan étiologique.


Le diagnostic de phénomène de Raynaud étant posé, l’enquête étiologique est essentielle : le clinicien doit s’efforcer d’en trouver la cause en opposant bien, dans un premier temps les formes primitives dites « maladies de Raynaud » traduisant une simple dysrégulation de la thermorégulation d’origine familiale au « syndrome de Raynaud » en relation avec une pathologie sous-jacente.


Pour porter le diagnostic de maladie de Raynaud, il convient de vérifier que l’acrosyndrome répond bien aux critères d’Allen et Brown et que l’examen clinique notamment cutané et vasculaire est strictement normal. Pour de nombreuses équipes, la confirmation n’est portée qu’après un examen capillaroscopique, permettant avant tout d’éliminer une sclérodermie par la recherche de mégacapillaires et d’une réduction du nombre d’anses capillaires. L’interrogatoire a une place prépondérante pour répondre à cette discrimination essentielle entre phénomène de Raynaud primitif et secondaire. Il doit rechercher un certain nombre de caractéristiques sémiologiques dont certaines sont spécifiques du diagnostic de maladie de Raynaud et d’autres, associés, rendent cette hypothèse très probable.


Dans la mesure où la maladie de Raynaud correspond à une hypersensibilité neurovasculaire au froid, génétiquement déterminée, il faut interroger le patient sur ses antécédents familiaux non seulement de phénomène de Raynaud mais aussi de terrain migraineux personnel ou familial souvent associé. Le début précoce dans les trois premières décades de la vie est habituel, encore que certaines formes à révélation plus tardive sont classiques notamment en cas de modification environnementale et d’exposition au froid. Après deux ans d’évolution, l’acrosyndrome est pratiquement toujours bilatéral. L’analyse topographique digitale est essentielle [18]. Les doigts les plus courts, dotés d’une vascularisation musculaire privilégiée, thénarienne et hypothénarienne, sont le plus souvent protégés. C’est dire que l’acrosyndrome touche en priorité les trois doigts médians des deux mains. Un indice de sévérité peut être constitué par la fréquence quotidienne des phases syncopales et leur extension à l’ensemble des doigts de la main, surtout les quatre derniers, plus rarement le pouce (5 % des cas environ). L’atteinte fréquente du pouce doit être considérée comme un facteur écartant a priori le diagnostic de maladie de Raynaud et doit faire rechercher de façon particulièrement minutieuse l’existence d’une maladie sclérodermique débutante sous-jacente. L’amélioration de l’acrosyndrome l’été et l’absence d’aggravation en dehors de facteurs environnementaux évidents (prises médicamenteuses, changement de mode de vie, exposition professionnelle au froid), achèvent de caractériser au plan sémiologique la sémiologie habituelle de maladie de Raynaud.


La recherche d’un facteur étiologique ou sensibilisant sousjacent doit être systématique, même en présence d’un phénomène de Raynaud a priori banal. Les hypothèses étiologiques à évoquer sont multiples (tableau 8-1) mais de diagnostic plus ou moins facile et plus ou moins fréquentes.


tableau 8-1 Diagnostic étiologique face à un phénomène De raynaud.































  PHYSIOPATHOLOGIE ÉTIOLOGIE
Maladies de système Spasme et hypodébit Sclérodermie
Dermatomyosite
Lupus
Connectivite mixte
Gougerot Sjögren
Artériopathies Hypodébit Athérome
Traumatismes (maladie du marteau hypothénar
Emboliques
Artérites
Inflammatoire
Causes toxiques Spasme et hypodébit Tabac
Buerger
Cannabis
Médicaments
ß-bloquants
Cyclosporine
Ergot de seigle
Interféron α
Clonidine
Bléomycine
Causes professionnelles   Maladie des vibrations
Maladie du marteau hypothénar
Exposition à la silice (sclérodermie)
Causes endocriniennes   Rarement révélatrices
Hypothyroïdie acromégalie
Causes générales   Amaigrissement (anorexie mentale, paranéoplasique)

La première crainte est bien sûr celle d’une maladie sclérodermique sous-jacente qui reste le diagnostic le plus difficile (une fois sur 300 environ en médecine générale), le phénomène de Raynaud de la maladie sclérodermique débutante pouvant prendre l’aspect d’une authentique maladie de Raynaud, d’où l’importance de la capillaroscopie précoce. Les autres diagnostics étiologiques sont plus faciles, car orientés par le constat de signes cliniques spécifiques associés qu’il s’agisse d’une oblité-ration artérielle ou d’une pathologie plus générale comme l’hypothyroïdie (maladie de Hashimoto assez souvent).


