Traitement de la migraine

36. Traitement de la migraine

Jean Grellet


Praticien hospitalier, pharmacien, maître de conférences, laboratoire de pharmacocinétique et pharmacie clinique, université Victor-Segalen/Bordeaux-II et CHU de Bordeaux, France

Marie-Claude Saux


Praticien hospitalier, pharmacien, professeur, laboratoire de pharmacocinétique et pharmacie clinique, université Victor- Segalen/Bordeaux-II et CHU de Bordeaux, France


PLAN DU CHAPITRE







Définition. Formes cliniques754


Physiopathologie754


Prévalence. Conséquences755


Diagnostic755


Médicaments utilisés756




Médicaments de la crise756


Critères de choix thérapeutique760




Traitements non médicamenteux760


Traitements de la crise760




Efficacité des traitements de la crise760


Stratégie du traitement de la crise de migraine761


Traitements de fond762




Efficacité des traitements de fond762


Stratégie du traitement de fond762


Traitements des populations et situations particulières763




Traitement de l’enfant763


Traitement de la femme enceinte764


Traitement des céphalées par abus médicamenteux764


Optimisation thérapeutique764




Optimisation posologique764




Dans le traitement de la crise migraineuse764


Dans le traitement de fond de la migraine764


Prévention de l’iatropathologie764




Traitement de la crise migraineuse764


Traitement de fond de la migraine768


Conseils au patient769


CE QU’IL FAUT RETENIR770


ÉTUDE DE CAS CLINIQUES771


Références bibliographiques772



GÉNÉRALITÉS



DÉFINITION. FORMES CLINIQUES



L’International Headache Society (IHS, 2004) a établi une classification des migraines qui définit six types différents dont les plus fréquents sont les migraines sans aura (type 1.1), sans aura probable (type 1.6) et les migraines avec aura (type 1.2) (tableau 36.1)






Tableau 36.1 Classification des migraines d’après l’International
Headache Society, 2004.



1.1 Migraine sans aura


1.2. Migraine avec aura




1.2.1 Migraine avec aura typique et céphalée


1.2.2 Migraine avec aura typique sans céphalée migraineuse


1.2.3 Migraine avec aura typique sans céphalée


1.2.4 Migraine familiale hémiplégique


1.2.5 Migraine sporadique hémiplégique


1.2.6 Migraine type basilaire


1.3. Syndromes périodiques de l’enfance, précurseurs possibles de la migraine ou associés à la migraine (vertige, hémiplégie alternante)


1.4. Migraine rétinienne


1.5. Complications de la migraine


1.6. Migraines sans aura probables remplissant l’ensemble des critères diagnostiques à l’exception d’un seul



► Migraine sans aura


Elle concerne 70 à 90% des sujets migraineux. La crise de migraine est précédée plusieurs heures avant la céphalée, chez environ 50% des migraineux, de signes annonciateurs ou «prodromes» que le malade apprend vite à reconnaître. Ces prodromes varient d’un sujet à l’autre mais sont relativement constants chez un même individu. Il s’agit principalement d’asthénie, de somnolence, de sensation de faim ou de troubles de l’humeur (irritabilité, euphorie).

Le tableau clinique de la crise elle-même est variable mais certains symptômes sont constants et utilisés pour le diagnostic. La céphalée est toujours présente. D’apparition rapidement progressive, sa durée est comprise entre 4 et 72 heures. Elle présente au moins deux des caractéristiques suivantes:




– temporale ou sus-orbitale typiquement pulsatile (en cadence avec le pouls);


– unilatérale (prédomine d’un seul côté de la tête);


– modérée ou sévère;


– aggravée lors de l’effort physique;

De plus, la céphalée est associée à au moins un des symptômes d’accompagnement suivants:




– nausées et/ou vomissements;


– photophobie, phonophobie ou osmophobie (Silberstein, 2001).

La crise de migraine se termine habituellement par une phase de sommeil plus ou moins longue, le malade se réveillant avec une sensation de fatigue importante.

Certains patients se plaignent, à leur réveil, de symptômes résiduels tels que douleurs musculaires ou perte d’appétit.


► Migraine avec aura


Elle regroupe les termes anciens de migraine accompagnée, ophtalmique, hémiparésique, hémiparesthésique. Elle est moins fréquente puisqu’elle ne concerne que 10 à 30% des cas.

