31: Sexologie

Chapitre 31 Sexologie1




Le médecin est souvent mal à l’aise devant une patiente qui se plaint d’un trouble de sa sexualité. Nous voudrions dans ce chapitre lui donner quelques notions élémentaires pour savoir « entendre » cette demande, examiner la femme à la recherche d’une étiologie et orienter sa prise en charge. La consultation pour un trouble sexuel demande une grande disponibilité et est souvent longue. Il faudra savoir prendre ce temps même si la salle d’attente est pleine car si la femme ne se sent pas « entendue », elle n’en parlera plus. Si le partenaire est présent, c’est une bonne chose car il s’agit d’un problème de couple même si c’est la femme qui se plaint.



La demande


Si la libération sexuelle a bien fait émerger le concept de « santé sexuelle » reconnu par l’OMS, elle n’a pas pour autant enlevé le caractère intime d’un dialogue sur ce sujet. Aussi le motif réel de la consultation, lorsqu’il porte sur la sexualité, n’est pas énoncé clairement par pudeur et est souvent sous-jacent au motif apparent. Il ne s’exprimera que si on le recherche et si le médecin suggère ou facilite son expression.


La dysfonction sexuelle s’accompagne fréquemment d’une souffrance psychique et l’exercice médical doit la soulager. Il faut donc que le médecin décrypte cette demande par un abord empathique. Ceci est d’autant plus important que les femmes pensent qu’il est plus facile d’en parler à son médecin généraliste ou gynécologue que d’aller spontanément consulter un médecin sexologue. Le domaine « pathologie et traitement de la sphère génitale » ne peut être dissocié de la sexualité. Il faudra donc aborder le problème de la sexualité lors d’une consultation pour :




Comment s’y prendre ?


Le but n’est pas ici de diagnostiquer très précisément le trouble et de proposer systématiquement un traitement salvateur mais de :






Examen clinique


L’examen gynécologique peut donner l’éveil par une réaction qui nous frappera : crise de larmes, signes d’anxiété.


Il est parfois impossible en cas de vaginisme. Nous verrons plus loin la conduite à tenir.


S’il est possible, ce qui est le plus souvent le cas, il peut être un moment privilégié où des « choses indicibles » se diront.


Néanmoins, il faut rechercher une cause organique et examiner :



image la vulve à la recherche de signes d’inflammation liée à une infection (mycose, leucorrhée bactérienne ; cf. chap. 19), d’une pathologie vulvaire (dystrophie, lichen, psoriasis ; cf. chap. 11) ;


image l’hymen qui peut être intact ou dont des reliquats peuvent être importants et gêner le rapport ;


image une cicatrice d’épisiotomie qui peut être mal cicatrisée ou à l’origine d’une bride douloureuse ou siège d’une endométriose (cf. chap. 15) ;


image les glandes de Bartholin qui peuvent présenter un kyste, un abcès, une cicatrice douloureuse après chirurgie (cf. chap. 11) ;


image le vagin qui sera examiné au spéculum. Il sera posé sans lubrifiant chez la femme jeune. Si cette pose est difficile, on pourra évoquer une dyslubrification qui inhibe l’activité sexuelle. C’est fréquent lors de la prise de la contraception orale ou lors de la ménopause. Il faudra examiner soigneusement le vagin qui doit être trophique en période d’activité génitale. On recherchera une cloison médiane qui peut être partielle, un diaphragme qui raccourcit la longueur du vagin (cf. chap. 16), une endométriose du cul-de-sac postérieur du vagin. Le toucher vaginal complétera l’examen au spéculum en recherchant à nouveau cloison, diaphragme ou nodule d’endométriose de la cloison rectovaginale, car ces anomalies sont souvent plus faciles à sentir qu’à voir. On détournera l’attention de la patiente en lui faisant par exemple tirer sur ses mains pour essayer d’apprécier l’importance des douleurs provoquées par le toucher vaginal ;


image l’utérus : il sera apprécié par le TV dans son volume, sa position anté- ou rétroversée, sa mobilité, les douleurs que celui-ci entraîne ;


image les ovaires : ils seront examinés par le TV à la recherche d’un kyste ;


image le toucher rectal : il peut être utile en cas de prolapsus, d’endométriose de la cloison rectovaginale ;


image le test de Carnett qui explore l’origine pariétale de la douleur. Il consiste à demander à la femme allongée sur le lit d’examen de relever la tête et le thorax pendant que le médecin lui palpe la paroi abdominale. Si la douleur dont elle se plaint est viscérale, elle diminue lors de la contraction des abdominaux, alors qu’une douleur d’origine pariétale va augmenter.