C’est dire que la recherche d’une maladie sclérodermique doit être extrêmement minutieuse. Le signe le plus précoce à rechercher est la télangiectasie périunguéale, dilatation des anses capillaires témoin de la microangiopathie sclérodermique. Elle correspond au mégacapillaire observé en examen capillaroscopique. Afin de mieux déceler ces anomalies parfois discrètes au début, il est conseillé d’huiler le rebord périunguéal pour permettre une meilleure visibilité des anses et de s’aider au minimum soit d’une loupe voire d’un ophtalmoscope (capillaroscopie clinique de débrouillage).


Une télangiectasie isolée n’a pas de valeur pathologique, leur multiplicité étant un élément clé du diagnostic. Les télangiectasies peuvent également être recherchées en pleine peau ou au niveau de la muqueuse labiale. Dans les formes plus évoluées, le clinicien aura vite repéré une sclérodactylie, une sclérose cutanée, des plis radiés péribuccaux, une sclérose du frein de la langue voire un aspect totalement lissé du visage. Le délai moyen entre le premier phénomène de Raynaud et le diagnostic évident cliniquement de sclérodermie est de 10 ans, d’où l’importance de la recherche précoce de la microangiopathie (capillaroscopie) et d’une anomalie séroimmunologique (autoanticorps). La découverte d’atteintes viscérales associées viendra conforter le diagnostic de maladie sclérodermique systémique, tel un syndrome sec (test de Shirmer), un reflux gastro-œsophagien (radiomanométrie œsophagienne), une dyspnée révélatrice d’une atteinte interstitielle avec des râles fins « Velcro » [épreuves fonctionnelles respiratoires avec étude de la DLCO (diffusion libre du monoxyde de carbone) et scanner en coupes fines].


Selon la positivité des anticorps antinucléaires (anticentromères ou anti-SCL70), on s’orientera soit vers une sclérodermie systémique limitée, à expression plutôt acrale (mais avec un risque d’HTAP) soit une sclérodermie plus diffuse avec atteintes viscérales en particulier pulmonaires. Le pronostic de la maladie sclérodermique est à la fois fonctionnel et vital et nombreux sont ceux qui pensent qu’un traitement précoce inhibiteur calcique en diminue l’évolutivité. Sur le plan fonctionnel, même dans les formes banales, un handicap sévère est à redouter du fait de la sclérodactylie avec une tendance au flexum irréductible de doigts faisant perdre toute fonctionnalité à la main. Les calcinoses sous-cutanées peuvent également perturber le cours évolutif de la maladie car très douloureuses et sans possibilités thérapeutiques évidentes. La surveillance régulière de ces patients est importante, notamment la surveillance annuelle échographique à la recherche d’une hypertension artérielle pulmonaire, actuellement accessible à un traitement. L’évolution de la maladie sclérodermique est très souvent également émaillée par les complications trophiques à type de nécroses digitales.


L’hypothèse d’une maladie sclérodermique étant écartée, l’examen clinique du patient doit rechercher systématiquement toutes les causes classiques de phénomène de Raynaud. La maladie de Raynaud et les syndromes canalaires (syndrome de la traversée thoracobrachiale dans sa forme neurologique et syndrome du canal carpien), sont des pathologies très fréquentes, expliquant des associations fortuites. Toutefois, en cas de maladie de Raynaud, la coexistence d’un syndrome canalaire peut influencer la symptomatologie. En cas d’anomalies anatomiques (anévrisme sous-clavier avec thrombus), il peut exister une authentique artériopathie digitale de mécanisme embolique expliquant un phénomène de Raynaud sévère.


L’étape vasculaire du bilan étiologique est importante, à la recherche d’un hypodébit dans le territoire correspondant au phénomène de Raynaud (deux derniers doigts pour une thrombose de l’artère cubitale, trois premiers doigts pour l’atteinte radiale). Cette étape s’appuie ici, avant tout, sur le test d’Allen et la prise de la tension artérielle aux deux bras. Les diagnostics étiologiques évoqués sont ceux de toutes les artériopathies oblitérantes, athéromateuses, emboliques, inflammatoires ou professionnelles.


C’est dire que cette enquête professionnelle doit être systématique, avec deux objectifs, soit de rapporter l’acrosyndrome à une pathologie indemnisable avec possibilité de reclassement, soit d’identifier au niveau du poste de travail des manipulations, postures ou une exposition au froid pouvant contribuer à la sévérité d’un phénomène de Raynaud.


Le cadre des syndromes de Raynaud professionnels ou occupationnels est précis et défini par le tableau 69 du régime général des maladies professionnelles, et 29 du régime agricole. Il concerne le recours régulier aux engins vibrants ou percutants avec une durée légale d’exposition (tronçonneuse, marteau-piqueur, perforeuse) et le syndrome du marteau hypothénar.