La céphalée est, dans ce cas, précédée voire accompagné d’une «aura» qui consiste en un dysfonctionnement neurologique transitoire, totalement réversible. Ce trouble neurologique est d’abord focal puis s’étend progressivement en quelques minutes, réalisant le phénomène de «marche migraineuse». Les symptômes régressent en moins d’une heure avant ou parallèlement à la céphalée. Les symptômes constituant l’aura migraineuse, variables d’un sujet à l’autre, sont par ordre de fréquence décroissante:




– des troubles visuels (migraine ophtalmique) touchant les deux yeux à type de:




• scotome: zone de champ visuel où la vision est floue ou absente,


• scotome scintillant: tache scintillante bordée par une ligne brisée au travers de laquelle le sujet ne distingue plus rien;


– des troubles sensitifs de type paresthésie avec fourmillements et engourdissement débutant de façon localisée au niveau d’un ou plusieurs doigts puis s’étendant au bras et à la moitié du visage («migraine hémiparésique»);


– des troubles de langage rares: aphasie = difficulté d’expression orale ou écrite et/ou de la compréhension («migraine aphasique»);


– des troubles moteurs très rares: faiblesse musculaire («migraine hémiparésique») ou suppression de la motricité de la moitié du corps («migraine hémiplégique»).

Les autres symptômes de la migraine avec aura sont les mêmes que ceux de la migraine commune mais la céphalée est généralement plus courte (6 à 8 heures) voire même absente.

À noter qu’un même patient peut alterner des migraines avec aura et des migraines sans aura.


PHYSIOPATHOLOGIE


La physiopathologie de la migraine est complexe et sa compréhension n’en est encore que très partielle. Différentes théories ont été proposées pour expliquer les phénomènes conduisant à la crise migraineuse.





– théories «vasculaires» pour lesquelles les crises de migraine résulteraient d’anomalies de vascularisation cérébrale:





• spasme vasculaire initial suivi d’une vasodilatation secondaire pour Graham (1938). La céphalée migraineuse dans ce cas résulterait d’une stimulation de récepteurs vasculaires à l’étirement conduisant à une activation secondaire de neurones périvasculaires (Willems, 2003);


– théories «neuroniques» pour lesquelles la migraine proviendrait de l’activation de structures neuronales et du relargage secondaire de neurotransmetteurs. Plusieurs auteurs ont suggéré que la migraine résulterait d’un processus de dépression corticale (Olesen, 1982). Celle-ci consisterait en une dépolarisation puis une inactivation de structures nerveuses du cortex, d’extension progressive, qui s’accompagnerait initialement d’une hyperémie puis d’une baisse de débit sanguin cérébral. Si cette théorie permet d’expliquer facilement certains symptômes comme les prodromes, elle se révèle incapable d’apporter une explication sur l’origine de la céphalée. Par ailleurs, le processus de dépression corticale n’a jamais pu être mis en évidence chez l’homme, contrairement à l’animal;


– théorie «neurogénique» qui réconcilie les théories vasculaires et les théories neurologiques. Selon cette théorie, la céphalée migraineuse est la conséquence de la stimulation de structures nerveuses trigéminales conduisant à une inflammation et à dilatation des vaisseaux des méninges. Cette théorie neurogénique est fondée sur deux observations faites par Lance en 1983 et Moskowitz en 1992. Lance a démontré que la stimulation de certaines structures nerveuses conduisait à des modifications de flux sanguin identiques à celles observées dans la migraine. Par ailleurs, Moskowitz a observé que l’activation du nerf trijumeau entraînait une augmentation de la perméabilité vasculaire au niveau de la dure-mère et de la pie-mère conduisant à un processus inflammatoire et à une stimulation des récepteurs périvasculaires de la douleur.

La tendance actuelle est donc de proposer une théorie «neurovasculaire» intégrant à la fois les hypothèses vasculaires et neuroniques et prenant en compte les données récentes sur le rôle de la sérotonine et de peptides pro-inflammatoires et algogènes.

Ainsi, le mécanisme physiopathologique proposé pour expliquer la crise migraineuse consiste en une perturbation neurovasculaire et s’appuie sur la notion de «seuil migrainogène» introduite par Lance en 1990.

