4 Acné, rosacée et troubles apparentés
Acné
Anamnèse
L’acné peut survenir à n’importe quel âge, mais elle est plus fréquente durant l’adolescence ; elle peut persister à l’âge adulte.
Vingt pour cent des personnes vont développer une acné sévère et avoir des cicatrices.
Les facteurs favorisant le développement de l’acné sont l’obstruction des follicules pilosébacés, la production accrue de sébum, le développement de Propionibacterium acnes et l’inflammation.
Il existe plusieurs formes d’acné.
Le rôle du régime alimentaire dans la pathogénie de l’acné demeure peu clair ; cependant, la consommation de laitages et de sucres simples a été incriminée dans certaines études.
L’acné peut avoir un caractère familial et ceux qui ont une histoire familiale d’acné développent plus souvent de l’acné dans le jeune âge.
Si les deux parents ont de l’acné, il y a 75 % de chances que leur enfant développe aussi de l’acné.
Il faut prendre en considération les pathologies, par exemple une hyperandrogénie liée à une hyperplasie congénitale des surrénales ou un syndrome des ovaires polykystiques.
Manifestations cutanées
Il existe deux types de lésions d’acné : les lésions non inflammatoires et les lésions inflammatoires.
Les lésions non inflammatoires incluent des comédons ouverts (points noirs) et des comédons fermés (microkystes).
Les lésions inflammatoires sont caractérisées par la présence de papules, de pustules et de nodules (kystes sébacés).
La rupture et la réépithélisation récurrentes des kystes aboutissent à une formation de sinus bordés de tissu épithélial, qui sont souvent accompagnés de cicatrices affichantes.
Des papules érodées sont observées chez des patients qui pressent les papules d’acné (acné excoriée).
Manifestations non cutanées
Les patients ayant un excès d’androgènes peuvent développer des signes de masculinisation (chute de cheveux, hirsutisme) et une puberté précoce.
Rarement, l’acné se manifeste en association avec de la fièvre ainsi que des problèmes osseux et articulaires (acné fulminante).
Des difficultés psychosociales importantes peuvent exister. Il peut y avoir dépression, anxiété et comportement asocial.
Examens de laboratoire et biopsie
Une évaluation par des tests biologiques est indiquée chez les femmes présentant une acné persistante ainsi que des signes d’hyperandrogénie (hyperpilosité faciale, hypertrophie musculaire, cycles menstruels irréguliers).
Les analyses incluent des dosages de testostérone, de FSH (follicle-stimulating hormone), de LH (luteinizing hormone) et de sulfate de déhydroépiandrostérone.
Des cultures bactériennes et fongiques permettent d’exclure une folliculite infectieuse.
Évolution et pronostic
La maladie est plus grave chez l’homme qu’elle ne l’est chez la femme ; les hommes sont moins enclins à recourir rapidement au traitement médical.
Les androgènes peuvent aggraver l’acné. Il est important de s’enquérir de l’utilisation des stéroïdes anabolisants, particulièrement chez les sportifs.
Des efflorescences d’acné peuvent survenir pendant les périodes de stress, avant les menstruations, avec certains médicaments (corticoïdes, lithium, anticonvulsivants, médicaments antituberculeux et produits iodés).
La tendance à former des cicatrices varie selon le patient.
La rougeur et la pigmentation faisant suite à la guérison des lésions d’acné peuvent mettre des mois à disparaître.
Les patients confondent souvent les macules rouges avec des cicatrices (pseudocicatrices).
Les régions sujettes au frottement de la peau peuvent manifester une acné accentuée (acné mécanique), par exemple sous un chapeau ou sous une lanière enserrant le menton.
L’acné se manifeste à des degrés de gravité variables. Parfois, il y a seulement apparition de comédons. Dans d’autres cas, les lésions kystiques prédominent.
L’acné commence habituellement entre 10 et 15 ans et dure pendant 5 à 10 ans.
Les enfants qui ont besoin d’un traitement oral à un âge précoce tendent à avoir une évolution plus grave.