La maladie des vibrations est la conséquence de l’utilisation répétée transmise par des machines-outils tenues à la main percutante (marteau-piqueur), roto-percutantes ou rotatives; il peut s’agir aussi de machines alternatives telles que les ponceuses ou les scies sauteuses ou les outils tenus à la main pour des travaux de burinage, de façonnage de meulage ou de polissage.


Le recours à ce type d’outil peut entraîner des affections ostéoarticulaires telles l’ostéonécrose du scaphoïde ou du semi-lunaire et des manifestations qualifiées d’angioneurotiques, prédominant à l’index et au médius, entraînant un phénomène de Raynaud par hypervasomotricité. L’association à un tabagisme est habituelle.


Le syndrome du marteau hypothénar concerne des patients exposés à l’utilisation du talon de la main en percussion directe itérative sur un plan fixe ou au choc transmis à l’éminence hypothénar par un outil percuté ou percutant. Il s’agit la plupart du temps d’ouvriers du bâtiment notamment menuisiers (mais parfois aussi à l’occasion de certaines activités sportives, karaté ou volley-ball). Ces microtraumatismes sont à l’origine d’un anévrisme de la partie distale de l’artère cubitale qui peut soit emboliser au niveau des collatérales des doigts correspondants (deux derniers doigts) ou se thromboser. Comme nous l’avons déjà précisé, le phénomène de Raynaud touche alors les deux derniers doigts de la main dominante et le diagnostic s’appuie sur le test d’Allen qui confirme l’absence de revascularisation des deux derniers doigts lors de la décompression de l’artère cubitale. L’écho-Doppler peut aider à la visualisation de l’anévrisme, mais la reconnaissance en maladie professionnelle impose un diagnostic de certitude par un examen angiographique avec injection de produit iodé ou par ARM ou angio-TDM.


L’exposition aux solvants semble de plus en plus rendue responsable d’une maladie sclérodermique (tout comme l’exposition à la silice), mais ne figure toujours pas au tableau des maladies professionnelles.


Même si l’exposition répétée au froid n’est pas reconnue comme une maladie professionnelle stricto sensu, elle est susceptible d’aggraver un phénomène de Raynaud et mérite une intervention prudente auprès du médecin du travail afin de juger de la possibilité d’adaptation ou de changement de poste de travail. Cette attitude est bien évidemment à adopter avec prudence et en accord avec le patient, celui-ci ayant la plupart du temps la crainte légitime d’être licencié. Dans ce contexte, un certificat médical peut être lourd de conséquences néfastes pour le patient.


La recherche d’une étiologie toxique ou médicamenteuse est une étape incontournable de l’enquête étiologique. L’implication d’une prise médicamenteuse dans la physiopathologie du phénomène de Raynaud doit s’appuyer sur son imputabilité intrinsèque et extrinsèque. C’est dire qu’il convient d’attacher une particulière importance à la concordance dans le temps, entre l’apparition ou l’aggravation d’un phénomène de Raynaud et la prise médicamenteuse incriminée ou la modification de sa posologie.


Outre l’intoxication tabagique classique à évaluer avec beaucoup de rigueur, il ne faut pas oublier de questionner le patient sur la prise de cannabis, de cocaïne, d’autres produits stupéfiants souvent sympathicomimétiques, ainsi que sur différentes ordonnances (collyres bêtabloquants, gouttes nasales).


Si le rôle sensibilisant vasoconstricteur du tabac doit être systématiquement pris en compte quel que soit le diagnostic étiologique du phénomène de Raynaud porté par ailleurs, la maladie de Leo Buerger doit être évoquée chez un sujet tabagique.


La maladie de Buerger est une entité de diagnostic parfois difficile, simple dans sa forme complète, beaucoup plus difficile dans sa forme révélée par un simple phénomène de Raynaud.


Il s’agit de sujets d’âge jeune inférieur à 45 ans, reconnaissant une consommation tabagique majeure avec une dépendance à la nicotine très particulière, et consommant souvent du cannabis. Fortement évocatrices sont les thromboses veineuses superficielles précédant ou accompagnant l’acrosyndrome ou les manifestations ischémiques distales, souvent spontanément résolutives avec l’arrêt du tabac.


La liste des médicaments habituellement incriminés est rappelée au niveau du tableau 8-1.


L’examen clinique à visée étiologique d’un phénomène de Raynaud ne saurait s’achever sans rechercher des signes évidents de maladie générale (amaigrissement, atteinte de l’état général), des signes cliniques d’hypothyroïdie ou des manifestations cliniques évocatrices de maladie de système type maladie lupique, dermatomyosites dont le phénomène de Raynaud est, contrairement à la sclérodermie rarement isolé et révélateur.


