17 Tumeurs cutanées non mélaniques, prémalignes et malignes
Carcinome basocellulaire
Le carcinome basocellulaire est un cancer cutané dérivant des kératinocytes de la couche basale de l’épiderme.
C’est l’affection maligne la plus courante chez l’être humain.
S’ils ne sont pas traités, les carcinomes basocellulaires vont localement envahir la peau avoisinante et détruire les tissus sous-jacents.
Rarement, les carcinomes basocellulaires peuvent métastaser.
Anamnèse
Le carcinome basocellulaire peut se manifester à n’importe quel âge. On l’observe cependant plus couramment chez les personnes âgées.
L’incidence la plus élevée se rencontre chez les caucasiens ou les personnes de teint clair.
Il est moins courant chez les Hispaniques et les Asiatiques et rare chez les Africains.
Des expositions cumulatives aux rayons ultra-violets sont le principal risque de développer un carcinome basocellulaire.
Les tumeurs se manifestent le plus généralement sur la peau du visage exposée au soleil, le cuir chevelu, les oreilles et le cou. Elles sont moins fréquentes sur le tronc et les membres.
On distingue plusieurs variantes cliniques de carcinome basocellulaire : le carcinome basocellulaire nodulaire, le carcinome basocellulaire pigmenté, le carcinome basocellulaire superficiel, le carcinome basocellulaire micronodulaire et le carcinome basocellulaire sclérodermiforme.
Chaque forme est différente en aspect clinique, histologie et agressivité.
Le carcinome basocellulaire nodulaire est le type le plus habituel.
Manifestations cutanées
En général, les carcinomes basocellulaires sont roses, violacés, ou blanc perlé, avec parfois des papules ou des nodules translucides.
Ils peuvent avoir une surface lisse couverte de télangiectasies.
La papule ou le nodule s’agrandissent lentement, s’aplatissant au centre ou peuvent développer une bordure surélevée.
Les tumeurs saignent fréquemment, et deviennent érosives, croûteuses et ulcérées au centre.
Les carcinomes basocellulaires peuvent contenir de la mélanine qui donne un aspect tacheté de couleur marron, noire ou bleue.
Le curetage trouve une texture molle de la lésion comparativement à la peau normale en périphérie.
Carcinome basocellulaire nodulaire
La lésion commence comme une papule nacrée, blanche ou rose, en forme de dôme, ou un nodule avec des télangiectasies.
Le centre s’ulcère fréquemment, devient hémorragique et forme ensuite des croûtes et des squames.
La croissance est irrégulière, formant une masse ovale ou multilobulaire.
Les manifestations ci-dessus sont caractéristiques et sont facilement reconnues par les spécialistes de la peau.
Carcinome basocellulaire pigmenté
Il est cliniquement identique au carcinome basocellulaire nodulaire, mais avec présence à l’intérieur de petites taches de mélanine.
Le pigment peut être épars ou diffus et il peut ressembler à un mélanome.
L’évolution naturelle et l’agressivité de la tumeur sont similaires à celles d’un carcinome basocellulaire non pigmenté.
Carcinome basocellulaire superficiel
Il s’agit de la forme la moins épaisse et la moins agressive de carcinome basocellulaire.
Les lésions sont typiquement multiples et surviennent plus tôt dans la vie comparativement à un carcinome basocellulaire nodulaire.
On l’observe généralement sur le tronc et les membres comparativement à un carcinome basocellulaire nodulaire.
Les lésions sont plus plates, parfois atrophiques et pas aussi profondément invasives que les lésions du carcinome basocellulaire nodulaire.
Les bords sont moins distincts mais ont le même aspect rose perlé.
La traction sur la peau peut accentuer la surélévation des bords.
La tumeur s’étend en périphérie, parfois sur plusieurs centimètres. Elle ne devient invasive qu’après une très longue période.
Les plaques squameuses rouges, rondes à ovales, peuvent être confondues avec de l’eczéma, du psoriasis, une maladie de Paget extramammaire ou une maladie de Bowen (carcinome épidermoïde in situ).
