3: Génétique du cancer

Chapitre 3


Génétique du cancer





Le cancer est une maladie génétique


Le cancer est causé par des altérations géniques. De nombreux gènes sont impliqués dans le processus, et l’éventail des mécanismes par lesquels les gènes peuvent être modifiés est vaste. Les altérations génétiques sont spécifiques de la tumeur, mais il existe des caractéristiques communes aux gènes qui causent le cancer. En outre, il faut examiner individuellement les différences entre des mutations somatiques (observées dans les tumeurs, mais pas dans le reste du corps) et des mutations germinales (héritées, et présentes dans chaque cellule du corps).


Les oncogènes sont des gènes cellulaires normaux qui participent à la stimulation des voies de croissance et deviennent anormalement activés en cas de cancer. L’activation peut survenir de plusieurs façons. Des mutations ponctuelles peuvent rendre les protéines correspondantes indifférentes aux signaux de régulation négative, comme dans le cas de la mutation de KRAS. Le facteur de transcription MYC est souvent activé par amplification du nombre de copies, ou il peut être mis sous le contrôle d’un promoteur inapproprié, ce qui donne le même résultat. Dans le cas de la mutation BCR-ABL, ubiquitaire dans certaines leucémies, une translocation chromosomique relocalise un promoteur actif dans les cellules myéloïdes dans une position qui entraîne la production non régulée d’une tyrosine kinase stimulant la prolifération.


Les gènes suppresseurs de tumeurs inhibent normalement la croissance cellulaire ou favorisent la différenciation cellulaire, et sont inactivés en cas de cancer. Puisque les humains naissent avec deux copies de chaque gène (sauf les chromosomes X et Y chez les hommes), il faut deux lésions ou « hits » pour libérer la cellule de l’activité régulatrice exercée par ces gènes. Les gènes suppresseurs de tumeur fournissent la base conceptuelle de la plupart des formes héréditaires de prédisposition au cancer. La personne touchée est née avec une mutation d’un allèle de la « lignée germinale », présent dans chaque cellule du corps. Le cancer survient dans une lignée cellulaire spécifique lorsque l’autre allèle est victime d’une mutation « somatique » inactivatrice, qui représente le deuxième hit. Des exemples de gènes suppresseurs de tumeurs comprennent les gènes Rb, p53, p16, inactivés dans certains cancers.


Les gènes de réparation de l’ADN jouent un rôle important dans le cancer. Il en existe de plusieurs types, chacun propre à une ou plusieurs variétés de dommages. Lorsque ces gènes sont inactivés, la cellule concernée devient facilement mutable, avec ensuite de nombreuses mutations somatiques dans les gènes cibles, notamment des oncogènes ou des gènes suppresseurs de tumeurs, ce qui conduit au cancer. Des états de réparation défectueuse de l’ADN ont fourni une explication supplémentaire pour certaines maladies héréditaires. Les systèmes de réparation d’ADN inactivés en cas de cancer comprennent le système de réparation des mésappariements de l’ADN appelé MMR (mismatch repair), impliqué dans le syndrome de Lynch ; le système de réparation par excision de base, qui mène à une forme autosomique récessive de la polypose familiale appelée polypose associée au MYH ; et la réparation par excision de nucléotide, cause du xeroderma pigmentosum, une maladie autosomique récessive.



Syndromes cancéreux héréditaires


Le concept du gène suppresseur de tumeur explique pourquoi une personne peut être prédisposée au cancer lorsqu’un allèle est muté dans chaque cellule ; la probabilité que certaines cellules finiront par perdre les deux copies du gène augmente considérablement, ce qui serait statistiquement peu probable sans une mutation germinale. En fait, des mutations germinales dans les suppresseurs de tumeur mentionnés précédemment, Rb, p53 et p16, causent respectivement le rétinoblastome familial, le syndrome de Li-Fraumeni et le syndrome FAMMM (familial atypical multiple-mole melanoma).


Les mutations germinales des gènes de réparation de l’ADN créent des tableaux cliniques plus complexes. En cas de cancer du côlon sans polypose héréditaire, aussi connu sous le nom de syndrome de Lynch, la forme héréditaire du cancer colorectal (CCR) la plus fréquente, qui représente environ 3 % de l’incidence du CCR, une mutation germinale se produit dans un allèle d’un gène de réparation des mésappariements de l’ADN (MSH2, MLH1, MSH6 ou PMS2), et la perte de l’autre allèle rend une cellule incapable de réparer des mésappariements de l’ADN et donc la prédispose aux mutations, qui s’accumulent dans les gènes régulateurs de croissance, ce qui provoque le cancer. (Il existe de rares cas dans lesquels les mutations touchent les deux allèles des gènes de réparation des mésappariements de l’ADN, ce qui cause un déficit constitutionnel et une diathèse cancéreuse pédiatrique.) Plus récemment, il a été découvert qu’une délétion dans le gène EpCAM (précédemment appelé TACSTD1), en amont de MSH2, peut réduire au silence MSH2, ce qui provoque un syndrome de Lynch sans mutation dans le gène MSH2 lui-même. Ainsi, le syndrome de Lynch est hérité de manière mendélienne dominante classique, mais les cancers ne se développent qu’après la mutation du second allèle ; la maladie est dès lors récessive au niveau tissulaire. Un défaut constitutionnel de réparation par excision de base, appelé polypose associée à MUTHY, peut être causé par des mutations bialléliques dans les gènes MUTHY ; ces patients développent de multiples adénomes colorectaux et sont fortement prédisposés au CCR. De même, le défaut constitutionnel de réparation par excision de nucléotides cause le xeroderma pigmentosum ; ces patients sont incapables de tolérer la lumière du soleil, même de très faible intensité, car le complexe enzymatique nécessaire à la réparation des altérations de l’ADN causées par les ultraviolets est défectueux. Ces deux affections sont classiquement récessives, et l’état de porteur monoallélique n’augmente pas significativement le risque de cancer.

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May 6, 2017 | Posted by in IMAGERIE MÉDICALE | Comments Off on 3: Génétique du cancer

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