Un problème grave

48. Un problème grave


Vous venez d’intégrer l’équipe d’un hôpital universitaire en tant qu’anesthésiste senior. Il est tard dans la soirée et vous êtes en second pour les urgences. Une craniotomie est en cours depuis 4h et il reste 1h avant la fin. Votre interne (un homme marié de 32 ans), bien que compétent, ne semble pas particulièrement intéressé par ce que vous essayez de lui enseigner contrairement aux fois précédentes où vous aviez travaillé ensemble, et au cours desquelles il avait montré une grande motivation. Il se plaint également d’avoir froid, alors que vous avez chaud, et porte une blouse à manches longues. Il s’est rendu aux toilettes au moins 3 fois depuis le début de l’intervention et souhaite y retourner. Vous lui demandez si tout va bien et il vous répond que oui mais qu’il doit retourner aux toilettes. Pendant qu’il y est, l’anesthésiste en premier entre en salle d’opération pour vous dire de rentrer chez vous. Vous faites la transmission de votre patient et indiquez que l’interne semble avoir une petite vessie. Il vous confirme qu’il a également eu cette impression et vous quittez la salle d’opération sans plus de commentaire. Alors que vous entrez dans le corridor, une infirmière accourt vers vous en criant qu’une personne se trouve inconsciente. Vous courez sur les lieux et trouvez votre interne inconscient à terre, cyanosé et en arrêt respiratoire . Il reprend très doucement une ventilation lorsque vous subluxez vigoureusement sa mandibule. Ses paramètres vitaux sont normaux mais il est toujours inconscient. Vous pincez son bras et obtenez une réaction de retrait. Très inquiet, vous demandez plus d’aide. Avec l’aide de l’infirmière, vous mettez rapidement en place une perfusion de Ringer Lactate® et injectez une ampoule de glucosé à 50 %, craignant une hypoglycémie, mais sans entraîner d’amélioration de son niveau de conscience. Que faites-vous ?



Discussion


La définition de l’addiction médicamenteuse selon l’American Society of Anesthesiologists est la suivante : « la compulsion irrépressible de consommer des drogues en dépit des conséquences. Il s’agit d’une maladie chronique dont le résultat est la perte de contrôle de sa vie. À moins d’être reconnue et traitée efficacement, l’addiction entraîne souvent la mort. Il existe souvent, selon les drogues, une dépendance physique. »

Bien que le nombre de praticiens abusant de substances addictives ne soit pas connu avec précision, le chiffre de 8 à 12 % est avancé comme pourcentage de médecins qui développeront à un moment ou un autre de leur carrière une addiction médicamenteuse [1]. La consommation de drogues a été signalée comme une cause majeure de poursuites judiciaires pour mauvaises pratiques médicales et négligences [2], de développement de maladies psychologiques et physiques, et de désordres familiaux [3]. Et ceci ne tient pas compte du préjudice fait au patient et à l’ensemble de la profession. Il est un fait que les praticiens souffrant d’addiction restent souvent indétectés pendant de nombreuses années, sans aucun traitement, et qu’il peut être trop tard lorsqu’ils sont découverts [4]. Sans traitement, le taux de mortalité rapporté chez les praticiens souffrant d’une telle addiction serait de 17 % [5]. Les anesthésistes sont considérés comme une population particulièrement à risque [6], bien que ceci ait été remis en question [1].

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Apr 25, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Un problème grave

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