Selon cette théorie:




– le déclenchement des crises migraineuses résulterait d’une sensibilité particulière des migraineux à «seuil migrainogène bas» vis-à-vis de stimuli endogènes (rythmes biologiques) ou exogènes (stress, lumière);


– les prodromes résulteraient de modifications de l’activité de l’hypothalamus sous l’action des mêmes stimuli;


– les étapes physiopathologiques de la crise seraient alors les suivantes:




• activation de structures nerveuses du tronc cérébral entraînant une sécrétion noradrénergique conduisant à une agrégation plaquettaire puis à un relargage de sérotonine par les plaquettes,


• vasoconstriction de certaines artères cérébrales sous l’action de la sérotonine libérée entraînant une ischémie locale transitoire à l’origine de l’aura décrite par certains patients,


• chute brutale du taux de sérotonine plasmatique en raison de son catabolisme très intense,


• stimulation trigéminale entraînant la libération de neuropeptides inflammatoires (substance P, Calcitonin Gene Relative Peptide [CGRP]) conduisant à une réaction inflammatoire an niveau de la dure-mère avec vasodilatation, extravasation plasmatique à l’origine d’une stimulation des récepteurs périvasculaires de la douleur.

Cette théorie est en accord avec l’hypothèse d’action des agonistes sérotoninergiques 5HT1 qui agiraient sur la céphalée migraineuse en empêchant la libération de la substance P et du CGRP.


PRÉVALENCE. CONSÉQUENCES


La migraine est une maladie commune. Sa prévalence en France et dans les pays européens est estimée entre 12 et 15% de la population (Henry, 1993; Stewart, 1994).

C’est une maladie qui demeure sous-diagnostiquée et l’on estime qu’en France 30 à 45% des patients ignorent leur statut de migraineux. La migraine est une pathologie qui affecte toutes les tranches d’âge mais de façon variable. Si un enfant sur 10 à 20 environ souffre de migraines occasionnant des céphalées récurrentes (Annequin, 2005), la classe d’âge la plus exposée est celle des adultes de 30 à 40 ans. Par ailleurs, les femmes sont plus fréquemment atteintes que les hommes avec un sexe ratio de 3 (Stewart, 1994). L’impact de cette maladie sur le plan de la santé publique est important compte tenu de son caractère invalidant et de son coût social en termes d’absentéisme professionnel et de consommation médicale. En Grande-Bretagne en 1982, 75% des sujets souffrant de migraines estimaient que leur maladie avait un impact non négligeable sur leur vie sociale, familiale et professionnelle (Mullis, 1982). Aux États-Unis, le coût économique direct et indirect de cette pathologie est estimé à 17 billions de dollars (Goldberg, 2005). Ces constatations plaident en faveur d’une prise en charge plus performante et large de cette pathologie d’autant que des traitements efficaces sont désormais disponibles.



MÉDICAMENTS UTILISÉS


Les médicaments utilisés pour le traitement de la migraine se divisent en deux grandes catégories:




– médicaments de la crise;


– médicaments du traitement de fond.


Médicaments de la crise


Le traitement de la crise de migraine fait appel:




– à des médicaments non spécifiques comme les antalgiques périphériques ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens (qui ne seront pas développés dans ce chapitre);


– à des produits plus spécifiques comme les dérivés de l’ergot de seigle et les agonistes 5HT1B/D.


► Antalgiques périphériques (tableau 36.2)


Les antalgiques périphériques utilisés dans le traitement de la migraine sont l’acide acétylsalicylique qui possède une action anti-inflammatoire, antalgique, antipyrétique et antiagrégante plaquettaire, le paracétamol (seulement antalgique et antipyrétique) et, dans une moindre mesure, la floctafénine et la noramidopyrine.



























































































Tableau 36.2 Antimigraineux non spécifiques utilisés dans le traitement de la crise migraineuse.
Ce tableau n’est pas exhaustif et ne mentionne qu’une partie des spécialités, des formes et des dosages disponibles. Par ailleurs, de nombreux génériques sont commercialisés.
Classes pharmacologiques Principes actifs Noms commerciaux Différentes formes galéniques Différents dosages
antalgiques périphériques aspirine Aspégic Sachets poudre 100, 250, 500, 1 000mg

Catalgine Sachets poudre 100, 250, 500, 1 000mg

Aspirine UPSA Comprimés effervescents 500, 1 000mg
paracétamol Doliprane
Efferalgan
Sachets poudre 80, 100, 150, 200, 250, 300, 500, 1 000mg

