69: Maladie de Coats

Chapitre 69 Maladie de Coats



Décrite au début du XXe siècle par Coats et Leber [19], la maladie de Coats se caractérise par la présence de télangiectasies vasculaires rétiniennes responsables d’une exsudation intra- et sous-rétinienne, sans signes de tractions vitréorétiniennes [20]. Cette pathologie sporadique, congénitale et idiopathique concerne typiquement le garçon (75 % des cas) de façon unilatérale (95 % des cas) [20]. Lorsque l’exsudation sous-rétinienne est importante, elle conduit à la constitution d’un décollement de rétine plus ou moins étendu, qui peut poser des problèmes de diagnostic différentiel avec un rétinoblastome et qui nécessite une prise en charge spécifique.



Physiopathologie, histoire naturelle et classification de la maladie de Coats


L’étiologie de la maladie de Coats reste aujourd’hui inconnue ; son origine génétique n’a pas été établie, même si certains auteurs suspectent une mutation dans le gène en cause dans la maladie de Norrie (gène NDP) situé sur le chromosome X en Xp 11.2 [3]. Le caractère unilatéral de la maladie reste à ce jour inexpliqué. Sa pathogénie met en cause une raréfaction (présumée congénitale) des péricytes et des cellules endothéliales, avec pour conséquence une altération de la barrière hématorétinienne à l’origine de l’exsudation [23]. La raréfaction et la dilatation du lit capillaire rétinien associées à la présence de télangiectasies et, parfois, de dilatations anévrysmales des gros vaisseaux, en particulier artériels, sont caractéristiques de cette maladie [17]. L’accumulation progressive de matériel lipoprotéique en intrarétinien aboutirait à la rupture de la limitante externe et à la constitution d’un décollement de rétine exsudatif, d’autant plus rapide et important que les anomalies vasculaires rétiniennes sont étendues [6,20]. En effet, les télangiectasies sont le plus souvent localisées dans le quadrant inférotemporal mais peuvent s’étendre à tous les quadrants et, dans un tiers des cas, en arrière de l’équateur. Ellesn’affectent que rarement l’aire maculaire (moins de 5 % des cas) [20].


La maladie est d’autant plus évolutive que l’atteinte vasculaire est plus importante et peut aboutir à la constitution d’un décollement de rétine qui s’étend progressivement, devient total, bulleux, puis rétrocristallinien. Un glaucome néovasculaire, secondaire au décollement de rétine chronique, peut se constituer dans environ 10 % des cas [20] (fig. 69-1). L’évolution peut aussi aboutir à la survenue d’une hypothalamie puis d’une athalamie avec opacification cornéenne secondaire lorsque le cristallin touche la cornée. À ce stade (glaucome néovasculaire, athalamie), l’énucléation ou l’éviscération devient nécessaire (fig. 69-2).




Une classification de la maladie de Coats a été proposée par Schields [22] (tableau 69-I ; fig. 69-3).


Tableau 69-I – Classification de la maladie de Coats selon Shields [21].


















Stade 1 Télangiectasies isolées
Stade 2
A

B
Télangiectasies et exsudation


Stade 3
A



B
Décollement de rétine exsudatif


Stade 4 Décollement de rétine total et glaucome
Stade 5 Stade terminal de la maladie



Épidémiologie du décollement de rétine dans la maladie de Coats


Le décollement de rétine dans la maladie de Coats est rare et concerne les formes les plus graves. Alors que l’âge moyen de diagnostic de la maladie se situe autour de dix ans — en tout cas dans les deux premières décennies de la vie le plus souvent (stades 1 et 2) —, le décollement de rétine concerne les enfants de moins de cinq ans avec un pic de fréquence avant trois ans [7, 8,20]. En effet, un diagnostic précoce de la maladie, habituellement fait sur des signes indirects d’amblyopie (strabisme) ou de décollement de rétine (leucocorie), témoigne d’une forme plus évolutive avec des anomalies vasculaires plus diffuses. De nombreuses études ont montré que plus le diagnostic était fait tôt, plus la maladie était évolutive et plus le risque d’énucléation était grand [4, 11, 20, 21].


Le diagnostic de décollement de rétine chez le jeune enfant de moins de cinq ans impose avant tout d’éliminer le diagnostic de rétinoblastome par des examens d’imagerie (échographie, tomo-densitométrie). Les calcifications évocatrices de la tumeur sont absentes dans la maladie de Coats (fig. 69-4).




Prise en charge thérapeutique


Le pronostic visuel de la maladie de Coats est relativement bon tant que la macula est épargnée par les exsudats ; il bascule lorsque les exsudats, secondaires à la diffusion des anomalies vasculaires périphériques, précipitent derrière la macula. En effet, dans cette localisation, en l’absence de traitement rapide, les exsudats ont tendance à se fibroser, laissant des séquelles visuelles irréversibles.


Le pronostic visuel est également très mauvais en cas de décollement de rétine exsudatif ; cependant, la nécessité de traiter ces décollements est justifiée par les complications trophiques qu’ils entraînent et qui peuvent nécessiter une éviscération à terme. L’enjeu dans ces cas est donc plus anatomique que visuel.


Le but du traitement est de réduire ou, idéalement, de supprimer les phénomènes exsudatifs en agissant sur les anomalies vasculaires.



image CRYOTHÉRAPIE


La cryothérapie était le traitement le plus utilisé pendant les deux dernières décennies mais, comme en témoigne la grande série rétrospective de Shields [21], le traitement au laser des télangiectasies a pris une importance progressivement croissante et est actuellement le traitement de choix, tous stades confondus [1, 15, 16, 18]. La cryothérapie est aujourd’hui utilisée en deuxième intention ou comme traitement adjuvant du laser ou de procédures chirurgicales complexes. Elle ne peut être efficace que sur une rétine non décollée. Le temps de cryoapplication est de l’ordre de 10 s pour obtenir un blanchiment complet des anomalies vasculaires. Un double passage (double freeze-thaw technique des Anglo-Saxons [21]) est habituellement réalisé.

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Jun 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 69: Maladie de Coats

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