Les autres diagnostics étiologiques rapportés sur le tableau 8-1 sont de moindre importance car beaucoup plus rarement observés et très rarement isolés, le phénomène de Raynaud n’apparaissant pratiquement jamais comme l’élément révélateur prédominant, qu’il s’agisse notamment des artériopathies inflammatoires, maladie de Horton, maladie de Takayasu, ou des étiologies hémorrhéologiques exceptionnelles. En effet, les étiologies hémorrhéologiques entraînent plus souvent une acrocyanose qu’un phénomène de Raynaud. La cryoglobulinémie, étiologie classique, s’accompagne plus souvent par sa composante hémorrhéologique d’une acrocyanose que d’un vrai phénomène de Raynaud et se révèle avant tout par un purpura pétéchial des membres inférieurs, d’une glomérulopathie, ou d’un syndrome polyarthralgique.


Quels examens complémentaires réaliser face à un phénomène de Raynaud ? Lorsque l’examen clinique a permis d’évoquer l’étiologie précise, les examens complémentaires ciblés s’imposent d’eux-mêmes. La situation est beaucoup plus difficile et non consensuelle lorsque l’on se trouve face à un phénomène de Raynaud qui échappe aux critères d’Allen et Brown et sans aucune hypothèse étiologique évidente à l’issue de l’examen clinique.


Le bilan complémentaire paraclinique d’un phénomène de Raynaud comporte deux volets : une exploration de la microcirculation d’une part et un bilan essentiellement biologique d’autre part.


L’exploration de la microcirculation s’est simplifiée au fil des années et ne comporte guère plus – dans la majorité des équipes – qu’un examen capillaroscopique, car sa performance dépasse de loin tous les autres examens. La capillaroscopie peut permettre de prendre la pression systolique digitale. Pour conforter le diagnostic de maladie de Raynaud, cet examen capillaroscopique ne doit mettre en évidence ni dystrophie capillaire majeure ni de réduction du nombre d’anses capillaires au lit unguéal. Il a surtout pour intérêt d’orienter ou de confirmer le diagnostic de maladie sclérodermique en authentifiant des mégacapillaires et des plages avasculaires.


Les autres explorations microcirculatoires visant à explorer une éventuelle artériopathie digitale, ou la sévérité du phénomène de Raynaud en quantifiant l’importance du vasospasme au froid sont loin d’être consensuelles. Aucune méthode n’a réussi à s’imposer en dehors des équipes qui en ont acquis l’expérience. Certains restent fidèles au simple Doppler, d’autres à la pléthysmographie (jauge annulaire ou photopléthysmographie) ou au laser Doppler.


En l’absence de toute orientation étiologique, la stratégie minimaliste en terme d’examen complémentaire pourrait se réduire à un examen capillaroscopique et à une recherche de facteurs antinucléaires. La positivité des anticorps antinoyau, même sans spécificité, doit conduire à la prudence et au suivi clinique et sérologique régulier du patient.


La prise en charge thérapeutique commence bien sûr par le traitement de la cause lorsqu’elle a été diagnostiquée. De ce fait elle commence par la suppression d’une intoxication tabagique et si elle est possible, la suppression ou le remplacement d’une thérapeutique vasoconstrictrice au profit d’une thérapeutique plutôt vasodilatatrice. C’est à ce stade aussi qu’une enquête de poste de travail peut s’avérer très utile, voire indispensable. La coexistence migraine et phénomène de Raynaud nécessite un traitement coordonné des deux affections.


La protection contre le froid est une étape qu’il ne faut pas négliger et qui peut prendre beaucoup de temps car elle est souvent mal comprise par les patients. Cette protection ne concerne pas simplement les mains par le recours à des gants efficaces mais aussi de l’ensemble du corps et notamment du cou et du visage. Il existe pour les formes sévères des « petits moyens » type chaufferette dont l’utilisation doit être encouragée.


Rappelons que le maintien d’un poids optimal stable est le seul garant d’une thermogenèse correcte. C’est un facteur aggravant très fréquent chez de jeunes femmes qui souhaitent un poids inférieur à leur poids idéal, même sans anorexie mentale.


Le recours aux traitements médicamenteux ne doit pas être systématique mais réservé exclusivement aux phénomènes de Raynaud invalidants. Les inhibiteurs calciques ont l’AMM dans cette indication et notamment la nifédipine (Adalate 10 mg). La prostacycline n’a d’efficacité qu’utilisée en cure intraveineuse et peut être une bonne alternative thérapeutique pour les phénomènes de Raynaud secondaires sévères.



