Chapitre 27 Échanges
La bonne compréhension des propriétés de tension de surface et de force de réapplication respectives de l’air et des différents liquides conditionne l’utilisation de ces différents outils en chirurgie rétinovitréenne [2].
Rappels sur la tension de surface et la force de réapplication
Le principe de l’utilisation des tamponnements internes est décrit dans le chapitre 25. Le choix du tamponnement interne dépend de plusieurs composantes :
La surface de tamponnement diffère selon le produit employé. Le gaz a une surface de tamponnement élevé — l’arc de contact est maximum car il moule complètement la surface du globe — : le niveau inférieur est horizontal. En revanche, le silicone présente une surface de tamponnement diminuée car son niveau inférieur est convexe, assurant un arc de contact plus faible (fig. 27-1, a et b). Cette notion est essentielle quand on réalise une rétinectomie inférieure, qui devra toujours être large pour tenir compte de la forme de la partie inférieure de la bulle de silicone (fig. 27-1, c et d).
Fig. 27-1 Arc de contact. a. et b. L’arc de contact assuré par une bulle d’air est plus important que l’arc de contact assuré par une bulle de silicone en raison de la surface de tamponnement : la bulle d’air présente un ménisque inférieur plan, alors que celui de la bulle de silicone est davantage convexe, ce qui diminue globalement l’arc de contact. c. et d. L’arc de contact conditionné par la forme du ménisque inférieur peut expliquer l’insuffisance de couverture des « cornes » d’une rétinectomie inférieure : une rétinectomie trop courte peut ne pas être couverte par le tamponnement interne (c). Il faut donc veiller à avoir d’une part une bulle de silicone bien complète et, d’autre part, une rétinectomie suffisamment large pour que les « cornes » soient couvertes par le ménisque inférieur.
Principes généraux des différents échanges
Les échanges ont transformé l’approche de la chirurgie vitréenne en permettant de mobiliser en per-opératoire le liquide sousrétinien. Leur utilisation a été très nettement améliorée par la généralisation des systèmes de visualisation « grand champ » qui sont absolument indispensables si on souhaite drainer le liquide sous-rétinien par un orifice de drainage (rétinotomie ou déchirure) périphérique (fig. 27-2).
ÉCHANGE SUR RÉTINE NON DÉCOLLÉE
Dans cette situation, l’échange peut être réalisé soit à partir d’une lentille biconcave de type Landers — car l’aspiration peut être faite au niveau de la rétine centrale —, soit à partir d’un système « grand champ » avec inverseur d’image. L’aspiration est soit passive grâce à la canule d’extrusion, soit active par aspiration du vitréotome par exemple (fig. 27-3 et 27-4).
ÉCHANGE SUR RÉTINE DÉCOLLÉE
Les deux propriétés, force de réapplication et pouvoir de tamponnement, sont alors mises à contribution : le principe est d’obtenir une bulle unique qui chasse efficacement le liquide sous-rétinien par la déchirure (par la force de réapplication) et l’obture ensuite (grâce au pouvoir de tamponnement). Le liquide sous-rétinien sera évacué à travers la déchirure, en poussant celui-ci :
Il est alors préférable d’utiliser un système de visualisation « grand champ » qui permet de localiser une déchirure périphérique. En effet, les lentilles biconcaves (type Landers) ne permettent pas de visualiser raisonnablement la périphérie rétinienne (fig. 27-5 et 27-6).
Échange fluide-air
PRINCIPE
Le principe est de remplacer l’eau dans la cavité vitréenne par un tamponnement par air précédant généralement un mélange gazeux isovolémique [1]. Il s’agit d’aspirer le liquide sous-rétinien le plus complètement possible pour que le tamponnement par gaz soit complet et que la pexie puisse être réalisée. La persistance d’un peu de liquide sous-rétinien est possible si la rétinopexie peut être faite dans de bonnes conditions autour des déchirures.
Un système d’injection automatique d’air — disponible sur tous les appareils de vitrectomie — est nécessaire pour les échanges : la pression d’infusion d’air est réglée entre 30 et 40 mm Hg. L’infusion de liquide est alors stoppée pour être remplacée par celle d’air. Il est nécessaire de visualiser les détails de la cavité vitréenne par une lentille biconcave ou un système « grand champ » avec inverseur et une lumière endoculaire [4].
RÉALISATION PRATIQUE
Les objectifs de l’échange sont :
DÉPLACEMENT DU LIQUIDE SOUS-RÉTINIEN AU NIVEAU DE LA PÉRIPHÉRIE RÉTINIENNE
Aspiration par la déchirure
Il peut rester du liquide sous-rétinien (fig. 27-7) [5]. Cette situation n’est pas préoccupante si la quantité est minime et si le décollement de rétine est supérieur, car le tamponnement va naturellement favoriser la résorption du liquide sous-rétinien avec un positionnement aisé [5].