24. Approches complémentaires et alternatives

Chapitre 24. Approches complémentaires et alternatives



Remarques préliminaires

Approches complémentaires et alternativesLes possibilités de la médecine «orthodoxe» dans les formes sévères de la paralysie cérébrale sont réelles mais bien insuffisantes [1]. Beaucoup de familles ne peuvent pas renoncer à leurs espoirs sans recourir un jour ou l’autre à ce qu’il est convenu d’appeler les médecines complémentaires et alternatives (MCA) [2]. Médecine parallèle, médecine douce, médecine non conventionnelle, médecine naturelle sont autant de termes retrouvés dans la littérature pour référer à ces pratiques considérées par la médecine moderne du monde occidental comme sans preuves d’efficacité et sans fondement scientifique acceptable, c’est-à-dire non orthodoxes.

Plus spécifiquement, le National Center for Complementary and Alternative Medicine (NCCAM), un des instituts du «National Health Institutes» aux États-Unis, définit les MCA comme divers systèmes, pratiques et produits de santé qui ne font pas présentement partie de la médecine conventionnelle pratiquée par des professionnels de la santé. Ces approches s’adressent à des individus en quête d’un cadre de soin qui se situe hors des cadres de référence de la médecine moderne, bien qu’elles soient parfois dispensées par des médecins ou autres professionnels de la santé. Selon les traditions et législations de chaque pays, elles peuvent être courantes, tolérées ou bien interdites.

Le NCCAM regroupe les MCA selon cinq champs : systèmes médicaux alternatifs (homéopathie, médecine traditionnelle chinoise); interventions holistiques incorporant corps et esprit (hypnose, méditation, prière); méthodes axées sur le corps (chiropractie, massage); thérapies basées sur la biologie (vitamines, produits aux herbes); et thérapies énergétiques (toucher thérapeutique, transfert d’énergie, thérapie magnétique).

Les approches sont multiples; certaines se veulent complémentaires des traitements conventionnels, d’autres cherchent à s’y substituer et sont parfois considérées comme potentiellement dangereuses. La plupart de ces techniques ne sont pas spécifiques au traitement d’une pathologie en particulier. Il n’existe des preuves scientifiques que pour quelques-unes de ces approches. Toutefois, pour la plupart d’entre elles, la sécurité, l’innocuité et l’efficacité restent autant de qualités qui n’ont pas encore été démontrées par des études rigoureuses.

Des enquêtes récentes rapportent que près de 56 % des enfants présentant une paralysie cérébrale sont utilisateurs de MCA, avec une préférence pour l’aquathérapie (25 %) et les massages (25 %). On constate que les utilisateurs sont plus jeunes et plus atteints, ont des mères plus scolarisées et des pères plus âgés qui ont tendance à être eux-mêmes des utilisateurs de MCA [2]. Plusieurs autres facteurs ont été proposés pour justifier le recours aux MCA, incluant le temps d’attente prolongé pour une prise en charge, la faible fréquence des interventions proposées, le caractère éclaté de certains programmes d’intervention pour lesquels les parents ont à assumer beaucoup de rendez-vous dans une même semaine, le manque de preuves pour les approches conventionnelles, la lenteur des progrès qui est source de découragement pour plusieurs parents, leur manque de participation aux prises de décision concernant leur enfant.

Il est nécessaire pour le clinicien d’avoir un minimum d’informations sur les méthodes les plus courantes dans le domaine de la paralysie cérébrale car, parfois, la famille lui demandera son avis ou le tiendra au courant de ses tentatives dans telle ou telle direction. Quelques méthodes seront donc rapidement décrites. Les espoirs des familles et l’attitude de la médecine classique vis-à-vis de ces thérapies non orthodoxes seront ensuite brièvement analysés.


Frontière entre les approches conventionnelles et complémentaires

La frontière entre approches conventionnelles et approches complémentaires est souvent mince du fait que les preuves scientifiques sont aussi limitées pour plusieurs des approches conventionnelles actuellement privilégiées auprès des enfants présentant une paralysie cérébrale. À l’opposé, plusieurs approches complémentaires, particulièrement dans le domaine de la réadaptation motrice, sont actuellement testées auprès de cette même population. Dans ce registre, l’entraînement avec contrainte induite chez l’enfant hémiplégique, l’entraînement à la marche sur tapis roulant avec ou sans poids ajouté, le renforcement musculaire, les programmes d’exercice physique, l’ostéopathie, les stimulations électriques transcutanées et/ou neuromusculaires, la thérapie d’intégration sensorielle et l’entraînement virtuel sont autant de moyens qui sont utilisés par différentes équipes de réadaptation pour diminuer la faiblesse musculaire, préserver l’élongation musculaire, diminuer la douleur, améliorer plus globalement la condition physique et la qualité de vie. Plusieurs de ces approches empruntent des principes des théories de l’apprentissage moteur. Généralement appliquées par des professionnels de la santé dans un cadre de réadaptation, certaines ont déjà fait leurs preuves auprès d’autres populations cliniques. Les résultats obtenus auprès des enfants paralytiques cérébraux, quoique souvent encore préliminaires, sont encourageants. Cependant, plusieurs paramètres incluant intensité, fréquence, type de pratique (en bloc, aléatoire…) restent à définir pour déterminer les conditions optimales d’application.


Quelques approches alternatives

Les approches alternatives sont souvent issues d’écoles de pensée parallèles, sous l’égide d’une seule personne généralement charismatique ou encore d’un institut à but lucratif qui gère l’application de la méthode. De façon assez habituelle, elles impliquent une formation préalable des parents à l’application de la méthode, mettent en jeu des ressources financières très importantes et sont pratiquées de façon intensive. Parfois basées sur des modèles explicatifs non actualisés, elles manquent souvent de définition précise mais leur promesse de progrès les rend attrayantes pour les familles parce qu’hors des sentiers battus. Les preuves d’efficacité se heurtent à plusieurs biais méthodologiques, touchant à la fois la sélection des populations ciblées (gravité de l’atteinte, niveau socioéconomique…) et à l’effet placebo potentiel lié à l’attention particulière donnée à l’enfant. Les effets négatifs sont mal documentés tant sur l’enfant que sur la famille qui peut se voir épuisée, financièrement appauvrie et exclue du réseau des services conventionnels. Quelques-unes des méthodes actuellement les plus populaires sont résumées au tableau 24.1.















Tableau 24.1 Quelques approches alternatives proposées en cas de paralysie cérébrale
Tiré et adapté de Damiano [4], Koman et al. [5], Liptak [6], Papavasiliou [7] et Patel [8].
Approche Modalités d’application Effets recherchés Commentaires, recommandations et résultats
Oxygénothérapie (hyperbare)


Exposition répétée à de l’oxygène pur à 100 %. Le sujet est placé dans un «caisson» d’acier monoplace ou multiplace, où la pression est supérieure à la pression atmosphérique au niveau de la mer.

Only gold members can continue reading. Log In or Register to continue

Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

May 9, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 24. Approches complémentaires et alternatives

Full access? Get Clinical Tree

Get Clinical Tree app for offline access