Traitement de la douleur

35. Traitement de la douleur

Michel Luyckx


Professeur de pharmacie clinique, UFR pharmacie, Lille, praticien hospitalier pharmacien, Centre hospitalier de Denain, France


PLAN DU CHAPITRE







Physiopathologie724




Mécanismes724


Classification des douleurs724


Médicaments utilisés725




Classification des antalgiques725


Mécanismes d’action725


Structure des antalgiques730


Pharmacocinétique730


Critères de choix thérapeutique733




Douleurs neurogènes733


Douleurs par excès de nociception733


Douleurs mixtes neurogènes et par excès de nociception734


Optimisation thérapeutique734




Optimisation posologique734




Posologies et plan de prises734


Adaptation posologique738


Optimisation de la voie d’administration739




Choix de la voie d’administration739


Conseils d’administration740


Prévention de l’iatropathologie741




Prévention des risques majeurs741


Préventions des effets indésirables744


Conseils au patient746


CE QU’IL FAUT RETENIR747


ÉTUDE DE CAS CLINIQUES748


Références bibliographiques751



GÉNÉRALITÉS



PHYSIOPATHOLOGIE



Cette définition qui intègre la dimension affective et émotionnelle à la dimension sensorielle paraît la plus satisfaisante, car elle rend compte de l’ensemble des mécanismes générateurs de la douleur qui peuvent être d’origine physique ou psychologique.


Mécanismes




► Mécanismes périphériques


Des récepteurs appelés nocicepteurs peuvent être activés ou sensibilisés par des stimuli mécaniques (pression), thermiques (chaleur, froid) ou chimiques (substances algogènes). Ces nocicepteurs sont situés en périphérie dans les tissus cutanés, musculaires, articulaires et dans la paroi des viscères.

Les nocicepteurs activés vont générer des messages qui seront véhiculés par deux types de fibres: les fibres Aδ peu myélinisées et C non myélinisées. Ces nocicepteurs qui sont en général des chémorécepteurs vont être activés ou sensibilisés par des médiateurs libérés à proximité de ces récepteurs. Les lésions tissulaires peuvent entraîner la libération d’ions H+, K+ et activer les nocicepteurs. L’inflammation par libération de prostaglandines (PGE2 et PGI2), de leucotriènes (LTB4) et de bradykinine peut permettre la sensibilisation des nocicepteurs aux ions H+ et K+. Les nocicepteurs peuvent également libérer la substance P qui pourra autoactiver directement les nocicepteurs euxmêmes. Les nocicepteurs peuvent aussi entraîner la dégranulation mastocytaire, libérant ainsi l’histamine et la sérotonine qui pourront à leur tour activer les nocicepteurs.


► Mécanismes médullaires


Les fibres afférentes Aδ et C vont atteindre le SNC dans la substance grise de la moelle épinière, au niveau des racines rachidiennes postérieures. Le relais est alors pris par des neurones spinaux (médullaires) qui transmettent les messages nociceptifs vers les centres supérieurs (faisceau spinothalamique qui se projette vers les régions latérales et médianes du thalamus, faisceau spinoréticulaire qui se projette vers la formation réticulée au niveau bulbaire et faisceau spino-pontomésencéphalique qui se projette vers le mésencéphale).

Les enképhalines (ligands endogènes) se fixent sur les récepteurs opioïdes situés au niveau présynaptique des fibres afférentes Aδ et C et bloquent la libération de substance P, provoquant ainsi une dépression directe de la transmission du message nociceptif à l’étage médullaire.

D’autres médiateurs, comme la somatostatine, le vasointestinal peptide, les acides aminés excitateurs (glutamate) peuvent aussi jouer le rôle de neuromédiateurs au niveau médullaire.


► Mécanismes supraspinaux


Les messages nociceptifs arrivant au niveau des centres supérieurs provoquent:




– par les relais bulbaires: des réactions motrices et d’éveil;


– par les relais mésencéphaliques: des réactions émotionnelles;


– par les relais thalamiques: des réactions motrices et émotionnelles, la sensation d’intensité et de localisation de la douleur.


► Systèmes de contrôle


La douleur survient lorsqu’il y a rupture de l’équilibre entre les messages nociceptifs excitateurs et inhibiteurs, le message excitateur prenant alors le dessus.

