dans les raideurs post-traumatiques du coude: Arthrolysis of the elbow for posttraumatic stiffness

L’arthrolyse dans les raideurs post-traumatiques du coude


Arthrolysis of the elbow for posttraumatic stiffness



image T. Judet1, 1 Service d’orthopédie-traumatologie, hôpital Raymond-Poincaré, 92380 Garches, France.



Résumé


La traumatologie du coude reste dominée par le risque d’enraidissement séquellaire, que même une prise en charge initiale optimale ne peut prévenir à tout coup, et qui doit faire envisager une arthrolyse secondaire. Or l’arthrolyse est une intervention réputée difficile et de résultat aléatoire. Son pronostic repose essentiellement sur l’intégrité des surfaces articulaires et sur la qualité du geste chirurgical, qui doit être complet. L’indication n’en doit être posée que lorsque les possibilités de récupération spontanée de la mobilité ont été épuisées et en tenant compte de l’espoir d’amélioration potentielle, qui dépend principalement de l’état cartilagineux, mais également de la demande et de la motivation du patient. L’arthrolyse chirurgicale est une procédure pas à pas qui répond à des principes rigoureux ; il faut utiliser des voies d’abord évitant ou protégeant les structures vasculonerveuses périarticulaires, ne pas déstabiliser le coude, obtenir par une capsulectomie réglée une levée complète des freins limitant l’amplitude, et supprimer toutes les butées interdisant un jeu articulaire harmonieux. Le protocole des suites est précis : lutte contre l’œdème et la douleur, mobilisation posturale et surtout active, les mobilisations sous anesthésie générale étant interdites. La technique chirurgicale repose sur le concept ancien des voies latérales, avec, selon les situations anatomiques, quelques variantes. Les techniques arthroscopiques d’apparition plus récente dans ce type d’indication, initialement limitées à des gestes de capsulotomie, sont actuellement plus ambitieuses et peuvent être envisagées dans les raideurs sans perturbation majeure de l’anatomie.



Summary


Joint stiffness remains the most dreadful complication of injuries to the elbow. A perfect primary treatment cannot always prevent this complication, which may require a secondary arthrolysis. This procedure is notoriously demanding, and its results are uncertain. The outcome mainly depends on the condition of the cartilage surfaces and on the quality of the surgical procedure; the latter should address all the elements responsible for joint stiffness. Surgical arthrolysis is indicated in case of failure of conservative treatment, provided the articular surfaces are in a satisfactory condition and the patient is motivated. Arthrolysis is a demanding step-by-step procedure; the surgical approach should minimize the risk of neurovascular damage, it should preserve the joint stability, it should allow to release, through controlled capsulectomy, any fibrous tissue that restricts motion, and it should relieve any bony impingement which could impede a normal range of motion. A strict rehabilitation programme is mandatory, including control of oedema and pain, postural and active mobilization. Manipulation under anaesthesia should be strictly avoided. The surgical technique is based on the well-known concept of medial and/or lateral approach(es), with various technical options depending on the local conditions. Arthroscopic arthrolysis of the elbow is more recent. Initially, it only consisted of capsular release but the technique has dramatically improved, and arthroscopy can now be used in stiff elbows without major anatomical distortion.




Rappel anatomique et facteurs anatomopatho- logiques de l’enraidissement du coude


Sans vouloir être exhaustif, certains points d’anatomie fonctionnelle et chirurgicale sont nécessaires, tant pour comprendre les mécanismes de l’enraidissement que pour guider son traitement chirurgical.



Ce qu’il faut connaître de l’anatomie




Appareil capsuloligamentaire


Circonscrivant une cavité articulaire unique, la capsule articulaire du coude est renforcée sur ses bords médial et latéral par les ligaments collatéraux.


En avant et en arrière, elle est à l’état normal fine et lâche, ne se tendant qu’en extension ou en flexion maximale et laissant en position intermédiaire des espaces larges ou chambres antérieure et postérieure.


Les insertions se font à distance du cartilage, contournant les fossettes humérales qui sont donc intra-articulaires. Au niveau ulnaire, les becs olécrâniens et coronoïdiens sont également intra-articulaires alors qu’au niveau radial, la capsule se continue avec le bord supérieur du ligament annulaire et est remplacée à son bord inférieur par de minces tractus fibreux lâches qui vont s’insérer à la base du col du radius, lui aussi totalement intra-articulaire.


Le ligament collatéral médial (LCM), renfort interne de la capsule impliqué dans la stabilité en valgus du coude, présente un faisceau antérieur prédominant, tendu en toute position et dont l’extrémité proximale prend une large insertion sur tout le bord inférieur de l’épicondyle médial. Son extrémité distale s’insère sur le tubercule coronoïdien médial. Il contracte sur tout son trajet des rapports intimes avec le tendon commun des muscles épicondyliens médiaux alors que, lors des mouvements de flexion-extension, son bord profond glisse sur la face médiale de la joue interne de la trochlée selon un mouvement d’« essuie-glace ». Le faisceau postérieur du LCM, fin et étendu de la face postérieure de l’épicondyle à la lèvre interne du bec olécrânien, n’est tendu qu’en flexion complète du coude. Sa lésion n’est responsable d’instabilité rotationnelle postéromédiale que dans des circonstances traumatiques très particulières (figure 2).