Efferalgan Comprimés sécables ou effervescents
Solution buv. pédiatr. 90mL
500, 1 000mg
2mL = 60mg

Dafalgan
Geluprane
Gélules
Gélules
500mg
500mg

Paralyoc Lyocs 250, 500mg
floctafénine Idarac Comprimés 200mg
antalgiques périphériques associés aspirine + métoclopramide Céphalgan
Migpriv
Sachets buv 900mg aspirine + 10mg métoclopramide
paracétamol + codéine Codoliprane
Dafalgan codéiné
Efferalgan codéiné
Comprimés sécables
Comprimés
Comprimés effervescents
Paracétamol: 400 ou 500mg
Codéine: 20 ou 30mg
paracétamol + dextropropoxyphène ± caféine Propofan
Di-Antalvic
Comprimés sécables
Gélules
Paracétamol: 400 ou 500mg
Dextropropoxyphène:
27 ou 30mg ± caféine 30mg
paracétamol+noramido pyrine + caféine Salgydal à la noramidopyrine Comprimés
Suppositoires
Noramidopyrine: 250-500mg
Codéine: 15-30mg
Paracétamol: 250-500mg
AINS ibuprofène Brufen
Gélufene
Nurofen
Nureflex
Comprimés, suppositoires
Gélules
Comprimés
Susp. buvable flacon 150mL
400-500mg
200mg
200mg
20mg/mL
naproxène Apranax
Naprosyne
Sachets, suppositoires
Comprimés, suppositoires
250, 500mg
250, 500, 750, 1 000mg
diclofénac Voltarène Comprimés
Suppositoires
25, 50mg
25, 100mg
kétoprofène Profénid
Bi-profénid
Toprec
Comprimés
Suppositoires
Gélules
Sirop enf/nourr
100, 150mg
100mg
50mg
1mg/1mL

Leur mécanisme d’action dans la migraine n’est pas connu. Deux spécialités, Migpriv et Céphalgan sont des associations d’aspirine et de métoclopramide dont l’intérêt est de réduire les troubles digestifs et d’augmenter la biodisponibilité de l’aspirine.

Les antalgiques centraux (codéine, dextropropoxyphène) peuvent être associés à un ou plusieurs antalgiques périphériques: codéine – paracétamol, dextropropoxyphène – paracétamol.



► Dérivés de l’ergot de seigle































































Tableau 36.3 Antimigraineux spécifiques utilisés dans le traitement de la crise migraineuse.
Classes pharmacologiques Principes actifs Noms commerciaux Différentes formes galéniques Différents dosages
dérivés de l’ergot de seigle ergotamine tartrate + caféine Gynergene caféiné Comprimé 1mg
dihydroergotamine Dihydroergotamine
injectable Novartis
Solution injectable sous-cutanée, IM et IV lente 1mg/1mL
Diergo-Spray Solution nasale 1mL = 4mg = 4 pulvérisations
agonistes sérotoninergiques 5HT1 (triptans) sumatriptan Imigrane Sol. injectable sous-cutanée 6mg/0,5mL
Comprimé 100mg
Solution nasale 10mg/0,1mL, 20mg/0,1mL
zolmitriptan Zomig Comprimé 2,5mg
Zomigoro Comprimé orodispersible 2,5mg
naratriptan Naramig Comprimé 2,5mg
élétriptan Relpax Comprimé 20 et 40mg
almotriptan Almogran Comprimé 12,5mg


• Tartrate d’ergotamine

L’ergotamine provoque une vasoconstriction périphérique généralisée et en particulier une vasoconstriction des artères cérébrales qui serait à l’origine de son action antimigraineuse. Ses effets pharmacologiques sont complexes, associant des effets agonistes dopaminergiques, antagonistes sérotoninergiques au niveau des récepteurs 5HT2 (vasoconstricteurs) et à fortes doses agonistes α-adrénergiques. L’ergotamine est rapidement résorbée au niveau intestinal. Sa biodisponibilité est relativement faible (60%) mais est augmentée par association à la caféine. Elle est éliminée de façon relativement lente (demi-vie d’environ 20 heures) essentiellement par métabolisation hépatique, les métabolites étant retrouvés dans la bile et les fèces. Ce mode d’élimination est à l’origine d’interactions médicamenteuses et de contre-indications.



