12 Infestations et morsures
Gale
La gale est une infestation parasitaire provoquée par l’acarien Sarcoptes scabiei var. hominis.
Elle est caractérisée par une éruption prurigineuse intense.
Anamnèse
Les patients ayant la gale se plaignent de démangeaisons ininterrompues et ne peuvent arrêter de se gratter, même pendant l’examen.
Il est rare que la gale se manifeste chez un seul membre d’une famille.
Habituellement, plusieurs membres de la famille, surtout ceux qui sont en contact direct, notamment les personnes partageant un même lit, sont également symptomatiques.
Les lésions nodulaires sont les plus longues à guérir ou à disparaître complètement.
La gale norvégienne (qui comporte des milliers d’acariens) peut être la source de la gale épidémique ou de celle observée chez les patients placés en institutions.
Un prurit persistant, même après un traitement approprié, est causé par une réponse allergique persistante.
Manifestations cutanées
La lésion caractéristique de la gale est un sillon linéaire ou sinueux ; il s’agit d’une strie cutanée légèrement surélevée, linéaire, incurvée ou en forme de S. Il peut aussi y avoir une papule de 1 à 2 mm de diamètre ou une vésicule.
Les sillons et les autres lésions scabieuses sont le plus susceptibles d’être observés dans les plis, les espaces interdigitaux, les poignets, les bords latéraux des mains et des pieds, les faces latérales des doigts et des orteils, les zones génitales, y compris le gland, le pénis, les fesses, le scrotum. Les paumes, les plantes et le cuir chevelu sont fréquemment atteints chez les nourrissons.
La gale peut également comporter des pustules inflammatoires, dispersées, des vésicules de disposition linéaire, des papules et des nodules.
Les lésions isolées peuvent être excoriées, hémorragiques et croûteuses.
L’éruption de gale et le prurit associé apparaissent en général 2 à 6 semaines après l’exposition.
Eczéma et impétigo peuvent apparaître en tant que lésions secondaires.
Une variante clinique unique et de stade avancé est la gale croûteuse (norvégienne). Les patients – généralement ceux souffrant de démence, de trisomie 21 (syndrome de Down) et/ou d’immunosuppression – ont des squames épaisses et une dermatite eczémateuse, en particulier sur les mains et les pieds. Ces lésions contiennent de très nombreux acariens à la surface de la peau, d’où une intense contagiosité.
Examens de laboratoire et explorations
Des acariens, des œufs ou les fèces peuvent être identifiés dans un prélèvement de lésion de gale.
On applique habituellement de l’huile minérale sur un sillon, une vésicule ou une papule, afin de préserver les fèces d’acariens.
Le sillon est raclé avec une lame de bistouri qui est ensuite frottée sur une lame de verre. Le frottis est recouvert d’une lamelle, puis examiné au microscope.
Les acariens ne sont pas toujours facilement identifiés ; parfois, des morceaux de leur corps, des œufs ou des fèces sont plus facilement visualisés pour confirmation.
Traitement
On utilise le benzoate de benzyle (Ascabiol®), deux applications à 24 heures d’intervalle, ou l’esdépalléthrine (Sprégal® aérosol). Le lindane n’est plus utilisé en France chez les nourrissons en raison des cas rapportés de neurotoxicité.
Le visage et le cou ne sont pas couramment atteints chez l’adulte. Cependant, si ces régions comportent des lésions nécessitant un traitement, il faut prendre soin d’éviter les yeux et la bouche.
Tous les vêtements et la literie doivent être lavés à l’eau chaude en même temps que l’application d’antiscabieux. La fumigation ou la désinsectisation de la maison n’est pas nécessaire.
Une dose unique d’ivermectine par voie orale (comprimés de Stromectol® à 3 mg : 200 μg/kg) est également sûre et efficace pour la plupart des patients. Le renouvellement de la dose 1 à 2 semaines plus tard est une pratique habituelle et peut permettre un taux plus élevé de guérison. L’ivermectine associée aux traitements topiques permet un taux plus élevé de guérison.
L’ivermectine doit être utilisée avec prudence dans le traitement de la gale chez les personnes âgées.
Des corticoïdes topiques peuvent être utilisés pour contrôler le prurit et l’inflammation, après un traitement complet par un scabicide.
