Chapitre 33 Traumatismes Vasculaires
Nous traiterons ici essentiellement des traumatismes des membres, accidentels ou iatrogènes. Les traumatismes vasculaires sont de gravité variable en fonction de leur mode de survenue qui détermine le type de lésion vasculaire mais aussi le nombre et l’étendue des lésions associées. Leur nombre a un peu diminué avec la baisse de la traumatologie routière mais leur fréquence reste importante en pratique civile avec la traumatologie des deux roues, les accidents sur certains lieux de travail (fig. 33-1) et les traumatismes volontaires ou accidentels par armes blanches ou armes à feu. La prise en charge en pratique civile des traumatismes vasculaires a bénéficié de l’expérience des traumatismes de guerre. La médicalisation de la prise en charge préhospitalière a contribué à abaisser la mortalité globale à 10 % en pratique civile depuis plusieurs décades [1]. Actuellement les buts du traitement sont d’une part de préserver le pronostic vital mais aussi d’assurer un bon pronostic fonctionnel du membre concerné.
HISTORIQUE
La réparation des traumatismes artériels et veineux n’est survenue que tardivement sur les champs de bataille. Longtemps le seul traitement des plaies vasculaires a été la ligature, aboutissant très souvent à une amputation, et la chirurgie artérielle reconstructrice ne s’est développée que dans la deuxième moitié du XXe siècle. La statistique historique publiée en 1946 par De Bakey et Simeone rapporte le traitement de 2 471 traumatismes vasculaires survenus parmi les troupes américaines sur les champs de bataille en Europe pendant la seconde guerre mondiale [2]. Dans cette série, tous les cas avaient été traités par ligature sauf 81 traumatisés. La plupart des réparations vasculaires ne comportaient de plus que des sutures latérales. Cette série se soldait par 70 % d’amputations. La philosophie de la prise en charge des traumatismes vasculaires a changé au cours de la guerre du Vietnam pendant laquelle 600 jeunes chirurgiens américains, formés au traitement des plaies de guerre, avaient été envoyés sur le front, permettant une prise en charge de 7 500 soldats américains victimes de traumatismes vasculaires. Cette expérience a été colligée dans le Vietnam Vascular Registery,[3], et Rich et Hughes en 1970 ont rapporté à partir de cette série 1 000 traumatismes artériels aigus majeurs [4]. Dans cette série, seuls 15 patients avaient été traités par ligature alors que 459 avaient bénéficié d’une autogreffe veineuse et 377 d’une anastomose terminoterminale. Les résultats témoignent de la qualité de la prise en charge puisque le taux d’amputation a été de 5 % pour les plaies vasculaires du membre supérieur, de 11 % pour les lésions iliaques et de 29,5 % pour les traumatismes poplités. Le traitement standard a donc radicalement basculé à partir de ces années de la ligature à la reconstruction vasculaire.
LÉSIONS ANATOMIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIE DES TRAUMATISMES VASCULAIRES
Lésions anatomiques
RUPTURE DES TROIS TUNIQUES
La rupture artérielle concerne les trois tuniques, intima, média et adventice. Cette rupture entraîne habituellement une extravasation sanguine. On distingue les plaies franches à bords nets et les plaies contuses associant dilacération et perte de substance. La rupture peut être complète avec section complète de l’artère ou partielle sous forme d’une plaie latérale. L’extravasation sanguine peut manquer en cas de rupture complète d’un vaisseau de petit calibre car les extrémités peuvent se rétracter et se spasmer entraînant une hémostase spontanée et une plaie sèche.
Mécanismes et agents traumatisants
Conséquences anatomiques des traumatismes vasculaires
Les traumatismes artériels ont des évolutions anatomiques variables à moyen ou long terme.
SPASME ARTÉRIEL
Il résulte de la contraction des cellules musculaires lisses de la média. Il survient principalement sur les artères de petit calibre. L’activation mécanique des cellules musculaires lisses due au traumatisme est considérée comme le principal médiateur de la contraction de ces cellules [7]. Une rupture intimale peut aussi entraîner un spasme artériel car l’endothélium a un rôle important dans la régulation de l’activité contractile des cellules musculaires lisses.
FAUX ANÉVRISMES
Les faux anévrismes peuvent se constituer de façon aiguë par rupture intimo-médiale. L’adventice assure une continuité temporaire mais se distend progressivement. Un faux anévrisme peut aussi résulter d’une rupture complète punctiforme de la paroi artérielle (accident de ponction, traumatisme par plomb de chasse de petit calibre). Dans les deux cas, la paroi du faux anévrisme est constituée de tissu autre que celui de la paroi artérielle et le risque évolutif est la rupture.