Chapitre 53 Décollements de rétine sur rétinites virales
Le terme de rétinites virales regroupe de nombreuses présentations cliniques, principalement le syndrome de nécrose rétinienne aiguë à HSV et VZV survenant chez l’immunocompétent (ARN, Acute Retinal Necrosis) et la rétinite à CMV de l’immunodéprimé. Le pronostic visuel est généralement médiocre, avec plus de 65 % d’acuité visuelle finale inférieure à 1/10.
Le décollement de rétine est la principale complication compromettant l’acuité visuelle au cours de l’évolution du syndrome de nécrose rétinienne virale. Son incidence est relativement élevée, supérieure à 50 % dans la plupart des séries publiées (50 % à 85 %) [5, 7, 9, 15, 16, 19]. Seul Tran et al. ne retrouvent que 17,5 % de décollements de rétine dans leur série de trente-trois patients, ce qu’ils expliquent par le faible recul (dix mois) [22].
Le décollement de rétine survient classiquement entre le premier et le quatrième mois après le début de l’inflammation, temps pendant lequel se produit le décollement postérieur du vitré, souvent incomplet, laissant d’importantes brides vitréorétiniennes responsables de tractions rétiniennes au niveau des zones de transition entre rétine saine et rétine nécrotique. Il peut cependant être plus précoce, voire présent dès les stades initiaux comme chez Morel [19] ou, au contraire, être retrouvé avec un délai de plusieurs années [5, 15, 16].
Formes cliniques
SUJET IMMUNOCOMPÉTENT : NÉCROSE RÉTINIENNE AIGUË (ARN)
Dans sa série de onze décollements de rétine, Blumenkranz retrouvait une prolifération vitréorétinienne de stade C chez 72 % d’entre eux [5]. Ahmadieh retrouve en 2003 une prolifération vitréorétinienne de stade C à prédominance antérieure chez 100 % de ses dix-huit patients atteints de nécrose rétinienne aiguë opérés de décollement de rétine [2].
SUJET IMMUNODÉPRIMÉ
RÉTINITE À CMV
La rétinite à CMV est évoquée en cas de taux de lymphocytes CD4 inférieur à 200/mm3 chez le patient infecté par le VIH, devant un aspect clinique décrit en « pizza » ou « fromage blanc et ketchup ». En effet, les plages de nécrose rétinienne blanc jaunâtre côtoient de vastes hémorragies rétiniennes. Le départ et souvent périvasculaire veineux, avec une progression du foyer nécrotique laissant une plage centrale cicatricielle pigmentée (fig. 53-1 et 53-2).
Fig. 53-1 Rétinite à CMV de type vascularité givrée touchant les troncs veineux.
Cliché de G. Caputo.
Chez l’immunodéprimé, il n’y a pas ou peu de réaction vitréenne inflammatoire.
Au début, la rétine est le siège d’un décollement exsudatif puis, avec la traction de la hyaloïde postérieure sur les zones de nécrose, le décollement devient rhegmatogène avec des microtrous ou des pertes de substance à la jonction entre rétine saine et rétine nécrotique cicatricielle. Ces déhiscences sont souvent postérieures et la prolifération vitréorétinienne est souvent absente ou tardive (fig. 53-3).