Plusieurs types de contrôles peuvent être distingués:



Le contrôle segmentaire

Les afférences cutanées de type Aα et A (grosses fibres) qui sont à l’origine des sensations tactiles légères peuvent inhiber au niveau médullaire la transmission des influx nociceptifs (d’où l’utilisation des techniques de neurostimulation de faible intensité et de fréquence élevée pour combattre la douleur).


Le contrôle d’origine supraspinale

À partir du tronc cérébral (mésencéphale, bulbe) se projettent des voies descendantes inhibitrices sérotoninergiques et noradrénergiques qui permettent la libération d’endorphines.


Classification des douleurs


Différentes classifications existent:


► Classification temporelle




Douleur aiguë

Elle est récente, transitoire. Elle peut être provoquée par une brûlure, une piqûre et persiste jusqu’à la cicatrisation. On la rencontre surtout en postopératoire, en traumatologie. Elle est due à un excès de nociception et fait office de signal d’alarme pour le patient, afin qu’il puisse réagir, par exemple, par un mouvement de retrait pour éviter cette douleur. Elle est génératrice d’anxiété et de stress.


Douleur chronique

La douleur aiguë peut se prolonger et devenir un syndrome. Elle perd alors sa fonction d’alerte. On parlera de douleur chronique lorsqu’elle se prolonge plus de 3 à 6 mois. Elle est associée à des troubles de l’appétit et des pertes de sommeil. Elle devient la préoccupation dominante du sujet et entraîne souvent une dépression.



MÉDICAMENTS UTILISÉS


Ces médicaments sont appelés antalgiques ou analgésiques. Les antalgiques calment ou suppriment la douleur due à une pathologie, alors que les analgésiques suppriment la sensibilité à la douleur. Nous utiliserons ici le terme «antalgique». On peut également utiliser des coantalgiques pour combattre la douleur.


Classification des antalgiques


























































































































































































































Tableau 35.1 Antalgiques non opioïdes non associés.
Principes actifs Noms de commercialisation Formes galéniques Dosages
Antalgiques purs
floctafénine Idarac Comprimé 200mg
néfopam Acupan Sol. inj. IM/IV 20mg/2mL
Antalgiques antipyrétiques
Paracétamol Claradol Comprimé 500mg
Dafalgan Gélule, comprimé 500mg, 1 000mg
Suppositoire 600mg
Dolitabs Cp orodispersible 500mg
Doliprane Sachet
Comprimé, comprimé eff., gélule
Suppositoire
Suspension buvable (sans sucre)
100, 150, 200, 300, 500, 1 000mg
500, 1 000mg
100, 150, 200, 300, 1 000mg
2,4%
Dolko Comprimé, Sachet
Sol. buvable
Suppositoire
500, 1 000mg
60mg/2mL
80, 170mg
Efféralgan Comprimé eff., comprimé
Sachet eff.
Solution buvable
Suppositoire
500, 1 000mg
80, 150, 250mg
3%
80, 150, 300mg
Expandox Comprimé 500mg
Fébrectol Suppositoire 150, 300, 600mg
Géluprane Gélule 500mg
Panadol Comprimé Comprimé
Paralyoc Lyophilisat oral 250, 500mg
Perfalgan Lyophilisat oral 500 et 1 000mg (10mg/mL)
propacétamol Propacétamol MERCK Sol. inj. IM/IV 1000, 2 000mg
Antalgiques antipyrétiques et anti-inflammatoires non stéroïdiens
acide acétylsalicylique Alka-Seltzer Comprimé eff. 324mg
Aspégic Sachet
Sol. inj. IM/IV
100, 250, 500, 1 000mg
500, 1 000mg
Aspirine pH8 Comprimé gastrorésistant 500mg
Aspirine Protect Comprimé 300mg
Aspirine du Rhône Comprimé, comprimé à croquer 500mg
Aspirine UPSA Comprimé eff.
Gélule
500, 1 000mg
325mg
Aspirisucre Comprimé à croquer 400mg
Aspro Comprimé, comprimé eff.
Comprimé
500mg
320mg
Catalgine Sachet 100, 250, 500, 1 000mg
Claragine Comprimé eff. 500mg
bénorilate Salipran Sachet 2 000mg
fénoprofène Nalgésic Comprimé 300mg
ibuprofène Advil Comprimé
Suspension buvable
100, 200, 400mg
20mg/mL
Anadvil Comprimé 200mg
Antarène Comprimé
Suspension buvable
100,200, 400mg
20mg/mL
Brufen Comprimé 400mg
Hémagène Tailleur Comprimé 200mg
Intralgis Comprimé, comp eff. 200mg
Nuréflex Comprimé, sachet
Gélule LP
Susp. buvable
200, 400mg
300mg
20mg/mL
Nurofen Comprimé, capsule 200mg
Solufen Gé Gélule 200mg
Upfen Comprimé, comprimé eff. 200mg
kétoprofène Profénid Sol. inj. IM/IV
Comprimé
Gélule
Comp LP, gélule LP
100mg
100mg
50mg
200mg
Topféna Gélule LP 100, 200mg
Toprec Comprimé
Sirop
25mg
1mg/mL
acide méfénamique Ponstyl Gélule 250 mg
naproxène Alève Comprimé 220mg
Antalgiques anti-inflammatoires inhibiteurs préférentiels de COX2
nimésulide Nexen Comprimé
Granulés
100mg
Antalgiques anti-inflammatoires inhibiteurs sélectifs de COX2
célecoxib Celebrex Comprimé
Granulés
100, 200mg
parécoxib Dynastat Sol inj 20, 40mg























































































































