7: Prise en charge des voies aériennes et de la ventilation

Chapitre 7 Prise en charge des voies aériennes et de la ventilation





Le dégagement et la protection des voies aériennes supérieures (VAS) jouent un rôle décisif dans la prise en charge d’un patient traumatisé. Son importance est encore davantage reconnue aujourd’hui que par le passé. L’impossibilité de maintenir l’oxygénation et la ventilation entraîne des lésions cérébrales secondaires, aggravant la lésion cérébrale primaire due au traumatisme initial. S’assurer de la liberté des voies aériennes, maintenir l’oxygénation et soutenir la ventilation : tels sont les points les plus importants pour minimiser l’ensemble des lésions cérébrales et améliorer le pronostic.


Le dégagement des voies respiratoires et une ventilation efficace, qui permettent l’oxygénation cérébrale et la distribution de l’oxygène (O2) aux tissus, demeurent les gestes les plus importants des soins préhospitaliers aux patients traumatisés. Parce que les techniques et les équipements utilisés pour cela sont en constante évolution, il est essentiel de se tenir au courant des nouvelles techniques et des nouvelles recommandations.


Le système respiratoire comporte deux grandes fonctions.



Si le système respiratoire ne peut fournir de l’O2 aux cellules ou si celles-ci ne peuvent pas l’utiliser, cela entraîne un métabolisme anaérobie, et l’organisme meurt rapidement. S’il ne peut pas éliminer le CO2 produit par le métabolisme, l’accumulation de celui-ci peut provoquer un coma et une acidose.



Anatomie


Les voies respiratoires peuvent être divisées en voies aériennes supérieures, voies aériennes inférieures et poumons (figure 7-1). Chaque partie du système joue un rôle important pour assurer les échanges gazeux (apport d’O2 aux GR et élimination du CO2 par les poumons).




Voies aériennes supérieures


Les VAS sont formées par la cavité nasale et la cavité orale (figure 7-2). L’air pénétrant dans la cavité nasale est humidifié, réchauffé et filtré pour retenir certaines impuretés. Derrière ces cavités se situe le pharynx qui s’étend de l’arrière du palais mou jusqu’à l’extrémité supérieure de l’œsophage. Il est divisé en trois parties : le rhinopharynx (partie haute), l’oropharynx (partie moyenne) et l’hypopharynx (partie distale). Sous le pharynx se situe l’œsophage, qui mène à l’estomac, mais aussi la trachée, où débutent les voies aériennes inférieures. Au-dessus de la trachée se trouve le larynx (figure 7-3) qui contient les cordes vocales, leurs muscles et les cartilages aryténoïdes. Les « fausses » cordes vocales bloquent le passage de l’air et dirigent celui-ci à travers les cordes vocales. Juste au-dessus et en avant du larynx se trouve une grosse structure en forme de feuille appelée épiglotte qui agit comme un aiguillage, dirigeant l’air vers la trachée, les solides et les liquides vers l’œsophage.






Physiologie


Les VAS sont un conduit qui permet de faire passer l’air atmosphérique à travers le nez, la bouche, le pharynx, la trachée et les bronches, aux alvéoles. Avec chaque inspiration, près de 500 ml d’air sont inspirés chez un adulte moyen. Le système de conduction des VAS représente dans ce volume à peu près 150 ml qui n’atteindront jamais les alvéoles, pour participer aux échanges gazeux. C’est ce que l’on appelle l’espace mort. L’air contenu dans l’espace mort n’atteindra jamais les alvéoles et donc ne participera jamais à l’oxygénation de l’organisme.


Lors de chaque inspiration, de l’air entre dans le système respiratoire. Quand l’air atmosphérique atteint les alvéoles, l’O2 traverse la membrane alvéolocapillaire et passe dans les GR. Le système circulatoire transporte les GR vers les tissus, où l’O2 est utilisé comme combustible par les cellules pour produire de l’énergie (métabolisme aérobie).