RÉFÉRENCES



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Érythermalgies



À l’inverse du phénomène de Raynaud (acrosyndrome paroxystique fréquent avec vasoconstriction cutanée volontiers déclenchée par le froid humide), à l’inverse de l’acrocyanose (acrosyndrome permanent fréquent avec vasoconstriction et cyanose cutanées homogènes), l’érythermalgie est un acrosyndrome paroxystique rare déclenché par le chaud avec vasodilatation cutanée déclenchée par le chaud. L’érythermalgie est une hypersensibilité au chaud, touchant préférentiellement les pieds, liée à une vasodilatation microcirculatoire des extrémités [1]. Cet acrosyndrome est rare. Les seules études épidémiologiques disponibles au plan mondial évaluent son incidence entre 0,25 et 0,33 pour 100 000 habitants en Norvège en 1998, et entre 1 et 2 pour 100 000 aux États-Unis en 2009 [2]. Le registre national des érythermalgies, proposé par la société française de microcirculation en 2001 n’avait colligé que 34 observations en un an [3]. Le diagnostic d’érythermalgie est clinique. La classification des érythermalgies (EM) est l’objet de controverses : soit classification en trois groupes étiologiques, soit classification en deux groupes, française : EM primitive, ou EM secondaire à un syndrome myéloprolifératif, un lupus systémique ou à la prise de médicaments vasodilatateurs [1]. Le traitement est simple en cas d’EM secondaire, difficile dans les EM primitives.




Présentation clinique (illustration)


Durant l’accès, les extrémités sont rouges, chaudes et très douloureuses. Les pieds sont préférentiellement atteints (près de 90 % des cas, fig. 8-1) [4]. Le diagnostic d’une érythermalgie est clinique, basé sur la notion d’accès paroxystiques de douleurs des extrémités, pendant lesquels celles-ci sont rouges et chaudes, déclenchés par l’exposition au chaud ou l’exercice, et calmés par le froid et le repos. La durée de l’accès est variable, de quelques minutes à plusieurs jours. L’intensité des douleurs est forte. Les douleurs sont décrites en premier lieu comme des brûlures, mais aussi des broiements et des élancements. La présentation clinique la plus stéréotypée est celle de brûlures des pieds survenant au coucher, nécessitant de dormir les pieds découverts, ou de rechercher le contact avec un carrelage froid, ou même d’immerger les pieds dans une bassine remplie d’eau glacée selon l’intensité des douleurs.



Il n’y a pas de test de provocation reconnu. Dans l’étude de Davies, chez 67 patients ayant une EM primitive étudiés en laboratoire, une crise n’a pu être déclenchée que chez 13 patients (19 %) [5]. Chez ces patients les mesures microcirculatoires objectivaient la vasodilatation cutanée des orteils : augmentation de la température cutanée de 7,8 °C, multiplication par 10 du flux cutané mesuré en laser-Doppler. Il s’agit donc bien d’épisodes paroxystiques de douleurs et vasodilatation des extrémités.


Des critères diagnostiques ont été proposés par les écoles françaises [1,6] de façon à retenir ce diagnostic exclusivement dans les formes où la douleur s’accompagne d’une vasodilatation cutanée évidente, c’est-à-dire lorsque les douleurs des extrémités s’accompagnent d’une rougeur et d’une augmentation de la température cutanée. Ces critères diagnostiques (tableau 8-2) permettent d’éliminer toutes les pathologies douloureuses des extrémités dont le mécanisme ne s’accompagne pas de vasodilatation.


Tableau 8-2 Critères diagnostiques des érythermalgies : érythermalgie si tous les critères majeurs et deux critères mineurs.















CRITÈRES MAJEURS CRITÈRES MINEURS
Évolution par crises Déclenchement par la chaleur et/ou l’exercice
rougeur pendant la crise Calmées par le froid et/ou le repos
Douleurs très intenses Chaleur pendant la crise Sensibilité à l’aspirine

Une des difficultés vient de l’absence de consensus sur les critères diagnostiques proposés dans la littérature anglosaxonne. Ainsi Davies retient 3 critères diagnostiques : rougeur, chaleur et brûlure des extrémités [4], tandis que Mork en 2000, dont l’expérience en Norvège est reconnue [7], propose de retenir le diagnostic d’EM uniquement si les 5 critères suivants sont présents :







Une difficulté supplémentaire est que les patients sont exceptionnellement examinés lors d’une crise, et que le diagnostic ne peut être qu’un diagnostic d’interrogatoire. Or, l’expérience montre que parfois les patients sont incapables de préciser si les extrémités sont objectivement chaudes durant la crise. Il faut alors les revoir, en leur demandant de tenir un cahier précisant la sémiologie des crises.



Classification et physiopathologie des érythermalgies


Les écoles françaises distinguent deux types d’érythermalgies : les primitives et les secondaires, dont la présentation clinique n’est pas identique [1,6].



FORMES PRIMITIVES


Ce sont les plus fréquentes (60 % dans le registre).


Elles débutent tôt, sont bilatérales, symétriques, volontiers intenses.


