21. Les troubles du contrôle sphinctérien
Marie-France Le Heuzey and Olivier Philippe
Les troubles du contrôle sphinctérien sont fréquents chez l’enfant, isolés ou associés à d’autres troubles psychopathologiques. L’énurésie concerne 5 à 10% des enfants de 5 ans, 3 à 5% des enfants de 10 ans et 1% des enfants de 15 ans et plus.
La prévalence de l’encoprésie est de 1% chez les enfants de 5 ans.
ENURÉSIE
L’énurésie est définie par l’existence de mictions répétées au lit ou dans les vêtements à un âge où un enfant est habituellement «sec», c’est-à-dire au moins à 5 ans (ou niveau de développement équivalent), en l’absence de cause organique et de cause médicamenteuse. L’énurésie peut être exclusivement diurne, exclusivement nocturne, ou à la fois nocturne et diurne. Elle peut être primaire ou secondaire, isolée (monosymptomatique) ou associée à d’autres troubles psychopathologiques (trouble déficit de l’attention avec hyperactivité [TDA/H] par exemple). C’est l’énurésie nocturne primaire isolée qui est la plus fréquente (ENPI).
TRAITEMENTS UTILISÉS
Systemes D’alarme
Les systèmes d’alarme (ou moniteurs d’énurésie ou avertisseurs sonores) ne seront pas abordés dans leur mode d’emploi.
Médicaments
Desmopressine
Analogue structural synthétique de l’hormone antidiurétique (ADH), elle agit en diminuant la production nocturne d’urine lorsqu’elle est administrée le soir. Par son action sur la réabsorption de l’eau au niveau du tube collecteur, la desmopressine permet de réduire le volume urinaire nocturne et de prévenir l’énurésie. Elle est commercialisée sous le nom de Minirin®.
Antidépresseurs tricycliques
Les antidépresseurs tricycliques (amitriptyline, imipramine, clomipramine) ont un mode d’action imparfaitement connu qui reposerait sur leurs effets anticholinergique, périphérique et α-mimétique. Ils agiraient en diminuant les contractions du détrusor et en renforçant le tonus sphincter lisse urétral.
Oxybutynine
L’oxybutynine (Ditropan®), médicament anticholinergique, relâche la fibre musculaire lisse vésicale, diminue l’amplitude et la fréquence des contractions vésicales ainsi que la pression intravésicale.
TRAITEMENT DE L’ÉNURÉSIE NOCTURNE PRIMAIRE ISOLÉE [10]
Le traitement s’adresse aux enfants de plus de 6 ans et motivés.
— Avant d’initier le traitement, il est recommandé d’évaluer l’énurésie en établissant un calendrier listant les nuits sèches pendant 1 mois.
— La prise en charge débute toujours par la mise en place de règles hygiénodiététiques (restreindre l’apport hydrique en fin de journée) et éducatives (suppression des couches, mictions avant de se coucher, etc.).
— Après 1 à 3 mois, en cas d’échec de ces mesures, le traitement proposé est soit un système d’alarme, soit un traitement par desmopressine.
S’il existe une polyurie nocturne (20% des ENPI), le choix ira à la desmopressine; si on évoque plutôt un problème de capacité vésicale réduite (30% des ENPI), le choix se fera plutôt en faveur du système d’alarme. En l’absence d’orientation clinique, le choix se fait en fonction de la famille et de l’enfant.
Si la desmopressine est choisie, le traitement est débuté par une cure de 3 mois à faible dose.
La plus petite dose efficace est de 0,2mg par jour pour les comprimés (soit deux comprimés) et de 120μg par jour pour les comprimés lyophilisés, en une prise unique le soir.
Il faut parallèlement:
— limiter les apports hydriques 1h avant et jusqu’à 8h après la prise de desmopressine;
— éviter les boissons diurétiques (riches en caféine de type cola…).
La posologie de desmopressine peut être augmentée progressivement si nécessaire par paliers de 0,2mg (120μg par jour de Minirinmelt®) sans dépasser 0,6mg par jour (soit six comprimés et 360μg/j de Minirinmelt®) en tenant compte de la tolérance.
Au terme de 3 mois de traitement, il est recommandé d’effectuer une fenêtre thérapeutique d’au moins 7 j jusqu’à 28 j, avant d’envisager une éventuelle reprise du traitement pour une durée de 3 mois (6 mois au total).
La réponse au traitement s’évalue de la façon suivante:
— répondeurs complets: plus de 90% de diminution du nombre de nuits mouillées par rapport à la période avant traitement;
— répondeurs partiels: plus de 50% et moins de 90% de diminution du nombre de nuits mouillées par rapport à la période avant traitement;
— non répondeurs: diminution du nombre de nuits mouillées inférieur à 50%.
Le taux de rémission est d’environ 30% après 3 mois de traitement, avec deux tiers de guérison définitive.