La notion de perte de chance

12. La notion de perte de chance





Présentation de la notion de perte de chance


La notion de perte de chance fut utilisée pour la première fois par les juges à la fin du xixe siècle. L’affaire concernait des mandataires de justice dont la faute avait privé une personne de la possibilité d’exercer un recours. La perte de chance était ici utilisée pour indemniser cette personne de l’impossibilité d’exercer ce recours. On parle de perte de chance, car rien ne dit que ce recours aurait abouti.

À la suite de cette affaire, le recours à la perte de chance s’est développé, et ce pour toutes les branches de la responsabilité. Par exemple, un étudiant s’est vu accorder une indemnisation pour la perte de chance de se présenter à un examen à la suite d’un accident de la route. Rien ne dit que cet étudiant aurait obtenu son examen, mais au vu de ses résultats antérieurs, on peut penser que l’accident lui a fait perdre une réelle chance de l’obtenir.

Qu’en est-il en droit médical ? Est-il possible d’engager la responsabilité d’un professionnel de santé pour une perte de chance subie par un patient ?


Perte de chance et responsabilité de la sage-femme


En matière de perte de chance, le droit médical n’a pas été oublié. À ce titre, un professionnel de santé qui commet une faute, qui a privé le patient de chances de guérison ou d’amélioration de son état, verra sa responsabilité engagée au titre de la perte de chance.

La question de la perte de chance ne se pose donc que dans les situations où le patient avait des chances de s’en sortir. En effet, si le patient n’avait aucune chance de s’en sortir rien ne peut être reproché au médecin puisqu’il n’est redevable que d’une obligation de moyens et non de résultats.


En revanche, si le médecin a commis une faute dans la prise en charge du patient et que cette faute a contribué à l’aggravation de la pathologie du patient, le juge pourra retenir la perte de chance.

Prenons l’exemple de la dystocie des épaules. Une sage-femme est confrontée en salle de naissance à une dystocie des épaules. L’urgence que représente cette situation l’oblige à intervenir et à pratiquer une manœuvre. Supposons qu’à la suite de cette dystocie, l’enfant ait des séquelles. Plusieurs questions se posent : à quoi sont dues ces séquelles ? Sont-elles dues à la dystocie, ou à la pratique de la manœuvre ? Si les séquelles sont dues à la dystocie, aucune responsabilité ne peut être engagée dans la mesure où la sage-femme ne peut pas être tenue pour responsable de la survenance de la dystocie, complication imprévisible. Si les séquelles sont dues à la pratique de la manœuvre, une nouvelle question se pose : la sage-femme a-t-elle commis une faute dans la pratique de la manœuvre ? Si le juge, par l’intermédiaire d’un expert, estime que la sage-femme l’a pratiquée selon les données acquises de la science comme l’aurait fait un médecin s’il avait été présent, sa responsabilité ne pourra être engagée. En revanche, si la sage-femme a commis une faute, qu’elle n’a pas pratiqué cette manœuvre selon les données acquises de la science, on pourra lui reprocher d’avoir fait perdre une chance à l’enfant de naître sans séquelles, et sa responsabilité sera engagée.

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Mar 22, 2020 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on La notion de perte de chance

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