Chapitre 5 Toxicologie
La toxicologie est l’étude des poisons, des produits toxiques, de leurs propriétés, de leur mode d’action, de leur recherche analytique et des procédés destinés à lutter contre leur action néfaste.
Définition d’un toxique
Une substance est toxique lorsque, après sa pénétration dans l’organisme à une dose suffisante, elle provoque des troubles variés pouvant éventuellement conduire au décès.
La science des poisons est très ancienne, les tous premiers toxiques ayant été utilisés pour empoisonner les flèches. Le mot toxique vient du grec qui signifie arc.
La mise en évidence des poisons est plus récente. L’arsenic a été détecté dès 1836 (Marsh) et c’est Orfila, médecin légiste, qui, quelques années après, eut l’idée de rechercher les toxiques dans les différents tissus. Les techniques se sont également affinées. Actuellement, il est possible de détecter des doses infinitésimales de produits dans la plupart des tissus et sécrétions et dans les cheveux. Ce sont les progrès des méthodes et les appareillages qui permettent cette détection et posent actuellement le problème des conditions de prélèvement afin d’éviter les contaminations.
Types d’intoxications
On peut distinguer les empoisonnements criminels, suicidaires et accidentels. Ces derniers sont de plus en plus nombreux en raison de la multiplication des produits toxiques actifs utilisés, tant en milieu domestique et professionnel qu’en matière de thérapeutique.
Les intoxications médicamenteuses sont fréquentes. Les drogues utilisées sont de plus en plus actives.
Empoisonnements criminels
Les empoisonnements criminels sont devenus rares. Les produits les plus dangereux (arsenic, cyanure…) sont très réglementés et d’accès difficile. Certains cas, souvent au sein des professions de santé, ont leur origine dans des médicaments hypnotiques ou curarisants.
Empoisonnements suicidaires
Les empoisonnements suicidaires sont essentiellement médicamenteux. Ils sont parfois causés par des produits domestiques. L’oxyde de carbone, jadis présent dans le gaz d’éclairage et les gaz d’échappement, n’est plus guère utilisé et utilisable.
Les médicaments sont largement en cause mais leur efficacité a considérablement baissé du fait des progrès de la réanimation qui permet de palier la plupart de ces intoxications. Les suicides médicamenteux réussis sont devenus exceptionnels.
Empoisonnements accidentels
La multiplication des produits actifs utilisés explique le grand nombre d’intoxications accidentelles tant domestiques que professionnelles.
Les enfants sont les principales victimes (solvants, produits déboucheurs, médicaments…).
Il peut s’agir d’intoxications accidentelles domestiques ou professionnelles ou médicamenteuses.
Ces dernières sont complexes associant de véritables intoxications par surdosage (digitaline, anticoagulants, hypnotiques), des accidents d’hypersensibilité et des interactions nocives entre médicaments, de plus en plus fréquentes.
Les intoxications alimentaires sont souvent des infections par des micro-organismes se trouvant dans la nourriture. Certaines toxines sont particulièrement redoutables, telle la toxine botulinique (conserves avariées). Certains produits présents dans quelques aliments sont également toxiques (mercure, plomb…).
Toutes ces intoxications peuvent être aiguës ou chroniques. Les effets se faisant alors sentir après de longs délais d’exposition (exemple : action cancérigène de certains produits ; action tardive des intoxications au plomb : saturnisme).
Modes de pénétration des toxiques
En dehors d’effets locaux (brûlures, eczéma…), les toxiques ne sont actifs qu’après pénétration dans l’organisme.
Celle-ci peut se faire par quatre voies :
Digestive
C’est un mode très fréquent d’absorption des toxiques. Certains sont cependant détruits et inactivés par voie digestive tels que les curares ou les venins.
Respiratoire
C’est un mode d’absorption fréquent en matière professionnelle : vapeurs, particules, aérosols sont inhalés. L’absorption est très rapide en raison des surfaces d’échange pulmonaire. Les fumeurs (tabac, haschich, opium) utilisent cette voie.
Transcutanée, transmuqueuse
De nombreux toxiques peuvent traverser la peau ou les muqueuses. C’est le principe de pénétration de certains médicaments : onguents, suppositoires, ovules.
Les toxicomanes utilisent cette voie (sniffing) qui est très rapide.
Action des poisons
Ils peuvent agir sur les différents tissus et métabolismes de l’organisme.
Après son absorption, le poison est souvent transformé chimiquement, les produits de dégradation pouvant être plus ou moins toxiques eux-mêmes.
Les réactions chimiques de métabolisation sont très nombreuses : oxydation, méthylation, déméthylation, réduction, hydrolyse… Lors des techniques de recherche et de dosage toxicologique, ce sont souvent ces métabolites qui sont identifiés et dosés.