Carcinome basocellulaire micronodulaire
Le carcinome basocellulaire micronodulaire ressemble médicalement au carcinome basocellulaire nodulaire. On observe cependant au microscope des îlots de cellules tumorales se prolongeant au-delà des marges cliniques.
Puisque cette variante histologique se prolonge au-delà des frontières cliniques suspectées, elle se reproduit plus fréquemment après un traitement traditionnel.
Carcinome basocellulaire sclérodermiforme
Le carcinome basocellulaire sclérodermiforme est la variante la plus subtile et la moins courante de carcinome basocellulaire ; il est également le plus difficile à supprimer.
Les lésions ressemblent à du tissu cicatriciel et peuvent apparaître blanc pâle tirant sur le jaune et cireuses à la palpation.
En raison de l’aspect inoffensif de cette variante, la biopsie et le diagnostic sont souvent retardés.
Les frontières sont indistinctes et les cellules tumorales peuvent s’étendre au-delà de la lésion clinique.
Ainsi, à la différence de la variante nodulaire, les tumeurs sont plus susceptibles de récidiver après une excision.
Les formes sclérodermiformes sont plus agressives, tendent à récidiver plus souvent et doivent être suivies de près.
Nævomatose basocellulaire (ou syndrome de Gorlin)
La nævomatose basocellulaire est une affection autosomique dominante causant des carcinomes basocellulaires multiples et de nombreuses anomalies associées de la peau, du squelette et du système nerveux central.
Les anomalies cutanées comprennent des carcinomes basocellulaires multiples apparaissant dans l’enfance, ainsi que des pits palmoplantaires.
Les anomalies faciales comportent un gros nez, des sourcils épais et un hypertélorisme.
Les anomalies squelettiques comprennent des kystes odontogéniques, des bosses frontales, un hypertélorisme, une cyphoscoliose et un raccourcissement des quatrièmes métacarpiens.
Les anomalies du système nerveux central comprennent la calcification de la faux du cerveau et la possibilité de développement d’un médulloblastome.
Cécité, surdité et convulsions peuvent faire partie du syndrome.
Ces patients posent un problème thérapeutique étant donné l’augmentation du nombre de tumeurs basocellulaires, le jeune âge, les altérations fonctionnelles après excisions chirurgicales, et la possibilité de métastases.
Examens de laboratoire et explorations
L’histologie montre des nids de kératinocytes basaloïdes tumoraux groupés dans un stroma particulier dans des carcinomes basocellulaires nodulaires et pigmentés.
Dans les cas de carcinome basocellulaire nodulaire, on observe de plus grands îlots de cellules tumorales dans le derme ; les îlots tumoraux peuvent être pleins ou peuvent contenir des cavités kystiques.
Le carcinome basocellulaire pigmenté est semblable au carcinome basocellulaire nodulaire. La différence réside dans le fait que les îlots tumoraux contiennent des foyers ou des amas de mélanine.
Dans les cas de carcinomes basocellulaires sclérodermiformes, des cordons ressemblant à du collagène et de fines bandes de cellules tumorales sont dispersés dans un stroma fibreux.
Évolution et pronostic
En l’absence de traitement, les carcinomes basocellulaires persistent, s’agrandissent, s’ulcèrent et envahissent et détruisent les structures environnantes.
Les carcinomes basocellulaires insuffisamment traités récidivent, le plus souvent sous les cicatrices, ce qui en retarde la détection.
Chez les patients qui ont un carcinome basocellulaire, le risque annuel de développer un autre carcinome basocellulaire augmente jusqu’à 5 %.
Discussion
Les carcinomes basocellulaires constituent très rarement une menace vitale, mais des métastases peuvent survenir, particulièrement chez les patients immunodéprimés.
Selon l’emplacement de la tumeur, la destruction locale du tissu sain peut aboutir à une détérioration importante. Les tumeurs insuffisamment traitées peuvent s’étendre sans que cela soit détecté et détruire de grandes zones du visage, du cou et du cuir chevelu.
Traitement
Le but du traitement est l’élimination de la tumeur et le retour à une forme anatomique et à une fonction normales.
Le traitement du carcinome basocellulaire est déterminé par la taille et l’emplacement de la tumeur, la variante histologique et les soucis du patient.
