32: Pathomimies en Pathologie Vasculaire

Chapitre 32 Pathomimies en Pathologie Vasculaire




QU’EST-CE QUE LA PATHOMIMIE ?


La pathomimie est une pathologie caractérisée par l’invention, la production ou la modification de l’état clinique d’un patient par lui-même afin de feindre une maladie physique ou mentale. Le DSM-IV [1] considère que les raisons du développement d’une telle pathologie sont motivées par la volonté de devenir patient et « d’éprouver » le corps médical dans sa compétence diagnostique. Au contraire de la simulation simple, il n’y a pas de recherche de bénéfices directs (mise en invalidité, compensation financière). Le pathomime adopte la maladie comme mode de vie en créant lui-même les symptômes dont il souffre et se plaint [2].


Il ne s’agit pas non plus d’un trouble de conversion hystérique à la recherche de bénéfices secondaires inconscients. En effet, dans la pathomimie, la production de symptôme est consciente et la motivation est inconsciente, alors que dans la simulation, production et motivation sont conscientes (à la recherche de bénéfices primaires) et dans la conversion hystérique production et motivation sont inconscientes (à la recherche de bénéfices secondaires). On estime que cette maladie représente 0,5 à 2 % des consultations en médecine générale et jusqu’à 10 % des fièvres d’origine inconnue [3].


La pathomimie qui consiste en une automutilation par le patient afin de créer des symptômes cliniques (injection de caustiques, de matières fécales ou traumatisme local) doit être différenciée d’une entité un peu particulière dans la famille des troubles factices : le syndrome de Münchhausen, un trouble dans lequel le patient allègue des symptômes qui ne sont pas confirmés par le médecin. Il s’agit classiquement d’un homme, âgé d’une quarantaine d’années, qui va d’hôpital en hôpital. Ce type de trouble factice est plutôt d’allure aiguë, souvent dramatique. La « mise en scène » s’accompagne d’un récit mythomaniaque, qui touche au passé médical mais aussi personnel du sujet. La biographie est teintée d’héroïsme, de drames familiaux avec un statut social très valorisant. Bien souvent les séquelles d’une maladie authentique sont exploitées pour appuyer la présentation factice.



QUAND LA PRÉSENTATION CLINIQUE DU PATIENT DOIT- LLE FAIRE ÉVOQUER UNE PATHOMIMIE ?


L’interrogatoire du patient est un temps majeur du diagnostic de pathomimie : les lésions sont décrites comme apparaissant brutalement, sans signe précurseur. L’interrogatoire est imprécis quant à la lésion primaire et au stade précoce de la pathologie. Le temps passé par le clinicien à l’interrogatoire pour préciser le développement de la lésion est souvent vécu avec hostilité par le patient alors que l’aspect clinique des lésions est vécu le plus souvent avec indifférence. Il ne semble pas y avoir d’influence du niveau socio-économique des patients.



Éléments de l’examen dermatologique faisant évoquer une pathomimie


L’élément essentiel est la présence de lésions qui ne ressemblent à aucune dermatose typique. L’aspect des lésions est hétérogène et dépend des moyens utilisés par le patient [47]. Il peut s’agir de bulles, d’érosions (fig. 32-1), d’ulcérations à contour géographique et aux limites nettes (fig. 32-2 et 32-3), de lésions croûteuses à disposition plus ou moins linéaire (fig. 32-4). Il est fréquent d’observer des lésions d’âge différent : des érosions en cours d’épidermisation, des ulcérations profondes et des lésions plus récentes au stade nécrotique (fig. 32-5). Les lésions apparaissent souvent brutalement, de préférence la nuit, le patient ayant du mal à préciser leur aspect initial. Leur disposition est souvent curieuse, volontiers linéaire ou à l’emporte-pièce au sein d’une peau saine sans signe d’insuffisance veineuse, artérielle ou lymphatique périlésionnelle, ce qui permet d’éliminer assez facilement l’origine vasculaire sous-jacente. La localisation des lésions est extrêmement variée. Elles peuvent toucher les membres supérieurs, les membres inférieurs (fig. 32-6), le visage, le tronc mais sont toujours situées sur des zones facilement accessibles au patient.








D’autres présentations sont également fréquentes à type d’ecchymose, d’hémorragie, d’œdème segmentaire suite à la mise en place d’un garrot (cf. paragraphe suivant). Il n’est pas rare également de rencontrer des lésions purpuriques à disposition punctiforme ou linéaire, des dystrophies unguéales.


Les agents utilisés par les patients pour la création de ces lésions sont très variés : brûlure de cigarette, lacération, injection ou application de produit caustique, cosmétique, de matières fécales ou urinaires, pose de garrot, utilisation de clou et de brosse…


Le diagnostic se fera localement sur :






Situations cliniques pouvant faire évoquer une pathomimie en médecine vasculaire


L’apotemnophilie est une pathologie à la frontière de la pathomimie correspondant au désir du patient de bénéficier d’une amputation de membre. Cette situation clinique survient le plus souvent dans un contexte de traumatismes répétés inexpliqués d’un même segment de membre. Dans ce cas bien particulier, les patients expriment spontanément le désir d’être amputés en rationalisant ce désir par de multiples plaintes et des symptômes survenant au niveau du membre incriminé. Les auteurs s’accordent à dire que les patients ayant une apotemnophilie souhaitent garder une autonomie complète malgré une amputation handicapante.


L’emphysème sous-cutané d’un membre est une situation clinique qui évoque volontiers une gangrène gazeuse dont on connaît le caractère volontiers peu symptomatique à la phase initiale et que peut donc rencontrer le médecin vasculaire. Ce trouble a déjà été décrit dans la littérature chez les patients porteurs d’une pathomimie. L’examen attentif de la peau peut permettre de retrouver des points de ponction. Le caractère bilatéral ou récidivant est bien sûr extrêmement suspect.


Un tableau évocateur de dystrophie sympathique (l’œdème bleu de Charcot, fig. 32-8) se caractérise par des douleurs localisées, un œdème segmentaire, des troubles vasomoteurs et une diminution de la mobilité d’un membre.


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Jul 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 32: Pathomimies en Pathologie Vasculaire

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