en charge chirurgicale des médiastinites aiguës de l’adulte

Chapitre 10 Prise en charge chirurgicale des médiastinites aiguës de l’adulte




L’incidence des médiastinites poststernotomie, estimée à 2,5 %, demeure inchangée depuis près de 20 ans [17]. La mortalité de cette affection, qui varie de 5 à 50 % [7], en fait la première cause de mortalité en chirurgie cardiaque. Le traitement des médiastinites poststernotomie a notablement évolué ces dernières années, en raison principalement d’un diagnostic beaucoup plus précoce qui a permis l’instauration du traitement conservateur. Classiquement, la mise à plat de la plaie sternale infectée était systématiquement suivie de pansements à ciel ouvert, tout au long d’une période prolongée de cicatrisation dirigée. L’exposition des structures médiastinales faisait parfois craindre la survenue de surinfections et/ou de ruptures vasculaires. Le recours aux transpositions musculaires puis à l’épiploplastie, à partir des années 1980, avait permis d’obtenir une diminution de la mortalité ainsi qu’un raccourcissement de l’évolution [13,18]. La généralisation de la ponction médiastinale postopératoire précoce, à visée diagnostique, a donné un nouvel essor au traitement à thorax fermé par drainage aspiratif qui succéda à la technique d’irrigation-drainage, considérée jusque-là comme la méthode standard de traitement des médiastinites précoces [2,6]. Cette évolution récente a eu pour corollaire une amélioration de la survie avec une diminution spectaculaire des pertes de substances médiastinales résiduelles résultant du traitement à ciel ouvert. Ce dernier ne se justifie plus qu’en cas d’échec du traitement à thorax fermé ou devant certaines médiastinites aiguës graves infectées à Streptococcus aureus méthicilline résistant ou bien comportant une nécrose sternocostale.




TRAITEMENT INITIAL À THORAX FERMÉ PAR DRAINAGE ASPIRATIF


Dès que le diagnostic est suspecté, un traitement antibiotique, fondé sur les données bactériologiques disponibles, doit être institué. Celui-ci associe généralement une bêtalactamine ou un glycopeptide à un aminoglycoside. Une exploration médiastinale sous anesthésie générale est alors entreprise en urgence (figure 10.1). La sternotomie est complètement réouverte ; un curetage des dépôts de fibrine et un parage généreux de la peau et des tissus sous-cutanés sont réalisés. Toute zone non vascularisée du sternum doit être réséquée à la scie. Enfin, la cavité péricardique est nettoyée et la plaie médiastinale abondamment irriguée avec de la povidone iodée diluée. La mise en dépression de la plaie est assurée grâce à la mise en place de 3 à 6 drains aspiratifs dans les espaces explorés. La synthèse du sternum et la fermeture cutanée vont permettre aux drains aspiratifs de maintenir une dépression de l’ordre de 700 mmHg pendant au moins 10 jours. Les produits de drainage doivent être régulièrement cultivés pour adapter l’antibiothérapie qui sera maintenue de 4 à 6 semaines [14].




TECHNIQUE À THORAX OUVERT


En cas d’échec de cette technique, ou bien de médiastinite à staphylocoque méthicilline résistant ou d’ostéomyélite avec nécrose massive du sternum, le recours à la mise à plat avec pansement à thorax ouvert s’impose, malgré les risques inhérents à cette technique : insuffisance respiratoire due au manque de rigidité thoracique, surinfection possible de la plaie médiastinale, exposition du coeur et des gros vaisseaux avec risque de rupture vasculaire.


La technique à thorax ouvert consiste à laisser à plat le médiastin après le parage des lésions. La plaie médiastinale est comblée de compresses imbibées de povidone iodée qui seront renouvelées deux à trois fois par jour jusqu’à contrôle de l’état septique local [8,9]. La mise de la plaie sous pression négative contrôlée, par l’intermédiaire d’une mousse de polyuréthane, selon la technique VAC® (vacuum assisted closure ; Équipement Médical KCI, France) à la place du pansement traditionnel doit être envisagée dès que possible [3,21] (figure 10.2). Tout en facilitant la prise en charge de la plaie, le maintien d’une pression négative continue de 125 mmHg réduit la colonisation bactérienne et l’oedème tissulaire ; cela améliore la vascularisation de la plaie et favorise la formation de tissu de granulation. Dans les cas les moins graves, cela permet une fermeture par cicatrisation dirigée. Dans les autres cas, cette mise en dépression crée les conditions favorables à une fermeture chirurgicale secondaire.




