19. Sémiologie des nerfs crâniens

Chapitre 19. Sémiologie des nerfs crâniens


Nerf optique SémiologieNerfs crâniens sémiologienerfs crâniensIl est indispensable de connaître la sémiologie des nerfs crâniens qui est un guide des symptômes dans le diagnostic ostéopathique crânien. On doit savoir identifier les contre-indications au traitement manipulatif. Il existe de nombreux livres d’anatomie et de pathologie sur les nerfs crâniens [[1][2][3][4] and [5]].

À l’exception du nerf olfactif et du nerf optique, les nerfs crâniens naissent ou se terminent dans le tronc cérébral (figure 19.1).








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Fig. 19.1
Orifices crâniens et neuropathies de compression (d’après [1]).



Nerf olfactif (I)


Généralités

NerfNerf olfactifNerf olfactif sémiologieLes récepteurs olfactifs sont des neurones bipolaires situés dans la muqueuse nasale. Les axones de ces neurones sont groupés dans des fascicules qui constituent le nerf olfactif et traversent la lame criblée de l’ethmoïde. Dans le bulbe olfactif, ils font synapse avec les cellules murales, dont les axones forment le tractus olfactif et les stries olfactives. La plupart des fibres olfactives se terminent dans l’uncus, quelques-unes dans le secteur prépiriforme (partie postérieure du gyrus orbitaire) et dans l’espace perforé antérieur. L’hippocampe n’a pas une fonction dans l’olfaction chez l’homme.

L’exploration de l’olfaction est faite en demandant au sujet d’identifier, avec les yeux fermés, diverses substances présentées séparément devant chaque narine, en obstruant l’autre par compression digitale. On doit proscrire les produits irritants comme l’ammoniaque et l’acide citrique, qui excitent les terminaisons sensitives du nerf trijumeau.

Indépendamment des atteintes nasales, l’anosmie est due à deux grandes causes : les traumatismes crâniens et les tumeurs développées dans la partie antérieure de la base du crâne. L’anosmie est une séquelle fréquente, et souvent définitive, des traumatismes crâniens. C’est la conséquence de l’arrachement des filets qui constituent le nerf olfactif quand ceux-ci traversent la lame criblée de l’ethmoïde.

La recherche d’une anosmie doit être systématique chez chaque individu qui présente des modifications progressives du comportement. Ce simple fait peut nous orienter vers une tumeur de la base avec répercussion sur le lobule frontal, et plus particulièrement un méningiome développé à partir du canal olfactif.


Commentaires cliniques

Une fracture antéropostérieure du crâne, parallèle à la suture sagittale, peut causer la rupture des fibres olfactives qui traversent la lame criblée et peuvent produire ainsi la perte ipsilatérale de l’odorat (anosmie).

Avec un mouvement antéropostérieur du cerveau d’intensité suffisante, causée par un impact (suite à une chute sur le ciment, en heurtant avec la tête), les fibres olfactives des deux hémisphères peuvent être arrachées ou être sectionnées dans la lame criblée. De telles fractures peuvent aussi permettre la perte de liquide céphalorachidien depuis l’espace subarachnoïdien vers la cavité nasale, et le passage d’air, et peut-être d’agents infectieux, à la cavité crânienne.

Les masses du lobe frontal (tumeurs ou abcès) ou les méningiomes du plancher de la fosse antérieure du crâne peuvent causer (parfois comme seul symptôme initial) une perte ipsilatérale de l’odorat due à la compression de la bandelette et du bulbe olfactif. Les dommages du secteur olfactif cortical primaire, suite à des tumeurs ou à des convulsions, peuvent produire des hallucinations olfactives, le patient sentant des parfums fantômes (habituellement désagréables).

La perte de l’odorat étant, en général, unilatérale, on doit tester séparément chaque fosse nasale.


Commentaire ostéopathique

La zone la plus importante de neuropathie de compression du nerf olfactif est l’ethmoïde au niveau de la lame criblée.


