Chapitre 8 Lambeaux cutanés
Les lambeaux cutanés sont très utilisés pour les réparations des pertes de substance du visage.
Les lambeaux cutanés peuvent être classés en trois types qui seront étudiés successivement : les lambeaux locaux, les lambeaux régionaux et les lambeaux à distance (voir chapitre 9).
Lambeaux cutanés locaux ou autoplasties de voisinage
Les lambeaux locaux sont adjacents à la perte de substance, leur vascularisation se fait au hasard. Ils sont utilisés dès qu’une suture en fuseau n’est plus possible. Véritables lambeaux de base de la chirurgie faciale, ils sont bien codifiés et faciles à réaliser. Leur classification dépend de leur tracé cutané ; la perte de substance cutanée est assimilée à une figure de géométrie plane. Leur inconvénient est de laisser une cicatrice visible, si possible masquée dans un pli cutané ; cette cicatrice est plus visible chez le sujet jeune ou l’enfant et certains lambeaux à forte composante cicatricielle doivent être évités à cet âge.
Lambeaux d’avancement (ou de glissement)
Ces lambeaux (figures 8.1–8.4) sont utilisés principalement pour la réparation des pertes de substance du front ou de la tempe.
La perte de substance cutanée est assimilée à un carré ou à un rectangle ; le lambeau uni- ou bilatéral a un tracé dont deux côtés sont dans le prolongement du carré ou du rectangle, l’élasticité de la peau assurant la fermeture de la zone cruentée ; cette plastie est également appelée plastie en U [1], lorsqu’elle est simple, ou en H, lorsqu’elle est en double ( vidéo 8.1).
L’avancée du lambeau entraîne au niveau du pied du lambeau deux oreilles dont la correction est aisément réalisée par la résection de deux petits triangles cutanés de Burow (figure 8.5), tracés en dehors du lambeau ou par l’adjonction d’une plastie en Z.
La plastie en VY est également une plastie d’avancement (figure 8.6). Son principe est de translater la peau comprise entre les branches du V dans l’axe de sa bissectrice, cette translation étant maintenue par la suture de la branche verticale de 1’Y. Cette technique sera retrouvée dans de nombreux lambeaux, en particulier au niveau de la racine du nez, dans les lambeaux glabellaires [2] (figures 8.7 et 8.8) ou de Rieger-Marchac [3,4] (figures 8.9 et 8.10 et vidéo 8.2).
Lambeaux de rotation
Le défect cutané est assimilé à un triangle dont la base est incurvée et s’inscrit dans un cercle dont le diamètre est une à trois fois égal à la hauteur du triangle. Le tracé du lambeau suit le tracé de la circonférence selon une longueur adaptée (deux à trois fois la base du triangle en moyenne) (figures 8.11–8.13).
La peau est largement décollée, soit d’un côté, soit de part et d’autre de l’incision. La translation de la peau se fait selon une tension qui sera atténuée en prolongeant l’incision à la demande. Ces lambeaux sont très utilisés pour les réparations de pertes de substance de la joue (voir chapitre 13).
À la fin de la suture, à l’extrémité de l’incision, apparaît une oreille qui est corrigée par la résection d’un triangle de peau tracé à l’extérieur du cercle, ou selon une plastie en Z au pied du lambeau. Le lambeau de Mustardé [5] pour les réparations de paupière inférieure en est une application.
Lambeaux de transposition ou de translation
La perte de substance est assimilée à un triangle ou à un rectangle. La réparation est assurée par un parallélépipède tracé à proximité et translaté (figure 8.14). Le tracé doit être étudié pour que le lambeau soit suffisamment long, l’axe de rotation tendant à le raccourcir.
Le but de ce lambeau est de recouvrir une zone cutanée dont la fermeture directe entraîne une déformation fonctionnelle et esthétique. Le lambeau est pris aux dépens d’une zone dont la fermeture directe se fait sans déformation. Le lambeau nasogénien utilisé pour réparer une perte cutanée superficielle de la lèvre supérieure ou de la face latérale du nez [6,7] est un lambeau de transposition (voir ci-après le paragraphe « Lambeaux cutanés régionaux »).
Les lambeaux bilobés [8–10], construits selon une figure géométrique (voir figure 11.7a, figures 8.15 et 8.16 et vidéo 8.3), sont aussi des lambeaux de transposition.
Fig. 8.16 Lambeau bilobé de transposition pour réparation de perte de substance de la région occipitale.
Plastie en Z
Il ne s’agit pas d’un lambeau mais d’une technique utilisée pour corriger les brides cicatricielles et rétractiles. Décrite en 1854 par Denonvilliers, la plastie en Z (figure 8.17) fut développée par Iselin et Morel-Fatio. Elle consiste à réaliser deux lambeaux locaux de transposition suivant un modèle géométrique. La transposition des lambeaux réalise un effet d’allongement. La plastie en Z est particulièrement utilisée en chirurgie cutanée de la face pour corriger des brides cicatricielles et rétractiles ou pour la reprise de cicatrices disgracieuses.