Tableau 35.2 Antalgiques opioïdes faibles.
Principes actifs Noms de commercialisation Formes galéniques Dosages
Codéine et dérivés
dihydrocodéine Dicodin LP Comprimé 60mg
codéine Codenfan Sirop 1mg/mL
codéine associée Algisédal Comprimé codéine 25mg + paracétamol 400mg
Claradol Codéine Comprimé codéine 20mg + paracétamol 500mg
Codoliprane Comprimé codéine 20mg + paracétamol 400mg
Dafalgan Codéine Comprimé codéine 30mg + paracétamol 500mg
Efféralgan Codéine Comprimé eff. codéine 30mg + paracétamol 500mg
Klipal Comprimé codéine 50mg + paracétamol 600mg
codéine 25mg + paracétamol 300mg
Lindilane Comprimé codéine 25mg + paracétamol 400mg
Migralgine Gélule
Solution buvable
codéine 20mg + caféine 62,5mg + paracétamol 400mg
codéine 19,5mg/c à s + caféine 62,25mg/c à s + paracétamol 400, 5mg/c à s
Prontalgine Comprimé codéine 20mg + caféine 50mg + paracétamol 400mg
Dextropropoxyphène
Dextropropoxyphène associé Di-Antalvic Gélule dextropropoxyphène: 30mg + paracétamol: 400mg
Di-Dolko Gé Gélule dextropropoxyphène: 30mg + paracétamol: 400mg
Dioalgo Gé Gélule dextropropoxyphène: 30mg + paracétamol: 400mg
Propofan Comprimé dextropropoxyphène: 27mg + caféine: 30mg + paracétamol: 400mgs
Tramadol
tramadol Biodalgic Comprimé eff. 50mg
Contramal Gélule
Solution buvable
Injectable IV
50mg
100mg/mL
100mg/2mL
Contramal LP Comprimé LP 100, 150, 200mg
Topalgic Gélule
Solution buvable
Injectable IV
50mg
100mg/mL
100mg
Topalgic LP Comprimé 100,150 et 200mg
Zamudol, Contramal, Topalgic Injectable IV 100mg/2mL
Zamudol LP Gélule LP 50, 100, 150, 200mg
Zumalgic Gé Comprimé eff. 50mg, 100mg
tramadol associé Ixprim, Zaldiar Comprimé tramadol: 37,5mg + paracétamol 325mg
































































