► Agonistes 5HT1 ou triptans (tableau 36.3)


Cinq agonistes sérotoninergiques 5HT1 sont disponibles en France en 2006 pour traiter la crise de migraine: le sumatriptan, le zolmitriptan, le naratriptan, l’élétriptan et l’almotriptan respectivement commercialisés sous les noms d’Imigrane, Zomig – Zomigoro, Naramig, Relpax et Almogran.

Ces cinq principes actifs font partie de la famille thérapeutique des triptans qui possèdent une structure chimique à noyau indole très proche de celle de la sérotonine. Ce sont des agonistes sélectifs des récepteurs 5HT1 B/D sérotoninergiques vasculaires qui provoquent la vasoconstriction des vaisseaux cérébraux de la dure-mère. Ils se différencient par leur activité intrinsèque et leurs caractéristiques pharmacocinétiques. Les doses efficaces de triptans s’échelonnent de 2,5 mg pour le zolmitriptan à 100 mg pour le sumatriptan.

Les triptans sont rapidement résorbés après administration orale ou nasale mais leur biodisponibilité est très variable. Faible pour le sumatriptan (15%), elle est plus élevée pour le zolmitriptan (40%) et l’élétriptan (50%) et atteint 60 à 70% pour le naratriptan et l’almotriptan. Elle peut être réduite lors de la crise migraineuse (élétriptan).

Leurs modalités d’élimination sont également différentes. D’une manière générale, les triptans sont éliminés rapidement avec des demi-vies comprises entre 2 heures pour le sumatriptan et le zolmitriptan et 6 heures pour l’almotriptan. L’élimination du sumatriptan, du zolmitriptan et de l’élétriptan se fait essentiellement par métabolisme hépatique alors que le naratriptan et l’almotripan s’éliminent à 70% sous forme inchangée par voies rénale (50%) et biliaire.


► Médicaments adjuvants


Ces médicaments n’ont pas d’action sur la crise de migraine mais sont prescrits en association avec les antimigraineux pour lutter contre certains symptômes associés aux céphalées. Il s’agit:




– d’antiémétiques comme le métoclopramide (Primpéran), la dompéridone (Péridys, Motilium), la métopimazine (Vogalène). Ils sont prescrits pour diminuer les nausées et les vomissements et favoriser la résorption des principes actifs;

d’anxiolytiques divers.


► Médicaments du traitement de fond


Les médicaments prescrits pour le traitement de fond de la migraine sont:




– les β-bloquants;


– les antisérotoninergiques dérivés ou non de l’ergot de seigle.

D’autres produits sont également utilisés comme des antagonistes calciques: vérapamil (Isoptine), flunarizine (Sibélium); des α bloquants: indoramine (Vidora); des antiépileptiques: topiramate (Epitomax), valproate de sodium (Depakine), gabapentine (Neurontin) et des antidépresseurs: amitryptiline (Laroxyl).


► β-bloquants








































































































































Tableau 36.4 Antimigraineux utilisés dans le traitement de fond de la migraine.
*Médicaments ayant l’indication AMM dans le traitement de fond de la migraine.
Classes pharmacologiques Principes actifs Noms commerciaux Différentes formes galéniques Différents dosages
antagonistes sérotoninergiques dérivés de l’ergot de seigle dihydroergotamine Dihydroergotamine
Novartis*
Flacon gouttes buv 1mg = 10 gouttes
Comprimé sécable 3mg
Tamik* Capsules 3mg
Ikaran* Flacon gouttes 1mg = 10 gouttes
Comprimé LP 5mg
Séglor* Gélules LP 5mg
Lyocs 5mg
méthysergide Désernil* Comprimé sécable 1,65mg
β-bloquants propranolol Avlocardyl* Comprimé sécable 40mg
Avlocardyl LP* Gélule LP 80 et 160mg
Propranolol
Ratiopharm LP*

Hémipralon LP 80*
β-bloquants (suite) métoprolol Lopressor Comprimé sécable 100mg


