Chapitre 51 Accouchement du prématuré
Les progrès accomplis dans le domaine de la prématurité concernent essentiellement la préparation du fœtus à son statut de prématuré ainsi que les conditions de son accueil. En effet, la corticothérapie anténatale et le transfert in utero détiennent une meilleure efficacité que la plupart des mesures destinées au maintien in utero du fœtus comme la tocolyse ou le cerclage.
Données du problème
Les circonstances de l’accouchement prématuré se répartissent en trois groupes : la prématurité induite (25 %), la rupture prématurée des membranes (25 %), l’accouchement prématuré spontané à membranes intactes (50 %) [1]. Le terme est un élément fondamental à intégrer à la décision obstétricale puisqu’il influe sur la mécanique obstétricale et sur le pronostic. On distingue la très grande prématurité avant 28 SA, la grande prématurité entre 28 et 32 SA, la prématurité moyenne de 33 à 36 SA + 6 jours.
Fragilité des prématurés
Fragilité des tissus
Fragilité sur le plan biologique
Le fœtus prématuré n’a que des réserves limitées en système tampon, ce qui diminue sa capacité de résister à l’hypoxie et l’entraîne plus rapidement vers l’acidose métabolique. On a montré qu’en cas de rythme cardiaque fœtal pathologique, il existe une chute plus rapide du pH et une élévation des lactates plus importante chez le prématuré que chez le fœtus à terme. Cette acidose a d’autant plus de conséquences que la prématurité est grande.
Fragilité sur le plan neurologique [2]
La part respective du traumatisme obstétrical et de la prématurité dans les complications neurologiques est discutée [3–5]. Les leucomalacies périventriculaires (LMPV) et les hémorragies intracrâniennes sévères (HIC) sont les principales lésions responsables de séquelles neuropsychiques chez les enfants nés prématurés. Si la physiopathologie des LMPV fait intervenir l’ischémie et l’inflammation et non pas le traumatisme, la situation est plus complexe pour les HIC. Les hémorragies sous-épendymaires retrouvées dans 50 à 70 % des naissances prématurées n’ont pas de retentissement en période néonatale. Les hémorragies intraventriculaires sont de bon pronostic quand elles sont isolées. Rarement elles peuvent se compliquer d’une dilatation ventriculaire. L’hémorragie intraparenchymateuse (HIP) est la plus grave, elle est responsable d’un taux élevé de mortalité néonatale précoce et de lourdes séquelles intellectuelles et motrices [6].
Mesures de protection
Césarienne élective [7–9]
Données de la littérature
Les études rétrospectives abondent. Thorp [10] sur une population de 12788 prématurés nés entre 23 et 34 SA montre que la césarienne a un effet protecteur vis-à-vis des HIC sévères [11] seulement pour les prématurissimes (25-26 SA). Le biais évoqué est celui de l’association du choix de la voie basse à un relatif « abandon » du fœtus en cas de situations jugées compromises. Il ressort de la littérature que le parti pris de prise en charge ou d’abandon du prématuré pèse considérablement sur son avenir [12].
En France, grâce au réseau AUDIPOG de 1998 à 2005 (figure 51.1), on constate une tendance à l’augmentation des taux de césariennes avant travail avant 37 SA avec une tendance plus marquée pour les termes 28-30 SA [13].
La figure 51.2 montre l’évolution des pratiques aux États-Unis pour des termes correspondant à la grande prématurité. On constate au cours de la décennie de 1990 à 2000 une tendance notable à l’augmentation des taux de césariennes dès 23 SA [14].
Difficultés techniques
Le segment inférieur de l’utérus n’est pas encore formé. Aussi certains préfèrent une incision verticale à une incision horizontale surtout lorsque la présentation est en siège ou en transverse. Une incision verticale garantit une extraction plus facile et reste à distance des pédicules utérins, mais elle est plus probablement corporéale. L’avenir obstétrical de ces hystérotomies à tout petit terme n’est pas encore connu [15].
Il faut souligner enfin que la morbidité maternelle postopératoire de ces césariennes prophylactiques ou en cours de travail est 6 fois plus importante qu’après un accouchement sans qu’aucun bénéfice n’ait pu être démontré pour le nouveau-né [16].