44: Décollement de rétine du myope fort

Chapitre 44 Décollement de rétine du myope fort




Définition, épidémiologie


La myopie forte est définie par une myopie de plus de (–) 6 D ou une longueur axiale dépassant 26 mm [16]. Elle induit de nombreuses complications rétiniennes, dont une augmentation de l’incidence du décollement de rétine comparée à celle des yeux emmétropes. La moitié des décollements de rétine non traumatiques surviennent dans les yeux myopes. Le risque de décollement de rétine augmente avec la longueur axiale : les personnes avec une myopie faible (1 D à 3 D) ont un risque quatre fois plus élevé de décollement de rétine ; quand la myopie dépasse 3 D, ce risque est déjà dix fois supérieur que chez les personnes non myopes [26]. Ce risque plus important chez les myopes forts est vraisemblablement lié à une interface vitréorétinienne pathologique. La fréquence des décollements de rétine « classiques » par déhiscences périphériques est plus importante chez les myopes, qui présentent aussi des formes spécifiques de décollements.



Diagnostic positif et différentiel


Le diagnostic du décollement de la rétine chez les myopes forts peut, dans la majorité des cas, se faire à l’examen du fond d’œil. Parfois, un décollement plan, surtout s’il est associé à une atrophie choriorétinienne, est de diagnostic plus délicat. La tomographie en cohérence optique (OCT) permet souvent d’objectiver le soulèvement et d’assurer le diagnostic différentiel avec un épaississement de la rétine, par fovéoschisis par exemple. Si le fond d’œil n’est pas accessible, par exemple à cause d’une hémorragie intravitréenne, l’échographie permettra ce diagnostic.




image DÉCOLLEMENT DE RÉTINE PAR DÉHISCENCE POSTÉRIEURE


Le décollement par déhiscence(s) située(s) en arrière de l’équateur est assez spécifique du myope fort. Il peut être lié à un trou maculaire (cf. infra) ou à une déhiscence postérieure extramaculaire à l’intérieur ou à l’extérieur du pôle postérieur et, dans ce dernier cas, elle est typiquement paravasculaire. Autour de la déhiscence, une traction vitréenne est souvent constatée. En effet, l’utilisation per-opératoire d’agents de visualisation, tels que la triamcinolone, permet de constater que dans ces cas, le vitré n’est pas décollé [20]. Une grande lacune vitréenne induit en erreur sur le plan clinique, échographique et parfois même à l’OCT : elle donne cette fausse impression de décollement postérieur du vitré. L’existence de cette grande lacune pourrait être impliquée dans la physiopathologie de l’apparition des tractions [23]. Le diagnostic de ces décollements est souvent simple à condition de réaliser un examen attentif du fond d’œil ; cependant, la recherche de la déhiscence peut être difficile (petite déhiscence et faible contraste du fond d’œil). Dans ces cas difficiles, l’examen par verre de contact ou par OCT peut permettre de retrouver la cause du décollement de rétine.



image DÉCOLLEMENT DE RÉTINE PAR TROU MACULAIRE


Ces décollements représenteraient jusqu’à 1 % des décollements de la rétine en Europe [5] mais ils sont plus fréquents en Asie, où la prévalence de la myopie forte est plus élevée : environ 10 % des décollements de rétine au Japon, par exemple [12]. Toutefois, tous les trous maculaires des myopes forts n’aboutissent pas à un décollement de rétine. De nombreux trous maculaires du myope fort peuvent même être asymptomatiques [6]. Un trou maculaire aboutit à un décollement de rétine s’il est associé à un staphylome et à un vitré non décollé. L’absence fréquente de décollement complet du vitré avait déjà été évoquée, malgré la difficulté à examiner la jonction vitréorétinienne dans ces yeux. Cette notion semble plus évidente aujourd’hui par l’utilisation per-opératoire de triamcinolone pour visualiser le vitré. Ces décollements se voient exclusivement chez le myope fort, avec une prédominance féminine. Les signes fonctionnels sont dominés par la chute de l’acuité visuelle avec scotome central positif brusque. Le décollement, peu mobile, est d’abord localisé au pôle postérieur puis il s’étend vers la périphérie, typiquement sans atteindre l’ora. Il n’y a pas de prolifération vitréorétinienne sévère spontanée (fig. 44-1). Le diagnostic fait appel à l’examen du fond d’œil et, surtout, à l’OCT.



Le principal diagnostic différentiel est le fovéoschisis du myope. Devant un soulèvement du pôle postérieur, il peut être difficile d’affirmer l’existence d’un vrai trou maculaire sur la seule base de l’examen clinique. De nombreuses formes cliniques intermédiaires existent : le fovéoschisis pur sans trou, le fovéoschisis avec trou incomplet (fig. 44-2) ou complet et le fovéoschisis avec décollement associé. Une baisse majeure de la vision de près sans correction oriente plutôt vers un décollement mais, en réalité, seul l’OCT permet le diagnostic précis (fig. 44-3) [3]. Plusieurs coupes OCT sont nécessaires pour explorer l’ensemble de la rétine décollée à la recherche du trou maculaire, l’acquisition de nombreuses coupes rapprochées ou d’un volume maculaire entier est indispensable (fig. 44-4)




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Jun 3, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 44: Décollement de rétine du myope fort

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