L’aspect esthétique de la cicatrice est important mais secondaire.
L’agressivité clinique est en corrélation avec le type histologique.
Les différentes options thérapeutiques incluent la cryothérapie, le curetage, l’électrochirurgie, l’excision traditionnelle, la chirurgie micrographique de Mohs, les rayons, la chimiothérapie topique, l’immunothérapie, le traitement photodynamique, et peut-être dans le futur l’inhibition de la transcription du gène du carcinome basocellulaire.
Électrochirurgie
L’électrochirurgie comporte un curetage avec ou sans électrodessication de la tumeur basocellulaire.
Elle est habituellement effectuée pour de petits carcinomes basocellulaires nodulaires ou superficiels bien définis.
Le taux de guérison à 5 ans après curetage approche 92 % pour les tumeurs primitives, mais seulement 60 % pour les tumeurs récidivantes.
Excision
L’excision en ambulatoire ou en hospitalisation est préférée pour les carcinomes basocellulaires nodulaires bien définis.
L’excision permet la confirmation des marges chirurgicales et une suture ; elle peut être préférée à l’électrochirurgie pour certaines tumeurs.
Le taux de guérison à 5 ans dépasse 90 % pour les lésions primitives et 85 % pour les lésions récidivantes avec cette technique.
Elle est la méthode préférée pour supprimer les carcinomes basocellulaires en dehors de la face.
Chirurgie micrographique de Mohs
La chirurgie micrographique de Mohs est une méthode d’excision tumorale très spécialisée qui épargne les tissus sains. Elle est utilisée pour les tumeurs de localisations difficiles, notamment les carcinomes basocellulaires.
Cette méthode est utilisée dans les cas de carcinomes basocellulaires récidivants, les formes histologiquement agressives de carcinomes basocellulaires, les tumeurs situées dans des zones anatomiquement importantes (telles qu’autour des yeux, sur les ailes du nez, sur la bouche et sur les oreilles) et les tumeurs ayant un risque élevé de récidive. C’est le traitement de choix pour le carcinome basocellulaire sclérodermiforme.
La technique comporte une réduction de volume de la tumeur suivie de l’excision de la tumeur avec des marges étroites, reprise par étapes.
Elle est guidée par la cartographie séquentielle en trois dimensions des zones congelées.
Cela permet une confirmation histologique de l’ablation de la tumeur avec des marges chirurgicales minimales.
Le taux de guérison à 5 ans, pour l’excision de Mohs, approche 90 % pour les tumeurs primitives et 96 % pour les tumeurs récurrentes.
La chirurgie micrographique de Mohs est utile lorsqu’il est nécessaire d’épargner le tissu en raison de l’emplacement anatomique et dans les cas de tumeurs récidivantes et de carcinomes basocellulaires ayant des bords indistincts.
Radiothérapie
La radiothérapie peut être utile dans les cas de tumeurs sur des zones difficiles à traiter chirurgicalement, telles que les paupières, ainsi que pour les patients qui ne peuvent pas ou sont peu disposés à tolérer la chirurgie.
Le taux de guérison à 5 ans est d’environ 90 % aussi bien pour les tumeurs primitives que pour les récidives.
L’aspect esthétique peut être excellent. Cependant, les changements provoqués par une radiothérapie à long terme sur la peau traitée peuvent limiter l’utilisation de ce moyen chez les patients âgés.
Chimiothérapie non chirurgicale et immunothérapie
L’imiquimod en crème topique à 5 % est un modificateur de la réponse immunitaire qui est efficace à 85 %, ou mieux, dans les cas de carcinomes basocellulaires superficiels. Son application quotidienne pendant 6 semaines par le patient à la maison aboutit dans la plupart des cas à une éradication complète. L’inflammation au site du traitement peut être importante ; des périodes de pause peuvent être nécessaires.
L’imiquimod a moins été étudié pour les carcinomes basocellulaires nodulaires ; il est un peu moins efficace pour les carcinomes basocellulaires nodulaires que pour les carcinomes basocellulaires superficiels.
Le 5-fluorouracile en crème est un agent chimiothérapique topique qui peut aussi être utilisé pour traiter les carcinomes basocellulaires superficiels.
