Les opérations pharmaceutiques

3. Les opérations pharmaceutiques



I. Dessiccation


II. Pulvérisation des solides


III. Mélange


IV. Dissolution


V. Filtration


VI. Distillation


VII. Stérilisation



Les substances actives et les excipients sont donc obtenus suivant des procédés validés et bien documentés : les matières premières subissent une série de transformations de façon à obtenir au final des matières de qualité pharmaceutique (tableau 3.I). Ces transformations sont appelées opérations pharmaceutiques et elles s’effectuent au moyen d’appareils standardisés. Ces opérations sont choisies en fonction à la fois des caractéristiques des matières premières à traiter et des matières pharmaceutiques à obtenir. On distingue principalement la dessiccation, la pulvérisation, le mélange, la dissolution, la filtration, la distillation et la stérilisation. Ces opérations pharmaceutiques peuvent également constituer des étapes indispensables de la fabrication des formes galéniques.
























Tableau 3.I Caractéristiques de différentes substances actives
Substance active Type de fabrication Méthode d’obtention Principales caractéristiques de la substance active
Morphine Origine végétale : exsudât de la capsule de pavot Séchage
Extraction en milieu hydro-alcoolique Séparation des autres opiacés par précipitation sélective Purification
PM : 285,3 g mol-1 T° de fusion : 195–200 °C
insuline Biotechnologie Biosynthèse : gène codant introduit dans des micro-organismes, sécrétion d’insuline dans le milieu de culture Purification par filtration et ultrafiltration Précipitation et resolubilisation Deux chaînes reliées par un pont disulfure Chaîne A de 21 acides aminés Chaîne B de 30 acides aminés
Paracétamol Synthèse chimique Acylation du paraaminophénol par de l’anhydride acétique Séparation du paracétamol et de l’acide acétique formés PM : 151,2 g mol-1 T° de fusion : 169–170 °C Insoluble dans l’eau froide Plus soluble dans l’eau chaude Soluble dans l’alcool, l’acétone

Par exemple, pour préparer une forme pharmaceutique, comme une solution de chlorure de sodium, destinée à la voie parentérale, il faut :




• préparer l’excipient, l’eau pour préparation injectable, par distillation ;


• dissoudre la substance active, le chlorure de sodium, dans l’eau pour préparation injectable (dissolution complète) ;


• filtrer la solution obtenue (filtration) ;


• répartir cette solution filtrée en ampoules et les stériliser pour détruire tous les germes qu’elles peuvent contenir (stérilisation).

Les opérations pharmaceutiques utilisées pour la préparation de ces matières premières ou de ces formes galéniques seront contrôlées en cours de réalisation ou à la fin ; quelquefois, ce contrôle se confond avec celui de la forme obtenue.


I. Dessiccation




A. Définition







La dessiccation (ou séchage) a pour but d’enlever totalement ou partiellement l’eau contenue dans un produit solide. Plus généralement, cette opération permet d’éliminer toute substance volatile présente dans un corps non volatil.


B. Intérêt et principe


L’eau est un des principaux facteurs d’altération des produits, car elle peut favoriser :




• le développement de micro-organismes ;


• leur dégradation par réactions enzymatiques.

Dessécher une substance, c’est donc assurer sa conservation.



m = k S (Pm − p)/p

m = masse d’eau en grammes, évaporée par unité de temps.

k = coefficient dépendant du produit à sécher (nature, porosité, etc.).

S = surface d’évaporation.

Pm = tension de vapeur saturante pour la température considérée.

P = pression partielle de la vapeur d’eau au niveau de l’air ambiant.

P = pression ambiante.

Ainsi, pour augmenter la vitesse d’évaporation, il faut :




• augmenter S (étaler les produits) ;


• augmenter la température car Pm croît avec la température ;


• diminuer p (donc éliminer la vapeur formée par une ventilation) ;


• diminuer P (en faisant un vide partiel).

Toutefois, cette vitesse doit être contrôlée lors du séchage de produits fragiles car si la vitesse est trop rapide il y a un risque de formation d’une croûte solide à la surface du produit (« croûtage »).


C. Méthodes et appareils



1. Séchage à l’air libre


Il s’effectue dans des hangars bien aérés. Les substances à sécher sont déposées en couches peu épaisses sur des claies. Ce procédé est long et risque d’entraîner une dégradation (hydrolyse…) et une pollution des produits (insectes…). Il ne convient que pour des drogues végétales dont les substances actives sont peu fragiles.