Nerf optique (II) et voies visuelles


Rappel anatomofonctionnel

NerfNerf optiqueLa rétine contient, en allant de l’extérieur vers l’intérieur, des photorécepteurs, des neurones bipolaires, qui sont complètement intrarétiniens et qui correspondent aux protoneurones visuels. Elle contient ensuite les neurones ganglionnaires et les deutoneurones visuels, dont les axones s’étendent jusqu’au corps géniculé latéral.

Les photorécepteurs sont les cônes et les bâtonnets qui reposent dans l’épithélium pigmentaire de la rétine. Les cônes, étant donné leur important seuil d’excitation, sont la base de la vision discriminative et des couleurs. Sa fonction nécessite de bonnes conditions d’éclairage. Les bâtonnets, dont le seuil d’excitation est faible, peuvent fonctionner en vision crépusculaire, mais les capacités discriminatives de ce système sont faibles. Les macules, situées dans le pôle postérieur du globe oculaire, présentent une dépression centrale, la fovéa, qui contient uniquement des cônes et où l’acuité visuelle est plus grande. La prépondérance des bâtonnets hors de cette région centrale rend compte de l’importance de la rétine périphérique pour la vision crépusculaire.

Les influx issus des photorécepteurs font relais au niveau des cellules bipolaires, se dirigent vers les neurones ganglionnaires, dont les axones, dépourvus de gaine de myéline, convergent vers la papille (tache aveugle), située dans la macule.

Les couches internes de la rétine sont vascularisées par l’artère centrale de la rétine, branche de l’artère ophtalmique. L’artère centrale de la rétine arrive au pôle postérieur du globe oculaire dans le nerf optique. Son émergence est visible au fond d’œil au niveau de la papille.

Le nerf optique est formé par la réunion des axones des neurones ganglionnaires. À partir de leur émergence du globe oculaire, ces axones sont couverts d’une gaine de myéline qui a les caractéristiques de la myéline du système nerveux central formée par les oligodendrocytes. Au début intraorbitaire, le nerf optique devient intracrânien en traversant le canal optique. Il est vascularisé par l’artère centrale de la rétine, par l’artère ophtalmique et, dans son segment intracrânien, par la cérébrale antérieure dont il croise la face inférieure. Les couches méningées et l’espace subarachnoïdien se prolongent le long du nerf optique jusqu’au pôle postérieur du globe oculaire.

Le chiasma est le lieu où se produit une décussation partielle des fibres optiques. Les fibres du champ nasal de la rétine croisent la ligne médiane pour atteindre la bandelette optique controlatérale. Les fibres qui viennent du champ temporal de la rétine ne décussent pas et se dirigent vers le tractus optique homolatéral.

Les tractus (bandelettes) optiques s’étendent du chiasma jusqu’au corps géniculé latéral en contournant les pédoncules cérébraux. Chaque tractus optique contient des fibres directes et des fibres croisées qui procèdent des deux hémirétines chargées du champ visuel controlatéral.

Le corps géniculé latéral se communique avec le thalamus, qu’il prolonge en arrière et vers le bas. Il est formé par six couches de neurones, sur lesquelles se terminent les fibres visuelles du tractus optique correspondant. Les couches 2, 3 et 5 reçoivent les fibres de l’œil homolatéral ; les couches 1, 4 et 6, de l’œil controlatéral.

Au contraire des fibres visuelles, celles qui correspondent au réflexe photomoteur (« fibres pupillaires ») ne font pas relais dans le corps géniculé latéral. Ces fibres court-circuitent cette formation pour atteindre la région prétectale, où elles s’articulent au moyen d’un neurone intercalaire avec le noyau d’Edinger-Westphal homolatéral et controlatéral.

Les radiations optiques s’étendent du corps géniculé latéral au cortex occipital. Elles correspondent au troisième neurone des voies visuelles. Les fibres des quadrants supérieurs de la rétine cheminent dans la profondeur du lobe pariétal ; celles qui viennent des quadrants inférieurs passent dans la profondeur du lobe temporal en dehors de la corne temporale.