En même temps que l’O2 passe de l’alvéole vers les GR, du CO2 est extrait du plasma vers les alvéoles, d’où il est éliminé lors des expirations (figure 7-4). Ce phénomène d’échange d’O2 et de CO2 à travers la membrane alvéolocapillaire est appelé diffusion transmembranaire ou diffusion pulmonaire. Il permet à des GR oxygénés et à du plasma avec un taux bas de CO2 de partir dans le cœur gauche et d’être éjectés vers les cellules du corps.



L’O2 est utilisé par les cellules qui produisent comme déchet de leur métabolisme aérobie du CO2 qui est libéré dans le plasma. Ce phénomène inverse de la diffusion transmembranaire est appelé perfusion cellulaire. Les GR désoxygénés et le plasma chargé en CO2 (un déchet du métabolisme aérobie) retournent vers le cœur droit ; le sang y est pompé vers les poumons où il est à nouveau chargé en O2, et débarrassé du CO2.


Il est essentiel pour le bon fonctionnement de ce processus que le contenu des alvéoles soit constamment renouvelé en air contenant un taux suffisant d’O2. Cet apport constant d’O2, connu sous le nom de ventilation, est capital pour l’élimination du CO2. La ventilation est mesurable. Le volume de chaque inspiration, appelé volume courant (Vc ou tidal volume), multiplié par le rythme ventilatoire par minute donne le volume minute.



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Pendant une inspiration normale (au repos), environ 500 ml d’air (suivant la personne) entrent dans les poumons. Comme nous l’avons déjà vu, une partie de ce volume (environ 150 ml) reste dans l’espace mort du système respiratoire, et ne participe pas aux échanges gazeux.


Si le volume courant est de 500 ml et la fréquence respiratoire de 14 mouvements par minute, le volume minute peut être calculé comme suit :



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Il faut donc que 7 litres d’air environ entrent et sortent des poumons pour qu’une élimination du CO2 et une oxygénation adéquate du sang soient garanties. Si le volume minute chute en dessous de la normale, le patient présente une ventilation inadéquate appelée hypoventilation alvéolaire. L’hypoventilation entraîne une élévation du CO2 dans l’organisme. L’hypoventilation est fréquente lors d’un traumatisme crânien grave (modification de la fréquence respiratoire par atteinte des centres respiratoires), ou lors d’un traumatisme thoracique (atteinte de la mobilité de la paroi thoracique). Par exemple, un patient souffrant de fractures de côtes, qui respire vite et de manière superficielle à cause de la douleur, peut avoir un volume courant de 100 ml et une fréquence respiratoire de 40 mouvements/minute. Le volume minute de ce patient est alors calculé comme suit :



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Si 7 l/minute sont nécessaires pour avoir des échanges gazeux adéquats chez une personne non traumatisée et au repos, il est évident que 4 l/minute sont largement en dessous de ce que nécessite le corps pour évacuer efficacement le CO2, indiquant une hypoventilation. De plus, environ 150 ml d’air sont nécessaires pour combler l’espace mort. Si le Vc de ce patient n’est que de 100 ml, l’air oxygéné n’atteindra jamais les alvéoles. En l’absence de traitement, cette hypoventilation alvéolaire sera rapidement létale.


Dans l’exemple précédent, le patient présente une hypoventilation, même si sa fréquence respiratoire est de 40/ minute. Il est donc nécessaire pour l’intervenant préhospitalier d’apprécier aussi bien la fréquence que l’amplitude de la ventilation pour savoir si la respiration est efficace. Une erreur fréquente consiste à croire qu’une fréquence ventilatoire élevée est synonyme d’hyperventilation. L’appréciation de la quantité de CO2 éliminée est le meilleur moyen de juger le statut ventilatoire. Les effets de l’élimination du CO2 sur le métabolisme sont traités avec le principe de Fick et les métabolismes aérobie et anaérobie au chapitre 8.


