Chapitre 25 Plaies de la main et des doigts
Ce que vous savez déjà
• C’est une des urgences les plus fréquentes mais aussi les plus polymorphes. Elles vont en effet des plaies les plus banales, que l’externe de garde peut suturer, aux lésions les plus complexes, où tous les artifices de la chirurgie reconstructrice sont à mettre en œuvre.
• Elles recouvrent souvent des lésions plus profondes tendineuses ou nerveuses que seule une exploration clinique et, au besoin, chirurgicale peut permettre de ne pas négliger.
Ce que nous pouvons préciser
Quelques principes généraux de traitement
• Le risque infectieux sera résolu beaucoup plus par le parage que par l’antibiothérapie, qui est ici contingente (tétanos excepté).
• Le délai d’attente doit être aussi court que possible et l’urgence différée avec pansement humide ne doit être qu’exceptionnelle.
• Toutes les lésions associées doivent être en principe traitées dans le même temps, et notamment la stabilisation du squelette qui est un préalable indispensable.
• Tout tissu noble : os, articulation, tendon, pédicule vasculonerveux, doit être impérativement recouvert. L’ongle et la pulpe des doigts représentent un capital à préserver au maximum. L’ongle sert d’appui à P3. La pulpe est le garant de l’utilisation du doigt et sa senbilité est indispensable. De sa rééducation sensitive précoce par contact peut dépendre la limitation des névromes, dont on connaît ultérieurement la difficulté thérapeutique.
• Un doigt insensible est aveugle et, par là même, inutilisé, d’où la nécessité de redonner une sensibilité de qualité optimale, en particulier dans certaines zones de préhension comme les pulpes (pouce et index surtout) et les éminences.
• Certaines régions ont un « sous-sol » plus réceptif aux greffes que d’autres. Ainsi, la face dorsale de la main représente un bon lit pour les greffes ; à l’inverse, la paume, à sa partie centrale, est mal vascularisée et l’utilisation d’un lambeau à vascularisation autonome est préférable.
Leur traitement
Vous avez à votre disposition :
La cicatrisation dirigée
• La réparation spontanée aboutit à un résultat esthétique et fonctionnel supérieur à celui que donnerait une greffe : le revêtement obtenu est en effet sensible. Encore faut-il diriger cette cicatrisation [*], tout d’abord en stimulant le bourgeonnement par des pansements pro-inflammatoires (pansements humides, baume du Pérou, vaseline…) et, secondairement, en freinant le bourgeon granulomateux par des pansements anti-inflammatoires (pansements à base de silicone : Mépitel®). Le renouvellement des pansements est peu fréquent, environ une fois par semaine. Lorsque la phalangette est intéressée, il est parfois utile de pratiquer une recoupe osseuse pour éviter une cicatrice douloureuse. Ce procédé est simple, satisfaisant pour le malade et permet un traitement ambulatoire quasi immédiat. Il doit être rejeté pour les pertes de substances occupant un pli de flexion (rétractibilité secondaire), ou si une structure fragile est exposée (nerf, tendon, articulation), ou si la perte de substance est étendue. Plus le délai de cicatrisation est important et moins la qualité de la cicatrice est bonne.
La greffe de peau
Elle peut être mince, épaisse ou totale [*] :
• la peau totale se prélève au bistouri, à la face interne du bras au pli du coude, à la région latéro-pubienne. Il faut la dégraisser totalement avant de la fixer par des points séparés. Sa prise est aléatoire mais ses caractéristiques sont les plus proches de la peau normale. Elle est plus souvent utilisée lors d’un second temps opératoire qu’en urgence ;
• la peau épaisse se prélève au dermatome ou au rasoir. La zone donneuse met 3 semaines au moins à cicatriser, avec parfois un aspect très inesthétique. Elle remplace la peau totale sitôt que la surface à greffer est trop grande ;
• la peau mince se prélève de la même façon. La cicatrisation de la zone donneuse est rapide et esthétique, mais le recouvrement obtenu est moins satisfaisant : plus grande rétractibilité, moins grande solidité, moins bonne sensibilité. Elle est particulièrement utilisée pour couvrir en urgence des surfaces importantes car elle est peu exigeante sur la qualité du sous-sol.
Pour éviter la rétraction secondaire des greffes, il faut :
• utiliser des greffes d’épaisseur suffisante (semi-épaisse sur la face dorsale et épaisse sur la face palmaire) ;
Les lambeaux cutanés
• les lambeaux à pédicule permanent : ils sont sensibles et ne réclament qu’un temps opératoire. Aux doigts, ils servent à combler une perte de substance peu importante palmaire, terminale ou commissurale. La zone donneuse restera insensible et doit donc être dorsolatérale. À la face dorsale de la main, ils sont très utiles pour recouvrir les tendons dénudés. Sur le plan technique, et quel que soit leur type (rotation, bascule, glissement…), il faut souscrire aux règles classiques : leur longueur ne doit pas dépasser une fois et demi leur largeur et toute torsion excessive est à rejeter. Les transplants en îlot représentent une forme particulière de lambeau à pédicule permanent ;