Chapitre 16 Thrombophilies Acquises
Détection des Anticorps Antiphospholipides Par Tests de Laboratoire (Biologie Clinique)1
Dans l’état actuel des connaissances, les anticorps antiphospholipides (aPL) d’intérêt clinique sont en réalité des autoanticorps dirigés principalement contre deux protéines : la β2 glycoprotéine I (β2GPI), dont la fonction physiologique n’est pas établie; et la prothrombine, qui est un facteur de coagulation. Ces deux protéines ont en commun la propriété d’interagir avec des surfaces phospholipidiques chargées négativement, telles qu’elles sont présentées par les plaquettes activées, les cellules apoptotiques, les microvésicules (aussi appelées microparticules) émises par ces cellules : en effet la phosphatidylsérine, de charge nette négative, est préférentiellement localisée dans le feuillet interne de la bicouche phospholipidique de la membrane plasmique et passe dans le feuillet externe lorsque le processus dit de flip-flop est activé. Du fait de caractéristiques moléculaires particulières, l’interaction antigène – anticorps se fait très préférentiellement sur ces surfaces.
Tests immunologiques
Les conditions pré-analytiques (du prélèvement à l’analyse) n’ont pas de particularité pour les ELISA, qui peuvent être réalisés avec du sérum. Pour les tests de coagulation elles ont une influence cruciale, et les recommandations sur ce point sont très claires.
Tests de coagulation
Le principe de la démarche au laboratoire pour la mise en évidence d’un LA est le suivant :
Les difficultés principales portent sur les points suivants :
La signification des anticorps antiβ2GPI mis en évidence seulement par un ELISA avec revêtement des puits de la plaque par cette protéine, c’est-à-dire avec un ELISA négatif avec revêtement par du cardiolipide (rapportée chez 3 à 10 % des malades) est controversée; l’inclusion de ces anticorps anti-β2GPI n’a d’ailleurs pas été consensuelle.
Au total, compte tenu des difficultés et incertitudes persistantes :
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Alhenc-Gelas 2009 Les autres références peuvent être trouvées dans diverses revues générales, et celles relatives aux aspects propres à la biologie clinique de la thrombophilie (qu’elle soit constitutionnelle ou acquise, comme les aPL) dans la revue de l’état de l’art par un groupe de travail ad hoc (Rédacteurs : M Alhenc-Gelas, MF Aillaud, B Delahousse, G Freyburger, A Le Querrec, G Reber; organisateurs : P Morange, C Biron-Andreani) du GEHT (numéro spécial 2009 de la revue STV; texte et références disponibles sur le site web du GEHT
Notions Générales
Le terme de thrombophilie désigne une prédisposition à la thrombose définie soit par des éléments cliniques personnels ou familiaux (« thrombophilie clinique ») ou par la mise en évidence de facteurs de risque de maladie thromboembolique veineuse biologiquement identifiables ou « thrombophilie biologique ».
À la frontière des facteurs acquis de risque de maladie thromboembolique veineuse biologiquement identifiables, on peut citer l’élévation du facteur VIII de la coagulation et l’hyperhomocystéinémie. Ces anomalies peuvent être déterminées à la fois par des facteurs génétiques et des facteurs d’environnement, il ne s’agit pas de thrombophilies acquises à proprement parler. De plus l’intérêt de la mesure de la concentration plasmatique de FVIII et du taux plasmatique d’homocystéinémie dans la gestion du risque de récidive, notamment l’estimation de la durée du traitement, est incertain. En pratique, les recommandations pour la recherche des facteurs de risque biologiques dans le cadre de la MTEV ont défini le périmètre de ces recherches. Parmi les thrombophilies biologiques dont la recherche est conseillée au décours d’un premier épisode de thrombose veineuse profonde ou d’embolie pulmonaire chez les personnes âgées de moins de 60 ans, la recherche d’une thrombophilie acquise peut généralement être limitée à la recherche d’anticorps antiphospholipides [1].