15: Imagerie cérébrale dans le bilan oculomoteur : actualités

CHAPITRE 15


Imagerie cérébrale dans le bilan oculomoteur : actualités




Grâce aux progrès continuels réalisés dans le domaine de la neuro-imagerie, l’imagerie cérébro-orbitaire prend une place de plus en plus importante dans la prise en charge des troubles oculomoteurs aussi bien sur le plan diagnostique que thérapeutique. Le clinicien pose l’indication de l’imagerie et rédige l’ordonnance de prescription pour le radiologue. Le dialogue entre clinicien et radiologue est indispensable ; la demande doit être claire et comporter des renseignements cliniques précis : muscles touchés, côté, contexte général, orientations étiologiques, afin de guider l’examen neuroradiologique (plans, type de coupe, de séquence, injection ou non) qui sera, le plus souvent en ophtalmologie, cérébral et orbitaire.



Techniques d’imagerie


L’imagerie dans le cadre d’un bilan oculomoteur est essentiellement représentée par le scanner et l’IRM. Le scanner est un examen facile à réaliser, de durée courte (moins de cinq minutes) peu bruyant mais irradiant. L’IRM est un examen bruyant, long (dix à vingt minutes) et réalisé dans un tunnel serré (donc difficile pour les patients jeunes ou claustrophobes). Il est en revanche très supérieur au scanner au niveau de l’étude des structures cérébrales ; il est, de plus, non irradiant. Pour les jeunes enfants et les grands enfants non coopérants, ces examens (en particulier l’IRM) sont réalisés sous anesthésie générale afin d’éviter les artefacts de mouvement. L’utilisation d’un produit de contraste est bien souvent nécessaire pour examiner une tumeur ou une lésion infectieuse et obligatoire pour mettre en évidence une thrombose ou un anévrysme, ce qui impose la pose d’une voie veineuse, pas toujours facile chez les enfants, de telle sorte qu’il est commun de prescrire une anesthésie locale de surface (pommade de type EMLA).



image SCANNER


La tomodensitométrie (TDM) est un excellent examen pour examiner la pathologie intraorbitaire et évaluer l’intégrité osseuse de l’orbite et de la base du crâne. Il est l’examen de choix des indications d’urgence car très facile d’accès. Il permet de sélectionner les urgences à prendre en charge au plus vite et d’orienter l’examen IRM complémentaire si nécessaire. Dans certaines indications, le scanner permet des reconstructions surfaciques de la voûte crânienne et de la face comme dans le bilan des craniosténoses par exemple. Le scanner utilise des rayons X. Il est donc irradiant et nécessite des précautions en termes de protection : des protocoles d’acquisition optimisés avec dose la plus basse admissible pour un diagnostic efficace ; par exemple, dans le cadre de la survenue d’une paralysie oculomotrice, le patient bénéficiera d’une angio-TDM en urgence afin d’éliminer une urgence neurologique ou vasculaire puis le suivi sera fait par IRM cérébro-orbitaire pour limiter l’irradiation.





image IMAGERIE PAR RÉSONANCE MAGNÉTIQUE NUCLÉAIRE


L’IRM est la technique de choix pour évaluer le tissu cérébral dans son ensemble (tronc cérébral et fosse postérieure compris) ainsi que les tissus des cavités orbitaires comme les muscles oculomoteurs. C’est de plus la seule technique d’imagerie permettant d’évaluer le cerveau en développement. Elle apporte des informations anatomiques excellentes et permet, à travers des techniques avancées d’IRM, d’étudier la microstructure des tissus, la connectivité cérébrale (IRM de diffusion ou DTI, Diffusion Tensor Imaging, fournissant des caractéristiques de la substance blanche), la myélinisation, la composition biochimique des tissus (spectroscopie par résonance magnétique) et enfin l’activation cérébrale (IRM fonctionnelle). L’IRM est particulièrement sensible aux mouvements et impose une immobilité parfaite du sujet de telle sorte que toute indication chez un enfant non coopérant nécessite la réalisation d’une anesthésie générale ou d’une autre méthode de sédation. Elle doit être réalisée dans un centre spécialisé par des neuroradiologues formés aux pathologies oculomotrices. L’IRM utilise le fait que les différents tissus de l’organisme soumis à un champ magnétique puissant émettent des rayonnements différents. Elle est non irradiante mais présente des contre-indications liées à l’utilisation de ce champ magnétique : patient porteur d’un pacemaker, d’une valve cardiaque mécanique ou de clips neurochirurgicaux. Les sources d’artefacts sont multiples : matériels dentaires inamovibles, maquillage, crèmes cosmétiques…





image Applications


Ce chapitre n’abordera pas l’IRM fonctionnelle et l’IRM en cours de contraction musculaire qui appartiennent au domaine de la recherche et ne sont pas utilisées en pratique clinique courante. Les situations cliniques qui ont particulièrement bénéficié des apports de l’IRM ces dernières années sont : les syndromes de rétraction, les nystagmus congénitaux, les strabismes, les troubles oculomoteurs dus à une impotence et la paralysie de l’oblique supérieur.



image SYNDROMES DE RÉTRACTION


Les syndromes de rétraction de Stilling-Duane et de Brown appartiennent à une forme particulière de strabisme dite restrictive. Ces entités bien définies et classées cliniquement (cf. chapitre 14) ont particulièrement bénéficié du développement de l’IRM cérébro-orbitaire, permettant de réels progrès dans la compréhension de l’étiopathogénie de ces syndromes.


Les séquences IRM utilisées sont spécifiques : 3D T2 CISS pour l’exploration des nerfs oculomoteurs, en particulier le VI pour le syndrome de Stilling-Duane, coupes inframillimétriques jointives avec acquisitions en trois dimensions au niveau orbitaire pour l’exploration des muscles oculomoteurs et des poulies.



SYNDROME DE STILLING-DUANE


Cette pathologie congénitale a fait l’objet de plusieurs études d’imagerie ayant permis de confirmer l’hypothèse étiopathogénique évoquée lors d’autopsies : défaut d’innervation du muscle droit latéral par le nerf abducens (VI) avec innervation aberrante par une branche du nerf oculomoteur commun (III) entraînant une fibrose des muscles droits horizontaux. Ces anomalies peuvent être observées dans chaque type clinique de syndrome de Stilling-Duane dans des proportions variables selon le type étudié [7].




Anomalies nerveuses

Les anomalies peuvent concerner le nerf abducens et/ou le nerf oculomoteur. La fréquence de ces anomalies dépend des études et du type clinique concerné [11, 14]. L’agénésie du nerf abducens dans les types I et III peut être retrouvée dans 60 % à 100 % des cas selon les séries (fig. 15-2). Pour les types II, l’agénésie est moins fréquente mais reste non exceptionnelle. Quant au nerf oculomoteur, peu d’études l’ont analysé ; il a été décrit comme hypotrophique [10] ou, à l’inverse, hypertrophique du côté du syndrome de syndrome de Stilling-Duane (fig. 15-3).


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May 31, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 15: Imagerie cérébrale dans le bilan oculomoteur : actualités

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