Chapitre 12 Fractures du fémur et traumatismes du genou
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE – PRINCIPES GÉNÉRAUX
1 Classification : Selon la classification de l’AO, la diaphyse fémorale est définie par la partie comprise entre la partie inférieure du petit trochanter (segment proximal) (1) et le bord supérieur (2) du carré contenant la partie distale du fémur (segment distal). Dans un but descriptif, la diaphyse (segment diaphysaire) peut être divisée en tiers proximal (3), moyen (4) et distal (5). Le tiers proximal est parfois appelé zone sous-trochantérienne.
4. Traitement des fractures de la diaphyse fémorale : Chez l’adulte, la fixation interne par enclouage centromédullaire reste la méthode la plus répandue. Son premier avantage reste la possibilité d’une rééducation précoce du membre et du patient, diminuant les risques de complications pulmonaires, vasculaires, rénales, articulaires et autres, tout en permettant l’entretien de l’activité musculaire, la mobilité articulaire et la récupération fonctionnelle. Cela permet également de diminuer le problème du taux d’occupation des lits (qui était la raison historique de son apparition). À noter, toutefois, que l’enclouage peut être différé en fonction du « damage control » (voir p. 44).
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE – ENCLOUAGE CENTROMÉDULLAIRE
7 Enclouage centromédullaire (c) : Positionnement du patient (suite) : Une alternative consiste en l’utilisation d’une table orthopédique avec le membre sain en flexion et rotation externe de hanche pour permettre l’accès à l’amplificateur de brillance. Une traction peut également être utilisée sur le côté atteint, dans l’axe du membre, grâce à un clou de Steinman (1), soit en transtibial à travers la tubérosité, soit (et préférée par certains) en transcondylaire au niveau fémoral distal, avec un appui périnéal de contre-traction (2). Le côté atteint est mis en adduction de hanche.
8 Enclouage centromédullaire (d) : Le sommet du grand trochanter est repéré à la palpation puis exposé à travers une incision latérale de 6 à 8 cm ; la fossette digitale (1) est identifiée au doigt, et l’ouverture du canal médullaire s’effectue à la pointe carrée courbe (2) au bord interne du grand trochanter. L’amplificateur de brillance permet de confirmer la localisation du point d’entrée avant de procéder à son élargissement. Alternativement, une pointe (3) peut être placée dans un introducteur, et l’orifice élargi avec un perforateur cannulé (4). (Un point d’entrée plus simple peut être réalisé au sommet du grand trochanter grâce à des clous angulés – voir p. 313).
13 Enclouage centromedullaire retrograde (a) : Cela peut être utile chez les patients obèses, en cas de traumatismes multiples, et quand il existe des fractures associées autour des condyles fémoraux et tibiaux qui doivent être traitées en un temps. L’articulation du genou est alors fléchie avec des coussins à environ 45°. L’incisure intercondylaire est exposée soit à travers une incision clivant le tendon rotulien, soit à travers une incision parapatellaire médiale associée au déplacement latéral de la patella.
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FEMORALE – TRAITEMENT CONSERVATEUR
19 Autres methodes d’osteosynthese : Fixation externe : Le contrôle (réduction, stabilité) de l’ostéosynthèse par fixateur externe des fractures fémorales est moins facile que dans le cadre des fractures tibiales en raison des contraintes mécaniques exercées sur le foyer de fracture par le poids du membre. Néanmoins, cette technique est souvent utile dans la prise en charge des fractures ouvertes et largement contaminées ; elle peut être remplacée dans des conditions convenables par un clou centromédullaire à plus de 10 jours du traumatisme. Certaines fractures ouvertes sont des indications particulières de fixateurs externes sur broches fines type Ilizarov (p. 79).
20 Autres methodes : Osteosynthese a foyer ouvert par plaques : Cette méthode est utile et rapide pour une ostéosynthèse stable dans le cadre d’un membre ischémique nécessitant une réparation vasculaire. L’ostéosynthèse par plaque possède un risque légèrement accru de surinfection et de pseudarthrose. L’effet compressif obtenu par la plaque (voir p. 77 pour d’autres techniques) est mieux engagé avec 8 corticales au-dessus et en dessous du foyer de fracture, et si possible avec l’ajout d’une vis interfragmentaire. L’ostéosynthèse par plaque en compression avec greffe osseuse est parfois utilisée dans la prise en charge d’une pseudarthrose après enclouage centromédullaire.
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FEMORALE – TRACTION
25 Mise en place d’une traction collee (a) : Avec soin et douceur, cela peut être fait sans anesthésie. (1) Commencer par le rasage de la peau. (2) Il est ensuite traditionnel de pulvériser ou de tamponner la peau avec une solution d’antiseptique local ; cela peut faciliter l’adhérence des bandes de contention.