L’écorce visuelle occupe les deux berges et le fond du sillon calcarin (scissure calcarine) dans la face interne du lobe occipital. La présence de la strie de Gennari, faite de fibres myélinisées d’association, lui vaut le nom de secteur strié (secteur 17 de Brodman). Les fibres d’origine maculaire occupent une vaste région qui s’étend dans le fond et sur les berges du sillon calcarin, dans le pôle occipital jusqu’à plus de la moitié de la longueur du sillon calcarin. Les fibres d’origine périphérique ont une représentation plus limitée et plus périphérique. D’une manière générale, les fibres qui proviennent des quadrants supérieurs de la rétine se terminent dans le bord supérieur du sillon calcarin ; celles qui proviennent des quadrants inférieurs, dans le bord inférieur. Le secteur 17 est entouré par le secteur 18, parastrié, et par le secteur 19, péristrié. Les secteurs 18 et 19 constituent classiquement l’écorce visuelle associative ; de fait, une projection des voies visuelles sur les secteurs 18 et 19 paraît actuellement établie. Le secteur 17 interviendrait dans la vision focale et la perception des formes, les secteurs 18 et 19 dans la perception des mouve- ments et la vision panoramique.


Lésions des voies optiques

Lésions des voies optiquesLes lésions des voies visuelles ont comme expression principale la diminution de l’acuité visuelle et l’amputation du champ visuel.

L’acuité visuelle doit être étudiée, œil par œil, avec l’aide d’échelles normalisées. Une perte d’acuité visuelle d’origine neurologique ne peut pas être corrigée avec des lentilles. C’est la traduction d’une lésion du système de fibres qui proviennent des macules.

Le champ visuel est exploré avec le doigt au cours de tout examen neurologique. L’exploration précise du champ visuel est généralement faite avec l’aide du périmètre de Goldmann. Il s’agit d’une coupole où le sujet fixe le centre avec l’œil exploré et sur laquelle il est possible de projeter un faisceau lumineux en allant du vu au non-vu. On peut ainsi dessiner les isoptères qui sont des courbures qui réunissent les points de sensibilité égale en fonction du diamètre et de l’intensité du stimulant lumineux utilisé.

Plus la vision est périphérique, plus il est nécessaire d’augmenter le diamètre et l’intensité du stimulant pour qu’il soit perçu. La papille correspond au disque du nerf optique (tache aveugle de Mariotte) situé un peu en dehors de la vision centrale.

Un scotome est une lacune dans le champ visuel d’un œil. Un scotome central qui traduit une lésion des macules ou des fibres d’où elles procèdent est accompagné d’une baisse de l’acuité visuelle.

L’hémianopsie est une modification du champ visuel des deux yeux. Les hémianopsies hétéronymes, bitemporales ou exceptionnellement binasales sont la base de lésions chiasmatiques. Les hémianopsies latérales homonymes, qui se traduisent par l’amputation du domaine visuel droit ou gauche, sont le signe d’une lésion rétrochiasmatique controlatérale. Une hémianopsie limitée aux quadrants supérieur ou inférieur est une quadrant-anopsie. Le terme d’hémianopsie altitudinale est utilisé parfois pour désigner l’amputation du champ visuel, supérieur ou inférieur, d’un seul œil.

L’examen ophtalmoscopique est le complément nécessaire de l’examen neurologique.

Il est utile pour le diagnostic des lésions de la rétine et du nerf optique.

Dans les lésions rétiniennes, l’ischémie résultant d’une occlusion de l’artère centrale de la rétine se manifeste par la perte brutale de la vision, avec dans le fond d’œil un œdème diffus de la rétine qui évolue vers un aspect d’atrophie optique. Si l’occlusion est limitée à la branche supérieure ou inférieure de l’artère centrale de la rétine, le syndrome est celui d’une hémianopsie altitudinale. Si l’ischémie est passagère, il s’agit d’un épisode de cécité monoculaire transitoire, évoquant une migration embolique à partir d’un foyer de sténose athéromateuse de l’artère carotide interne.

La thrombose rétinienne veineuse se traduit par une détérioration brutale de l’acuité visuelle et, dans le fond d’œil, par des hémorragies rétiniennes massives ; on doit rechercher une atteinte générale (hémopathie, dysglobulinémie, cancer, diabète).