Le cas des femmes de plus de 25 ans constitue un problème thérapeutique particulier pour le traitement de l’acné. Elles ont tendance à avoir une acné de faible intensité mais prolongée.
Les filles qui développent un grand nombre de comédons et des lésions précoces sont susceptibles de développer une acné plus sévère.
Traitement
Le traitement doit tenir compte des facteurs médicaux, financiers et psychosociaux.
Quand c’est possible, les traitements doivent être simplifiés, utilisant le moins de médicaments possible.
Les médicaments topiques nécessitent au moins 2 mois pour atteindre leur effet maximal. Il faut donc être patient.
La plupart des traitements sont continus et prolongés. On parvient plus souvent à un contrôle qu’à la guérison.
Il est nécessaire d’évaluer la tendance du patient à former des cicatrices. Si c’est le cas, on peut lui administrer un traitement systémique et le suivre de près.
S’il n’y a aucune amélioration appréciable, on peut envisager l’utilisation d’isotrétinoïne. Les patients présentant une acné nodulokystique peuvent commencer d’emblée l’isotrétinoïne.
Quand on prend en charge l’acné, la sensibilité cutanée, la présence de lésions inflammatoires ou non inflammatoires doit être prise en compte.
Sensibilité cutanée
La peau doit être nettoyée doucement avec un savon doux et de l’eau tiède.
Les patients doivent être encouragés à ne pas trop frotter leur peau.
Sécher la peau avant d’appliquer des produits topiques.
Les produits doivent être appliqués en couche fine avec un massage doux sur les zones susceptibles d’acné.
Les patients ne doivent pas appliquer de traitements sur la peau normale où des lésions d’acné ne sont pas présentes.
Si la peau devient rouge ou sèche, il faut vérifier qu’un traitement excessif n’est pas appliqué et que l’agent adéquat a bien été choisi en fonction du type de peau du patient.
Les solutions et les gels sont mieux adaptés pour les peaux grasses, alors que les crèmes et les lotions sont mieux adaptées pour les peaux sèches.
De plus faibles concentrations de médicament sont préférables pour les patients ayant une peau sensible.
Les après-shampooing et les huiles pour cheveux doivent être évités.
Si des produits de beauté sont utilisés, ils doivent être sans huile et à base aqueuse.
Les patients doivent éviter de gratter ou de faire éclater leurs lésions d’acné.
Orifices des follicules obstrués, non inflammatoires (comédons, points noirs et points blancs)
Les agents qui exfolient doucement la couche superficielle de la peau et ont des propriétés antibactériennes (par exemple le peroxyde de benzoyle) sont utilisés en combinaison avec des agents qui corrigent la comédogenèse (par exemple la trétinoïne, l’adapalène et le tazarotène). Un produit est en général appliqué le matin et un autre le soir.
Les produits destinés à l’exfoliation et obtenus sur ordonnance ou en vente libre contiennent de l’acide salicylique, des rétinoïdes et du peroxyde de benzoyle.
Il y a dans le commerce des gels, des lotions et des crèmes de peroxyde de benzoyle de concentration comprise entre 2,5 et 10 %.
La trétinoïne et ses dérivés sont comédolytiques et corrigent la comédogenèse. L’adapalène à 0,1 % en gel, crème, compresse ou solution peut être moins irritante. L’adapalène ne cause pas de sensibilité accrue au soleil, contrairement à la trétinoïne et au tazarotène. La trétinoïne provoque une photosensibilité et une sensation de brûlure accrue au soleil, même lorsqu’elle est appliquée au coucher.
Le tazarotène est un comédolytique puissant et efficace. Les méthodes pour diminuer l’irritation consistent à utiliser la formulation en crème ou en gel, suivie de lavages effectués à intervalles croissants (traitement de contact court).
L’acide azélaïque est comédolytique et antibactérien mais d’efficacité modeste. Il peut être utilisé sans risque pendant la grossesse.
Les produits exfoliants le visage (acide glycolique, acide salicylique) sont parfois utilisés pour libérer les pores obstrués.
Orifices des follicules inflammatoires (papules et pustules)
Beaucoup de patients ont en même temps des comédons, des papules et des pustules.