Parmi les formes primitives, les formes familiales ont fait l’objet d’avancées spectaculaires tant sur le plan physiopathologique que thérapeutique. Il était connu qu’il existait des formes familiales autosomiques dominantes, sévères, débutant dans l’enfance. Drenth en 2001 a montré que l’anomalie génétique se situait sur le chromosome 2q 31–32, après avoir examiné 47 sujets, dont 28 malades provenant de 5 familles qui avaient fait l’objet de publications internationales (États- Unis, Canada, Pays-Bas, France) [8]. En 2004, Yang, à partir d’une famille chinoise comprenant 3 générations d’érythermalgie, a confirmé l’anomalie sur le chromosome 2q et a identifié une mutation sur un gène des canaux sodiques, précisément sur le gène SCN9A [9]. Ce gène code pour la sous-unité alpha de canaux sodiques (Na1.7) présente dans les nerfs périphériques, les muscles et le cœur. Cette sous-unité alpha est exprimée dans les ganglions sensitifs sympathiques et dans les neurones des fibres nociceptives. Cette donnée a été ultérieurement retrouvée chez 6 familles sur 8 répertoriées, et l’anomalie est également possible même si les parents ne sont pas atteints (pénétrance variable ou mosaïcisme chez les parents). Ce canal sodique muté ne fonctionne pas normalement. Il est hyperpolarisé lorsqu’il est activé, notamment en réponse à des dépolarisations lentes. La stimulation des canaux sodiques présents dans les neurones nocicepteurs se fait ainsi pour de faibles stimulus [10]. Cette hyperactivation explique les douleurs et les troubles vasomoteurs. L’érythermalgie primitive familiale fait donc partie des canalopathies sodiques et son traitement est basé sur les médicaments agissant sur les canaux sodiques.


Les EM primitives non familiales sont plus fréquentes. Les pistes physiopathologies sont diverses. La plus aboutie, et qui rejoindrait la physiopathologie des formes familiales est celle de l’existence d’une neuropathie des petites fibres. Ainsi chez 32 patients, dont 31 formes primitives étudiées à la Mayo Clinic [11], il a été retrouvé une neuropathie des petites fibres chez 69 % des patients et des troubles de la sudation à type d’hypohidrose, voire d’anhidrose chez 88 % des patients. Ces anomalies dysautonomiques étaient constatées essentiellement au niveau de la peau. Une dysautonomie cardiaque était montrée chez seulement 10 % des patients et une neuropathie des grosses fibres, dépistée par l’électromyogramme standard, seulement chez 22 % des malades. L’hypothèse des auteurs est que l’EM est un mécanisme compensateur pour perdre de la chaleur chez des patients ayant une hypohidrose ou une anhidrose secondaire à une maladie des petites fibres. Les mains et les pieds ayant une activité vasomotrice riche seraient principalement concernés par cette réaction excessive.


Cette hypothèse est confortée par les résultats de biopsies cutanées effectuées chez 29 patients souffrant d’EM primitive, dont 16 ont pu avoir une estimation de la densité des fibres nerveuses cutanées. Chez 13 patients (81 %), une diminution des fibres nerveuses épidermiques était constatée [12]. Ainsi, au moins 80 % des EM primitives seraient liées à une neuropathie des petites fibres.


L’hypothèse vasculaire est défendue par l’école norvégienne. Elle s’appuie sur la constatation clinique parfois observée d’une association chez ces malades à une hypersensibilité au froid, soit extrémités froides, soit phénomène de Raynaud. Dans une enquête réalisée auprès des membres de l’association des érythromélalgies, cette association était retrouvée chez 18 patients sur 41 (43 %) [13]. Mork et coll [14] ont montré que chez des patients en crise, le flux microcirculatoire plantaire (zone riche en anastomoses artérioveineuses) était significativement plus important que chez des patients non en crises et des contrôles, lors d’une épreuve de chauffage de l’ensemble du corps. Cette augmentation excessive du flux microcirculatoire n’était pas constatée sur le dos du pied, zone pauvre en anastomoses artérioveineuses. L’EM serait liée à une maldistribution du sang microcirculatoire cutané avec perfusion excessive des shunts artérioveineux, expliquant la chaleur et la rougeur, et hypoxie relative des capillaires nutritifs expliquant les douleurs [14]. L’origine de cette maldistribution est inconnue : soit un mécanisme neurologique, qui pourrait rejoindre l’hypothèse neurologique, soit une anomalie locale, par exemple un vasospasme en aval des shunts responsable d’une ouverture excessive des shunts, ce qui expliquerait les formes associées à une hypersensibilité au froid [14]. Il est probable qu’il y ait plusieurs types d’EM et plusieurs mécanismes physiopathologiques possibles, ce qui explique les difficultés thérapeutiques.



FORMES SECONDAIRES


Trois étiologies sont incontestablement responsables d’érythermalgies car leur traitement fait disparaître l’érythermalgie.


