38: Complications orbitaires Infection d’éponge, migration d’éponge, troubles oculomoteurs

Chapitre 38 Complications orbitaires Infection d’éponge, migration d’éponge, troubles oculomoteurs



L’indentation épisclérale est une technique encore largement utilisée pour la prise en charge du décollement de rétine. Les deux complications de cette technique le plus fréquemment observées sont l’extériorisation du matériel d’indentation sclérale, qui peut être associée à une infection, et les troubles oculomoteurs. Ces complications semblent être en diminution, probablement en raison du perfectionnement des techniques opératoires et des matériaux d’indentation (abandon des bandes en hydrogel). En outre, depuis une vingtaine d’années, les procédures endoculaires, sans indentation externe, sont de plus en plus utilisées et sont beaucoup moins pourvoyeuses de troubles oculomoteurs [19].



Extériorisation et infection d’éponge


Quatre principaux types de matériaux d’indentation peuvent ou ont pu être utilisés lors d’une chirurgie du décollement de rétine ces deux dernières décennies : les éponges en silicone expansé, les rails ou bandes de silicone dur, le PTFE et les bandes en hydrogel (MIRAgel®), qui ne sont plus commercialisées depuis plusieurs années. L’extériorisation avec infection du matériel d’indentation sclérale, qui survient dans environ 1 % à 3 % des cas[10,15], concerne essentiellement les éponges en silicone expansé et, moins fréquemment, les bandes de silicone dur [10]. Les bandes de MIRAgel® exposaient à un risque nettement inférieur d’extériorisation à court terme [10], justifiant leur large utilisation ; néanmoins, l’augmentation de leur volume à long terme a justifié leur abandon.


Les bandes de silicone dur sont utilisées le plus souvent pour la réalisation de cerclages, moins sujets à l’extériorisation que les indentations localisées, ce qui explique leur meilleure tolérance. En effet, c’est le plus souvent la tranche de section du matériau qui constitue un angle acéré pour les plans ténoniens et conjonctivaux et qui est à l’origine d’une inflammation locale puis d’une déhiscence conjonctivale aboutissant à l’extériorisation. La migration et l’extériorisation transcutanée du matériel d’indentation ont également été décrites de façon plus exceptionnelle [3, 17]. L’utilisation de plusieurs indentations et les chirurgies multiples augmentent le risque d’extériorisation.


L’extériorisation du matériel expose à sa surinfection. Environ 50 % des indentations extériorisées sont surinfectées au moment de leur ablation, les germes le plus fréquemment retrouvés étant Staphylococcus aureus et Staphylococcus epidermidis[18]. La possibilité d’une contamination infectieuse en per-opératoire existe. Certains chirurgiens trempent l’éponge dans une solution d’antibiotique avant de la mettre en place, mais aucune étude n’a, à notre connaissance, évalué l’efficacité de cette pratique.


L’ablation du matériel extériorisé est impérative en raison du risque infectieux, qui est inéluctable à plus ou moins court terme si l’infection n’existe pas au départ. En effet, l’infection du matériel expose à la cellulite orbitaire secondaire et, parfois, à l’endophtalmie.


Ainsi, l’extériorisation avec infection d’éponge est d’autant plus grave qu’elle est plus précoce car la nécessité d’enlever l’éponge en totalité expose alors à un plus grand risque de récidive du décollement de rétine.


Sur le plan technique, l’ablation d’éponge réalisée au bloc opératoire est en principe facile ; elle se fait en bloc en la saisissant par l’extrémité extériorisée. Il n’y a pas nécessité d’enlever tous les points de suture scléraux qui ne sont pas exposés. En revanche, si l’éponge est difficile à retirer, il faut suspecter sa suture directe à la sclère et l’exposer suffisamment pour retirer toutes les sutures qui empêchent son ablation. Un traitement antibiotique local est prescrit en postopératoire.


Le PTFE nécessite une dissection prudente du fait de sa colonisation à long terme et de son intégration dans la sclère.


Dans la majorité des cas, l’ablation du matériel d’indentation scléral suffit à résoudre la complication clinique, avec un risque de récidive du décollement de rétine d’autant plus faible qu’on est à distance de la chirurgie du décollement de rétine (4 % à 33 %) [4, 10].



Troubles oculomoteurs


Les troubles oculomoteurs secondaires aux chirurgies des décollements de rétine concernent habituellement les procédures de mise en place de matériel d’indentation. Ils sont le plus souvent transitoires, dus à l’œdème et aux hémorragies péri-oculaires et musculaires, et/ou à une baisse de vision (rupture des capacités de fusion). Généralement, ils disparaissent spontanément dans les trois à six mois suivant la chirurgie [14]. Lorsque ces troubles persistent, ils se manifestent le plus souvent sous la forme d’une diplopie, dont la fréquence est très variable selon les auteurs (de 3 % à 50 %) [12] ; les études les plus récentes et sur les séries les plus grandes rapportent des fréquences faibles (moins de 5 %) [2, 5, 13].



image PATHOGÉNIE




MÉCANISMES






image CLINIQUE



EXAMEN CLINIQUE


Le diagnostic positif d’un trouble oculomoteur secondaire à une chirurgie de décollement de rétine ne pose en principe pas de difficulté, l’anamnèse, la chronologie de l’histoire ophtalmologique et l’examen clinique étant généralement explicites.


On recherchera à l’interrogatoire des antécédents de vision basse avant le décollement de rétine, d’un trouble oculomoteur préexistant à la chirurgie du décollement, de myopie forte. On précisera le type de chirurgie du décollement réalisée : indentation et, si oui, sa localisation, anesthésie générale ou locorégionale (péribulbaire).


L’examen clinique doit préciser l’état sensoriel de chaque œil, la meilleure acuité visuelle corrigée. La motilité oculaire sera étudiée avec soin avec un bilan orthoptique complet.


L’examen sera complété par la recherche à la lampe à fente d’éléments en faveur d’un syndrome restrictif (brides conjonctivales, extrusion de matériel) et par l’examen du fond d’œil, afin de savoir si la rétine est réappliquée et si un traitement rétinien complémentaire est indiqué.


Dans certains cas extrêmes, en particulier lorsque le trouble oculomoteur se déclare très à distance de l’intervention sur le décollement de rétine, des diagnostics de tumeur ont pu être évoqués devant un syndrome de masse conjonctivale ou orbitaire. Il complique le plus souvent une indentation par MIRAgel®, ancienne, qui, par hydrophilie, a augmenté de volume et peut mimer une tumeur orbitaire lacrymale ou conjonctivale. À l’examen clinique, on retrouve alors une masse sous-conjonctivale péri-oculaire à contenu translucide pouvant s’apparenter à un kyste d’inclusion (fig. 38-1). En cas d’hydratation plus étendue de l’éponge, les paupières peuvent être refoulées avec présence d’une masse sous-palpébrale évoquant alors une tumeur orbitaire (fig. 38-2). La réalisation d’un bilan d’imagerie permet de retrouver en IRM une masse périoculaire bien limitée, parfois déplacée en intraconique postérieur, en hypo-signal en T1. En T2, cette masse est en hypersignal (de même signal que le vitré) étant donné son contenu hydrique (fig. 38-3) — a contrario, le silicone apparaît en hypo-signal en T2.


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Jun 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 38: Complications orbitaires Infection d’éponge, migration d’éponge, troubles oculomoteurs

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