La rétinite pigmentaire se traduit par une héméralopie et un rétrécissement concentrique du champ visuel, tandis que la vision centrale est respectée assez longtemps. Anatomiquement, le processus pathologique se caractérise par la disparition des bâtonnets, ensuite des cônes, remplacés par des cellules pigmentaires dont la conglomération confère au fond d’œil un aspect caractéristique.

La dégénérescence maculaire se distingue de la rétinite pigmentaire par l’atteinte élective des cônes de la région maculaire avec perte de la vision centrale. La rétinite pigmentaire et la dégénérescence maculaire sont habituellement des atteintes dégénératives héréditaires qui peuvent survenir sous forme isolée dans le cadre d’une dégénérescence plurisystématisée du système nerveux. Certains toxiques peuvent donner lieu à un tableau semblable (phénothiazines, chloroquine).

La lésion des couches internes de la rétine (neurones ganglionnaires) conduit à une atrophie optique avec diminution de l’acuité visuelle et, au fond d’œil, une pâleur de la papille. Dans la maladie de Tay-Sachs, l’atrophie optique est la conséquence d’une surcharge lipidique des neurones ganglionnaires. Des toxiques peuvent affecter les neurones ganglionnaires et déterminer une atrophie optique (quinine). De fait, devant un tableau d’atrophie optique, il est parfois difficile de savoir si le processus pathologique intéresse primitivement les neurones ganglionnaires ou le nerf optique.

La rétine peut aussi être le siège de tumeurs (rétinoblastome, hémangiome), de lésions plus ou moins diffuses d’origine vasculaire (rétinopathie diabétique, rétinopathie avec hypertension) ou inflammatoire.

L’électrorétinogramme (ERG) est un complément utile pour l’exploration des atteintes rétiniennes. Il enregistre l’activité des neurones rétiniens soumis à une illumination très brève (1/10 e de seconde). On place une électrode sur la cornée au moyen d’un cristal de contact, un autre sur une paupière. L’ERG est plat dans les lésions de la couche externe de la rétine (cellules photosensibles), comme dans la rétinite pigmentaire. Il est normal dans les lésions qui intéressent les couches internes, comme la surcharge lipidique d’une maladie de Tay-Sachs.


Lésions du nerf optique

Nerf optique LésionsnerfNerf optiqueCes lésions ont pour expression une diminution de l’acuité visuelle en relation avec l’atteinte des fibres du faisceau maculaire. L’étude du champ visuel peut mettre en évidence un scotome central. Si l’interruption du nerf optique est complète, cela donnera comme résultat une cécité avec abolition du réflexe photomoteur direct, mais avec conservation du réflexe consensuel ; l’illumination de l’œil sain permet d’obtenir une réponse bilatérale.

Si la lésion est rétrobulbaire, le fond d’œil reste initialement normal ; secondairement, une atrophie optique apparaît qui se traduit par une décoloration de la papille. S’il s’agit d’une neuropapillite, un œdème papillaire précède la constitution de l’atrophie optique ; l’existence d’une perte précoce et importante de l’acuité visuelle est une importante caractéristique, distinguant l’œdème papillaire de l’hypertension intracrânienne.

La compression du nerf optique est la première éventualité à examiner. Elle peut être due à un anévrisme développé dans la région de l’artère communicante antérieure, un méningiome au niveau de la petite aile du sphénoïde dans sa variété interne, d’une tumeur parasellaire, et chez l’enfant d’un gliome du nerf optique. Dans toute névrite optique unilatérale, progressive, on doit penser à une compression, et des radiographies des canaux optiques doivent être pratiquées, et, éventuellement, une artériographie carotidienne.


Névrites optiques inflammatoires

Névrites optiquesNévrite optique inflammatoiresLa sclérose en plaques est une des causes essentielles des névrites optiques inflammatoires. Généralement, c’est le tableau d’une névrite optique rétrobulbaire et parfois d’une neuropapillite. Une névrite optique, fréquemment unilatérale, est une manifestation initiale d’une sclérose en plaques dans beaucoup de cas. Le nerf optique peut également être lésionné au cours de méningo-encéphalites virales, d’encéphalites para-infectieuses et de méningites bactériennes. La syphilis est une cause exceptionnelle.