Les syndromes myéloprolifératifs, polyglobulie ou surtout thrombocytémie essentielle sont l’étiologie la plus fréquente. L’érythermalgie serait particulièrement fréquente dans ces pathologies, lorsqu’elle est systématiquement recherchée (60 % pour Michiels) [15]. L’intensité est moindre que dans les formes primitives (ce qui explique qu’il faille les rechercher par l’interrogatoire), elles peuvent être unilatérales. Elles s’accompagnent volontiers d’autres signes microcirculatoires secondaires au syndrome myéloprolifératif : orteil bleu, livedo du bord externe du pied. Les chiffres de plaquettes ne sont pas forcément très élevés et Michiels conseille de poursuivre les investigations à partir de 350 000 plaquettes/mm3[15]. La physiopathologie fait intervenir des prostaglandines vasodilatatrices libérées par les plaquettes anormales ou une diminution du flux dans les capillaires nutritifs créée par l’hyperviscosité sanguine, ce qui ouvrirait les shunts artérioveineux [14].


L’EM peut précéder le syndrome myéloprolifératif : 1,3 % de syndromes myéloprolifératifs apparus dans le suivi des 168 patients de la Mayo Clinic [4], ce qui justifie une surveillance hématologique de ces patients.


La prise d’un médicament vasodilatateur peut déclencher une EM. Les observations rapportées concernent essentiellement les inhibiteurs calciques et parmi ceux-ci les dihydropyridines (nifédipine et nicardipine) et le vérapamil, ainsi que la bromocriptine (Parlodel). Les inhibiteurs calciques (félodipine et nifédipine) concernaient 2 patients sur 37 EM secondaires de la série de Kalgaard [16]. Enfin, deux observations d’EM survenant rapidement après l’introduction d’un inhibiteur de la recapture de la sérotonine (fluoxétine et sertraline) et disparaissant immédiatement après son arrêt, ont été publiées [17].


Le lupus systémique a été rapporté par Alarcon et par Levesque [6] et chez 2 patients sur 37 EM secondaires dans la série de Kalgaard [16]. L’érythermalgie accompagnait la survenue du lupus systémique. La physiopathologie en est obscure.


À ces trois grandes causes classiques, nous voudrions rajouter l’hyperthyroïdie, car nous avons pu observer deux cas d’érythermalgies indiscutables révélatrices de l’hyperthyroïdie. Sur le plan physiopathologique, il existe des récepteurs microcirculatoires aux hormones thyroïdiennes responsables de vasodilatation, expliquant d’ailleurs les phénomènes de flush rencontrés dans l’hyperthyroïdie.



DIFFICULTÉS DE CLASSIFICATION


Pour Michiels, il existe trois types d’érythermalgie [15] : les formes primitives, familiales ou non, dénommées érythermalgies primitives, les formes secondaires à un syndrome myéloprolifératif qu’il dénomme érythromélalgies, et les formes secondaire à d’autres pathologies dénommées érythermalgies secondaires. Il classe dans ce dernier groupe des pathologies à l’origine de brûlures des extrémités dans lesquelles il n’existe manifestement pas de vasodilatation, telles l’artériopathie, le diabète, la polyarthrite rhumatoïde. Nous considérons quant à nous qu’il s’agit de diagnostics différentiels.


Enfin des formes aiguës d’EM ont été proposées, notamment après infection virale.




PRONOSTIC


Il est bon dans les formes secondaires, ou par définition, l’acrosyndrome disparaît avec le traitement de la cause.


Dans les formes primitives, il est difficile à apprécier. La plus grande série qui s’est intéressée au sujet est celle de la Mayo Clinic, comportant 168 patients [4]. Cette série est probablement biaisée, les patients consultant à la Mayo Clinic étant certainement plus graves, et l’enquête est rétrospective. Néanmoins, elle nous apprend que la survie est diminuée par rapport à une population du même âge, avec 26 % de décès au bout de 6 ans en moyenne après le diagnostic, dont 3 suicides liés à l’EM. 31 % des patients s’aggravaient, 26 % étaient stables, 31 % s’amélioraient et 10 % guérissaient. L’acrosyn- drome influait sur la qualité de vie avec une limitation à la marche prolongée chez 50 % des patients, à la station debout prolongée chez 49 % des patients, à la conduite automobile chez 12 % des patients et une cessation de l’activité professionnelle liée à l’EM chez 12,5 % des patients [4].


Il y a des observations de gelures graves publiées chez des jeunes femmes calmant la douleur dans des bains d’eau glacée. Les douleurs peuvent être majeures, avec un retentissement considérable sur la qualité de vie des patients, ayant pu conduire certains au suicide.