Traitement photodynamique
La combinaison d’un agent photosensibilisant, soit l’acide aminolévulinique (ALA), soit le méthyl aminolévulinate (MAL), et d’une source lumineuse de lumière bleue (415 nm) ou de lumière rouge (diode), peut être utilisée pour traiter les tumeurs superficielles, y compris les carcinomes spinocellulaires in situ et les carcinomes basocellulaires superficiels.
L’agent photosensibilisant est appliqué sur la peau au niveau de la tumeur et on attend pendant 1 à 3 heures qu’il soit absorbé.
L’agent appliqué est transformé en protoporphyrine IX et la source lumineuse excite la porphyrine ; il en résulte la formation d’oxygène à l’état de singlets qui altère une grande partie des cellules cancéreuses dans la zone traitée.
Inhibition de la voie de signalisation Patched/Hedgehog
Le gène patché, un gène suppresseur des tumeurs des cellules basales, est déficient dans les carcinomes basocellulaires, ce qui permet une augmentation de la fonction du proto-oncogène régulateur.
Les premières études et les essais cliniques ont montré qu’un médicament oral peut prévenir l’inhibition du gène patché.
Si ces essais montrent une efficacité, ce sera une importante option thérapeutique pour ceux qui ont des carcinomes basocellulaires métastatiques ou inopérables.
Conseils et recommandations
Le patient doit être informé du fait que les carcinomes basocellulaires ne sont ni insignifiants, ni fatals.
Les patients doivent être suivis après le traitement car ces tumeurs peuvent récidiver et le risque de développer d’autres carcinomes basocellulaires est augmenté.
Tous les patients ayant des carcinomes basocellulaires nécessitent un suivi pour surveiller le développement de nouvelles tumeurs et de récidives sur la zone traitée, indépendamment du traitement utilisé.
Les carcinomes basocellulaires peuvent se manifester en tant qu’ulcères ne guérissant pas et peuvent apparaître sur n’importe quelle zone du corps, y compris les organes génitaux et les jambes.
Le carcinome basocellulaire sclérodermiforme est une papule blanche, ferme, plate à légèrement surélevée, pâle tirant sur le blanc et pouvant ressembler à une cicatrice ; il peut être négligé lors de l’examen clinique mais confirmé histologiquement. Il est plus agressif que les autres variantes de carcinome basocellulaire et récidive souvent en l’absence de traitement approprié.
Kératose actinique
Les kératoses actiniques sont des lésions très courantes, kératosiques, ayant un potentiel malin.
Elles sont considérées comme des précurseurs intraépidermiques ou des lésions précoces de carcinomes spinocellulaires.
Les lésions sont le plus généralement observées sur les zones exposées au soleil, chez les patients âgés, de teint clair et ayant eu une exposition importante au soleil durant leur vie.
Anamnèse
Les années d’exposition répétée au soleil et les lésions causées aux kératinocytes mènent au développement de kératoses actiniques.
Les différentes lésions deviennent progressivement plus courantes après l’âge de 40 ans.
Les lésions multiples sont courantes chez les personnes ayant une peau de phototypes I et II.
La régression spontanée ou la progression vers un carcinome spinocellulaire peuvent survenir.
Il est difficile de prédire quelles lésions vont progresser en cancers invasifs, mais les lésions hypertrophiques semblent être plus inquiétantes.
Environ 10 % des kératoses actiniques évoluent, sur plusieurs années, en carcinome épidermoïde invasif.
Les patients greffés ayant une kératose actinique doivent être suivis de près. L’évolution des lésions en carcinome épidermoïde est beaucoup plus courante chez ces patients et le potentiel métastatique est augmenté.
Les kératoses actiniques sont accompagnées d’autres signes d’exposition chronique au soleil, tels qu’une pigmentation inégale, une atrophie ou un amincissement cutané et des télangiectasies.
Les lésions sont observées principalement sur le visage, la tête, le cou et le dos des mains.
Les kératoses actiniques se manifestent au départ comme des zones de rougeur ou de télangiectasies mal définies.
Avec le temps, la lésion devient mieux définie et présente des squames fines, adhérentes, jaunâtres ou transparentes.
