19: Fractures de fatigue et algodystrophie du pied

Chapitre 19 Fractures de fatigue et algodystrophie du pied



1 Fractures de fatigue de la cheville et du pied





Physiopathologie


La pathogénie des fractures de fatigue est discutée. Plusieurs théories sont proposées [14].


Un équivalent d’usure de matériaux inertes : l’application de contraintes répétées sur os de cadavre produirait une déformation plastique et des microfractures [4].


Un déséquilibre du processus physiologique de remodelage osseux : le tissu osseux est un tissu dynamique en constant remodelage réactionnel aux forces musculaires auxquelles il est soumis. La phase initiale consiste en une activité ostéoclastique avec résorption de l’os lamellaire suivie d’une phase ostéoblastique permettant la formation d’un os plus dense et plus résistant. L’augmentation des contraintes provoque un déséquilibre entre ces deux phases au profit de la phase ostéoclastique, responsable d’une fragilisation osseuse favorisant l’apparition de lésions fissuraires.


Les contraintes à l’origine des fissures osseuses sont variables selon les sites : les fractures corticales résultent probablement de contraintes répétées en flexion ou torsion ; les fractures spongieuses répondent à des contraintes en compression, responsables de fracture perpendiculaire à l’axe des travées principales. Les contraintes en cisaillement ou distraction sont incriminées dans la survenue de fracture évoluant fréquemment vers la pseudarthrose (sésamoïde médial de l’hallux, os naviculaire, 5 e métatarsien).


En réponse à la lésion fissuraire s’établissent des phénomènes de réparation avec successivement un décollement ostéopériosté, une apposition périostée calcifiée évoluant vers cal de consolidation. Ce cal est constitué d’un tissu très réactif et riche en prolifération osseuse qui peut être confondu avec une lésion tumorale maligne s’il fait l’objet d’une étude histologique, ce qu’il faut absolument éviter.




Caractères cliniques et notions thérapeutiques


Les fractures de fatigue se manifestent, dans les suites d’un effort de marche ou de course, par des douleurs mécaniques d’apparition rapide et d’aggravation progressive, parfois insomniantes ou responsables d’une impotence fonctionnelle marquée.


L’interrogatoire doit rechercher soigneusement le stress responsable, qui est parfois méconnu. Chez le grand sportif, il peut s’agir de modifications de modalités d’entraînement, d’un changement de terrain, de sport ou de chaussage. Chez le sujet non sportif ou le sujet âgé, il peut s’agir d’une activité sportive inhabituelle ou d’une longue marche à pied, par exemple au retour des beaux jours.


L’examen clinique peut mettre en évidence un œdème des parties molles en regard de la fracture et une douleur exquise à la palpation. Au stade tardif, un cal osseux exubérant peut être palpable.


Les examens biologiques, souvent inutiles, éliminent un syndrome inflammatoire ou infectieux.


La clé du diagnostic repose sur le rapprochement entre les circonstances déclenchantes et le Tableau clinique.


La connaissance des principaux sites intéressés par ces fractures et leurs caractéristiques en imagerie permettent de confirmer le diagnostic.


Le traitement consiste en la mise en décharge partielle ou complète, pour une durée comprise entre 4 et 6 semaines, selon le stade clinique, radiologique et la localisation de la fracture. Une courte immobilisation plâtrée peut être utile, à visée antalgique. La décharge complète sera recommandée en cas de localisation à risque (sésamoïde, naviculaire, 5 e métatarsien, malléole médiale).


En cas de pseudarthrose, le traitement sera à discuter en collaboration avec le chirurgien.


Le traitement préventif est fondamental, basé sur la progression, la variété et l’adaptation des entraînements physiques.



Imagerie


Les aspects des fractures de fatigue en imagerie sont variables et dépendent :






Radiographie standard [13,5,6]



Fractures corticales


Elles intéressent les métatarsiens, plus particulièrement les cols des 2e et 3e. Elles peuvent également toucher les diaphyses phalangiennes des orteils ou l’extrémité distale du tibia ou de la fibula.


Au début, aucune anomalie radiographique n’est visible sauf, rarement, une microfracture corticale transversale ou oblique.


Après 2-3 semaines, la fissure est parfois mieux visible mais, surtout, apparaît une réaction périostée active, partiellement calcifiée et floue (fig. 19-1).



Au bout de 3-4 semaines, le cal fracturaire s’amplifie de façon lamellaire. Si le stress persiste, le cal se développe de façon exubérante et prend parfois un aspect pseudotumoral, spiculaire radiaire. Cette forme est loin d’être exceptionnelle au niveau de la diaphyse des métatarsiens. Le diagnostic doit alors être redressé par les autres caractéristiques cliniques, la topographie évocatrice, la rareté des affections malignes sur le pied et l’évolution de l’aspect radiologique dans le temps.


À distance, survient une incorporation des appositions périostées à la corticale adjacente, déterminant un épaississement régulier, plus ou moins étendu du versant sous-périosté du cortex.



Fractures spongieuses


Elles intéressent les os du tarse, les bases ou les têtes des métatarsiens, les bases des phalanges et l’extrémité distale du tibia et de la fibula. L’exemple le plus typique est l’atteinte du calcanéus (fig. 19-2).



Au début, aucune anomalie radiographique n’est visible.


Après 2–3 semaines apparaissent une ou plusieurs bandes de condensation osseuse, floues, typiquement perpendiculaires à l’orientation des travées spongieuses principales. Quand les bandes de condensation sont nombreuses et proches, leur confluence peut créer une large plage de densification osseuse, hétérogène, occupant éventuellement la totalité d’un os court et pouvant évoquer une nécrose osseuse, une ostéite ou une ostéocondensation tumorale.


À distance, le cal fracturaire s’organise et se transforme en une zone de réseau trabéculaire épaissi et structuré. Ces anomalies se résorbent ensuite très progressivement, en plusieurs mois.




Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 19: Fractures de fatigue et algodystrophie du pied

Full access? Get Clinical Tree

Get Clinical Tree app for offline access