Tableau 35.3 Antalgiques opioïdes forts.
Principes actifs Noms de commercialisation Formes galéniques Dosages
Agonistes purs
fentanyl Durogésic Dispositif transdermique 12, 25, 50, 75 et 100 μg/h
fentanyl Actiq Comprimé buccal 200, 400, 600, 800, 1 000, 1 200, 1 400, 1 600 μg
hydromorphone Sophidone LP Gélule LP 4, 8, 16, 24mg
morphine orale Actiskénan Gélule 5, 10, 20, 30mg
Kapanol LP Gélule 20, 50, 100mg
Morphine Aguettant Solution buvable 150mg/30mL
Moscontin LP Comprimé 10, 30, 60, 100, 200mg
Sévrédol Comprimé 10, 20mg
Skénan LP Gélule 10, 30, 60, 100, 200mg
morphine injectable Morphine Aguettant Sol. inj. sous-cutanée, IM, IV 10, 20, 40mg/mL
Morphine Cooper Sol. Inj. SC, IM, IV 20mg/2mL
Morphine Lavoisier Sol. inj. sans conservateur 10, 20mg/mL
50, 100mg/5mL
Morphine Méram Sol. inj. sous-cutanée, IM, IV 10, 20mg/mL
Morphine Renaudin Sol. Inj. SC, IM, IV 1, 10mg/mL, 50, 100mg/5mL
péthidine Péthidine Renaudin Sol. Inj. IM/IV 100mg/2mL
oxycodone Oxynorm Gélule 5, 10, 20mg
Oxicontin LP Comprimé 10, 20, 40, 80mg
buprénorphine Temgésic Comprimé sublingual
Sol. inj.
0,2mg
0,3mg/mL
nalbuphine Nalbuphine générique Sol. inj. sous-cutanée, IM/IV 20mg/2mL














Tableau 35.4 Protoxyde d’azote.
Principes actifs Noms de commercialisation Formes galéniques Dosages
oxygène + protoxyde d’azote Kalinox
Medimix
Inhalation 2, 5, 15, 20L













































Tableau 35.5 Médicaments n’appartenant à la classe des antalgiques mais utilisés dans les douleurs neurogènes.
Principes actifs Noms de commercialisation Formes galéniques Dosages
Antidépresseurs
amitriptyline Laroxyl Comprimé
Solution buvable
Sol. inj. IM/IV
25, 50mg
40mg/mL
50mg/2mL
imipramine Tofranil Comprimé 25mg
Anticonvulsivants
carbamazépine Tégrétol Comprimé
Comprimé LP
Susp. buvable
200mg
200 et 400mg
20mg/mL
phénytoïne dihydan Comprimé 100mg
gabapentine neurontin Comprimé
Gélule
600, 800mg
100, 300, 400mg
Neuroleptiques
Tiapride Tiapridal Comprimé
Sol inj
100mg
100mg/2mL


Mécanismes d’action



► Antalgiques non opioïdes


Ces antalgiques ont principalement une action périphérique au niveau des lésions tissulaires et ont donc été appelés «périphériques» pour cette raison. Ils agissent en inhibant les cyclooxygénases et donc la synthèse des prostaglandines. Il en résulte une diminution de la sensibilisation des fibres A et C aux médiateurs algogènes (histamine, sérotonine, bradykinine, H +, K +, etc.).

Toutefois, les antalgiques «périphériques» peuvent aussi avoir une action centrale. Ainsi, le paracétamol agit surtout en inhibant la cyclooxygénase cérébrale. Il diminue donc la production de prostaglandines au niveau du SNC, ce qui permet l’activation des voies descendantes inhibitrices sérotoninergiques.

Le terme d’antalgique «périphérique» doit donc être substitué maintenant par celui d’antalgique non opioïde.

Ces dérivés ont une action antalgique limitée par un effet plafond. Certains d’entre eux possèdent également des propriétés antipyrétiques et anti-inflammatoires.

On distingue dans les antalgiques non opioïdes:




– les antalgiques non opioïdes purs: floctafénine et néfopam;


– les antalgiques antipyrétiques: paracétamol, propacétamol, les antalgiques antipyrétiques anti-inflammatoires non stéroïdiens; salicylés (aspirine, bénorilate), dérivés arylcarboxyliques (fénoprofène, ibuprofène, kétoprofène, naproxène), fénamates (acide méfénamique);


– les antalgiques anti-inflammatoires inhibiteurs préférentiels de COX 2: nimésulide;


– les antalgiques anti-inflammatoires inhibiteurs sélectifs de COX 2: célécoxib, parécoxib.