À ce stade, il est parfois plus facile de détecter les lésions par la palpation que par l’observation.
On peut observer un léger changement de la texture de la peau, associé à un érythème minime.
Avec le temps, les squames adhérentes deviennent progressivement plus épaisses et jaunes.
Les squames peuvent former une structure kératinisée ou un papillome corné.
Sans biopsie cutanée, de telles lésions avancées peuvent être difficiles à distinguer d’un carcinome épidermoïde invasif et devraient vraisemblablement être traitées comme un carcinome épidermoïde.
L’expression « kératose actinique pigmentée extensive » décrit les kératoses actiniques ayant une pigmentation réticulée fine et une desquamation minimale ; elles peuvent imiter un lentigo solaire ou un mélanome in situ.
Le lentigo malin (mélanome in situ) apparaît comme une tache pigmentée et se manifeste également le plus souvent sur une peau lésée par le soleil. Il peut être confondu avec une kératose actinique extensive ; aussi, une biopsie peut être nécessaire pour établir le diagnostic correct.
Chéilite actinique
La chéilite actinique est une dysplasie kératinocytaire de la lèvre inférieure, induite par le soleil. Il y a des croûtes et une hyperkératose focale, accompagnées d’une irrégularité du bord libre de la lèvre, qui est blanchâtre ou grise
.
Les lésions actiniques situées à cet endroit peuvent être tout à fait discrètes sur le plan clinique mais se comporter de manière agressive.
Comme ses équivalents cutanés, la chéilite actinique peut évoluer en carcinome épidermoïde manifeste de la lèvre.
Examens de laboratoire et explorations
La biopsie est souvent utile pour distinguer les kératoses actiniques évoluées et la chéilite actinique du carcinome épidermoïde invasif, mais elle n’est souvent pas nécessaire et la plupart des médecins se fient à leur expertise clinique.
La caractéristique histologique est un épiderme désorganisé avec atypies kératinocytaires.
Par définition, l’invasion du derme par des kératinocytes atypiques n’est pas observée dans les cas de kératose actinique.
De même, les lésions de kératose actinique pigmentée extensives montrent des atypies kératinocytaires avec une pigmentation accrue, tandis que des mélanocytes atypiques sont observés dans le lentigo malin.
Évolution et pronostic
Un petit pourcentage des lésions de kératose actinique régressent spontanément grâce à une protection continue contre le soleil. Cependant, d’autres kératoses actiniques évoluent en carcinome épidermoïde.
Le comportement d’une lésion individuelle ne peut pas être prévu par l’examen clinique, même si les lésions hypertrophiques sont plus susceptibles de progression.
On estime que 20 % des patients ayant des kératoses actiniques multiples développent un carcinome épidermoïde à partir d’une ou de plusieurs lésions.
Les carcinomes épidermoïdes se développant sur l’oreille, le cuir chevelu ou le bord libre de la lèvre sont plus susceptibles de métastaser que les carcinomes épidermoïdes situés à d’autres endroits de la peau ; les kératoses actiniques de ces zones sont donc plus à risque et doivent être traitées de manière agressive.
Discussion
Les lésions inflammatoires impliquant la tête et le cou, telles que la dermite séborrhéique et la rosacée, peuvent gêner la détection des kératoses actiniques. Une prise en charge adéquate de ces lésions inflammatoires aide à l’identification et au traitement rapides des kératoses actiniques.
Les kératoses actiniques du bas des jambes sont fréquemment multiples, hyperkératosiques et réparties sur une grande surface.
De nombreuses lésions peuvent se former sur le dos de la main ; ces lésions peuvent évoluer facilement en carcinome épidermoïde.
Les patients transplantés et les autres patients immunodéprimés posent un difficile problème de traitement. Ces patients ont une grande incidence de carcinomes épidermoïdes
et de métastases. Un traitement adéquat et agressif des kératoses actiniques et des carcinomes épidermoïdes débutants est donc essentiel.
Traitement
Un patient ayant des kératoses actiniques multiples a besoin d’au moins un suivi annuel, mais c’est souvent plus pour certains patients qui ont eu des atteintes liées au soleil plus extensives.