Le ligament collatéral latéral (LCL) est surtout impliqué dans la stabilité antéropostérieure de la tête radiale sous le capitulum. Son faisceau principal, faisceau moyen des auteurs européens, antérieur des auteurs nord-américains, naît du sommet de l’épicondyle latéral, sous le tendon commun des muscles épicondyliens latéraux dont il reste clivable, alors que sa face profonde glisse sur le bord médial du capitulum et du condyle sus-jacent selon le même effet essuie-glace que le LCM. Son insertion distale sur la face médiale de la métaphyse ulnaire se confond avec le pied postérieur du ligament annulaire (figure 3).






Anatomopathologie des raideurs du coude


La bonne compréhension des facteurs de l’enraidissement est la condition préalable à sa prise en charge.



Freins capsulaires et butées osseuses


Ce sont les deux éléments de base des raideurs « standard ».






Histoire naturelle et évolution des raideurs post-traumatiques du coude


La prise en charge de la traumatologie du coude est dominée par le dogme de la mobilisation précoce après restauration d’une anatomie exacte. Ce dogme reste globalement vrai, mais doit être nuancé et précisé.


La restauration anatomique reste incontournable. En revanche, l’impératif d’une rééducation précoce doit céder le pas à une immobilisation réfléchie, ou au moins à une grande prudence dans la rééducation toutes les fois que celle-ci pourrait mettre en péril cette anatomie, qu’il s’agisse de réparations ligamentaires ou d’ostéosynthèses rendues inévitablement précaires par le type de fracture, son siège ou une qualité osseuse médiocre, paramètres d’ailleurs souvent associés.


L’évolution de la mobilité du coude dans les suites d’un traumatisme est éminemment variable, mais il faut tenir compte du fait que, sur un profil articulaire rétabli, la progression des amplitudes articulaires peut se faire de façon très prolongée, jusqu’à une année. Cette lente évolution rend discutable l’indication de tout geste mobilisateur avant ce délai, y compris les traitements conservateurs par attelles posturales [5], la raideur ne pouvant être considérée comme constituée. Par ailleurs, il n’est pas prouvé que l’ancienneté de la raideur soit un facteur pronostique négatif de l’arthrolyse [1]. Bien évidemment, un dérangement articulaire persistant – cal vicieux ou pseudarthrose intra-articulaire ou corps étranger incarcéré dans l’interligne, facteur de pérennisation de la raideur – devra sans délai être analysé et traité.



Bilan d’une raideur post-traumatique du coude



Clinique


La clinique a une place prépondérante.




Examen clinique


L’examen clinique est bilatéral et comparatif, effectué sur un patient dont les deux membres supérieurs sont dénudés.


La mesure chiffrée comparative de la mobilité se fait pour la flexion-extension en prenant pour repère de l’axe du bras la ligne unissant trochiter et condyle latéral, et pour celui de l’avant-bras, celle qui unit condyle latéral et épiphyse ulnaire. La transcription chiffrée des amplitudes passives et actives se fait soit en notant un déficit d’extension de X degrés et une flexion de Y degrés, soit plus simplement en suivant la nomenclature internationale par référence à la position anatomique, le point zéro correspondant à l’extension complète. Ainsi, un coude présentant un déficit d’extension de 30° et une flexion de 100° sera coté : 0/30/100 ; un recurvatum de 10° avec une flexion de 100° : 10/0/100 ; et une ankylose à 90° : 0/90/90.


La pronosupination, mesurée autant que possible à 90° de flexion et toujours humérus immobilisé coude au corps, se réfère également à la position anatomique, c’est-à-dire en supination complète. Une supination à 0° avec pronation à 70° sera cotée : 0/90/160, et un enraidissement total en supination complète : 0/0/0.


L’examen clinique évalue la force musculaire cliniquement ou, mieux, la mesure au Cybex™ en cherchant à évaluer continuité et trophicité des tendons périarticulaires. Des cicatrices et des adhérences susceptibles d’interférer sur un geste chirurgical sont recherchées.


L’état vasculonerveux est précisé.


Les douleurs sont analysées. Elles peuvent être péri-articulaires diffuses, neurologiques. Lorsqu’elles sont uniquement réveillées par la mobilisation en flexion- extension contre résistance alors que la flexion- extension passive est indolore, elles témoignent volontiers d’une altération cartilagineuse huméro-ulnaire. De même, le réveil de douleurs au cours de la pronosupination le poing du patient fortement serré, alors que la pronosupination passive est indolore, évoque une chondropathie du compartiment externe capituloradial.

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Jul 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on dans les raideurs post-traumatiques du coude: Arthrolysis of the elbow for posttraumatic stiffness

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