Des lésions nodulaires persistantes, en particulier chez le nourrisson, peuvent être traitées avec des corticoïdes en injections intralésionnelles.
Un prurit post-thérapeutique peut persister pendant des semaines ou des mois, même si les acariens ont été éradiqués.
Conseils et recommandations
La gale doit être envisagée pour n’importe quelle éruption irritante généralisée, insensible à la prednisone, ou n’importe quelle éruption prurigineuse qui s’aggrave avec un traitement stéroïdien.
Des démangeaisons plus importantes pendant la nuit sont une caractéristique essentielle.
Même la gale bien traitée peut continuer à être prurigineuse pendant des jours voire des semaines après le traitement. Dans tous les cas, elle ne nécessite pas de renouvellement du traitement. Un autre prélèvement diagnostique par raclage de lésions doit être effectué si un traitement incomplet ou une réinfection est suspecté.
Poux (pédiculose)
Les poux sont des insectes aplatis, sans ailes, qui infestent les poils du cuir chevelu, du corps et de la région pubienne.
Chaque espèce d’insecte a une prédilection pour une région spécifique du corps.
Les poux ont trois paires de pattes situées sur la partie antérieure du corps, directement derrière la tête. Les pattes se terminent en griffes pointues adaptées à l’alimentation, et permettant au pou de saisir et de tenir fermement les poils ou les vêtements.
Les poux s’agrippent à la peau et se nourrissent de sang humain. Ils pondent des œufs sur les tiges pilaires.
Les lentes sont des œufs de poux, ovales, durs, blancs et fixés aux tiges pilaires.
Plus rarement, les poux peuvent transmettre des maladies telles que le typhus épidémique.
Chaque type d’insecte est dénommé en fonction de la partie du corps qu’il parasite :
Poux de tête
L’infestation de la tête par les poux est hautement contagieuse.
La principale source de transmission est le contact direct.
Les poux se trouvent parmi les poils du cuir chevelu, le plus souvent chez les enfants.
Ces insectes sont des parasites humains obligatoires. Ils ne peuvent donc pas survivre sur d’autres animaux ou sur le mobilier.
Le pou de tête ne véhicule aucune maladie humaine connue.
Les poux se nourrissent de sang toutes les 3 à 6 heures.
Les femelles pondent 7 à 10 œufs par jour.
Les œufs, ou lentes, sont ovalaires et fermes, cimentés à la tige pilaire à environ 1 cm de la surface du cuir chevelu. Les lentes éclosent en 8 à 10 jours.
Anamnèse
L’infestation de la tête par les poux est typiquement diagnostiquée par un professeur des écoles ou une infirmière scolaire.
Les filles sont plus souvent atteintes que les garçons.
La contamination par l’intermédiaire des chapeaux, des brosses ou des écouteurs est courante.
L’infestation peut causer une légère démangeaison de la base du cou ou être asymptomatique.
On note parfois des adénopathies cervicales postérieures.
L’infestation est rare chez les personnes à peau noire.
L’infestation des cils s’observe en principe uniquement chez les enfants.
Manifestations cutanées
Les lentes sont de petits œufs blancs fermement cimentés aux cheveux.
Il est souvent plus facile de voir les lentes que les poux.
Les poux de la tête mesurent 3 à 4 mm de long. Ils peuvent être observés sur les tiges pilaires et le cuir chevelu lors d’un examen attentif.
Le diagnostic n’est généralement pas difficile, mais peut exiger des examens répétés.
Les poux de tête ont un corps ovale, semblable à celui du pou du corps, bien que plus petit.
Des croûtes de couleur miel ou un impétigo et des adénopathies se manifestent en cas d’infection.
L’infestation peut induire une blépharite avec prurit des paupières, desquamation, croûtes et pus.
Les lentes sont fluorescentes ; aussi, un examen en lumière de Wood peut être utilisé pour examiner les enfants.
Traitement
Topique standard
Les lotions de pyrétrines en vente libre sont souvent le traitement de première intention pour les différents types de poux. Faire un shampooing et sécher. Imprégner les cheveux et le cuir chevelu. Rincer après 10 minutes. Un ou deux traitements additionnels à une semaine d’intervalle peuvent être nécessaires.
