41: Rééducation de la rhizarthrose

Chapitre 41


Rééducation de la rhizarthrose





Rappel anatomo-physiologogique



L’articulation trapézo-métacarpienne (TM)


L’articulation TM est en forme de selle inversement conformée [1]. Elle oppose la surface articulaire distale du trapèze qui présente une courbure concave dans le plan radio-ulnaire et convexe dans le plan dorso-palmaire, à la surface articulaire proximale du 1er métacarpien (M1) qui présente une courbure convexe en direction radio-ulnaire et concave en direction dorso-palmaire.


Les surfaces articulaires ne sont pas symétriques et présentent des irrégularités de courbures. La capsule articulaire est réputée pour être lâche et autorise un important jeu mécanique.


Selon Pierron, un système de cinq ligaments vient renforcer cette capsule :



À l’exception du LIM, la section d’un ligament n’a pas de conséquence sur la stabilité de l’articulation TM (selon Kuczinski). Les ligaments sont détendus en position intermédiaire. Les ligaments obliques limitent la rotation du 1er métacarpien sur son axe longitudinal et les ligaments postérieurs verrouillent l’articulation en fin d’opposition (close packed position de Mc Conaill).


Le LIM, tendu entre le versant radial de la base du second métacarpien et le versant ulnaire de la base du 1er métacarpien, n’est pas à proprement parler un ligament de l’articulation TM. La section du LIM permet un glissement radial de M1 de 6 mm. C’est le ligament qui a le rôle le plus important dans la stabilité de la base du 1er métacarpien surtout au cours des mouvements d’ouverture et d’opposition.




Physiologie de l’articulation


Kapandji compare la colonne du pouce à un pylône, articulé à sa base par l’articulation TM et orienté dans quatre directions principales par des haubans musculaires. Sous l’effet des forces qui lui sont appliquées, l’articulation TM travaille en compression.


Pour l’étude des mouvements, le trapèze est considéré comme fixe et M1 mobile [2].


Défini par de La Caffinière [3], le point de départ des mouvements ou position 0 fonctionnel, se situe pour le pouce à 40° en palmaire et 30° latéralement par rapport au plan de référence anatomique.


Dans cette situation, les rapports articulaires de l’articulation TM sont maximaux, l’appareil ligamentaire est détendu, le système musculaire relâché (silence électromyographique). À partir de cette position de référence, on peut définir les mouvements suivants :



• les mouvements angulaires simples non rotationnels : l’ensemble des auteurs s’accordent pour définir deux axes de mouvement, un axe passant par le trapèze où s’effectuent les mouvements de flexion-extension et un axe passant par le métacarpien où s’effectuent les mouvements d’anté- et rétroposition. Ces axes sont constants, non orthogonaux et ne se coupent pas ;


• les mouvements angulaires simultanés rotationnels : la pronation et la supination de M1 résultent de la rotation automatique de M1 sur son axe longitudinal au cours d’un mouvement s’effectuant simultanément autour des deux axes principaux. Le mouvement d’opposition combine antéposition, flexion et pronation de M1. Cette capacité offre à l’articulation TM un 3e degré de liberté, 10 à 20° de rotation du métacarpien autour de son axe longitudinal sont possibles. La pronation oriente la tête du métacarpien vers le médial et l’arrière, la supination vers le latéral et l’avant.


Différentes propositions ont été développées pour expliquer les mécanismes de rotation du 1er métacarpien.


Kapandji assimile l’articulation à un cardan. Les mouvements se font autour de deux axes perpendiculaires. La rotation longitudinale est due à l’effet mécanique de cardan (selon les travaux de Mc Connaill) et accessoirement aux muscles thénariens. Elle dépendrait du fonctionnement intrinsèque des surfaces articulaires.


Coke et Kuczinski pensent que lors de la rotation du 1er métacarpien dans le mouvement d’opposition, il y a perte de congruence mécanique au niveau de l’articulation TM, ceci étant permis par l’irrégularité des surfaces articulaires et la laxité ligamentaire. En tournant, la base de M1 sort de la selle trapézienne en déchaussant l’articulation. Les surfaces articulaires montent l’une sur l’autre et la capsule s’enroule. Il y a réduction des zones de contact.