Névrites optiques toxiques

Névrites optiquesNévrite optique toxiquesFace à une névrite optique bilatérale, il faut rechercher une cause toxique ou médicamenteuse. La névrite optique est alors souvent associée à des signes plus diffus de lésion du système nerveux, comme dans la neuropathie myélo-optique subaiguë, produite par les dérivés halogénés de l’hydroxykinoline. La névrite optique alcoolotabagique est d’origine toxique (cyanures contenus dans le tabac et manque de vitamine B).


Névrites optiques ischémiques

Névrites optiquesNévrite optique ischémiquesLa cécité brutale par lésion ischémique du nerf optique est une complication importante de la maladie de Horton. Outre cette atteinte, les névrites ischémiques peuvent être observées dans les cas de personnes âgées pour des lésions d’artériosclérose. Finalement, une névrite optique bilatérale survient souvent au cours d’une hémorragie massive.


Névrites optiques familiales

Névrites optiquesNévrite optique familialesLa maladie de Leber est une névrite optique héréditaire qui affecte les adolescents et les adultes jeunes. Elle affecte, d’une manière aiguë et presque simultanée, les deux yeux. Dans sa forme génétique plus habituelle, elle est transmise par les femmes et affecte les hommes. Hormis cette atteinte, une atrophie optique peut être développée dans le cadre de bon nombre de maladies hérédodégénératives du système nerveux.


Lésions chiasmatiques

chiasmatiquesL’hémianopsie bitemporale est la conséquence d’une compression du chiasma dans sa partie moyenne. Les adénomes hypophysaires et les craniopharyngiomes sont les causes principales. La sémiologie visuelle est souvent plus complexe en cas de compression associée des voies visuelles rétrochiasmatiques. L’hémianopsie binasale est beaucoup plus rare ; elle résulte d’une compression bilatérale de dehors en dedans du chiasma d’origine généralement vasculaire.


Lésions rétrochiasmatiques

rétrochiasmatiquesUne lésion rétrochiasmatique unilatérale a pour conséquence une hémianopsie latérale homonyme controlatérale avec conservation de l’acuité visuelle des deux yeux, puisque la moitié des fibres maculaire de chaque œil échappent à la lésion.

Les fibres afférentes du réflexe photomoteur sont séparées des fibres visuelles à l’arrivée au corps géniculé latéral. L’abolition du réflexe photomoteur, quand on illumine un seul champ hémianopsique (réflexe hémioptique), permet de différencier les lésions des tractus optiques de celles des radiations optiques et de l’écorce occipitale où le réflexe est conservé.

Le nystagmus optocinétique, dont la voie efférente a son point de départ dans la région pariéto-occipital, peut être diminué quand l’hémianopsie est en relation avec une lésion hémisphérique. Il reste symétrique dans les hémianopsies par lésion du tractus.

Quand la lésion des radiations optiques est limitée, affectant uniquement le contingent pariétal ou temporal, le résultat est une quadrant-anopsie latérale homonyme qui affecte respectivement les quadrants inférieurs ou les quadrants supérieurs.

Tandis qu’elles s’approchent du sillon calcarin, les fibres correspondantes des deux yeux tendent à se situer côte à côte, de telle sorte que l’hémianopsie arrive à être chaque fois plus « congruente », c’est-à-dire précisément superposable dans les deux yeux.

Une lésion bilatérale des radiations optiques ou du sillon calcarin donne lieu au tableau clinique de la cécité corticale, qui se caractérise par la conservation des réflexes locomoteurs, et qui se distingue d’une cécité hystérique par l’abolition du nystagmus optocinétique.

En l’absence d’interruption des voies visuelles rétrochiasmatiques et d’hémianopsie vraie, il est possible d’observer une hémianopsie relative mise en évidence par la présentation symétrique de deux objets identiques dans les deux hémichamps. Ce phénomène d’« extinction » ou de « négligence » visuelle peut être en relation avec une lésion pariétale ou frontale (pseudohémianopsie frontale).