TRAITEMENT DES ÉRYTHERMALGIES SECONDAIRES


C’est le traitement de la cause qui fait disparaître l’érythermalgie [1]. Dans les syndromes myéloprolifératifs où un délai est habituel entre le début du traitement et le contrôle de la maladie, les antiagrégants plaquettaires à petites doses ont un effet spectaculaire sur l’acrosyndrome : aspirine entre 100 et 300 mg par jour.



TRAITEMENT DES ÉRYTHERMALGIES PRIMITIVES



Dans les formes primitives familiales (canalopathies sodiques)


Il convient d’agir sur les canaux sodiques.


Les inhibiteurs des canaux sodiques comme la lidocaïne par voie parentérale ou en patch, la mexilétine par voie orale, sont souvent efficaces, et cette efficacité avait été rapportée avant l’élucidation du mécanisme physiopathologique [19]. Mais l’efficacité n’est pas obligatoire (seulement 55 % des patients selon Mark et Davies 2005) [20] et ceci s’expliquerait par la multiplicité des mutations possibles, sur des endroits différents du canal sodique 1.7 [21]. Ainsi il a été rapporté une mutation rendant le canal insensible à la lidocaïne [22].


La carbamazépine est inconstamment efficace [13] et pourtant, très récemment a été publiée une observation très élégante, d’une nouvelle mutation où sur lignée cellulaire mutée pour le canal Na1.7, la carbamazépine normalisait le fonctionnement du canal, avec un contrôle rapide de l’EM chez tous les membres de la famille atteinte obtenu par la prescription de ce médicament [23].


Très clairement, c’est la biologie moléculaire qui va faire progresser les pistes thérapeutiques dans l’EM primitive familiale. L’identification précise de la mutation et de l’anomalie du canal sodique devrait aider à comprendre quelles molécules peuvent être efficaces.



Dans les EM primitives non familiales


La diversité des hypothèses physiopathologiques rend compte de la diversité des options thérapeutiques, qui correspondent également à la diversité des réponses thérapeutiques rapportées dans la littérature.




Médicaments limitant la vasoconstriction

S’il existe chez certains patients une tendance vasoconstrictrice suivie d’une hyperhémie non adaptée, il est logique, même si cela semble paradoxal, de traiter ces patients par des vasodilatateurs. Ainsi, des améliorations spectaculaires ont été rapportées avec le nitroprussiate de sodium [27]. Dans la série américaine de Cohen, 6 patients sur 8 ayant essayé le diltiazem avaient été améliorés et dans le registre national, une patiente ayant une association phénomène de Raynaud et érythermalgie a été contrôlée par la prise de nifédipine. 15 % de la série de Davies étaient contrôlés par des vasodilatateurs [4].


Enfin, la seule étude randomisée, réalisée en aveugle en cross over sur 6 semaines a porté sur le misoprostol, prostaglandine habituellement utilisée dans la prévention des effets gastrotoxiques des anti-inflammatoires non stéroïdiens [28] Les auteurs ont rapporté une amélioration chez 17 patients sur 22 traités par le misoprostol, versus 5 sur 22 traités par placebo, à la dose de 400 mg x 2 par jour.



Traitements agissant sur la douleur

Il est possible que certaines EM primitives non familiales soient liées à des maladies des petites fibres et dans ce cas, il est compréhensible que des améliorations après prise de médicaments agissant sur la douleur, soient rapportées.


Ainsi la mexilétine a été décrite comme efficace chez un enfant souffrant d’EM primitive non familiale [29], après échec de tous les traitements habituellement proposés ainsi que la lidocaïne en patch chez une adolescente, en échec thérapeutique (y compris la mexilétine) [30].


Les anticonvulsivants utilisés comme des antalgiques sont certainement intéressants : la gabapentine à la dose de 100 à 300 mg, 3 fois par jour, s’est avérée efficace chez deux patients, dont pour l’une on peut discuter de l’authenticité de l’érythermalgie (contexte de sclérose en plaques) [31]. Dans l’expérience américaine, ce médicament a amélioré tous les patients qui l’ont essayé, sans toutefois faire disparaître l’acrosyndrome [13]. La gabapentine a le mérite d’être bien tolérée, si ce n’est une somnolence le plus souvent transitoire, en début de traitement. Le clonazépam (Rivotril) a été également utilisé avec succès chez une patiente souffrant d’une érythermalgie associée à un lupus systémique et résistante au traitement du lupus [32] et l’oxcarbazépine chez un enfant en échec de traitement [33].


Enfin, signalons l’efficacité d’un gel contenant 1 % d’amitriptyline (inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, agissant sur les canaux sodiques) et 0,5 % de kétamine (inhibiteur des récepteurs au N-méthyl-D-aspartate) [34].





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Jul 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 8: Acrosyndromes Vasculaires

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