L’évaluation préhospitalière de la fonction respiratoire doit comprendre l’évaluation des volumes mobilisés (profondeur de la respiration), de la diffusion et de la distribution d’O2 aux tissus (perfusion). En cas d’hypoxie, un métabolisme anaérobie va s’installer. Le patient peut présenter une ventilation normale, insuffisante ou carrément un arrêt respiratoire. Les intervenants préhospitaliers doivent évaluer et traiter de manière énergique toute défaillance de l’oxygénation et/ou de la ventilation.



Oxygénation et ventilation du patient traumatisé


Le processus d’oxygénation dans le corps humain comprend les trois phases suivantes.



1. La respiration externe est le transfert des molécules d’O2 de l’air atmosphérique vers le sang. L’O2 présent dans les alvéoles est à l’état gazeux. Chaque molécule d’O2 exerce donc une partie de la pression atmosphérique. Augmenter le pourcentage d’O2 dans l’air inspiré augmente la pression de l’O2 alvéolaire. L’air contient 21 % d’oxygène, le reste étant essentiellement de l’azote. Quand on apporte un supplément en oxygène, le pourcentage d’oxygène dans chaque inspiration augmente, ainsi que la quantité d’oxygène dans chaque alvéole.


2. La distribution de l’O2 est le résultat du transfert de l’O2 de l’atmosphère vers les GR durant la ventilation, puis le transport de ces GR vers les tissus via le système cardiovasculaire. L’efficacité de ce processus dépend du débit cardiaque, de la concentration d’hémoglobine et de la saturation en O2 de l’hémoglobine contenue dans les GR. Le volume d’O2 consommé par le corps en une minute est appelé consommation d’O2. De manière schématique, l’on pourrait décrire les GR comme les camions-citernes d’O2 du corps. Ces « camions-citernes » se déplacent sur des autoroutes (système cardiovasculaire) pour décharger leur O2 au niveau des points de distribution du corps que sont les capillaires.


3. La respiration interne est la diffusion de l’O2 des GR vers l’intérieur des cellules des tissus. Le métabolisme normal (cycle de Krebs) produit de l’énergie, du CO2 et de l’eau. Les échanges en oxygène entre les GR et les tissus se font à travers la fine membrane des capillaires, et tout facteur qui interrompt ce processus bloquera le cycle d’échange gazeux. L’apport supplémentaire en O2 peut lutter contre ces facteurs de blocage. Les tissus ne peuvent pas consommer une quantité suffisante d’O2 si un taux adéquat d’O2 n’est pas disponible, et ne peuvent donc pas fonctionner.


Une oxygénation adéquate dépend de toutes ces phases. Bien que la capacité d’évaluer l’oxygénation des tissus dans un contexte préhospitalier s’améliore rapidement, il est nécessaire que tous les patients traumatisés bénéficient d’une oxygénothérapie et d’une assistance ventilatoire au besoin, afin de corriger ou de prévenir une hypoxie, toujours délétère.



Physiopathologie


Les traumatismes peuvent affecter la capacité du système respiratoire de fournir de l’O2 ou d’éliminer le CO2 de différentes manières.



Dans les trois premiers cas, l’hypoventilation est le résultat d’une baisse du volume minute. Si elle n’est pas traitée, cette hypoventilation mène à une baisse du taux d’O2, à une élévation du CO2 dans l’organisme, à une acidose et, finalement, à la mort. La prise en charge d’un patient traumatisé vise à optimiser le rythme et l’amplitude de la ventilation, en corrigeant le ou les problèmes de perméabilité des voies aériennes, et en assistant, au besoin, la ventilation.


La suite de ce chapitre va traiter des deux premières causes d’hypoventilation, à savoir les atteintes neurologiques et les obstructions « mécaniques » des voies respiratoires. Les anomalies de l’expansion pulmonaire seront traitées dans le chapitre 10. Enfin, les quatre dernières causes seront traitées dans le chapitre 8.