► Antalgiques opioïdes


Ces antalgiques ont une action centrale (Chauvin, 1993):




– action spinale: ils agissent en se fixant sur les récepteurs opioïdes au niveau spinal et dépriment la transmission du message nociceptif en inhibant la libération de substance P;


– action supra spinale: en se fixant sur les récepteurs opioïdes au niveau du SNC, ils augmentent le contrôle inhibiteur exercé par les structures supra spinales sur la totalité des neurones nociceptifs.

Ces antalgiques possèdent également une action périphérique. C’est la raison pour laquelle le terme d’antalgique opioïde est préférable à celui d’antalgique central. Ces antalgiques opioïdes se fixent tous sur les récepteurs opiacés, mais avec des affinités variables selon les produits et les différents types de récepteurs.

Les récepteurs mu seraient responsables de l’analgésie spinale et supra spinale, de l’euphorie, de la dépression respiratoire et des phénomènes de dépendance physique. Les récepteurs kappa seraient responsables de l’analgésie spinale, de la sédation et du myosis. Les récepteurs delta seraient responsables de l’analgésie en modulant les effets du récepteur mu. Les récepteurs sigma seraient responsables des dysphories et des hallucinations.

Les ligands opioïdes peuvent être séparés en:




– agonistes: ils vont activer le récepteur mu et entraîner une réponse dose dépendante:




• agonistes purs de faible activité: dextropropoxyphène, codéine, dihydrocodéine, tramadol,


• agonistes purs de forte activité: morphine, péthidine, fentanyl, hydromorphone, oxycodone;


– agonistes antagonistes de forte activité: nalbuphine et buprénorphine. Ils se fixent sur les récepteurs opioïdes et entraînent une activité antalgique, mais ayant une affinité plus forte que celle de la morphine pour ces récepteurs, ils vont donc déplacer cet agoniste et donc diminuer son action. L’activité antalgique de ces produits est caractérisée par un effet plafond;


– antagonistes: naloxone, naltrexone. Ils permettent de lever l’action des agonistes.

► Mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA): effet analgésique majeur


► Médicaments n’appartenant pas à la classe des antalgiques mais utilisés dans les douleurs neurogènes


Ces médicaments peuvent, seuls ou associés, diminuer la douleur. Il s’agit des antidépresseurs tricycliques ou d’inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, d’anticonvulsivants.

Certains possèdent une AMM pour leurs propriétés antalgiques.


Structure des antalgiques










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Figure 35.1
Structure des antalgiques.



Pharmacocinétique




► Antalgiques non opioïdes



• Paracétamol


Résorption

Per os et par voie rectale, la résorption est rapide (pic obtenu entre 30 et 90min après la prise) et forte (biodisponibilité supérieure à 80%). Elle est diminuée par la prise d’aliments et par la position allongée. Le paracétamol peut être maintenant utilisé par voie injectable (Perfalgan). Le propacétamol soluble peut être utilisé par voie parentérale. C’est un précurseur du paracétamol qui est rapidement hydrolysé par les estérases plasmatiques en paracétamol. La pharmacocinétique est ensuite identique à celle du paracétamol.


Distribution

Très faible liaison protéique plasmatique et donc pas d’interférence avec les anticoagulants oraux à la différence des salicylés. Volume de distribution de 0,9L/kg.


Métabolisation

Forte biotransformation hépatique en dérivés glyco- et sulfoconjugués inactifs. En cas d’intoxication, la N-acétyl p-benzoquinone-imine, métabolite toxique est formée en grande quantité et sature les capacités de fixation du glutathion réduit. Ce métabolite se fixe alors sur les macromolécules de la cellule hépatique et entraîne une nécrose hépatique. L’antidote est la N-acétylcystéine (Fluimicil inj).


Élimination

90% d’élimination sous forme de métabolites inactifs en 24h et temps de demi-vie plasmatique rapide (2h) qui augmente en cas d’insuffisance hépatocellulaire.


• Aspirine


Résorption

La résorption par voie orale a lieu dans l’estomac et dans la partie terminale de l’intestin grêle. Sa vitesse varie selon la forme galénique:




– forme soluble (acétylsalicylate de lysine): pic plasmatique en 15min;


– forme orale effervescente: pic plasmatique en 20min;


– forme orale simple (comprimé): pic plasmatique en 2 à 4h.


Distribution

Fixation importante (80 à 95%) sur les protéines plasmatiques entraînant de nombreuses interacinteractions médicamenteuses. Volume de distribution très faible (0,16L/kg).