Commentaires cliniques

Des défauts de développement, des traumatismes, des problèmes vasculaires et métaboliques peuvent causer des dommages dans le système visuel.

Les défauts de développement peuvent produire de petits yeux (microphtalmie), une agénésie (anophtalmie) ou encore la fusion des deux yeux pour former un seul œil central (cyclopie).

Les défauts de développement de la partie transmettant la lumière à l’œil, par exemple les cataractes congénitales (cristallins opaques), interfèrent aussi avec la vision.

Bien que la plupart du système visuel se trouve dans l’os, la partie antérieure de l’œil est seulement protégée par les paupières et peut être endommagée par des traumatismes de la face. Les traumatismes graves de la tête peuvent endommager le système visuel, aussi bien que d’autres parties du système nerveux central.

Comme le nerf optique est en réalité un tractus du système nerveux central, ses axones sont soumis à des maladies de ce système, comme la sclérose multiple et les tumeurs.

Le système visuel peut aussi être affecté par un défaut d’apport sanguin. Par exemple, le diabète endommage les vaisseaux sanguins de la rétine.

La perte visuelle qui résulte des dommages du système visuel dépend de leurs situations et de leurs extensions.


Avant le chiasma

La lésion de la rétine produit une perte de l’entrée visuelle depuis le secteur affecté et elle donne lieu à un défaut du champ monoculaire.

Du fait que les axones des cellules ganglionnaires convergent vers le disque optique, les dommages près du centre de la rétine produisent un défaut de champ plus grand que la même lésion dans la périphérie de la rétine. La lésion de la fovéa produit une perte de la vision centrale et cause un préjudice visuel plus grand que les lésions dans tout autre partie de la rétine.

Les dommages du nerf optique entraînent la perte de l’entrée de l’œil ipsilatéral seulement. Le patient présentera une cécité de cet œil.


Dans le chiasma

Le secteur moyen du chiasma peut être atteint à cause d’une tumeur dans la glande hypophyse ; les axones seront affectés dans la zone de décussation, ce qui provoquera la perte de l’entrée visuelle des hémirétines nasales des deux yeux. En ce cas, il y a perte des champs visuels temporaux (hémianopsie bitemporale, perte de la vision périphérique).

Si le secteur latéral du chiasma est endommagé (par exemple par un anévrisme au niveau de la bifurcation de l’artère carotide interne), il y a perte de l’entrée des stimuli de la moitié de la rétine temporale de l’œil ipsilatéral ; cela cause la perte du champ ipsilatéral nasal visuel.


Après le chiasma

Au niveau des radiations optiques, les axones géniculocalcarins s’étendent sur un secteur relativement vaste, ce qui explique pourquoi les lésions peuvent ici affecter seulement une partie du champ visuel. Une lésion dans la partie antérieure du lobe temporal, par exemple, affecte les axones de l’anse de Meyer et produit une perte d’environ un quart du champ visuel, c’est-à-dire du quadrant supérieur controlatéral des deux yeux (quadrant-anopsie supérieure homonyme).

Comme la moitié des axones des cellules ganglionnaires croisent la ligne moyenne dans le chiasma, la lésion des tractus optiques, des corps géniculés latéraux, des tractus géniculocalcarins (radiations optiques) ou du cortex optique produit la perte d’entrée des stimuli des champs visuels controlatéraux des deux yeux (hémianopsie homonyme).

Fréquemment, les lésions situées dans les radiations optiques ou dans le cortex visuel ne causent pas la perte complète de la vision dans les champs correspondants, mais laissent une certaine vision centrale intacte. Cette « économie maculaire » est due au fait que l’entrée de stimuli depuis la macula est représentée sur une surface plus grande du cortex visuel.


Commentaire ostéopathique

Les zones les plus fréquentes de neuropathie de compression du nerf optique sont le canal optique du sphénoïde et l’anneau tendineux commun (de Zinn).


