Syndromes cutanés nécessitant des enquêtes étiologiques

5. Syndromes cutanés nécessitant des enquêtes étiologiques





PRURIT

Le prurit, sensation cutanée incitant au grattage, est le signe fonctionnel essentiel en dermatologie, et un motif très fréquent de consultation.

Une démarche rigoureuse est nécessaire car, à partir de ce signe d’appel banal, on peut mettre en évidence :


• des maladies dermatologiques ;


• des maladies systémiques ;


• des troubles psychologiques.

Indépendamment de sa cause, un prurit intense entraîne un certain nombre de conséquences dont l’importance doit être évaluée :


• stries de grattage, épaississement de la peau (plaques de lichénification), papules de prurigo ;


• perturbation de la vie quotidienne ;


• insomnie ;


• syndrome dépressif réactionnel.


Diagnostic étiologique

C’est évidemment la démarche essentielle. On distingue :


• les prurits secondaires à une dermatose ;


• les prurits sans dermatose préalable (prurit sine materia) :


– généralisés : ils incitent à rechercher une cause générale ;


– localisés : ils sont souvent fonctionnels.



Prurits sans dermatose initiale



Prurits localisés









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Figure 5-1
Lichénification : l’aspect à l’œil nu de quadrillage est identique à l’aspect d’une peau normale à la loupe. L’ancien nom de névrodermite correspond probablement bien à la pathogénie de ces lésions, conséquences d’un prurit fonctionnel chronique.


Les zones les plus sensibles à ces prurits sans cause organique sont :


• chez la femme, le haut du dos (notalgie paresthésique) ;


• chez l’homme, la jambe, l’anus ;


• dans les deux sexes, le cuir chevelu, et les organes génitaux.

Mais d’autres régions peuvent être atteintes.

En cas de prurit anal ou génital, un examen approprié s’assurera de l’absence de cause locale :


• un prurit anal doit faire rechercher :


– des hémorroïdes,


– des fissures,


– une allergie de contact,


– une anite à Candida,


– chez l’enfant une oxyurose ;



Traitement

Seul le traitement étiologique est satisfaisant.

Le traitement symptomatique du prurit est aléatoire : les antihistaminiques H1 sont souvent prescrits mais insuffisamment efficaces. Selon les cas, on évite ou on recherche l’effet sédatif de certains d’entre eux.

Localement, on peut utiliser :


• des hydratants, en cas de xérose ;


• des dermocorticoïdes, sur des lésions récentes et pas trop étendues (prurits anogénitaux, névrodermites) ;


• des réducteurs (préparations au goudron) sur des zones lichenifiées épaisses. Les photothérapies peuvent être utiles.


PRURIGOS

Bien que souvent employé, le terme de prurigo a une signification floue. On peut proposer de le définir comme une éruption papuleuse qui ne reconnaît pas d’autre étiologie que le grattage.

Il s’agit en général de papules excoriées.

Il faut éviter de porter le diagnostic de prurigo, sauf dans les situations décrites ci-dessous. Dans les autres cas, on considérera qu’il faut rechercher une cause au prurit, comme indiqué ci-dessus.


Prurigo strophulus

Le prurigo strophulus s’observe en général chez les enfants : il s’agit d’une éruption de papulovésicules (figure 5-2) prurigineuses, correspondant à des réactions à des piqûres d’insectes, parfois durables.








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Figure 5-2
Papulovésicules de prurigo strophulus chez un enfant.



Prurigo nodulaire

Dans cette variété de prurigo chronique, on observe des nodules dermiques souvent pigmentés, à surface lisse ou verruqueuse, gros comme des noisettes, et très prurigineux (figure 5-3).








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Figure 5-3
Volumineuses papules prurigineuses de prurigo nodulaire.


Chez les sujets jeunes, il s’agit d’une forme particulière de conséquence du prurit de la dermatite atopique. Chez les sujets plus âgés, aucune cause n’est en règle retrouvée.



URTICAIRE



Clinique

L’urticaire est faite de papules ou de plaques érythémateuses et œdémateuses, à contours nettement tracés, prurigineuses, d’évolution fugace, éphémère et de siège mobile en quelques heures.