Séloken


Lopressor LP* Comprimé LP 200mg


Séloken LP*

aténolol Ténormine
Aténolol
Betatop
Comprimé 50 et 100mg

timolol Timacor Comprimé sécable 10mg
antagonistes sérotoninergiques divers oxétorone Nocertone* Comprimé sécable 60mg
pizotifène Sanmigran* Comprimé 0,5mg
antagonistes calciques flunarizine Sibelium* Comprimé sécable 10mg
α-bloquants indoramine Vidora* Comprimé 25mg
antiépileptiques topiramate Epitomax* Comprimé
Gélule
25 et 50mg

valproate de sodium Depakine
Nombreux
génériques
Comprimé
Comprimé LP
Solution buvable
200mg
500mg

gabapentine Neurontin
Nombreux génériques
Comprimés
Gélules
100, 300, 400, 600 et 800mg
antidepresseurs amitriptyline Laroxyl
Elavyl
Comprimé
Solution buvable
25 et 50mg
40mg/mL

Le propranolol est la molécule de référence et dispose comme le métoprolol d’une AMM dans cette indication mais d’autres β-bloquants ont démontré leur efficacité: aténolol, timolol

Leur mécanisme d’action reste mal compris. Ont été évoqués: une vasoconstriction par blocage des récepteurs β et un effet anxiolytique. Le propranolol aurait également une action antisérotoninergique.

Le propranolol et le métoprolol ont des caractéristiques pharmacocinétiques proches. Ces deux principes actifs sont résorbés de façon rapide et importante mais leur biodisponibilité est réduite du fait d’un effet de premier passage hépatique.

Leur élimination se fait essentiellement par métabolisation hépatique (demi-vie de 4h) avec formation de métabolites hydroxylés conservant une activité β-bloquante résiduelle pour le propranolol.

L’aténolol et le timolol sont résorbés de façon rapide au niveau du tractus intestinal et possèdent respectivement des biodisponibilités de 50 et 75%. Ces deux β-bloquants sont éliminés principalement par voie rénale avec des demi-vies de 9 heures pour l’aténolol et 4h pour le timolol.

Tous les β-bloquants cités traversent la barrière fœto-placentaire et sont retrouvés dans le lait.


► Antisérotoninergiques (tableau 36.4)


La dihydroergotamine (DHE) est assez fréquemment utilisée dans le traitement de la migraine (tableau 36.4). Ses propriétés ont déjà été évoquées dans le paragraphe concernant les médicaments de la crise.

Elle est administrée dans ce cas principalement par voie orale pour laquelle la biodisponibilité est réduite (environ 30%).

L’oxétorone (Nocertone) est un neuroleptique mineur ayant des effets antihistaminiques H1, α-adrénolytique et antisérotoninergique.

Le pizotifène (Sanmigran) est un dérivé tricyclique initialement proposé comme antidépresseur, possédant des propriétés antihistaminique, anticholinergique et antisérotoninergique au niveau des vaisseaux cérébraux et des plaquettes sanguines. Le pizotifène possède une biodisponibilité élevée. Son élimination est lente (demi-vie de 23 heures) et se fait par métabolisation hépatique en dérivés déméthylés et glucuronoconjugués.



► Autres médicaments






– antiépileptiques: topiramate (Epitomax), valproate de sodium (Depakine), gabapentine (Neurontin). Le topiramate possède une AMM dans l’indication: traitement de fond de la migraine. Son mécanisme d’action reste à élucider. Une des hypothèses d’action proposée est une limitation de la stimulation des cellules nerveuses;


– antagonistes calciques: vérapamil (Isoptine) et flunarizine (Sibelium). Leur effet dans la migraine pourrait être dû à un blocage de l’entrée de calcium dans les cellules musculaires lisses vasculaires cérébrales ou à une modulation de l’activité des neurotransmetteurs;


– α-bloquants: l’indoramine (Vidora) agirait par blocage des récepteurs α-vasculaires vasoconstricteurs;


– antidépresseurs tricycliques: amitriptyline (Laroxyl), clomipramine (Anafranil). Leur action dans la migraine semble indépendante de leur effet antidépresseur.


CRITÈRES DE CHOIX THÉRAPEUTIQUE


Le traitement de la migraine repose sur trois approches complémentaires:




– l’instauration d’un traitement non médicamenteux prophylactique;


– la mise en œuvre d’un traitement médicamenteux des crises;


– l’instauration éventuelle d’un traitement médicamenteux de fond à visée prophylactique.


TRAITEMENTS NON MÉDICAMENTEUX



L’objectif du traitement non médicamenteux de la migraine est de réduire l’intensité et la fréquence des crises. Cette approche doit systématiquement être conseillée au patient. Elle consiste à éviter les situations pouvant conduire à un déclenchement de crises migraineuses.

