Principes généraux de l’expertise
De façon générale, l’expertise est un dispositif d’aide à la décision, sollicité par un décideur, confronté à des questions qui sont en dehors de sa compétence. Elle suppose une mission qui est définie par le décideur et comporte des opérations allant au-delà de simples constatations. La réalisation de cette mission se conclut par un rapport remis au décideur. Même en limitant le propos aux expertises qui peuvent être confiées à des psychiatres, la variété des expertises est grande et la complexité des situations n’est pas simple à appréhender. Il vient d’abord à l’esprit de chacun les expertises qui peuvent être diligentées par une juridiction, mais on sait que la demande peut provenir d’une administration (ex. : préfet à l’occasion de soins sans consentement ou CPAM). D’autres expertises peuvent être demandées par des organismes privés tels les compagnies d’assurances. Dans ce chapitre de généralités, nous nous limiterons à donner les indications les plus importantes en matière d’inscription sur une liste officielle d’experts, l’esprit des textes qui président aux règles procédurales à appliquer lors des opérations d’expertises ainsi que les critères déontologiques auxquels l’expert doit se conformer en toutes occasions.
Déontologie de l’expertise
Quatre articles lui sont spécifiques :
• Article 105 : « Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d’un même malade. Un médecin ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services ». On en retient qu’il s’agit de toutes les circonstances dans lesquelles le médecin expert n’aurait pas toute son indépendance. Il faut y être très attentif. On peut également retenir qu’à contrario, cela signifie qu’il n’est pas exclu de devenir médecin traitant après avoir été médecin expert. Il convient cependant d’être très prudent avant d’accepter de prendre en charge un patient que l’on a expertisé précédemment.
• Article 106 : « Lorsqu’il est investi d’une mission, le médecin expert doit se récuser s’il estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à la technique proprement médicale, à ses connaissances, à ses possibilités ou qu’elles l’exposeraient à contrevenir aux dispositions du présent Code de déontologie ». Ne jamais aller au-delà de ses compétences, ne pas se prêter à des missions qui vont au-delà des connaissances médicales.
• Article 107 : « Le médecin expert doit avant d’entreprendre toute opération d’expertise informer la personne qu’il doit examiner de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé ». Cet article est particulièrement important, non seulement dans la réalisation des expertises pénales, mais également dans tout type d’évaluation et de contrôle. La personne doit comprendre qu’elle est face à un médecin qui devra rendre compte de sa mission à un tiers. Il est impératif d’expliquer les questions auxquelles le médecin aura à répondre et de vérifier que le patient les a bien comprises.
• Article 108 : « Dans la rédaction de son rapport, le médecin expert ne doit révéler que les éléments de nature à apporter la réponse aux questions posées. Hors de ces cas limites, il doit taire tout ce qu’il a pu connaître à l’occasion de cette expertise. Il doit attester qu’il a accompli personnellement sa mission. »; En d’autres termes, cet article rappelle au médecin qu’il est tenu au secret professionnel. Dans certaines missions et notamment en psychiatrie, il n’est pas simple de respecter cet article à la lettre. Ainsi la responsabilité de certains médecins experts a pu être engagée pour avoir donné des informations couvertes par le secret à un tiers (voir par exemple, Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins, 6 mai 2011). Actuellement, il est admis en matière d’expertise pénale, notamment de l’auteur, que des éléments biographiques parfois assez précis peuvent figurer dans le rapport. Il en va tout autrement lorsqu’il s’agit d’expertises de la victime. La situation est encore plus restrictive dans les expertises diligentées par d’autres juridictions ou des administrations. Il est le plus souvent indispensable de respecter à la lettre cet article et de ne répondre que de manière laconique aux questions qui sont posées (cf. infra, expertise pour la CPAM par exemple).