Atteinte de la fonction neurologique


Une diminution du volume minute peut être causée par deux situations cliniques associées à une baisse de l’état de conscience.


Tout d’abord, une baisse de l’état de conscience s’accompagne d’une perte de tonus musculaire au niveau de la langue. Si le patient est en décubitus dorsal, la base de la langue chute en arrière et vient obstruer l’hypopharynx (figure 7-5). Pour cette raison, il est impératif de vérifier et de corriger si nécessaire la perméabilité des VAS chez tout patient présentant une altération du niveau de conscience. Chez ce type de patients, il peut aussi être nécessaire de pratiquer des aspirations répétées pour dégager l’hypopharynx du sang, des sécrétions et des débris qui peuvent s’y accumuler. Une altération du niveau de conscience peut également entraîner une atteinte de la commande respiratoire, ce qui entraîne une baisse de la fréquence respiratoire et/ou des volumes ventilatoires. Cette diminution du volume minute peut être temporaire ou permanente.




Obstruction mécanique


Une autre cause de chute du volume minute est l’obstruction mécanique des voies respiratoires. Elle peut être due à une atteinte neurologique ou être d’origine purement mécanique. Une diminution de l’état de conscience entraîne une perte du « contrôle » qui maintient en temps normal la langue dans une position non obstructive ; la langue chute en arrière, obstruant alors le pharynx (voir figure 7-5).


Des corps étrangers présents dans la cavité orale peuvent aussi obstruer le larynx ou l’hypopharynx. Ils peuvent provenir de l’extérieur (débris de verre, aliments, etc.) ou du patient lui-même (dents, dentiers, vomissures, sang, mucosités). Une compression du larynx ou un œdème des cordes vocales peut également provoquer une obstruction des voies aériennes supérieures. Un patient victime d’un traumatisme de la face peut présenter en même temps deux des obstructions les plus fréquemment rencontrées en préhospitalier, à savoir du sang et des vomissures. Il est indispensable que les voies respiratoires soient libérées de ces liquides le plus rapidement possible. Les obstructions des voies aériennes supérieures ou inférieures peuvent aussi être dues à des parties osseuses ou cartilagineuses comprimant les voies respiratoires, en cas de fracture du larynx ou de la trachée notamment. Les traumatismes maxillofaciaux posent très souvent problème du fait de la présence combinée de sang et de fragments d’os ou de tissus qui peuvent créer une obstruction.



Évaluation des voies aériennes supérieures et de la ventilation


Il est indispensable de savoir évaluer les VAS pour pouvoir les prendre en charge. Il est évident que cette évaluation se fait automatiquement sans s’en rendre compte. Un patient qui est alerte et qui nous parle normalement alors que nous approchons de lui a des VAS qui sont perméables. Mais chez un patient qui présente des troubles de la conscience, il est indispensable de bien évaluer les VAS avant de passer à tout autre chose. Quand les VAS sont abordées au cours de l’évaluation primaire, il convient d’évaluer les points suivants.







Prise en charge



Contrôle des voies aériennes


Assurer la liberté des voies respiratoires est la première des priorités lors de la prise en charge d’un patient traumatisé ; pour pouvoir sécuriser les voies respiratoires, rien n’est plus crucial qu’une évaluation adéquate de celles-ci (figure 7-6). Dès que l’on manipule les voies respiratoires d’un patient traumatisé, il faut garder à l’esprit la possibilité d’une lésion du rachis. Toutes les méthodes de contrôle des voies aériennes doivent être appliquées avec une stabilisation de la colonne cervicale en position neutre jusqu’à ce que le patient soit complètement immobilisé (voir chapitre 9).