La trétinoïne, l’adapalène, le tazarotène plus une préparation de peroxyde de benzoyle ou un antibiotique sont appliqués pour les comédons, les papules et les pustules. La trétinoïne est appliquée à l’heure du coucher et le peroxyde de benzoyle ou un antibiotique est appliqué le matin.
Pour les papules et les pustules, on administre des antibiotiques topiques, du peroxyde de benzoyle ou une combinaison de peroxyde de benzoyle et d’un antibiotique comme la clindamycine.
Les antibiotiques topiques peuvent être prescrits dès l’abord ou comme traitement auxiliaire, après que l’état du patient s’est adapté à la trétinoïne, au peroxyde de benzoyle ou aux deux produits.
Les antibiotiques topiques incluent la clindamycine, l’érythromycine et la clindamycine à 1 %.
On obtient de meilleurs résultats cliniques et un taux inférieur de rechute lorsque les antibiotiques oraux sont utilisés à des doses plus élevées, avec diminution seulement quand le contrôle est obtenu.
Les doses habituelles pour commencer le traitement sont : tétracycline, 500 mg deux fois par jour ; doxycycline, 100 mg deux fois par jour.
Les antibiotiques doivent être pris pendant des semaines pour être efficaces et sont administrés pendant des mois pour réaliser le maximum d’effet.
Les données scientifiques et pharmacocinétiques disponibles ne soutiennent pas l’hypothèse que les antibiotiques (excepté la rifampicine) diminuent l’efficacité contraceptive des contraceptifs oraux.
La photothérapie dynamique – application d’un médicament photosensibilisant et exposition à une source lumineuse (laser ou lumière bleue) – est efficace pour traiter une acné inflammatoire.
Nodules et kystes inflammatoires (acné nodulokystique)
Certains patients répondent au traitement indiqué ci-dessus pour l’acné papuleuse ou pustuleuse. Si un essai de ce traitement pendant 3 mois n’en permet pas le contrôle, il faut alors recourir aux traitements indiqués ci-dessous.
L’isotrétinoïne per os est très efficace.
Un corticoïde peut être injecté dans les kystes. La prudence est recommandée étant donné le risque d’atrophie cutanée au site d’injection.
Quand l’acné est très grave, on utilise parfois la prednisone orale en traitement initial.
Chez les femmes, les contraceptifs oraux, en particulier anti-androgéniques, peuvent être bénéfiques.
La spironolactone peut être envisagée pour les femmes, en particulier celles qui ne sont pas en mesure de prendre un contraceptif oral, ainsi que pour les femmes qui ont rechuté après un traitement par isotrétinoïne. La dose est de 50 mg deux fois par jour. Certaines femmes ontbesoin de doses plus élevées (jusqu’à 100 mg
deux fois par jour). La spironolactone peut être prise en même temps que les contraceptifs oraux. À éviter en cas de grossesse.
Changements dans la pigmentation et cicatrices
Au sujet des cicatrices, il est souhaitable de référer le patient à un chirurgien plasticien ou à un dermatologue spécialisé dans l’esthétique seulement si l’acné a été quiescente pendant au moins un an ; cela permet une guérison normale maximale avant toute intervention invasive.
Les macules rouges s’estompent avec le temps et ne sont pas de véritables cicatrices.
Certains patients, surtout s’ils ont le teint mat, développent des macules claires et/ou foncées qui mettent des mois ou des années à disparaître et qui sont permanentes chez certains patients.
Les cicatrices peuvent être surélevées et épaisses (chéloïdes) ou déprimées (cicatrices en pic à glace).
Les traitements modifiant la pigmentation comprennent l’hydroquinone, la trétinoïne, l’acide azélaïque, l’exfoliation chimique et le resurfaçage au laser.
Le traitement des cicatrices d’acné comprend l’exérèse, le laser, la dermabrasion, l’exfoliation chimique et l’injection de produits de comblement (collagène, lipides, etc.). Pour les cicatrices épaisses, des injections intralésionnelles de corticoïde et l’application d’une feuille de gel de silicone sont très utiles.