Élimination des poisons
Les voies d’élimination sont multiples. Le poison peut être éliminé en l’état comme l’alcool ou après métabolisation. Les poumons sont le lieu d’élimination préférentielle des poisons gazeux et volatils (oxyde de carbone, hydrogène sulfuré, alcool, anesthésiques volatils…). Le tube digestif et les fèces éliminent également de nombreux produits le plus souvent après métabolisation.
Le rein et l’urine sont un système d’élimination très important touchant pratiquement tous les toxiques et justifiant l’utilisation des urines dans le dépistage des intoxications.
Les phanères (ongles, cheveux) sont également des lieux de fixation des toxiques, permettant un traçage des intoxications sur le long terme compte tenu de la durée de vie de ces phanères.
Toxicité
Toxicité aiguë
Elle est exprimée par la dose nécessaire pour tuer 50 % des sujets d’expérience exposés au poison : c’est la DL 50 (dose léthale 50). Cette dose permet une estimation statistique de la dangerosité du produit. Cette notion est relative car fonction de l’animal d’expérience utilisé.
La toxicité aiguë est également estimée à partir des dosages effectués chez l’homme en cas de décès après intoxication. Ils permettent une estimation de dose mortelle.
Toxicité chronique
Certains toxiques ont des conséquences à long terme. Ils peuvent être stockés dans l’organisme, après une dose unique, pour aboutir à des lésions ou des pathologies après un certain temps ou après l’accumulation de doses successives. Cette toxicité chronique est très complexe. L’alcool entraîne à long terme des cirrhoses. Les métaux lourds, les produits radioactifs, l’amiante peuvent entraîner des surcharges et des pathologies chroniques multiples.
Répartition des toxiques
La toxiques répartition des toxiques dans l’organisme est variable. Le toxique, après pénétration, est véhiculé par le sang dans les différents tissus.
La fixation dépend des caractères physiques et chimiques du toxique. L’alcool, hydrosoluble, diffuse ainsi dans tous les tissus. Les toxiques liposolubles s’accumulent dans les graisses : centres nerveux, foie, surrénales, graisse sous-cutanée.
Le fluor se fixe préférentiellement sur les zones riches en calcium : os, dents. Les métaux lourds qui réagissent avec des groupements souffrés se fixent sur les phanères.
La distribution des différents toxiques doit être connue des toxicologues. Elle permet une étude dynamique des intoxications.
Risques professionnels toxiques
Ils sont en relation avec les produits toxiques manipulés.
Formol
Le formaldéhyde, ou aldéhyde formique (formule : HCHO), est un gaz incolore qui bout à −19 °C, −20 °C, a une odeur très forte, particulière, et est suffocant et piquant. Son seuil de perception est de 0,1 à 1 ppm et il est irritant au-delà de 1 ppm.
Dissous dans l’eau à saturation (plus ou moins 30 %), cette solution est utilisée habituellement diluée au dixième, ce qui représente 3 % de formaldéhyde.
C’est un fixateur, conservateur, antiseptique puissant par destruction des structures protéiques : coagulation par réaction avec NH2.
Propriétés chimiques
Très réactif, c’est un réducteur puissant. La polymérisation est facile, ce qui explique le trouble observé au niveau de certaines solutions. Cette polymérisation est inhibée par le méthanol (alcool méthylique) et les dérivés cellulosiques. L’oxydation produit l’acide formique.
Les oxydants agissent violemment avec le formol qui est assez stable.
Il est stocké dans des récipients en acier inox, ou acier galvanisé, aluminium, polyéthylène ou verre. (Les vapeurs sont inflammables.)
Toxicité aiguë
Il existe une toxicité locale par causticité : le formol est irritant, provoque une nécrose.
En cas d’ingestion, cette nécrose atteint la bouche, l’œsophage, les muqueuses, les yeux.
En cas d’inhalation, c’est l’ensemble de l’arbre aérien qui est touché.
Au niveau des téguments, le formol produit une irritation, des eczémas et une altération des ongles qui sont ramollis et bruns.
La toxicité systémique (liée à la pénétration du formol dans l’organisme) est responsable :
Des complications sont possibles : perforations digestives, hémorragies, détresse respiratoire.
Les complications tardives sont des sténoses en relation avec des phénomènes cicatriciels.
Toxicité systémique chronique
Le formol est un puissant allergène entraînant eczéma et asthme. C’est également une substance cancérogène. L’exposition maximale est de 15 min à 1 ppm ou 8 h à 0,5 ppm.
Prévention, réglementation
Des normes d’étiquetage sont obligatoires ainsi que des normes de transport qui concernent les concentrations supérieures à 25 % de HCHO (c’est-à-dire quasiment le formol dit pur du commerce, en solution).

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