Compétences essentielles requises


Tout intervenant préhospitalier doit avoir une maîtrise parfaite d’un certain nombre de techniques de dégagement des voies respiratoires. Pour les intervenants disposant d’une formation et/ou de prérogatives limitées, ces techniques peuvent représenter le seul moyen de sécuriser les voies aériennes d’un patient [1]. Cependant, si elles sont correctement employées, ces techniques de base servent à maintenir la liberté des voies aériennes, et réduisent grandement le risque de décès du patient par asphyxie. Ces méthodes « basiques » sont tout aussi importantes pour les intervenants habilités à utiliser des méthodes dites avancées, telles que l’intubation trachéale, car elles constituent une alternative indispensable en cas d’échec des techniques invasives.




Techniques manuelles


Chez le patient inconscient, la langue, devenue flasque, chute en arrière et vient obstruer l’hypopharynx (voir figure 7-5). La chute de la langue en arrière est la cause la plus fréquente d’obstruction des voies aériennes supérieures. Du fait que la langue est fixée à la mandibule, des méthodes manuelles facilement réalisables permettent de rétablir ou de maintenir la perméabilité des VAS.



image Subluxation de la mandibule. En cas de suspicion de traumatisme crânien, facial ou cervical, la colonne cervicale doit être maintenue en position neutre et en ligne. Cette technique permet de rétablir la perméabilité des VAS en réduisant au minimum la mobilisation de la tête et du rachis cervical (figure 7-7). La mandibule est poussée en avant en plaçant les pouces sur chaque pommette, les index et les majeurs sont placés sur la mandibule, poussant celle-ci vers l’avant.


image Traction du menton. Cette technique convient aux patients présentant une obstruction partielle des VAS mais respirant spontanément (figure 7-8). Le menton et les incisives de la mâchoire inférieure sont pincés avec le pouce, l’index et le majeur, puis tirés vers le haut afin de dégager la mandibule vers l’avant. Le port de gants est impératif afin d’éviter une contamination par des substances corporelles. Pendant cette manœuvre, un assistant doit maintenir la tête immobile afin d’éviter toute mobilisation du rachis cervical.




Ces deux techniques font basculer la mandibule en avant et légèrement en bas tout en évitant une mobilisation intempestive du rachis cervical.



Aspiration


Un patient traumatisé peut ne pas être capable de dégager ses voies respiratoires des sécrétions encombrant sa bouche et sa trachée (mucosités, sang, vomissures). L’aspiration est donc une technique importante pour le dégagement des voies respiratoires.


La complication la plus importante de l’aspiration est due à l’emploi trop prolongé de cette technique, qui va produire une hypoxémie, laquelle peut se manifester par des troubles du rythme cardiaque comme une tachycardie. La préoxygénation du patient aidera à prévenir cette hypoxémie. Durant une aspiration prolongée des voies respiratoires, les troubles du rythme peuvent aussi provenir d’une hypoxémie artérielle, menant à une hypoxémie myocardique et à une stimulation vagale secondaire à une irritation trachéale. Une stimulation vagale vraie peut mener à une bradycardie profonde et à une hypotension.


Un patient traumatisé qui doit être intubé peut avoir besoin d’une aspiration énergique des VAS. Mais si la quantité de sang ou de vomissures obstruant les voies respiratoires est très importante, elle peut dépasser les capacités de l’aspirateur de mucosités. Dans ce cas, le patient doit être tourné sur le côté « en bloc » (c’est-à-dire en protégeant la colonne cervicale), de façon à permettre l’évacuation des débris obstruant la cavité buccale. La manœuvre doit alors être complétée par une aspiration avec une sonde de gros calibre. Bien qu’une hypoxie puisse être la conséquence d’une manœuvre d’aspiration prolongée, une obstruction totale des VAS provoquera l’absence complète d’échanges gazeux. Une hyperoxygénation peut être utilisée pour éviter l’hypoxie. Tout comme la préoxygénation, elle peut être réalisée avec un BAVU ou un masque à haute concentration, attaché à une source d’oxygène délivrant un débit de 15 l/minute. Le but est de maintenir une SpO2 de 95 % au moins.