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Figure 5-4
Urticaire. On note l’aspect papuleux œdémateux nettement délimité, la taille variable des plaques, la disposition sans ordre. Le prurit et la fugacité de l’éruption sont également très utiles pour le diagnostic d’urticaire.


Il n’y a pas de règle non plus pour leur nombre et leur localisation : elles se répartissent sans ordre sur tout le tégument. Le plus caractéristique est leur fugacité : elles durent entre 30 min et plusieurs heures, puis elles disparaissent sans laisser de trace, pour réapparaître éventuellement ailleurs. Cette courte durée de chacun des éléments éruptifs est, en pratique, pathognomonique de l’urticaire.

Au cours des poussées aiguës, il peut y avoir une fébricule et quelques arthralgies. Le mode évolutif de l’urticaire est la répétition de ces plaques dont chacune est éphémère, pendant quelques jours. C’est ce que l’on appelle une urticaire aiguë. Lorsque ces poussées d’urticaire se répètent pendant plus de 6 semaines, on parle d’urticaires chroniques ; en réalité, urticaires aiguës et chroniques ont de nombreuses causes en commun.

La description ci-dessus correspond à l’urticaire habituelle, dermique. L’angio-œdème (synonymes : œdème de Quincke, œdème angioneurotique) est une variété hypodermique d’urticaire, dont l’aspect clinique est différent. Siégeant dans des zones particulières où le tissu sous-cutané est lâche (paupières, lèvre supérieure, organes génitaux), il s’agit d’un gonflement blanc ou rosé, avec sensation de tension (figure 5-5). Il peut être isolé, ou accompagné d’urticaire commune. L’angio-œdème est particulier car :








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Figure 5-5
Angio-œdème de la lèvre supérieure, la localisation la plus fréquente.



Problèmes d’urgence


Dans certains cas cependant, il existe des éléments de gravité immédiate nécessitant une intervention de toute urgence.


Urticaire du choc anaphylactique

Ici l’urticaire s’associe à un collapsus cardiovasculaire, à une dyspnée asthmatiforme, à des troubles digestifs. Actuellement la cause essentielle des chocs anaphylactiques est médicamenteuse (pénicilline).

Le traitement du choc anaphylactique comporte, avant même l’arrivée des services d’urgence :


• injection immédiate, en SC ou IM, de 0,25 à 0,50mL d’ adrénaline à 1 ‰ (soit 0,25 à 0,50 mg pour un adulte). En cas d’échec, on en injecte 0,25mL dilué dans 5cm3 de glucosé isotonique, en IV très lente ;


• injection IV ou IM de corticoïde (Soludécadron, Solumédrol) ;


• en cas d’œdème de la glotte, spray sympathicomimétique (Dyspné-Inhal) ;


• remplissage vasculaire.

Après correction de l’état de choc, le relais sera pris par les antihistaminiques.


Angio-œdème muqueux

Dans le cadre d’une crise d’urticaire importante (urticaire géante), la présence d’un angio-œdème atteignant les muqueuses (lèvres, langue, pharynx, larynx) est l’indication de l’injection de corticoïde.

Le cas de l’angio-œdème héréditaire est particulier. Son traitement de fond (prévention des poussées) repose actuellement sur le danazol, androgène peu virilisant, ou sur l’acide tranexamique. Une crise aiguë se traite par perfusions d’inhibiteur de C1 estérase purifié. Le plasma frais, qui contient un peu de cet inhibiteur, est peu efficace. Une intubation ou une trachéotomie peuvent être nécessaires. Un antagoniste d’un récepteur de la bradykinine est en cours de développement.


Physiopathologie

L’urticaire correspond à une vasodilatation aiguë, secondaire à la libération dans le derme de l’histamine contenue dans les mastocytes. Bien que de nombreux autres médiateurs et mécanismes soient impliqués, l’histamine est toujours considérée comme le médiateur principal de l’urticaire.

Ainsi, l’étude de la pathogénie de l’urticaire revient à étudier les causes et les mécanismes de la libération d’histamine.



Apr 23, 2017 | Posted by in DERMATOLOGIE | Comments Off on Syndromes cutanés nécessitant des enquêtes étiologiques

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