Les lésions apparentes représentent une partie seulement du nombre total de zones cutanées comportant des kératinocytes atypiques réellement présentes.
La majeure partie des atypies sont dispersées dans la peau lésée par le soleil et se situent en deçà du niveau de détection clinique.
Avec le temps, ces patients développeront très certainement des lésions de kératose actinique plus apparentes sur le plan clinique.
Il faut encourager une protection appropriée contre le soleil, grâce à des vêtements protecteurs et des écrans solaires, afin de limiter davantage les lésions.
La méthode la plus courante d’ablation est la destruction par azote liquide (cryothérapie) sur les lésions superficielles isolées.
Les patients ayant une héliodermie diffuse ou des lésions multiples et récidivantes posent des problèmes thérapeutiques difficiles.
Il est bien documenté que les patients qui ont de nombreuses kératoses actiniques ont un risque augmenté de développer des carcinomes épidermoïdes avec le temps.
Le 5-fluorouracile topique à 5 % et 0,5 % permet de traiter les lésions existantes et de réduire le nombre des kératinocytes atypiques dans l’épiderme ; il a constitué le traitement topique, non chirurgical standard des kératoses actiniques.
Le traitement doit être adapté en termes de nombre d’applications par jour et de durée.
Bien que le traitement de toutes les zones lésées par le soleil soit approprié, il est rarement pratique de traiter de grandes surfaces en une seule fois, certains patients préférant plutôt le traitement successif de zones limitées.
Un érythème apparaît s’il y a présence de kératoses actiniques. Il est suivi de sensation de cuisson, de brûlure et de suintement. Le traitement peut être arrêté avant la fin de la cure de 3 semaines, si apparaissent une inflammation intense, des croûtes ou une gêne.
Les patients doivent être évalués pendant la période de traitement en ce qui concerne la gêne et les autres complications.
Il a été démontré que la crème imiquimod à 5 %, un modificateur de la réponse immunitaire, permet de traiter efficacement les kératoses actiniques multiples, en applications trois à cinq fois par semaine pendant 4 semaines.
Des modifications inflammatoires semblables à celles observées avec le 5-fluorouracile se manifestent avec l’imiquimod.
Un traitement photodynamique avec soit l’acide aminolévulinique (ALA) soit le méthyl lévulinate (MAL) est encore une autre option pour traiter une héliodermie diffuse extensive et de multiples kératoses actiniques en permettant de traiter une grande surface.
Comme avec les traitements locaux mentionnés ci-dessus, il y a un érythème, une inflammation et une gêne, mais ils sont de durée plus brève.
Toutes les méthodes destructives enlèvent l’épiderme avec un effet minimal sur le derme. Toutes les personnes ont un certain risque d’hypopigmentation ultérieure et de formation de cicatrices, notamment chez celles de teint mat. Cela doit être clairement expliqué au patient avant le traitement.
Traitement d’une chéilite actinique
La chéilite actinique peut être traitée par différentes méthodes qui doivent être expliquées au patient ainsi que les effets secondaires.
La cryothérapie peut être utilisée pour traiter la chéilite actinique, sur des zones limitées ou vastes d’altérations photoprovoquées de la muqueuse labiale.
La vermillonectomie au laser CO2 est une autre option pour une chéilite actinique étendue.
Le 5-fluorouracile et l’imiquimod peuvent également être utilisés sur la muqueuse (avec précaution), mais la réaction peut être brutale et inconfortable.
L’application de 5-fluorouracile et d’imiquimod sur la muqueuse orale est discutée et doit être de plus courte durée comparativement à la fréquence des applications cutanées.
Conseils et recommandations
Un carcinome épidermoïde invasif peut se développer à partir d’une kératose actinique, surtout avec des lésions épaisses, hypertrophiques ou ne réagissant pas au traitement.
Les kératoses actiniques de la muqueuse orale prédisposent particulièrement à l’évolution vers un carcinome épidermoïde.
Une biopsie doit être envisagée chez n’importe quel patient ne répondant pas convenablement au traitement de routine d’une kératose actinique et dans les cas de kératoses actiniques récidivantes ou hypertrophiques.