12: Grossesse extra-utérine

Chapitre 12 Grossesse extra-utérine




La fréquence des grossesses extra-utérines a augmenté de 1970 à 1990, son taux est passé de 0,58 % des grossesses à 1,3 % (Coste et al., 1994). Elle a décru de 1990 à 2000 et actuellement, on observe une diminution des GEU sous contraception et une augmentation des GEU sans contraception. Il y a eu 13 000 GEU en France en 2005.


Parmi les femmes qui souhaitent une grossesse, 2 % auront une GEU (Bouyer et al., 2002). Cette augmentation paraît liée à trois facteurs :



La GEU reste une affection grave pour deux raisons essentielles :



C’est pourquoi il faut penser au diagnostic de GEU au moindre signe d’appel et recourir aux examens complémentaires afin de permettre une chirurgie conservatrice sur une paroi non rompue.



Pourquoi la GEU ?


L’œuf fécondé séjourne 72 heures à la jonction ampullo-isthmique du fait :



L’œuf franchit l’isthme à la fin du 3e jour postovulatoire grâce :




La migration à travers l’isthme s’effectue en 8 heures et l’œuf fécondé fait issue dans la cavité utérine 80 heures après l’ovulation au stade de 16 blastomères. Chez la femme, le trophoblaste s’implante au 6e jour postovulatoire, quel que soit le lieu où il se trouve : trompe, ovaire, péritoine, alors que chez l’animal cette implantation ne peut se faire que sur l’endomètre.


La grossesse extra-utérine résulte donc d’un retard dans le transport de l’œuf fécondé.



Pourquoi l’œuf est-il en retard ?




Par arrêt ou ralentissement de sa migration dans la trompe


Le péristaltisme tubaire peut en effet être perturbé de multiples manières, soit par :



La pilule du lendemain expose à un risque de GEU de 10 %, car les estrogènes provoquent un spasme musculaire au niveau de l’isthme tubaire. Cette augmentation du risque n’est pas observée avec le lévonorgestrel – Norlevo® (Afssaps, 2003).


Les progestatifs microdosés en prise continue augmentent le risque de GEU en raison de leur action inhibitrice sur les contractions musculaires de la trompe.


L’induction de l’ovulation par les gonadotrophines humaines (HMG–HCG) favorise les GEU dont le taux peut atteindre 3 %. Il est alors fréquent de noter l’association grossesse intra-utérine et grossesse extra-utérine. Cette complication s’observe au cours des ovulations multiples, les ovulations pouvant survenir à des moments différents après l’injection d’HCG. Le premier ovocyte a un transit normal mais les modifications hormonales liées au premier corps jaune perturbent le transport des ovules supplémentaires.


Après FIV, malgré la réimplantation de l’œuf dans l’utérus, la GEU est possible (5 à 10 %) s’il reste une trompe perméable à la corne. La GEU est fréquente aussi après GIFT ou ZIFT.


Enfin, un œuf anormal pourrait par lui-même être cause du retard de la migration, donnant une GEU sur trompes saines.


Le tabac jouerait sur la motilité tubaire par toxicité directe de la nicotine. Il serait en cause dans 30 % des GEU (Bouyer, 2003).


Âge : le risque de GEU augmente avec l’âge surtout après 35 ou 40 ans (Coste, 1990).


Les dispositifs intra-utérins (DIU) diminuent le risque de GEU de 1,6 par rapport aux femmes qui ne prennent pas de contraception, ce qui montre l’effet contraceptif du stérilet qui diminue les grossesses qu’elles soient intra- ou extra-utérines. Si, par contre, on compare le taux de GEU entre femmes enceintes et non enceintes portant un stérilet, on observe que le risque de GEU est dix fois plus élevé chez les femmes porteuses du DIU. La réalité est que le stérilet prévient mieux les grossesses intra-utérines que les GEU (99,5 % versus 95 %). Ce risque est supérieur avec le stérilet au cuivre qu’avec un DIU au lévonorgestrel (Bouyer, 2003). Il augmente lorsque l’utilisation du DIU au cuivre dépasse 25 mois. Il est maximal dans les 3 mois qui suivent l’ablation du DIU.


