Chapitre 6O Indications chirurgicales et particularités techniques chez l’enfant
Les décollements de rétine de l’enfant, notamment du nourrisson, présentent des particularités cliniques et de prise en charge tout à fait spécifiques. Ils se caractérisent par un retard au diagnostic, un Tableau sévère d’emblée et des pathologies associées alourdissant le pronostic.
Épidémiologie
Les décollements de rétine de l’enfant représentent 5 % à 12 % des décollements de rétine et les traumatismes en constituent 40 % à 50 %[1–3,6,7,10,12,13,15]. On distingue les décollements de rétine rhegmatogènes et les décollements non rhegmatogènes. Les mécanismes impliqués dans les décollements peuvent être multiples, comme dans les dysplasies rétiniennes ou la rétinopathie des prématurés, où ils sont à la fois tractionnels et exsudatifs. Le Tableau 60-I résume les différentes causes de décollements de rétine retrouvées. Le Tableau 60-II rassemble les résultats des principales études sur les décollements de rétine de l’enfant, mais la majorité concerne les décollements rhegmatogènes. La prédominance masculine (60 % à 80 % de garçons) est retrouvée dans toutes les séries du fait de l’importante proportion de traumatismes[1–3,6,7,10,12,13,15]. La répartition des étiologies montre l’importance des atteintes congénitales dans la petite enfance, supplantées par les traumatismes et atteintes dégénératives chez l’enfant plus grand, ce qui rend la comparaison des séries difficile et partielle[12].
Décollements de rétine traumatiques | Plaies pénétrantes Contusion |
Dégénérescences vitréorétiniennes | Myopie Rétinoschisis juvénile Syndrome de Stickler, Wagner Syndrome de Marfan |
Décollements de rétine post-chirurgicaux | Cataracte congénitale Glaucome congénital |
Anomalies du développement | Colobome et fossette colobomateuse Persistance de la vascularisation fœtale (hyperplasie du vitré primitif) Dysplasie vitréorétinienne (Norrie, récessive) |
Décollements de rétine exsudatifs | Maladie de Coats Hémangiome choroïdien Hémangiome capillaire rétinien Rétinopathie des prématurés |
Décollements de rétine tractionnels | Toxocarose Vitréorétinopathie exsudative familiale Rétinopathie des prématurés |
Décollements de rétine tumoraux | Rétinoblastome |
Circonstances de découverte
La baisse de vision est souvent mise en évidence lors d’un examen systématique de dépistage scolaire ou de suivi ophtalmologique. L’atteinte étant unilatérale, l’enfant ne l’a pas signalée dans la majorité des cas[6]. Le traumatisme initial n’est pas retrouvé dans bon nombre de cas[15]. Les manifestations tardives du décollement vont constituer les signes d’appel : l’apparition d’un strabisme ou celle d’une leucocorie après un délai d’évolution important sont de fréquents motifs de consultation[6].
Clinique
Le Tableau clinique est sévère d’emblée, avec une prolifération vitréorétinienne de stade supérieur à B présente dans environ 50 % des cas. La macula est soulevée dans trois quarts des cas et le décollement de rétine est total dans plus de la moitié des cas[1–3,6,7,12,13,15]. Le taux de bilatéralité est également élevé, entre 15 % et 25 %, et témoigne de la fréquence de l’atteinte dégénérative, où une atteinte bilatérale peut s’observer jusqu’à 70 % des cas[3].
Prise en charge
La prise en charge du décollement de rétine de l’enfant est un travail d’équipe impliquant le pédiatre, l’anesthésiste, l’ophtalmopédiatre et l’orthoptiste pour assurer le suivi du traitement de l’amblyopie induite. Les anesthésies devront être répétées pour le suivi et la prise en charge, notamment chez l’enfant de moins de trois ans[8]. On s’attachera notamment chez le petit enfant à faire un interrogatoire approfondi des parents à la recherche de pathologies associées ou d’éléments pouvant évoquer un syndrome de Silverman ou des enfants secoués : lésions des membres, décollement de rétine d’aspect traumatique chez un nourrisson, éléments d’interrogatoire contradictoires. Les atteintes associées, fréquentes chez le nourrisson du fait de la part importante des anomalies congénitales dans les causes de décollement de rétine de l’enfant, seront recherchées en collaboration avec les pédiatres et neuropédiatres. Une atteinte congénitale bilatérale justifie de réaliser une IRM cérébrale pour éliminer des lésions centrales associées, qui peuvent être des anomalies de la ligne médiane ayant des conséquences endocriniennes.