Les shampooings et les crèmes aux pyréthrines. Deux ou trois traitements à une semaine d’intervalle peuvent être nécessaires.
La perméthrine à 5 % est laissée sur les cheveux durant la nuit, sous un bonnet de douche.
La lotion de malathion à 0,5 % est rapidement pédiculicide et ovicide. Elle est utile pour le traitement des poux de la tête résistants aux pyréthrines. La lotion est appliquée pendant 8 à 12 heures ; elle doit être appliquée 7 à 9 jours plus tard, au besoin.
Des souches résistantes aux pyréthrines sont apparues ces dernières années.
L’utilisation des différents agents doit être renouvelée après une semaine.
Il est également utile de peigner les cheveux avec un peigne spécial pour lentes pendant la semaine suivant le traitement.
Le traitement des proches, en particulier des enfants, est controversé, mais fréquemment recommandé.
Les coiffures, vêtements, brosses, peignes et draps sont lavés à l’eau chaude pendant 10 minutes. Les articles qui ne peuvent pas être lavés sont enfermés pendant 3 jours dans un sac plastique.
En dernier recours, le rasage du cuir chevelu et des autres zones pileuses peut permettre la guérison.
Traitements oraux
L’ivermectine en comprimés (Stromectol® à 3 mg), à une dose de 200 μg/kg, est prescrite en dose orale unique répétée 10 jours après.
Des antibiotiques sont administrés en cas d’infection secondaire, comme un impétigo staphylococcique.
Élimination des lentes
Il est essentiel, mais difficile d’enlever les lentes.
Il est utile de peigner les cheveux avec un peigne spécial pour lentes pendant la semaine suivant le traitement.
L’application d’une solution de 50 % de vinaigre et 50 % d’eau peut aider à « décoller » les lentes. La solution est enlevée 15 minutes après l’application.
Myiase furonculoïde
La myiase est une infestation des tissus animaux ou humains par l’étape larvaire de mouches qui ne piquent pas.
Dermatobia hominis est un des parasites en cause dans l’infestation humaine.
Ces espèces de mouches sont originaires d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud.
La mouche femelle utilise les moustiques pour transmettre ses œufs.
Anamnèse
L’infestation de l’hypoderme humain par les larves se rencontre chez les voyageurs de retour d’Amérique centrale, d’Amérique du Sud et d’Afrique.
Les femelles Dermatobia utilisent des moustiques comme vecteurs pour transmettre leurs œufs en capturant des moustiques et en déposant leurs œufs sur leur corps avant de les relâcher.
Des larves de mouche sont déposées incidemment sur la peau par les moustiques et pénètrent le tissu sous-cutané, parfois dans la zone de la piqûre de moustique, où elles deviennent des larves.
La larve est vivante dans le tissu sous-cutané et apparaît comme une papule érythémateuse ou un nodule érythémateux pouvant être confondu avec un kyste inflammatoire ou un furoncle.
Dans le nodule, il y a un point central de 1 à 2 mm correspondant au tube respiratoire de la larve.
Beaucoup de patients se plaignent de malaise et de sensations mobiles dans la peau.
À maturation, la larve sort du corps et tombe par terre. Elle se développe alors en mouche adulte.
Manifestations cutanées
Le nodule rouge sensible mesure environ 2 à 10 mm de diamètre.
Les lésions sont typiquement observées sur le cuir chevelu, le visage ou la partie supérieure des bras et de la poitrine.
Le tube respiratoire larvaire est mobile et peut être vu en ouverture et fermeture au sein de la peau, environ une fois chaque minute.
Le nodule inflammatoire ressemblant à un kyste s’agrandit au fil des jours et des semaines. Il est connu sous le nom de « varron ».
Du matériel séreux ou séropurulent peut s’écouler par l’ouverture.
Il peut être difficile à diagnostiquer, à moins que ce nodule ne soit inspecté de près ou qu’une infestation par le gastrophile ne soit suspectée.
Un voyage dans une zone d’endémie peut aider à soupçonner le diagnostic.
Examens de laboratoire
Après extraction, la larve de gastrophile apparaît comme un ver blanc, en forme de sac, avec des spicules noirs circulaires et un tube respiratoire situé à une extrémité. Elle mesure de 10 à 15 mm de long.