2. Séchage par air chaud


Ce procédé est beaucoup plus employé. Il est réalisé dans des séchoirs qui peuvent être de deux types.


a. Séchoirs à fonctionnement discontinu




Dans l’industrie, pour un séchage plus efficace, des séchoirs à lit d’air fluidisé (technique de la fluidisation) sont préférés. De l’air chaud et sec entre dans le fond d’une cuve et passe à travers une grille finement perforée avant d’entrer en contact avec la substance à dessécher. Cet air provoque un brassage du produit humide à sécher et permet une dessiccation très rapide. L’air humide est évacué par la partie haute de l’appareil (fig. 3.2 et 3.3). Les lits d’air fluidisé sont particulièrement adaptés pour sécher des poudres ou des formes galéniques solides tels des granulés ou des microsphères.






4. Séchage en couche mince sur cylindres


Les séchoirs à cylindres sont constitués d’un ou de deux cylindres qui trempent dans le liquide à dessécher. Ils sont chauffés intérieurement à des températures réglables. La rotation entraîne, par adhérence, un film liquide qui se dessèche au cours du cycle. Cette technique est utilisée pour l’obtention du lait en poudre par exemple (fig. 3.5).



5. Séchage par nébulisation


La nébulisation (souvent appelée improprement atomisation) consiste à disperser la substance à dessécher en un brouillard de très fines gouttelettes, au sein d’un courant d’air très chaud (150 °C par exemple), qui les transforme, instantanément, en une poudre desséchée. Les appareils permettant cette dessiccation par dispersion sont appelés nébuli- seurs (ou atomiseurs, terme incorrect). Ils produisent des nébulisats. Ils se composent :




• d’un système de dispersion du liquide ;


• d’une chambre de séchage ;


• d’un « cyclone » de séparation (fig. 3.6).


La nébulisation présente un intérêt certain dans le domaine pharmaceutique. En effet, la dessiccation des gouttelettes est instantanée. Dans ces conditions, le liquide n’a pas le temps d’atteindre la température de l’air chaud. Ainsi, un liquide introduit à une température de 20 °C et pulvérisé dans une enceinte où l’air est à 150 °C donne à la sortie de l’appareil un nébulisat qui n’atteint pas 60 °C. Ce procédé permet donc la dessiccation de substances fragiles, sensibles à la chaleur, à l’oxydation et à l’hydrolyse. Il est très utilisé dans l’industrie alimentaire (café, lait ) et en pharmacie (laits pour nourrissons, extraits de plantes, extraits d’organes, préparation de certains excipients). Les nébulisats se présentent sous forme de poudres très légères à grains sphériques creux ou non, plus ou moins poreux qui se remettent facilement en solution.


6. Lyophilisation2 ou cryodessiccation








b. Réalisation d’une lyophilisation



Première étape : la congélation

Un lyophilisateur comprend deux enceintes reliées entre elles (fig. 3.8 et 3.9). L’enceinte A (chambre de sublimation ou évaporateur) est refroidie à une température qui permet la congélation du produit à dessécher, par exemple – 40 °C. Lors de sa transformation en glace, l’eau augmente de volume et risque de dilacérer plus ou moins les tissus qui la contiennent. Pour limiter au mieux cette altération, la congélation doit être rapide pour que la glace formée se présente sous forme de petits cristaux et non de gros cristaux.





Troisième étape : la condensation

Dans l’enceinte B (condenseur), le système réfrigérant du lyophilisateur permet d’être à une température inférieure, par exemple – 50 °C. Cet abaissement de température permet à la tension de vapeur « saturante », obtenue en A, d’être diminuée en B.

Ce déséquilibre permet le déplacement de la vapeur de A vers B, le vide favorisant de façon considérable ce déplacement. La vapeur formée en A est donc refroidie en B, elle se recongèle au contact des surfaces du condenseur qui sert de « piège à vapeur ».

Les différents paramètres sont enregistrés grâce à des appareils de contrôle, tout au long du cycle de lyophilisation qui peut durer plusieurs jours. À l’issue de cette opération, on obtient un produit lyophilisé très avide d’eau.



8. Séchage par hyperfréquence (ou micro-ondes)


Dans la zone des infrarouges et des hautes fréquences (ou microondes) l’action thermique est prépondérante.

Quelques bandes étroites de fréquences réservées aux applications industrielles, scientifiques et médicales peuvent être utilisées pour la dessiccation et en particulier, la fréquence 50 MHz. Les micro-ondes ainsi produites traversent l’air, le verre, la porcelaine. Elles sont réfléchies par les parois métalliques et sont absorbées par les substances à constante diélectrique élevée (eau et produits qui en contiennent). À ce stade, l’énergie électromagnétique apportée par les micro-ondes entraîne la rotation des molécules sur elles-mêmes à très grande vitesse ; le frottement ainsi créé assure la production de chaleur.

Ces dernières années, l’usage des micro-ondes s’est surtout développé dans le domaine alimentaire :




• décongélation, réchauffage des aliments, cuisson ;


• séchage industriel des produits alimentaires.

Ce type de séchage peut être utilisé dans l’industrie pharmaceutique pour permettre une dessiccation en continu de granulés ou d’extraits végétaux par exemple.



