Chapitre 55 Accouchement de l’enfant mort
L’accouchement de l’enfant mort est une épreuve pour les parents, mais également pour l’équipe.
L’encadrement médical, psychologique et législatif de la naissance d’un enfant mort nécessite une formation et une préparation spécifiques. Ce chapitre a pour objectif la description de toutes les étapes encadrant la prise en charge de la naissance d’un enfant mort. Chaque étape sera traitée séparément pour en simplifier la description, même si l’annonce, la prise en charge, le bilan, le déclenchement puis l’accouchement sont réalisés quasiment en même temps pour certaines patientes.
L’annonce
Circonstance de découverte
Découverte fortuite
Si la mort fœtale in utero intervient tôt dans la grossesse, avant 20 SA, sa découverte aura lieu de manière fortuite lors d’une consultation mensuelle (absence de bruits du cœur fœtal au Doppler) ou à l’échographie (absence d’activité cardiaque).
L’absence de mouvements actifs habituellement perçus conduit la patiente à consulter en urgence. La mort fœtale est alors confirmée par une échographie.
Même pressentie, l’annonce de MFIU est toujours violente pour les parents. Le professionnel qui fait cette annonce doit faire preuve de tact tout en étant suffisamment clair dans son discours pour ne pas laisser subsister d’espoir ou de malentendu. L’emploi de termes clairs et compréhensibles ne signifie pas l’utilisation de mots crus. Il faut rapidement utiliser des mots sans équivoque. Une annonce « en douceur » peut comporter des mots comme « mort » et « décès ». Cette situation difficile qu’est l’annonce de la MFIU doit être adaptée aux réactions du couple, lui laissant le temps de réagir, acceptant les blancs et pauses, laissant les parents réagir selon leur personnalité, leur culture et leurs émotions. L’absence apparente d’émotion est également à respecter. Le soignant doit aborder les thèmes de la conduite à tenir, du bilan étiologique, du risque maternel, de l’autopsie, du risque de récidive lors de la prochaine grossesse au rythme et à la demande du couple. Si le couple ne réagit pas ou n’aborde aucun de ces sujets, il faudra alors le diriger, au début, au moins vers des explications sur le bilan et l’accouchement [1].
Interruption médicale de grossesse
C’est le cadre le plus fréquent dans lequel le personnel médical accompagne les couples qui donnent naissance à un enfant mort-né. À partir d’un certain terme qui varie en fonction des équipes mais qui se situe aux alentours de 20-24 SA (désir des couples, pathologie fœtale, difficultés techniques), le déclenchement du travail se fait après la réalisation d’un fœticide.
Facteurs de risques de mort fœtale in utero
Ils sont nombreux et modifient parfois la prise en charge de l’accouchement. Les principaux sont :
Le plus important est de noter que plus le terme avance, plus la proportion de décès inexpliqués augmente (tableau 55.1). Nous utilisons le terme « inexpliqué » lorsque l’étude anatomopathologique du fœtus et du placenta est négative et en l’absence de facteurs de risque maternels ou obstétricaux pouvant expliquer la MFIU.
Bilan maternel
Il suit généralement l’annonce de la mort fœtale. Il est indispensable même si la cause de la mort semble a priori évidente (grand RCIU, infection) car il permet parfois d’identifier des risques maternels immédiats méconnus comme un diabète, une pré-éclampsie ou encore des anomalies métaboliques. Pour qu’il soit le plus complet possible, l’existence d’une liste type des examens à réaliser permet d’éviter les oublis et standardise la prise en charge. Cette liste peut différer d’une équipe à l’autre mais doit faire partie des protocoles de service. Il comprend :
Ce bilan pourra être adapté en fonction de l’interrogatoire ou après la consultation d’anesthésie.
Encadrement
Quand ? (avant pendant et après)
L’encadrement commence au moment de l’annonce de la mort et ne se termine que sur la volonté du couple, parfois bien après la sortie. Il semble important de limiter le nombre d’intervenants pour assurer une continuité et une bonne cohérence des soins et des conseils. La réalisation d’une fiche contenant les différentes informations recueillies auprès des parents : devenir du corps, autopsie, s’ils souhaitent le voir, l’habiller, lui donner un prénom, etc. favorise un accompagnement optimal puisque le couple n’aura pas à se répéter auprès de chaque nouvel intervenant.
Par qui ?
Pour faciliter le travail de deuil, l’équipe soignante qui prend en charge les parents endeuillés par une MFIU doit avoir des capacités essentielles d’écoute, d’information claire, d’accompagnement et de compassion envers ces couples et leur famille. Il est primordial que ces qualités prennent racine dans une formation initiale puis continue, spécifique au deuil périnatal. Ainsi la compréhension des différentes étapes du deuil (sidération, phase dépressive, etc.), permettra à chacun de mieux identifier son rôle souvent complémentaire avec les autres.
Une consultation avec un psychologue ou un psychiatre est systématiquement proposée au moment de l’annonce du décès, ou rapidement après. Souvent les parents sont dans une telle phase de sidération que ce premier entretien ne permet qu’une prise de contact. Les autres rencontres se feront au rythme souhaité par les parents. Pouvoir parler de cet enfant et déculpabiliser les couples est primordial tout comme être simplement présent et disponible.
Qui encadrer ?
La mère et le père peuvent être suivis ensemble et/ou séparément selon leurs besoins. Ce besoin peut n’apparaître que plus tard. Les différentes phases du deuil périnatal ne sont pas traversées de la manière par la mère et le père (différentes intensités, manifestations, durée). Par expérience, le père joue fréquemment, dans un premier temps, un rôle de soutien pour sa femme hospitalisée, c’est souvent lui qui est dans l’action : il effectue les démarches auprès de la mairie, des pompes funèbres, etc. C’est donc plus souvent à distance, lorsque sa femme ira mieux, qu’il aura besoin d’un soutien psychologique.
L’angoisse de la réaction de la fratrie à l’annonce du décès de cet enfant attendu peut nécessiter parfois l’aide du psychologue pour trouver les mots justes. Quel que soit leur âge, les aînés sont en mesure d’entendre puis progressivement de comprendre ce qui arrive secondairement au décès du bébé.
L’accouchement
Le déclenchement du travail survient rarement spontanément. Le but est d’obtenir l’accouchement dans des délais courts et dans les meilleures conditions pour préserver l’avenir obstétrical des patientes.
Moyens de déclenchemeni [8,9,10]
En France, la large utilisation de Mifégyne permet de potentialiser ces méthodes de déclenchements du travail. Le délai d’accouchement est dans plus de 90 % inférieur à 24 heures après le début du misoprostol. Attention cependant aux contre-indications de Mifégyne qui sont rares mais à bien connaître : insuffisance corticosurrénalienne, traitement corticoïde au long cours.
La maturation du col par le ballonnet est assez peu pratiquée ; elle consiste à introduire une sonde à ballonnet dans le col et à le gonfler (30-50 mL) au-dessus de l’orifice interne du col. Cette sonde est maintenue 12 à 24 heures ou jusqu’à ce qu’elle tombe. Le mode d’action semble être la conséquence d’un décollement du pôle inférieur des membranes et une pression centrée sur l’orifice interne du col.

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