Lors de l’aspiration à travers une sonde d’intubation trachéale, il faut utiliser des sondes souples afin de limiter les risques de traumatisme et de minimiser les résistances par friction. Ces sondes doivent aussi être assez longues pour pouvoir dépasser la sonde d’intubation, et avoir un bout suffisamment souple pour éviter les traumatismes de la muqueuse. Ce genre de sonde souple ne convient pas pour aspirer des quantités importantes de liquides dans l’oropharynx d’un patient traumatisé. Dans ce cas, il vaut mieux choisir une sonde courbée plus rigide et d’un diamètre plus important de type Yankauer. En aucun cas ces sondes ne doivent être introduites dans la sonde d’intubation


Lors de l’aspiration d’un patient, le respect des règles d’asepsie est primordial, et tout intervenant préhospitalier devrait respecter cette séquence de base :




Choix du matériel permettant le maintien de la perméabilité des voies aériennes supérieures


Dès qu’une anomalie des VAS est rencontrée lors de l’évaluation primaire, l’intervenant doit mettre en œuvre de façon immédiate les mesures permettant de maintenir la perméabilité des VAS. Une fois les mesures manuelles entreprises, il est nécessaire d’utiliser des outils permettant de maintenir cette perméabilité de façon plus prolongée. L’outil doit être choisi en fonction du niveau de compétence de l’intervenant et en fonction de ses habitudes. Il faut donc évaluer le rapport risque/bénéfice pour chaque situation. Le choix doit être également dicté par les caractéristiques du patient – « quelle est la meilleure solution pour ce patient donné ? » Au cours des formations initiale et continue, les intervenants sont confrontés aux différents matériels qu’ils auront à utiliser. Plus la procédure est complexe, plus elle nécessite de temps de formation, ces techniques allant de la simple canule à la trachéotomie en passant par l’intubation de la trachée.


Avec l’intubation, plus la technique est réalisée, plus les chances de succès sont grandes. Un jeune intervenant n’ayant intubé que dans des conditions de bloc opératoire aura moins de chances de succès qu’un ancien rodé aux situations d’urgence. Plus il y a d’étapes à suivre, plus la procédure est longue à maîtriser ; et plus la technique est complexe, plus le risque d’échec est élevé. Quand une compétence augmente en difficulté, son apprentissage devient plus long (figures 7-9 et 7-10). Généralement, plus une technique est complexe, plus les conséquences seront lourdes pour le patient en cas d’échec ; c’est particulièrement le cas pour les VAS. Il est donc capital de sélectionner le bon outil pour le bon patient et pour la bonne situation.





Méthodes invasives basiques


Lorsque les manœuvres manuelles ne permettent pas de corriger une obstruction anatomique des voies aériennes, l’emploi de « voies aériennes artificielles » est l’étape suivante.





Sondes supraglottiques


Les sondes supraglottiques offrent aux intervenants préhospitaliers une alternative fonctionnelle de contrôle des voies aériennes (Encadré 7-1 et figure 7-13). De nombreux pays autorisent l’emploi de ces équipements parce qu’ils ne nécessitent qu’une formation minimale pour être utilisés de manière adéquate. Ces sondes sont insérées sans vision directe des cordes vocales (à l’aveugle). Les intervenants autorisés à pratiquer des techniques avancées, telles que l’intubation endotrachéale, doivent considérer ce type de sondes comme une technique de secours très utile en cas d’échec de l’intubation, même après qu’une intubation en séquence rapide ait été réalisée. On peut même, dans certaines circonstances (après évaluation précise), les préférer d’emblée à une intubation classique. L’avantage majeur de ces sondes est qu’elles peuvent être insérées quelle que soit la position du patient, ce qui peut être particulièrement intéressant chez les patients incarcérés, avec des possibilités d’accès minimes, ou chez les patients traumatisés avec suspicion importante de lésion du rachis cervical. Certaines de ces sondes existent en taille pédiatrique.