Il est important de retirer la larve en entier, une infection pouvant survenir en cas d’extraction incomplète. Il y a seulement une larve par lésion.
Traitement
La larve humaine hypodermique a besoin d’oxygène ; elle peut donc être forcée à gagner la surface par l’application de vaseline ou d’antibiotique topique. Dans certains cas, de la graisse de porc, un occlusif ou du vernis à ongle peuvent être appliqués sur l’ouverture pour diminuer l’oxygène.
La larve monte pour chercher de l’air. Elle peut être enlevée à l’aide de pinces, souvent dans un délai de 30 minutes à 3 heures après l’application.
Une autre technique consiste à injecter de la lidocaïne au-dessous de la larve. La pression produite peut l’expulser par l’orifice.
Quelquefois, l’ouverture doit être agrandie avec une lame de bistouri en un motif en croix, pour faciliter l’extraction de la larve.
Conseils et recommandations
Le cycle de vie de la mouche est unique dans le sens où la femelle colle ses œufs sur le corps d’un moustique ou d’une tique qui, sans le savoir, dépose les œufs ou larves pendant qu’il pique ou se nourrit.
La plupart des cas de myiase de gastrophile sont suspectés s’il y a eu un voyage récent en Amérique centrale, du Sud ou en Afrique.
Un autre type moins courant de myiase est provoqué par une puce de sable rouge-brun appelée Tunga penetrans.
La myase à Tunga penetrans s’observe sur les plantes des pieds, les espaces interdigitaux des orteils et les chevilles des voyageurs de retour d’Afrique ou d’Amérique Centrale ou du Sud.
Piqûres d’abeille et de guêpe
Les abeilles sont la source la plus courante des piqûres d’insecte. Elles peuvent provoquer des réactions allergiques graves.
L’aiguillon de l’abeille se sépare de son abdomen lors de la piqûre et reste incorporé dans le tissu du vertébré.
Les aiguillons des autres abeilles et ceux des guêpes ne se détachent pas. L’aiguillon détaché est une caractéristique diagnostique utile pour distinguer les piqûres des abeilles à miel de celles des autres abeilles et des guêpes.
Anamnèse
La piqûre initiale, douloureuse, dure pendant quelques minutes et est suivie d’une brûlure modérée. Les symptômes disparaissent en quelques jours.
Chez les enfants, la plupart des réactions sont légères.
Les enfants ayant des réactions cutanées plus profondes ont tout de même une évolution bénigne et sont peu sujets à des réactions récidivantes.
Les réactions graves sont plus courantes chez l’adulte.
Il peut se développer une réaction allergique localisée ou systémique.
Les patients sensibilisés par des piqûres antérieures peuvent développer de grandes réactions locales, avec gonflement œdémateux se formant plusieurs heures après la piqûre et guérissant en quelques jours.
L’œdème est plus prononcé en cas de piqûres à la tête et au cou.
Une réaction systémique toxique peut se développer plusieurs heures après la piqûre.
Il peut y avoir vomissement, diarrhée, mal de tête, fièvre, spasme musculaire et perte de conscience.
Les réactions allergiques anaphylactiques comprennent du prurit, de l’urticaire, une dyspnée, des sifflements, de la nausée et des crampes abdominales. Elles se produisent dans les minutes ou l’heure suivant la piqûre.
La plupart des piqûres mortelles d’abeille et de guêpe se produisent chez une personne hypersensible de plus de 40 ans et qui a reçu une piqûre unique sur la tête ou le cou. Les décès sont provoqués par dysfonctionnement respiratoire ou anaphylaxie.
Les symptômes allergiques tardifs (jusqu’à une semaine après la piqûre) vont de l’anaphylaxie à la maladie sérique.
Les piqûres multiples peuvent causer la mort même chez les personnes non allergiques.
La dose létale 50 du venin d’abeille est estimée à 500 à 1500 piqûres.
Manifestations cutanées
Une urticaire ou une papule œdémateuse surélevée et rose, avec un point rouge punctiforme central, apparaît quelques minutes après la piqûre et dure environ 20 minutes.
Un angio-œdème peut apparaître. Il s’agit d’une réaction localisée, d’aspect épais, dur et profond, recouvrant une zone de 10 à 50 cm.