Nerfs des muscles oculomoteurs

Les quatre muscles droits (médial, latéral, supérieur, inférieur), nés de l’anneau tendineux commun (tendon de Zinn) dans le fond de l’orbite, s’insèrent sur l’hémisphère antérieur des globes oculaires et ils sont innervés par le nerf oculomoteur (III), à l’exception du droit latéral, qui est innervé par le nerf abducens (VI).

Le muscle oblique supérieur se réfléchit sur une poulie à la face interne de l’orbite ; il se dirige ensuite en arrière et en dehors vers la face supérolatérale de l’hémisphère postérieur du globe oculaire ; il est innervé par le nerf trochléaire (IV).

Le muscle oblique inférieur, né de la face interne de l’orbite, s’attache sur la partie inférieure du globe oculaire ; il est innervé par le nerf oculomoteur (III).

À ces six muscles, il est nécessaire d’ajouter le releveur de la paupière supérieure, innervé par le nerf oculomoteur (III), et l’orbiculaire de l’œil, innervé par le nerf facial (VII).



Notion de mécanique oculaire

oculaireLe droit latéral et le droit médial sont, respectivement, abducteur et adducteur. L’action des droits supérieur et inférieur et des obliques est variable selon la position du globe oculaire. Quand l’œil est en adduction, l’axe optique s’approche de l’axe des obliques et la verticalité est assurée par les muscles obliques : l’oblique supérieur descend l’œil, l’oblique inférieur l’élève, tandis que les droits supérieur et inférieur sont rotateurs (mouvements d’intorsion et d’extorsion autour d’un axe antéropostérieur). Quand l’œil est en abduction, l’axe optique se rapproche de l’axe des droits, le droit supérieur est élévateur, le droit inférieur descend le globe oculaire, tandis que les obliques deviennent rotateurs. Quand l’axe visuel est strictement sagittal (position primaire), la verticalité est due aux deux groupes musculaires, droit supérieur et oblique inférieur pour l’élévation, droit inférieur et oblique supérieur pour la descente (figure 19.2).








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Fig. 19.2
Muscles Œil Muscles de l’œil.


La paralysie d’un muscle oculomoteur peut donner lieu à un strabisme apparent dans le regard direct ou seulement quand le sujet essaie de regarder dans la direction du muscle déficitaire. Très souvent, la paralysie se traduit seulement par une diplopie, qui peut être horizontale (lésion d’un droit latéral ou médial), ou verticale (lésion d’un droit supérieur ou inférieur ou bien d’un oblique) ; l’analyse de cette diplopie par le spécialiste permet de reconnaître avec précision le muscle déficitaire. Une attitude vicieuse compensatrice de la tête, adoptée pour rétablir le parallélisme des globes oculaires, peut être utile pour le diagnostic.


Nerf oculomoteur (III)

NerfNerf oculomoteurNerf oculomoteur sémiologieLe nerf oculomoteur (III) naît dans le mésencéphale. Son noyau est situé au niveau des colliculus supérieurs (tubercules quadrijumeaux antérieurs), près de la ligne médiane, en avant de la substance grise périaqueducale. Les fibres nerveuses se dirigent en avant et traversent le noyau rouge avant d’émerger du tronc cérébral dans la fossette interpédonculaire en dessous de l’artère cérébrale postérieure et au-dessus de l’artère cérébelleuse supérieure.

Le nerf chemine ensuite dans la paroi externe du sinus caverneux et traverse la fente sphénoïdale pour atteindre l’orbite où il se divise en une branche supérieure pour le droit supérieur et le releveur de la paupière supérieure, et une branche inférieure pour le droit médial, le droit inférieur et l’oblique inférieur. Le III contient également des fibres parasympathiques qui proviennent du noyau d’Edinger-Westphal et destinées à la pupille ; ces fibres font relais dans le ganglion ciliaire auquel elles arrivent après s’être unies à la branche inférieure du III.

La paralysie du nerf oculomoteur provoque, lorsqu’elle est complète, une ptose, un strabisme externe, une impossibilité de déplacer le globe oculaire vers le haut, vers le bas et en dedans, une mydriase aréactive. Une lésion du nerf entre le tronc cérébral et le sinus caverneux (encastrement temporal) peut provoquer une mydriase aréactive isolée. La mydriase manque fréquemment quand la lésion se situe au niveau du sinus caverneux (anévrisme de l’artère communicante postérieure) ou de la fente sphénoïdale.