Intubation endotrachéale


L’intubation endotrachéale (IET) est traditionnellement l’une des méthodes de choix pour obtenir un contrôle efficace des VAS chez un patient traumatisé apnéique ou nécessitant une ventilation assistée (figure 7-14 et Encadré 7-2). Des études récentes ont cependant montré que, dans un environnement urbain, les patients traumatisés en état critique bénéficiant d’une IET n’ont pas un meilleur pronostic que ceux transportés en étant oxygénés avec un masque autoremplisseur et une canule oropharyngée [1]. La décision d’intuber la trachée ou de choisir une autre option doit être prise après une évaluation précise des VAS visant à déterminer le niveau de difficulté attendu de l’intubation. Il faut toujours évaluer le risque d’hypoxie dû à des tentatives infructueuses d’intubation sur des VAS difficiles.





Facteurs prédictifs d’intubation difficile


Il est impératif, avant chaque intubation, d’évaluer les facteurs prédictifs d’intubation difficile. Ils sont nombreux (Encadré 7-3), certains étant dus au traumatisme lui-même, d’autres à des particularités anatomiques propres au patient.



L’acronyme LEMON a été développé comme outil mnémotechnique pour retenir les principaux signes faisant redouter une intubation difficile (voir la signification de cet acronyme dans l’Encadré 7-4). Des techniques alternatives doivent être prêtes en cas de difficultés attendues. Le temps de transport vers une structure hospitalière compétente est également un facteur à prendre en compte dans la décision d’intuber. Un exemple peut être un patient qui maintient ses VAS avec une canule et qui est assisté au BAVU, à quelques minutes du centre hospitalier. Il peut alors être décidé de garder la perméabilité des VAS avec des méthodes de base. Il faut toujours évaluer le rapport risques/bénéfices de la technique choisie.



Encadré 7-4 Évaluation des critères d’intubation difficile (LEMON)


L (look) – regarder. Chercher les caractéristiques qui sont connues pour provoquer une intubation ou une ventilation difficile.


E – évaluer la règle 3-3-2 (voir ci-dessous). Pour permettre l’alignement des axes pharyngé, laryngé et oral, et donc simplifier l’intubation, les indications suivantes devraient être observées.



M (Mallampati ; voir ci-dessous). L’hypopharynx doit être visualisé de manière adéquate. Cela a été fait traditionnellement par l’évaluation de la classification de Mallampati.


Lorsque cela est possible, le patient est invité à s’asseoir, à ouvrir la bouche complètement et à tirer la langue aussi loin que possible. L’examinateur regarde ensuite dans la bouche avec une lampe pour évaluer le degré de visibilité de l’hypopharynx. Chez les patients en décubitus dorsal, le score de Mallampati peut être estimé en demandant au patient d’ouvrir grand la bouche et de tirer la langue ; la lumière du laryngoscope est alors dirigée vers le haut de l’hypopharynx.


O (obstruction). Toute affection pouvant causer une obstruction des voies aériennes rendra la laryngoscopie et la ventilation difficiles. Ces affections comprennent l’épiglottite, l’abcès périamygdalien et les traumatismes.


N (neck mobility) – mobilité du cou. Il s’agit d’une condition indispensable pour une intubation réussie. Elle peut être évaluée facilement en demandant au patient de placer son menton sur la poitrine, puis de faire une extension du cou en sorte qu’il regarde vers le plafond. Les patients dont le cou est immobilisé à l’aide d’un collier cervical n’ont évidemment pas les mouvements du cou et, par conséquent, sont plus difficiles à intuber.









Malgré tout, l’IET est la méthode de choix pour le contrôle des VAS parce qu’elle :


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May 27, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 7: Prise en charge des voies aériennes et de la ventilation

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