Chapitre 43 Dialyse à l’ora
La première description des dialyses rétiniennes remonte à Leber en 1882, bien que le terme n’ait été proposé par Anderson qu’à partir de 1932 [1]. Les dialyses sont de véritables déchirures rétiniennes, leurs caractéristiques justifiant une appellation spécifique. Les traumatismes oculaires constituent le principal facteur favorisant leur apparition. La proportion des cas qui leur est attribuée dans la littérature est variable. La multiplicité des autres causes évoquées et les rapports faisant état de cas bilatéraux à des fréquences variables laissent penser que d’autres mécanismes pourraient être en cause.
Épidémiologie
Chez l’adulte, la proportion de décollements de rétine rhegmatogènes secondaires à une dialyse rétinienne est comprise entre 4,4 % et 17 % [4,8,13,14,17,25]. Cette variabilité peut s’expliquer notamment par les possibles confusions avec des déchirures géantes et les variations de l’incidence d’autres causes de décollement de rétine au cours du temps comme les décollements du pseudophaque. La prédominance masculine est constante, entre 59 % et 82 %, et l’âge moyen est de trente ans [4,8,13,14,17,25].
Physiopathologie
FORMATION DES DIALYSES RÉTINIENNES
Afin d’appréhender la réaction du globe oculaire à un traumatisme, un modèle expérimental de tir de projectile sur des yeux de porc énucléés a été développé [26]. Si un projectile ayant une vitesse et une masse suffisantes rentre en contact avec l’œil, il se produit au moment de l’impact une bascule postérieure du cristallin et une augmentation de la distance entre le pôle postérieur du cristallin et la base du vitré, sur toute sa circonférence. Les forces de cisaillement appliquées sur la base du vitré sont potentialisées par l’amincissement rétinien consécutif à l’expansion du globe. L’augmentation concomitante de la pression intraoculaire s’oppose insuffisamment à la traction ainsi provoquée. En définitive, la mauvaise extensibilité de la base du vitré comparée à celle de la zonule ou de la capsule postérieure explique la formation préférentielle de lésions au niveau rétinien [6].
TOPOGRAPHIE DES DIALYSES RÉTINIENNES
Dès 1932 [1,2], la fréquence de la localisation temporale (84 %) et plus précisément temporale inférieure (59 %) des dialyses rétiniennes a été notée. Deux types d’explications ont été proposés pour justifier cette particularité :
DÉLAI D’APPARITION DU DÉCOLLEMENT DE RÉTINE
Le délai entre la création de la dialyse rétinienne et l’apparition d’un décollement de rétine symptomatique peut être assez long : 41 % des décollements surviennent plus d’un an après le traumatisme et 80 % dans les deux ans [5,27. L’ancienneté des signes fonctionnels et l’observation des lignes pigmentées de démarcation peuvent parfois permettre d’évaluer la durée d’évolution. Il a ainsi été établi que 28 % des décollements de rétine secondaires à une dialyse rétinienne évoluent depuis plus de six mois au moment du diagnostic [10]. Ces délais importants impliquent trois conclusions :
Étiologie
DIALYSE POST-TRAUMATIQUE
Les traumatismes contusifs représentent une cause plus importante de décollement de rétine que les traumatismes à globe ouvert. Toutefois, la plupart des traumatismes oculaires à globe fermé ne se compliquent pas de lésions rétiniennes. Un lien direct et immédiat entre un traumatisme causal et l’apparition d’une dialyse rétinienne a déjà été établi [22], le diagnostic étant réalisé dès que les milieux permettent un examen complet de la périphérie rétinienne. Le pourcentage de cas de dialyses rétiniennes compliquées de décollements de rétine pour lesquels un antécédent de traumatisme oculaire est retrouvé varie entre 36,5 % et 70 % des cas, avec une prépondérance masculine [8,14,17,25,27]. La variabilité de ce taux peut être expliquée par le caractère subjectif de la notion de traumatisme oculaire, retenue par certains auteurs, alors que d’autres ne considèrent que les cas présentant des signes objectifs de traumatisme lors de l’examen clinique. La prépondérance de dialyses post-traumatiques chez les hommes pourrait être expliquée par une plus importante tendance aux dialyses « spontanées » chez les femmes ou, plus probablement, à un phénomène socioculturel de déni des agressions physiques chez les femmes [27].
DIALYSE SECONDAIRE À UNE PRÉDISPOSITION GÉNÉTIQUE
L’étude de familles de patients atteints de dialyses temporales inférieures non traumatiques a abouti à des résultats discordants. Certains travaux ont avancé la possibilité d’une prédisposition génétique aux dialyses rétiniennes, transmise sur le mode autosomique récessif [24. D’autres études, pourtant menées sur des groupes importants de patients, n’ont pas produit de résultats significatifs [8,18]. L’hypothèse d’une prédisposition congénitale est donc actuellement préférée.