Nerf trochléaire (IV)

NerfNerf trochléaireNerf trochléaire sémiologieLe nerf trochléaire (IV) naît d’un noyau situé juste en dessous du nerf précédent, au niveau des colliculus inférieurs (tubercules quadrijumeaux postérieurs). Les fibres sont dirigées en arrière et croisent la ligne moyenne avant d’émerger à la face dorsale du mésencéphale. Le nerf entoure ensuite le tronc cérébral, chemine dans la paroi externe du sinus caverneux, traverse la fente sphénoïdale et se termine dans le muscle oblique supérieur.

La paralysie du nerf trochléaire (IV) produit une diplopie qui est maximale lorsque le patient regarde vers le bas et vers le côté sain. Pour compenser, la tête est inclinée sur l’épaule du côté sain et revient vers ce côté.


Nerf abducens (VI)

Le nerf abducens (VI) naît dans la partie dorsale du pont. Le noyau est situé en dessous du plancher du IV e ventricule près de la ligne médiane ; il est entouré en arrière par les fibres du nerf facial (VII, genou du facial). Après son émergence dans la partie interne du sillon bulbopontique, le nerf passe au-dessus de la pointe de la partie pétreuse du temporal et pénètre dans le sinus caverneux, où il est en contact avec l’artère carotide interne. Il pénètre dans l’orbite par la fente sphénoïdale et se termine dans le muscle droit latéral.

La paralysie du nerf abducens provoque un strabisme interne de l’œil paralysé qui ne peut pas passer la ligne médiane lors du regard latéral vers le côté affecté. Si la lésion est nucléaire, il existe, en plus, une paralysie des mouvements conjugués de latéralité du côté de la lésion.


Mouvements conjugués des yeux

ŒilŒil MouvementsLes mouvements oculaires se font normalement toujours d’une manière conjuguée. Ils doivent être étudiés en fonction de leurs caractéristiques dynamiques (déviations lentes, brusques), de leur origine (réflexe, automatique, volontaire), de leur direction (latéralité, verticalité, convergence, divergence).

La distinction entre des mouvements oculaires lents et rapides est fondamentale, parce que ces deux types de mouvements expriment des fonctions différentes. La fonction des mouvements oculaires lents (mouvements de persécution) est de maintenir la fixation pendant le déplacement du stimulus visuel ou lors d’un déplacement de la tête. La fonction des mouvements oculaires rapides (secousses) est de mettre fin à une fixation et de permettre une exploration du champ visuel au moyen de fixations successives (mouvements de « fixation » ou d’« exploration »).

L’intégration de ces deux types de mouvements est faite dans la formation réticulée paramédiane du tronc cérébral, au niveau du pont pour les mouvements horizontaux et du mésencéphale pour les mouvements verticaux. Il s’agit de deux systèmes anatomophysiologiques différents qui peuvent être affectés de manière dissociée. Cette dualité continue jusque dans l’appareil d’exécution périphérique, où a été décrite la coexistence d’unités motrices de contraction rapide et d’unités motrices composées de fibres musculaires multi-innervées de contraction graduelle et lente.

Les mouvements oculaires réflexes sont sous la dépendance d’afférences vestibulaires et proprioceptives cervicales mises en jeu par les déplacements de la tête.

Un déplacement passif de la tête tend à provoquer une déviation conjuguée des yeux en sens contraire, et ce même après l’exclusion d’une fixation d’origine optique. Il s’agit d’un mouvement lent, équivalent à un mouvement de persécution, qui tend à stabiliser la fixation. De fait, ces déviations réflexes sont normalement inhibées par des influences d’origine corticale. Elles ne sont apparentes qu’après l’exclusion de ces influences inhibitrices corticales chez des patients comateux ou après une lésion dans les secteurs oculomoteurs corticaux ou de ses efférences. La mobilisation passive de la tête fait alors apparaître le phénomène des « yeux de poupée ».

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May 23, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 19. Sémiologie des nerfs crâniens

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