FERMETURE DES PERTES DE SUBSTANCES THORACIQUES RÉSIDUELLES DANS LES SUITES DE MÉDIASTINITES AIGUËS GRAVES


Avant d’envisager la fermeture d’une perte de substance thoracique, un bilan local s’impose. L’exploration méticuleuse de la plaie recherche une fistule médiastinopleurale, une exposition vasculaire, un séquestre ou une atteinte chondrocostale associée, qui doivent faire pratiquer préalablement une résection à la demande, en sachant que tout cartilage atteint doit être réséqué en totalité jusqu’au contact osseux [10].


La longueur, la largeur et la profondeur de la brèche pariétale, en un mot le volume de l’espace mort rétrosternal sont des données essentielles à prendre en compte dans le choix de la technique de fermeture.



Fermeture par lambeaux d’avancement


La fermeture cutanée simple était très utilisée avant l’avènement des myoplasties. Elle était pratiquée après une période généralement très longue de cicatrisation dirigée et ne s’adressait qu’aux pertes de substances résiduelles les plus modestes.


L’intervention consiste en un simple décollement cutané prépectoral bilatéral à la demande, suivi d’une fermeture cutanée toujours associée à un drainage aspiratif prolongé [16].


De pratique plus récente, le décollement sous-pectoral de deux vastes lambeaux musculotanés d’avancement (figure 10.3) permet d’obtenir un bon matelassage de la région sternale grâce au rapprochement des pectoraux sur la ligne médiane. Cette technique présente en outre l’avantage de mieux respecter l’intégrité de la vascularisation cutanée tout en relaxant la traction sternocostale des muscles.



Ces procédés ont vu leurs indications se multiplier avec l’extension de la technique de cicatrisation par pression négative contrôlée (VAC®) qui permet d’accélérer le comblement de la plaie, sans toujours conduire à une fermeture complète de celle-ci.



Transposition épiploïque


La transposition du grand épiploon a été historiquement l’une des techniques les plus utilisées pour la reconstruction du thorax [5,23]. Elle s’est imposée dès la fin des années 1970 dans la prise en charge des pertes de substances d’origine trophique et/ou infectieuse [12]. Son comportement dans les plaies torpides ou infectées est attribué à son fort potentiel de néovascularisation et à ses propriétés anti-infectieuses, conséquence de sa concentration élevée en cellules immunocompétentes [15].


Après ouverture du péritoine, un décollement coloépiploïque est mené de gauche à droite, en prenant soin de respecter le mésocôlon transverse. La plastie épiploïque peut alors être mobilisée à la demande, en sectionnant tout d’abord l’épiploon et les vaisseaux gastroépiploïques gauches près de la rate, puis en la pédiculisant sur les vaisseaux gastroépiploïques droits par section progressive des vaisseaux courts gastriques jusque dans la région antrale. Cette manoeuvre de libération génère un arc de rotation qui est presque toujours suffisant pour atteindre n’importe quel point du médiastin. L’ascension de l’épiploon vers le médiastin est, le plus souvent, assurée grâce à un large décollement sous-cutané et, plus rarement, par l’intermédiaire d’une incision diaphragmatique en avant du péricarde. L’épiploon est alors soigneusement étalé sur les structures médiastinales exposées et généralement maintenu en place par quelques points aux structures anatomiques adjacentes (figure 10.4).



Chez ces patients à l’état hémodynamique souvent précaire, nous avons appris à nous méfier des procédés d’allongement épiploïque par dédoublement qui font courir un risque accru de nécrose distale [4].



Myoplasties


C’est en 1980 que Jurkiewicz et al. ont pour la première fois fait état d’excellents résultats obtenus après un parage agressif suivi de l’exclusion de tout espace mort médiastinal grâce à la transposition des muscles grands pectoraux [13].


Apr 27, 2017 | Posted by in CHIRURGIE | Comments Off on en charge chirurgicale des médiastinites aiguës de l’adulte

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