La proctalgie provoquée lors du toucher vaginal évoque une participation névrotique dans les douleurs pelviennes chroniques.






Prise en charge




Expliquer la physiologie


Les pathologies organiques ayant été éliminées, le rôle du médecin est d’abord d’expliquer la physiologie de l’acte sexuel avec tact, sans gêne, parfois avec un peu d’humour. On insistera sur une possible amélioration liée à la bonne compréhension par le couple des différents moments du rapport en sortant des notions de performance. Il faut surtout rassurer et éviter les côtés négatifs qui entraîneraient un sentiment d’échec chez un des deux partenaires et démystifier « la technique ».


Il faut expliquer les différentes phases.


La phase d’excitation liée aux préliminaires. Elle est importante, souvent trop courte du fait de l’impatience du partenaire masculin. Elle se caractérise par une vasocongestion pelvienne, un gonflement du clitoris, un allongement et une dilatation de la partie profonde de la cavité vaginale. La vasocongestion induit une transsudation vaginale qui permet la lubrification vaginale. Celle-ci peut être, selon les périodes de la vie (grossesse, ménopause) ou les traitements, plus ou moins abondante ou demander plus de temps à apparaître si le temps de réponse aux caresses s’allonge et ce en fonction du désir initial.


La phase de plateau, dite aussi de tension sexuelle, comporte un gonflement du premier tiers de la paroi vaginale aboutissant au rétrécissement du diamètre inférieur du vagin, et à la formation de la plate-forme orgasmique (Masters et Johnson, 1970) qui peut devenir inconfortable voire douloureuse selon l’état vasculaire ou sécrétoire.


La phase orgasmique. La plate-forme orgasmique est le siège d’une série de contractions brèves toutes les 0,8 secondes en nombre variable pouvant atteindre la vingtaine. Les mêmes facteurs peuvent contribuer à la moins bonne qualité de la réponse musculaire.


La phase de résolution enfin qui devrait induire une heureuse détente mais peut ne faire qu’intensifier un climat d’insatisfaction physique et psychologique avec le sentiment d’un rapport soit « bâclé », soit au contraire « interminable et sans intérêt » (Lachowsky, 2001, a).


Selon Masters et Johnson, il y aurait trois sortes de réactions sexuelles féminines :



Selon ces auteurs, il n’y a pas un orgasme clitoridien et un orgasme vaginal, mais un seul type de réaction orgasmique de localisation vaginale pouvant cependant être ressenti différemment par la femme qui semble posséder de multiples zones corporelles, dites zones « gâchettes », dont la stimulation directe déclenche l’orgasme (il a été ainsi décrit en 1950 par Grafenberg un « point G » vaginal situé en avant au tiers inférieur, équivalent d’une « prostate féminine »).


Enfin, il faut colorer cette description clinique par des composants très subjectifs mais indispensables à l’activité sexuelle féminine comme les notions de désir, de sentiments, de satisfaction (Brideron, 2006).


Le désir est soumis à l’influence des hormones, en particulier des œstrogènes, qui influent sur le système nerveux central comme facteurs neuro- et psycho-actifs. Ces hormones jouent un rôle important au niveau de la peau, de la production de sébum, de la transpiration et comme facteur de trophicité du tractus génital. Ce sont les œstrogènes qui sont impliqués dans les phénomènes de vasocongestion pelvienne et la transsudation à l’origine de la lubrification vaginale. Mais le désir, dans sa composante « besoin », est essentiellement dépendant du taux sanguin circulant de testostérone et de prolactine.


Ces explications physiologiques données, il est bien certain que tout ne se joue pas au seul niveau mécanique du coït mais les explications donnant aux difficultés un caractère médical sont souvent un bon début pour enrayer la honte qui s’attache encore aux mots du corps sexuel et sexué. C’est donner à la femme et au couple la permission de dire et de demander. Ainsi leurs questions n’en deviendront que plus aisées et moins gênantes pour eux. Cela permet une déculpabilisation qui permettra d’aller plus loin dans le retentissement psychologique, cause et conséquence des troubles de la sexualité (Lachowsky, 2001, b).


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Apr 23, 2017 | Posted by in GYNÉCOLOGIE-OBSTÉTRIQUE | Comments Off on 31: Sexologie

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