II. Pulvérisation des solides


Après la dessiccation, la pulvérisation est une étape pratiquement obligatoire pour utiliser une substance active, qu’elle soit d’origine animale ou végétale ou qu’elle provienne de substances chimiques naturelles ou synthétiques.


A. Définition







La pulvérisation des solides a pour but de diviser finement des substances solides par destruction des forces de cohésion de la matière. Le résultat forme une poudre constituée de particules de taille réduite et de granulo- métrie déterminée.

Remarques

La pulvérisation consiste à réduire en poudre une substance tandis que le broyage correspond à une réduction en miettes.

Avant pulvérisation, il peut être nécessaire de trier et d’éliminer les parties inutiles de la matière première en effectuant par exemple une mondation des graines (élimination de leurs pellicules extérieures).

Ensuite, il peut être effectué une division grossière par différentes méthodes telles que :




rasion (opération utilisant une râpe qui donne des copeaux) ;


section (instruments tranchants, type coupe-racines, qui cisaillent les matières à broyer) ;


concassage (les concasseurs permettent déjà d’obtenir des particules de taille assez fine : de l’ordre de 1 à 2 mm).

Enfin, il est souvent utile d’effectuer une dessiccation de certaines drogues pour obtenir un produit sec plus facile à pulvériser.

Après pulvérisation, il est nécessaire d’effectuer un tamisage de façon à sélectionner une ou plusieurs fractions granulométriques qui devront être contrôlées.



C. Appareils


Le choix de l’appareil s’effectue en fonction des propriétés des substances à pulvériser comme leur dureté, leur élasticité, leur friabilité, leur thermosensibilité et en fonction de la réduction granulométrique que l’on souhaite réaliser. Pour les substances dures, on utilise de préférence des appareils à percussion dans lesquels les particules subissent des chocs violents (ex. : broyeurs à marteaux). Il existe de nombreux appareils qui soit écrasent les produits à broyer tels que les broyeurs à cylindres, soit procèdent par trituration au mortier ou attrition (écrasement par compression et frottement) ce qui est plus adapté aux substances friables. Les substances molles sont traitées par arrachement. Certains appareils combinent plusieurs de ces principes de broyage/ pulvérisation (percussion, projection…).

Un échauffement se produit généralement au cours de la pulvérisation. Il est fonction de la substance à pulvériser et de l’appareil utilisé, aussi certains d’entre eux sont munis d’un système de refroidissement. Pour conserver des substances actives volatiles ou thermosensibles, un broyage peut être effectué sous une température très basse (cryobroyage), grâce à divers procédés tels que l’emploi de l’azote liquide à – 100 °C.



2. Matériel utilisé en milieu industriel



a. Broyeurs à écrasement




Broyeurs à cylindres

L’écrasement est assuré par deux cylindres lisses ou cannelés, à écarte- ment réglable et tournant en sens inverse (fig. 3.14).


Il existe un broyeur à trois cylindres lisses, basé sur ce principe, et utilisé pour homogénéiser certaines préparations, comme les pommades et les dentifrices (réduction des grumeaux ou agglomérats par écrasement).


b. Broyeurs par cisaillement



Broyeurs à couteaux

Ces broyeurs sont conçus comme les appareils de laboratoire, la cuve de broyage pouvant recevoir une quantité importante de produit à pulvériser. Un système de refroidissement est possible sur certains appareils ce qui réduit les risques d’altération par échauffement. Ces broyeurs sont très intéressants pour la pulvérisation des plantes fraîches ou sèches avant dissolution extractive de leurs substances actives.



c. Broyeurs par percussion



Broyeurs à marteaux

Ils sont constitués d’un bâti fixe, garni à l’intérieur de chicanes, et d’un rotor qui entraîne des marteaux articulés ou non. Une grille perforée permet de recueillir la poudre lorsque celle-ci a la ténuité, c’est-à-dire la finesse, désirée correspondant aux dimensions des perforations du tamis. Les substances sont pulvérisées grâce à la percussion violente des marteaux qui tournent à grande vitesse (5 000 à 10 000 tr/min) et projettent le produit sur les chicanes (fig. 3.16).



Broyeurs à percuteurs

Basés sur le même principe que les broyeurs à marteaux, les broyeurs à percuteurs n’ont pas de marteaux mais, par exemple, des broches, des aiguilles, etc. Le broyeur peut être conçu en position horizontale ou verticale (fig. 3.17).



Broyeurs à boulets




Pour améliorer la rapidité du broyage, certains broyeurs à boulets de laboratoire utilisent la force centrifuge tels :




• le broyeur planétaire à boulets (fig. 3.19) ;



• le broyeur à boulets à récipient centrifugé.

Le cylindre est soumis à un mouvement planétaire très rapide autour d’un axe de rotation.

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Jun 7, 2020 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on Les opérations pharmaceutiques

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