Le port antérieur d’un stérilet augmente aussi (peut-être par l’intermédiaire d’une inflammation persistante) le risque de GEU.


Les antécédents de fausses couches spontanées et d’IVG augmentent aussi le risque de GEU vraisemblablement via des infections liées à ces interventions.


Le tableau 12.1 résume les facteurs de risque de GEU chez la femme sans contraception. Les antécédents d’infection ou de chirurgie tubaire et le tabac sont les principaux facteurs de risque. Chacun explique un tiers des GEU et ils ont aussi un rôle causal, ce qui n’est pas le cas de l’âge ou des antécédents de FCS, d’IVG, de stérilet.


Tableau 12.1 Facteurs de risque de la grossesse extra-utérine en France chez la femme sans contraception en comparant à des femmes venant d’accoucher.











































Antécédents Odd ratio
Infection génitale Salpingite probable 2
Salpingite certaine 3,5
Chirurgie tubaire 3,5
Tabac Ex-fumeuse 1,5
10–19 cigarettes/j 3
Âge 30–39 ans 1,5
≥ 40 ans 3
Antécédents obstétricaux FCS 3
IVG 2
Antécédent de stérilet 1,5
Infertilité antérieure 2,5

(d’après le registre d’Auvergne ; Bouyer, 2003)


En clinique, il semble qu’il faille distinguer deux groupes de GEU :





Aspect de la GEU





Évolution


La régression spontanée est possible, avec résorption progressive de l’œuf et des caillots, liée à une implantation superficielle de l’œuf, souvent au niveau du pavillon ; elle est associée à un taux assez bas d’HCG. Les moyens de diagnostic moderne ont montré que cette évolution est plus fréquente qu’on ne le pensait (50 à 60 % des cas) et de ce fait passe souvent inaperçue.


Le plus souvent l’évolution se fait vers les complications.


L’hématosalpinx : les villosités ouvrent les vaisseaux de la paroi créant de petites hémorragies qui se collectent dans la trompe. Ce sang s’écoule par l’utérus, et souvent aussi dans le cul-de-sac de Douglas, c’est en fait le tableau d’une GEU encore intratubaire au début, plus que celui d’une vraie complication.


En l’absence d’intervention, des accidents hémorragiques graves vont survenir par :



Cette hémorragie peut être diffuse et brutale, c’est l’inondation intrapéritonéale de constitution rapide, pouvant atteindre 3 ou 4 litres de sang. Mais elle peut être circonscrite : c’est l’hématocèle dont la constitution plus lente laisse au péritoine pelvien et aux organes de voisinage le temps de cloisonner l’hématome. Cette hématocèle est le plus souvent rétro-utérine et comble le cul-de-sac de Douglas mais peut aussi être anté-utérine ou péritubaire.


Enfin, l’hémorragie peut être intraligamentaire, dédoublant les feuillets du ligament large, source de difficultés opératoires.



Diagnostic clinique


Le diagnostic de la GEU reste difficile :





Dans la forme clinique typique de GEU au début


Il s’agit d’une femme jeune qui se sait enceinte et qui consulte parce que sa grossesse est anormale. En effet, elle souffre et elle saigne.


Les douleurs sont hypogastriques basses, volontiers unilatérales, à type de torsion surtout, de coliques, très caractéristiques. Elles peuvent aussi être associées à des douleurs irradiant vers l’épaule évoquant un hémopéritoine.


Les pertes sont constituées de sang noirâtre sépia peu abondant. Cette association grossesse–douleurs–métrorragies évoque la GEU.


À l’inverse de la fausse couche, le saignement extériorisé est de faible abondance.


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Apr 23, 2017 | Posted by in GYNÉCOLOGIE-OBSTÉTRIQUE | Comments Off on 12: Grossesse extra-utérine

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