Chapitre 19 La réhabilitation esthétique : l’otopoïèse
Historique
L’utilisation expérimentale et clinique de cartilage costal autologue a été décrite pour la première fois au début des années 1930 par Pierce et al. [1] et a ouvert une nouvelle ère pour la chirurgie reconstructrice.
Tanzer a décrit les premières otopoïèses reposant sur l’interposition d’une maquette de cartilage costal autologue en 1959 [2,3].
En s’appuyant sur les principes énoncés par Tanzer, Brent a développé la technique et décrit l’otopoïèse en quatre temps [4–6].
Nagata a affiné la technique et permis le passage vers une reconstruction auriculaire en deux temps [7].
Classification
De nombreuses classifications ont été proposées pour prendre en compte les différents types de malformations du pavillon, du méat acoustique externe et de l’oreille moyenne rencontrés dans les aplasies majeures d’oreille. Concernant le pavillon, la classification la plus utilisée est celle de Meurman [8] qui est représentative des quatre grands types d’atteinte (figure 19.1) :
Technique chirurgicale
L’otopoïèse est réalisée en deux temps séparés de 4 mois. Un troisième temps est parfois nécessaire. En cas d’anotie (type IV), il est parfois nécessaire de poser un expandeur cutané 2 mois avant le premier temps d’otopoïèse.
Positionnement de l’oreille à reconstruire
Premier temps : réalisation d’un greffon tridimensionnel de cartilage costal
Le cartilage de la 6e à la 8e côtes (K6 à K8), du côté controlatéral à l’oreille à reconstruire, est prélevé. Le geste est facilité par l’utilisation de ciseaux bipolaires permettant d’effectuer un prélèvement extrapérichondral exsangue (figures 19.2 et 19.3).
Les différentes pièces cartilagineuses costales sont sculptées et assemblées grâce à du fil métallique, de manière à former une armature de pavillon tridimensionnelle. Les dimensions de cette maquette doivent correspondre à celles de l’oreille controlatérale. Le cartilage commun des 6e et 7e côtes sert de support pour les greffons qui formeront l’hélix et l’anthélix. Cette console cartilagineuse est évidée en avant pour former la dépression conquale. La partie inférieure constitue l’armature du lobule. Un greffon cartilagineux est en avant pour constituer le tragus (figure 19.4).
La maquette est positionnée, inclinée en haut et en arrière, le pôle supérieur à hauteur de la ligne sourcilière (figure 19.5a). Puis, la coaptation cutanée est assurée par un drain aspiratif doux (EmoDrain™) qui doit être maintenu sans aucun clampage pendant 7 jours (figure 19.5b).
Dès le premier temps, la partie inférieure du sillon rétroauriculaire est modelée.
Deuxième temps : création du sillon rétroauriculaire
Réalisé au bout de 4 mois, ce temps permet la latéralisation du pavillon grâce à l’interposition dans le sillon rétroauriculaire de la cale cartilagineuse laissée en nourrice sous le FTS lors du premier temps.
L’incision cutanée suit le contour du néopavillon et est complétée par une incision horizontale s’étendant en arrière, vers le greffon semi-lunaire laissé en nourrice (figure 19.6a).
Un lambeau de FTS à pédicule antérieur emportant en tête le cartilage semi-lunaire est transposé dans le néosillon rétroauriculaire (figure 19.6b,c).
La face médiale du pavillon et le FTS enveloppant le greffon semi-lunaire sont recouverts d’une greffe de peau mince de 3/10e de millimètre d’épaisseur, alors que la face mastoïdienne du sillon est recouverte par deux lambeaux d’avancement mastoïdien (figure 19.6d,e,f).
Complications
Au niveau du site de prélèvement du cartilage
Au niveau du site de reconstruction auriculaire
Autres techniques
Épithèses de pavillon
Les épithèses de pavillon peuvent être proposées comme une alternative à la reconstruction du pavillon. Elles sont utilisées depuis 1979. La technique chirurgicale utilisée est la même que celle pour le Baha®, mais plusieurs implants sont mis en place (deux en général). Ces fixtures ostéointégrées en titane vont permettre de supporter une épithèse de pavillon en silicone réalisée sur mesure par un épithésiste reproduisant la carnation et la texture de l’oreille saine (figure 19.7).
Lambeaux libres
De nombreuses techniques de couverture de la maquette ont été décrites en cas de mauvaises conditions cutanées locales, essentiellement chez des sujets ayant déjà bénéficié d’une reconstruction de pavillon s’étant révélée non satisfaisante. Ce sont des techniques lourdes faisant appel à la microchirurgie.