Métabolisation

Les estérases plasmatiques hépatiques et érythrocytaires hydrolysent rapidement l’aspirine en acide salicylique actif.


Élimination

Principalement urinaire sous forme de métabolites conjugués. Le temps de demi-vie plasmatique est compris entre 3 et 5 heures pour l’acide salicylique. Il est compris entre 15 et 30min pour l’aspirine. La clairance plasmatique totale augmente si le pH urinaire augmente.


• Dérivés arylcarboxyliques

Ce sont des acides faibles lipophiles qui possèdent le même profil pharmacocinétique (sauf pour l’élimination).


Résorption

Biodisponibilité forte.


Distribution

Forte liaison protéique plasmatique (60 à 95%) et faible volume de distribution (0,1L/kg).


Métabolisation

Hépatique.


Élimination

Rénale, la rapidité est variable selon les produits.


• Célécoxib


Résorption

Biodisponibilité forte par voie orale.


Distribution

Forte liaison aux protéines plasmatiques (85-97%).


Métabolisation

Hépatique.


Élimination

Rénale, demi-vie comprise entre 12 et 17 heures.


► Antalgiques opioïdes de faible activité



• Codéine


Résorption

Par voie orale, 70% de résorption au niveau intestinal. Cette résorption est rapide, le pic plasmatique est obtenu au bout d’une heure.


Distribution

Faible fixation aux protéines plasmatiques.


Métabolisation

Rapide au niveau hépatique en dérivés glycuronoconjugués et en morphine. La codéine qui a une très faible activité sur les récepteurs mu doit ses propriétés antalgiques à sa transformation en morphine. Cependant, cette voie métabolique est perturbée chez 10% des sujets, ce qui explique les variations interindividuelles observées avec ce composé.


Élimination

La demi-vie plasmatique varie entre 2,5 et 3h; sa durée d’action antalgique est de 4 à 6h.



• Tramadol


Résorption

Forte (90%) et rapide; pic plasmatique obtenu en 2 heures par voie orale.


Distribution

Faible liaison protéique plasmatique.


Métabolisation

Hépatique par déméthylation. Il existe de grandes variations interindividuelles dans la formation du O-desméthyltramadol, métabolite plus puissant que la molécule mère.


Élimination

Urinaire, à 70% sous forme métabolisée. Le temps de demi-vie du tramadol et du O-desméthyltramadol est égal à 8h.


► Antalgiques opioïdes de forte activité




• Fentanyl


Résorption

Par voie transdermique (Durogésic), il n’y a pas d’effet de premier passage hépatique comme par voie orale. La libération du principe actif est progressive sur 72h, ce qui permet l’utilisation d’un dispositif tous les trois jours. Par cette voie, le lag time est égal à 2 heures et la concentration plasmatique maximale est obtenue au bout de 24h, ce qui nécessite l’adjonction d’un second antalgique lors de la première pose du dispositif. L’intensité de résorption cutanée est très variable (plus ou moins 50%), selon l’épaisseur de la peau, sa température, les conditions de pose (peau sèche ou humide, rasée ou non, etc.). Par voie orale transmuqueuse (Actiq), la durée de la dissolution totale du comprimé est de 15min, le délai d’action antalgique est rapide (5min).


Métabolisation

Elle est hépatique et diminue beaucoup chez l’insuffisant hépatique et chez le sujet âgé.


Élimination

Le temps de demi-vie apparent d’élimination plasmatique après retrait du dispositif transdermique est égal à 12h, ce qui limite l’apparition du syndrome de sevrage. Par voie IV, le temps de demi-vie d’élimination plasmatique varie entre 3 et 4h. Par voie transmuqueuse (Actiq), l’élimination est rapide avec une durée d’action antalgique de 2 à 4 heures.


• Hydromorphone


Résorption

Par voie orale, la résorption se situe au niveau gastro-intestinal avec une élimination présystémique résultant en une biodisponibilité de l’ordre de 36%.


Distribution

Sa liaison aux protéines plasmatiques est très faible, de l’ordre de 8%.


Métabolisme

Elle subit un métabolisme hépatique en hydromorphone-3-glucuronide, dihydroisomorphine et dihydromorphine.