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE – ATTELLE DE THOMAS
31 Systeme de traction : traction collee dans une attelle de Thomas (a) : Le point très important dans le choix d’une attelle de Thomas concerne la taille de l’anneau. Afin de gagner du temps (par exemple avant l’anesthésie), il faut mesurer le périmètre crural du membre traumatisé, ajouter 5 cm du fait de l’oedème, présent ou prévisible. Il est cependant utile de disposer d’une taille au-dessus et en dessous de l’estimation en cas d’inexactitude.
40 Attelle de Thomas (j) : Après avoir uni la traction avec l’attelle via les cordes, il est possible de soulever l’extrémité distale de l’attelle sur un oreiller (1) afin de pouvoir bander le membre autour de l’attelle, en utilisant par exemple une bande de 15 cm (2). Noter le rembourrage en regard du foyer de fracture afin d’agir comme point d’appui (3), ainsi que derrière le genou pour maintenir une légère flexion (4), et en regard de la crête tibiale (5) pour éviter toute lésion.
42 Attelle de Thomas (l) : Les forces mises en jeu au niveau de l’anneau de l’attelle de Thomas peuvent provoquer des plaies (1) (en particulier dans le périnée, le pli de l’aine, et en regard de la tubérosité ischiatique) ainsi que des complications vasculaires, et doivent être soulagées. Cela se fait en appliquant une traction (environ 3 kg) sur les cordes d’attache (2). Si la force au niveau de l’anneau n’est pas soulagée, augmenter le poids de traction.
49 Attelle de Thomas (s) : Reglages : Il est possible que le recurvatum (13) soit la plus fréquente des déformations résiduelles nécessitant une réduction qui est accessible. Dans le cadre d’une attelle de Thomas confectionnée avec un bandage circulaire en hamac postérieur, l’épaisseur du rembourrage en regard du foyer de fracture doit être augmentée. Il en est de même pour un hamac postérieur confectionné à partir de plusieurs sangles séparées (14).
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE – RÉÉDUCATION PRÉCOCE
52 Attelle de Thomas (v) : Surveillance (iii) : Des soins infirmiers de qualité doivent tout particulièrement être dispensés au niveau de la racine du membre où se situe l’anneau de l’attelle, afin d’éviter toute lésion cutanée. En outre, pour éviter la compression de la racine du membre, fendre l’anneau si besoin ; pour l’hyperpression sur le périnée, augmenter le poids de la traction ; gérer l’hyperappui sur l’épine iliaque antérosupérieure (a) avec un abaissement de l’attelle (b) ; l’hyperappui de la cuisse contre la partie inférieure de l’anneau (c), en réduisant voire en supprimant tout le poids de soutien de l’attelle (d), avec possibilité d’ajouter un coussin sous le membre en amont de l’anneau (e) ; surveiller l’état cutané en regard du bord de la bande de soutien qui sert de hamac (f).
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE – PLÂTRE MOULÉ ARTICULÉ/TRACTION DE HAMILTON-RUSSELL
57 Platre moule articule (ii) : Il faut protéger la peau, et en particulier tous les reliefs osseux, avec l’utilisation d’ouate au-dessus (5) et en dessous (4) de l’articulation du genou. Une fois humidifiées, les bandes de plâtre sont appliquées (6) de manière circulaire et harmonieuse tout en incorporant les extrémités du jersey (7). Un morceau de polyéthylène est sélectionné (8), moulé et maintenu en position (9).
FRACTURES DE LA DIAPHYSE FÉMORALE
61 Potence de traction : Les enfants jusqu’à l’âge de 3 ans (ou 4 si très petits et légers) sont idéalement traités par cette méthode, et elle peut également parfois être mise en oeuvre au domicile si les circonstances s’y prêtent. Les bandes de traction sont appliquées aux deux jambes et fixées par une corde à une potence (1), les maintenant à la verticale de sorte que les fesses de l’enfant soient tout juste surélevées du lit (2) ; cela rend les soins infirmiers d’autant plus faciles. C’est le poids du corps de l’enfant qui est responsable de la traction. Ce système de potence de traction ne doit pas être utilisé chez l’enfant plus âgé, car il existe un risque de spasme vasculaire et de nécrose périphérique.
62 Platre pelvipedieux (spica de hanche) : Les fractures diaphysaires stables peuvent être immobilisées par un plâtre pelvipédieux (3) ; cette méthode doit immobiliser le membre blessé jusqu’aux orteils et le membre controlatéral jusqu’au-dessus du genou, ainsi que vers le haut au-dessus de la ligne des mamelons. Un tel plâtre peut être utilisé pour les enfants agités mais pour lesquels des soins infirmiers de qualité sont disponibles à la maison (avec surveillance régulière tous les 15 jours), ou bien dans le cadre de fractures ouvertes et infectées de l’adulte (voir chap. 11).