Chapitre 2. Système nerveux central
maturation fœtale et postnatale
Remarques préliminaires
Le développement cérébral ne peut être que grossièrement schématisé ici à l’usage du clinicien. Les étapes suivantes sont rapidement analysées : prolifération, migration, organisation, myélogenèse. Ces étapes sont à la fois successives et intriquées; la prolifération neuronale et la migration ont lieu au cours de la première moitié de la gestation, c’est la période d’histogenèse ou encore de mise en place du tissu neuronal. La seconde moitié est marquée par la croissance et la différenciation cellulaire, c’est la phase d’organisation, qui se poursuit bien au-delà de la naissance. Les connaissances sur les phénomènes maturatifs progressent rapidement, elles sont essentielles à la compréhension des différents mécanismes pathologiques au cours du développement fœtal. Elles sont représentées graphiquement en figure 2.1.
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Figure 2.1 Table chronologique de la maturation neuronale et gliale jusqu’à 40 SA.La zone grisée recouvre la seconde moitié de la gestation. Le trait discontinu indique un processus débutant ou finissant. Le trait continu indique l’activité maturative la plus intense. Amiel-Tison C, Gosselin J. From neonatal neurology : some clues for interpreting fetal findings. In : Pooh R, Kurjak A, éds. Fetal Neurology. Jaypee Brothers, Donald School library as a scientific monography; 2009. |
Prolifération et migration
MaturationanatomiqueproliférationMaturationanatomiquemigration neuronaleLa première étape est la neurulation dite primaire, aboutissant à la formation du tube neural; celui-ci est terminé vers 4 SA. La formation des crêtes neurales succède à la fermeture du tube neural; la partie crânienne contribuera à la formation de la voûte crânienne et de la face; la partie somatique à celle du squelette et des muscles.
Dans la zone sous-ventriculaire commence ensuite la prolifération des neurones et des cellules gliales. Dans un premier temps, l’activité mitotique est intense, particulièrement entre 8 et 12 SA pour les neurones, puis elle persiste jusqu’à 20–22 SA à un rythme plus lent. Des travaux récents très médiatisés ont bousculé les idées reçues : des cellules souches, capables de se diviser, persistent dans le cerveau adulte. La «glie radiaire» joue un rôle prédominant dans cette prolifération neuronale. La période de neurogenèse intense est suivie par une prolifération gliale qui débute autour de 20 SA, est très active au cours de la seconde moitié de la gestation; elle se poursuit au site de migration jusqu’à l’âge adulte. In fine, le nombre des cellules gliales excède largement celui des neurones.
La migration de millions de neurones est un phénomène rapide et spectaculaire; elle commence très tôt, elle est très active jusqu’à 24 SA puis diminue jusqu’à 40 SA. De la zone sous-ventriculaire de prolifération cellulaire, une première génération de neurones migre vers la partie externe (superficielle) du tube neural pour former la plaque sous-corticale (PSC) ou «sous-plaque». Cette couche de cellules est ensuite traversée par tous les neurones jeunes qui vont par vagues successives former, de dedans en dehors, «la plaque corticale» ou futur cortex, les couches superficielles étant donc formées les dernières.
Organisation
MaturationanatomiqueorganisationL’organisation est le stade suivant du développement cérébral, elle se poursuit pendant des années. Certaines formations sont transitoires, elles jouent un rôle capital dans l’organisation cérébrale. Zone germinative (ZG) et PSC sont des formations transitoires liées à un stade très précis du développement cérébral.
Structures transitoires
Zone germinative ou «matrix»
Maturationanatomiquezone germinativeOn appelle «zone germinative» ou «matrix» le reliquat de la couche ventriculaire qui, chez l’embryon et le jeune fœtus, tapisse toute la surface de la paroi ventriculaire, sous l’épendyme (figure 2.2). C’est un siège de prolifération cellulaire; elle forme une masse encore volumineuse à 26–28 SA, au-dessus de la tête du noyau caudé dans le plancher de la corne frontale du ventricule latéral, dans le toit de la corne temporale et dans la paroi externe de la corne occipitale; la ZG n’est presque plus visible à 40 SA. Cette structure transitoire est très richement irriguée à la période où elle est très active. Son irrigation artérielle est décrite plus loin.
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Figure 2.2 Évolution de la zone germinative pendant la vie fœtale.Coupes frontales du cerveau au niveau du troisième ventricule à 20, 26 et 32 SA. La ZG est représentée en noir; on peut apprécier le volume relatif par rapport aux autres structures hémisphériques qui se mettent en place. [1]. |
Plaque sous-corticale ou «sous-plaque»
Maturationanatomiqueplaque sous-corticaleLa PSC est la zone immédiatement sous-corticale de la substance blanche. Les neurones de la PSC sont en place avant la migration des neurones qui constitueront le cortex; ils se différencient rapidement et développent des récepteurs transitoires (neurotransmetteurs, facteurs neurotrophiques, etc.). L’activité de ces neurones, déjà présente à 15 SA, est maximale de 20 à 32 SA (figure 2.1). Puis la mort neuronale programmée (ou apoptose) entre en jeu : 90 % des neurones de la PSC auront disparu à 6 mois postnatals. Cette zone transitoire est familièrement appelée la «salle d’attente» pour tous les axones ascendants et descendants en attente de la maturation de leur site définitif. Cette structure remplit donc une fonction d’organisation pour le développement des connexions futures et des structures définitives.
Un mot sur les facteurs neurotrophiques : cette famille de protéines trophiques favorise la croissance, la différenciation et la survie des neurones du SNC immature. Ces facteurs ont aussi un rôle de maintenance pour les neurones du SNC adulte. Ce sont des polypeptides sécrétés par les cellules neuronales et non neuronales. Ils agissent par liaison et activation des récepteurs spécifiques situés à la surface des cellules. Ils protègent les neurones d’une mort programmée en «verrouillant» le programme de destruction.
Organisation laminaire du cortex, gyration et sillons
gyrationL’organisation laminaire du cortex (voir la figure 1.3) commence dès la fin de la migration neuronale. Chaque neurone émet des ramifications dendritiques et axonales. Parallèlement à ces modifications morphologiques, le système de transmission synaptique se met en place. Cette maturation varie selon la topographie : le développement dendritique apparaît d’abord au niveau du thalamus et du tronc cérébral, puis au niveau des régions corticales.
La gyration et l’apparition des sillons augmentent la superficie du cortex cérébral, évitant ainsi une augmentation trop importante du volume des hémisphères. Les étapes de la gyration sont précises et permettent donc de décrire des aspects caractéristiques de chaque âge gestationnel. L’aspect lisse de la surface des hémisphères est physiologique jusqu’à 20–22 SA (figure 2.2); la gyration s’accélère au troisième trimestre. Au cours de la lamination corticale, le cortex «externe», superficiel, croît plus vite que le cortex «interne», d’où la voussure du manteau cortical qui crée les circonvolutions.

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