Élimination

L’élimination se fait dans les urines principalement en hydromorphone-3-glucuronide. Sa demivie d’élimination est de 2,5 heures; sa durée d’action antalgique est de 8 à 12 heures.


• Morphine


Résorption

Par voie orale, la biodisponibilité est très variable (de 10 à 50%), en raison d’un fort métabolisme par premier passage hépatique. Les formes à libération prolongée à base de sulfate de morphine entraînent un pic variable obtenu au bout de 2 à 8h, selon les spécialités commercialisées. La libération de la morphine est soit continue sur 12h (Moscontin LP, Skénan LP), soit sur 24h (Kapanol LP), ce qui permet soit une administration biquotidienne (Moscontin LP, Skénan LP), soit quotidienne (Kapanol LP).

Par voie IM et sous-cutanée, la résorption est complète.


Distribution

La liaison aux protéines plasmatiques varie de 30 à 40%.


Métabolisation

La morphine est fortement métabolisée au niveau hépatique en morphine 3-glucuronide inactif, en morphine 6-glucuronide et normorphine actifs.


Élimination

La morphine 6-glucuronide peut s’accumuler chez l’insuffisant rénal et entraîner une dépression respiratoire. Chez l’insuffisant hépatique, il convient également de diminuer les doses, en raison du déficit du catabolisme de la morphine.

Les formes orales à libération immédiate (Actiskénan, Sévrédol, Sévrédol solution buvable) ont une demi-vie d’élimination courte de 4 heures correspondant à leur durée d’action antalgique.

Le temps de demi-vie plasmatique de la morphine par voies IV, IM, sous-cutanée, varie de 2 à 6h, ce qui oblige à des administrations réitérées (4 à 6/j) ou à l’utilisation d’administration continue par pompe.


• Oxycodone


Résorption

Elle est rapide (30 à 60min) pour la forme à libération immédiate (Oxynorm) et plus lente (2 à 3 heures) pour la forme LP (Oxycontin LP).


Élimination

La durée d’action antalgique est de 3 à 5 heures pour Oxynorm, elle est de 12 heures pour Oxycontin LP.



► Mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote



Résorption

Très rapide, l’effet analgésique apparaît au bout de 3min.


Élimination

Très rapide, l’effet disparaît dans les minutes qui suivent l’inhalation, le mélange est éliminé sous forme inchangée par voie pulmonaire.


CRITÈRES DE CHOIX THÉRAPEUTIQUE


Les critères de choix d’un antalgique efficace dépendront de la nature de la douleur et de l’intensité de la douleur.


DOULEURS NEUROGÈNES


Les douleurs de désafférentation ou neurogènes sont traitées principalement par:




– les antidépresseurs tricycliques pour les douleurs permanentes (amitriptyline, clomipramine, imipramine), à dose inférieure à la posologie antidépressive;


– les anticonvulsivants (clonazépam et carbamazépine pour les douleurs fulgurantes, gabapentine pour les douleurs fulgurantes et permanentes);


– les neuroleptiques (tiapride);


– la neurostimulation;


– éventuellement par les anesthésiques locaux.

Ainsi, par exemple:





Dans les neuropathies périphériques du diabétique

Les antidépresseurs tricycliques de première génération (amitriptyline, imipramine) ont une efficacité identique (Max, 1992). Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine ne semblent pas actifs dans cette pathologie. On peut également utiliser la lidocaïne par voie IV.


Dans les névralgies post-zostériennes

Les antidépresseurs tricycliques sont également efficaces (Watson, 1995; Watson, 1998). La gabapentine possède une AMM dans le traitement des douleurs zostériennes. La lidocaïne peut aussi être utilisée. En revanche, les antalgiques non opioïdes ne sont pas efficaces à long terme.


Dans la névralgie du trijumeau

La carbamazépine constitue le traitement de référence (Taylor, 1981) et le baclofène est utilisé en 2e intention (Steardo, 1984).

D’autres anticonvulsivants, comme la phénytoïne, le clonazépam, le valproate de sodium seront prescrits en cas d’échec (Sweet, 1986).


Dans les douleurs neurogènes post-traumatiques

Le fond douloureux est traité par les antidépresseurs tricycliques, les phénomènes paroxystiques par la carbamazépine et le baclofène.

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May 13, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on Traitement de la douleur

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