L’expertise psychiatrique pénale
L’expertise psychiatrique pénale a un rôle majeur en permettant un équilibre indispensable entre l’hôpital et la prison, c’est-à-dire entre santé et justice. L’expertise psychiatrique a longtemps eu une vocation principale, celle de diagnostiquer la maladie mentale de l’auteur d’infraction et donc de faire en sorte à ce qu’il bénéficie de soins plutôt que d’une peine. Il s’agit là de l’expertise présententielle qui existe depuis le Code pénal de 1810.
Les expertises réalisées au décours de la garde à vue, en réquisition à des médecins qualifiés ne sont pas considérées comme des expertises pénales au sens strict du terme. Elles ne devraient être sollicitées que pour déterminer si l’intéressé présente une pathologie psychiatrique, si celle-ci nécessite des soins et sous quelles modalités.
Une clinique psychiatrique qui s’est développée autour d’une clinique médicolégale
Le premier équilibre entre santé et justice imposera la mise en place d’une loi d’internement : la loi du 30 juin 1838, portée par Esquirol et Jean Pierre Falret, de façon à ce que celui qui a été reconnu irresponsable, parce que dément au sens de l’article 64 du Code pénal, puisse être soigné sous contrainte avec la mise en place d’un placement d’office. Dans les mêmes temps, Esquirol avançait des principes d’organisation de l’asile pour que celui-ci soit départemental et apporte des réponses appropriées, en termes de prise en charge.
• l’abolition du discernement au sens de l’article 122-1 alinéa 1 du Code pénal qui prévoit que « n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes » ;
• l’altération du discernement prévue par l’article 122-1 alinéa 2 qui établit que « la personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable »; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine ou en fixe le régime.
Principes légaux de l’irresponsabilité pénale
Les exclusions de la faute sont envisagées en droit pénal français en deux types (Tableau 18.I) :
Tableau 18.I
Exclusions de la faute et causes d’irresponsabilité en droit pénal français.
Causes objectives d’irresponsabilité
Justification fondée sur une injonction :
ordre donné par un texte
ordre provenant de l’autorité légitime
Justification fondée sur une permission :
permission fondée sur la légitime défense
permission fondée sur l’état de nécessité
lois et coutumes
Causes subjectives d’irresponsabilité
Cause présumée : minorité
mineurs de moins de 13 ans irréfragablement irresponsables
mineurs de plus de 13 ans : présomption d’irresponsabilité
Causes non présumées
erreur : absence de connaissance
contrainte : absence de liberté
trouble mental : absence de discernement
• les causes objectives d’irresponsabilité pénale ;
• les causes subjectives d’irresponsabilité dont fait partie le trouble psychique ou neuropsychique en rapport avec l’abolition du discernement de l’article 122.1 alinéa 1.
L’expertise en réquisition au stade de l’enquête
Au stade de l’enquête, le Code de procédure pénale organise les examens médicaux indispensables :
• l’article 63-3 du Code de procédure pénale permet un examen médical pendant la garde à vue, à la demande de l’intéressé, de l’officier de police judiciaire, du Parquet ou de la famille ;
• l’article 63-4 alinéa 4 offre à l’avocat la possibilité de faire toute observation et de suggérer un examen médical ;
• les articles 60 et 77-1 du Code de procédure pénale permettent de procéder à des examens techniques et scientifiques sur réquisition du Parquet. Certaines catégories d’infractions imposent un examen médical, notamment la criminalité organisée et surtout les infractions sexuelles. La personne en garde à vue pour meurtre ou assassinat d’un mineur, précédé ou accompagné d’un viol, actes de tortures ou de barbarie, agressions sexuelles ou proxénétisme à l’égard d’un mineur, doit être soumise à une expertise médicale et l’expert est interrogé sur l’opportunité d’une injonction de soins dans le cadre d’un suivi sociojudiciaire (art. 706-47 du Code de procédure pénale).