Certains facteurs inducteurs de crises sont bien connus et souvent identifiés par le patient lui-même: facteurs alimentaires (chocolat, alcool), hormonaux (règles, contraception), sensoriels (lumière, odeurs), situations de stress ou au contraire de détente (migraine du week-end).

D’autres facteurs moins connus (sommeil prolongé, hypoglycémie) doivent être recherchés par le médecin qui doit inciter le malade à les prévenir.

Les techniques de relaxation, de gestion du stress et de biofeedback peuvent être proposées aux migraineux car elles sont susceptibles de leur apporter des bénéfices en termes de réduction de la fréquence des crises. Ainsi, la technique de biofeedback, qui consiste en un contrôle volontaire de fonctions biologiques normalement sous contrôle involontaire, s’est révélée capable, dans un essai clinique contrôlé, d’améliorer la situation clinique chez 43% des patients versus 17% dans le bras témoin (Göebel, 2005). Enfin certaines pratiques comportementales simples semblent avoir un intérêt en limitant et en enrayant les symptômes lors des crises migraineuses (voir conseils aux patients).


TRAITEMENTS DE LA CRISE


Les traitements de la crise sont à but curatif. Ils visent à faire disparaître la céphalée ainsi que les symptômes d’accompagnement ou au moins à en réduire la durée et/ou l’intensité pour permettre au patient une reprise d’activité.

Ce sont des traitements ponctuels, prescrits seuls ou associés à un traitement de fond. Quatre classes médicamenteuses sont utilisées dans le traitement de la crise de migraine: les antalgiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, les dérivés de l’ergot de seigle et les agonistes 5HT1.

La plupart des médicaments n’agissent que sur la composante céphalalgique de la crise nécessitant la co-prescription de médicaments adjuvants pour traiter les symptômes d’accompagnement (nausées, etc.).

Le choix d’un traitement de la crise doit reposer sur des critères d’efficacité, de non-contre-indication et de bonne tolérance (se reporter aux Tableau 36.7, Tableau 36.8 and Tableau 36.9 pour les effets indésirables et contre-indications).

Les essais cliniques fournissent des pourcentages de patients répondeurs mais il n’est pas possible de prévoir de façon fiable l’efficacité d’un médicament chez un patient donné. De ce fait, le traitement devra être individualisé tant en ce qui concerne le choix des médicaments que les posologies.


Efficacité des traitements de la crise


L’efficacité des traitements de la crise a été évaluée dans différents essais cliniques sur la base de leur capacité à faire régresser la céphalée. Dans quelques essais, l’évaluation a également porté sur les symptômes associés: nausées, photo/phonophobie. Les deux critères utilisés pour évaluer l’efficacité du traitement sur la douleur étaient:




– l’existence d’une réponse partielle au traitement: amélioration de la céphalée;


– l’existence d’une réponse totale, c’est-à-dire la disparition de la céphalée.


Dans les études, l’effet placebo est particulièrement significatif puisque 20 à 30% des patients voient leur état s’améliorer sous placebo.


Associée ou non au métoclopramide, l’aspirine par voie orale exerce une efficacité sensiblement équivalente (57% de patients améliorés 2h après la prise) (Tfelt-Hansen, 1980, Ross-Lee, 1982 and Oldman et al., 2002). En outre, l’association au métoclopramide s’accompagne d’une réduction des nausées. L’avantage de l’aspirine et du paracétamol résulte de leur facilité d’obtention et de leur coût réduit.

Administrés par voie orale, les AINS suivants: naproxène (750-1 250mg) (Pradalier, 1985, Nestvold, 1985 and Treves et al., 1992) kétoprofène (100mg) (Karabestos, 1997), ibuprofène (200-400mg) (Havanka-kanniainen, 1989; Codispoti, 2001) et diclofénac (50-100mg) (Karachalios, 1992; The diclofenac K/Sumatripan group, 1999) améliorent significativement la céphalée 2 heures après la prise. Leur efficacité est supérieure par voie IM puisque dans ce cas l’amélioration concerne 85 à 90% des patients. En pratique clinique, l’efficacité des AINS se situe entre celle du paracétamol et celle des triptans.

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May 13, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on Traitement de la migraine

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