Psychopathologie de la Sphère Oro-Alimentaire

7. Psychopathologie de la Sphère Oro-Alimentaire



GÉNÉRALITÉS


le nouveau-né possède un équipement neurophysiologique particulièrement bien développé dès la naissance au niveau du comportement de succion: le réflexe des points cardinaux accompagné de la rotation de la tête, le réflexe de fouissement, le réflexe de succion et de déglutition (accompagnés des tentatives de préhension des doigts) représentent une unité motrice immédiatement fonctionnelle. il ne faudrait pas en conclure pour autant que tous les bébés présentent le même comportement face à la nourriture.

les infirmières de maternité savent rapidement distinguer, dès les premiers repas, les «petits mangeurs» et les «gloutons». lorsqu’on étudie le rythme de succion de la tétine et la fréquence des arrêts, on peut aussi distinguer des nourrissons qui tètent à un rythme rapide, presque sans pause, et d’autres, dont le rythme de succion est plus lent et entrecoupé de nombreux arrêts. il semble d’ailleurs que les garçons fassent plus souvent partie de ce second groupe (i. lézine et coll.). mais ce comportement de succion, déjà différent d’un nouveau-né à l’autre, s’accompagne d’un ensemble de manifestations elles aussi variables. certains bébés pleurent, s’agitent bruyamment devant ce qu’ils doivent ressentir comme une intolérable tension, d’autres paraissent attendre plus paisiblement l’arrivée de la nourriture. certains tètent les yeux ouverts, d’autres les yeux fermés.


La succion est néanmoins le «temps fort» de cet échange et représentera le mode privilégié grâce auquel le nourrisson commence à explorer le monde qui l’environne; en témoigne cette phase où il porte systématiquement tout à la bouche (4-5 mois à 10-12 mois).


Nous ne reprendrons pas ici l’étude de l’évolution de l’oralité; mais il importe d’en souligner les diverses significations avec l’âge et les stades libidinaux et agressifs.

L’attitude de la mère est fonction à la fois du comportement de son nouveauné, de ses propres affects face à l’oralité, mais aussi de sa capacité d’apprentissage ou d’adaptation aux situations nouvelles. Ainsi I. Lézine et coll. ont montré qu’au cours des premiers biberons, «peu de mères primipares trouvent d’emblée de façon souple et adroite, les gestes qu’il faut faire pour tenir le bébé, le manipuler, le calmer et satisfaire ses besoins de façon immédiatement gratifiante». Au début leur rythme d’alimentation, les arrêts et reprises qu’elles imposent ne correspondent pas au rythme propre du bébé. Le plus souvent, vers le quatrième jour environ, se produit une sorte d’adaptation réciproque, la mère primipare prenant conscience de son nourrisson comme tel, et exprimant le sentiment d’être mieux capable de s’occuper de l’enfant. Cette adaptation réciproque se produit beaucoup plus rapidement chez les secondipares.


La société enfin intervient elle aussi de façon tout à fait privilégiée dans l’échange alimentaire mère-enfant. Notre propos n’est pas de nous étendre ici sur l’ensemble du symbolisme culturel lié à l’alimentation, ni sur le rôle social toujours fondamental du repas. Dans la relation entre le bébé et sa mère, à la variabilité des conduites citées ci-dessus, la puériculture a longtemps répondu par une pression monomorphe où le pôle diététique (qualité et quantité des aliments) était outrageusement privilégié par rapport au pôle relationnel. De nos jours, la tendance serait plutôt inverse, et avec l’alimentation à la demande le risque est plus de laisser la jeune mère complètement désarmée face à ses craintes et fantasmes concernant l’alimentation sans le guide rassurant que constituaient les conseils et recommandations diététiques.



ÉTUDE PSYCHOPATHOLOGIQUE


ANOREXIE DU SECOND TRIMESTRE

Cette anorexie survient le plus souvent entre 5 et 8 mois. Elle apparaît soit progressivement, soit brutalement, parfois à l’occasion d’un changement de régime alimentaire: sevrage ou ablactation (d’où le terme «anorexie du sevrage»), introduction de morceaux, etc. Classiquement, il s’agit d’un nourrisson vif, tonique, éveillé, manifestant de la curiosité pour l’entourage, en avance dans son développement. Très vite ce refus de nourriture, plus ou moins total, suscite une réaction anxieuse de la mère; apparaît alors tout un manège dont le but est de faire manger l’enfant: on tente de le distraire, de jouer, de le séduire, on attend qu’il soit somnolent, ou au contraire on l’attache, lui fixe les mains, tente d’ouvrir sa bouche de force. Inéluctablement l’enfant sort victorieux du combat, la mère épuisée et vaincue. Famille ou amis sont réquisitionnés pour donner conseils et avis dont la divergence ne fait qu’accroître l’anxiété maternelle.


L’évolution permet de distinguer deux formes (Kreisler).





Anorexie simple.

— Elle apparaît comme un trouble essentiellement réactionnel (au sevrage, à une maladie intercurrente, à un changement de cadre de vie, etc.), passager, conduite de refus liée souvent à une attitude de forçage de la mère. Le problème se résout rapidement avec un changement d’attitude de la part de la mère, après qu’elle ait été rassurée, ou avec quelques aménagements pratiques (repas donné par le père ou une tierce personne, aide temporaire d’une puéricultrice, etc.).

Jun 8, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Psychopathologie de la Sphère Oro-Alimentaire

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