Zancolli, au contraire, soutient l’idée que l’articulation reste congruente quel que soit le mouvement [4]. Il s’appuie sur les travaux de divers anatomistes et divise la géométrie de l’articulation en deux parties :




Système musculaire et stabilité active de l’articulation


Les muscles moteurs du pouce sont au nombre de dix, répartis en quatre muscles extrinsèques : abductor pollicis longus (APL), flexor pollicis longus (FPL), extensor pollicis longus (EPL), extensor pollicis brevis (EPB) ; et six muscles intrinsèques : opponens pollicis (OP), abductor pollicis brevis (APB), adductor pollicis (AP), flexor pollicis brevis (FPB), 1er interosseus palmaris (IOP), 1er interosseus dorsalis (IOD). Ils constituent un véritable haubanage musculaire, mobilisent le pouce dans les trois plans de l’espace et assurent sa stabilité.


Trois muscles s’insèrent directement sur M1, proche de l’articulation TM. L’APL prend son insertion terminale sur le versant latéral de la base de M1, il écarte le 1er métacarpien du second.


L’OP et le 1er IOD s’insèrent de façon diamétralement opposée à la base de M1 et entretiennent des rapports intimes avec l’articulation TM. Ce sont des muscles courts, épais, et puissants. Ils rapprochent M1 de l’axe de la main et leurs actions combinées lors des pinces en font un véritable couple stabilisateur de l’articulation TM [5].




Physiopathologie


La rhizarthrose est l’atteinte dégénérative du cartilage de l’articulation TM, à laquelle aujourd’hui, on associe les autres arthroses péri-trapéziennes.


C’est une affection fréquente qui touche les femmes 8 à 9 fois sur 10, après 40 ans, souvent dans un contexte ménopausique. La symptomatologie est variable, elle s’exprime principalement par une douleur mécanique à la base du pouce. Les douleurs peuvent être nocturnes témoignant de réactions inflammatoires articulaires. Du fait des contraintes importantes transmises à l’articulation TM lors des pinces pollici-digitales, certains facteurs mécaniques vont aggraver la symptomatologie. Les formes post-traumatiques sont rares et touchent plus souvent l’homme.


L’évolution naturelle se fait vers un enraidissement progressif de l’articulation, avec souvent l’apparition d’une déformation caractéristique, le pouce en « Z ». Douleur et déformation génèrent une gêne fonctionnelle majeure.


Mécanisme de la déformation : l’instabilité TM est présente dans 50 % des cas de rhizarthrose et semble souvent être une des premières manifestations cliniques de cette affection. On observe une désaxation latérale de la base du premier métacarpien avec une réduction des surfaces articulaires en contact entraînant une augmentation des pressions unitaires sur le cartilage. La distension du système ligamentaire, en particulier du LIM, associée aux contraintes de l’activité manuelle va potentialiser cette désaxation. Elle s’accompagne d’une fermeture de la première commissure, avec rétraction du muscle AP. En compensation, l’articulation métacarpo-phalangienne (MP) est sollicitée en hyperextension, la force de prise ne se faisant plus que par le muscle FPL. Ainsi s’installe un schéma de fonctionnement des muscles du pouce autour de la déformation en triple flexion :



Conséquence : les muscles thénariens stabilisateurs sont mis sur la touche, la force de préhension diminue, la possibilité d’adaptation aux différents types de pinces s’appauvrit, le champ d’exploration du pouce dans l’espace est de plus en plus restreint.



Signes cliniques et paracliniques



À l’examen


Le patient décrit une douleur principale à la base du pouce, soit d’origine mécanique, déclenchée par des activités sollicitant les pinces pollici-digitales, soit de type inflammatoire nocturne. À l’examen, on peut observer une tuméfaction à la base du pouce, la « bosse », témoignant de la sub-luxation de la base du 1er métacarpien. Les mouvements sont limités par la douleur, particulièrement les mouvements de torsion, associée éventuellement à des craquements ou crépitation articulaire ; on notera la limitation d’ouverture de la première commissure, l’amyotrophie des muscles thénariens, la tendance ou la présence de la déformation.


Trois tests permettent d’apprécier l’importance de la douleur et de l’instabilité de l’articulation TM :



• le signe de la touche de piano : la base du pouce se présente avec un aspect tuméfié et grossit. Une pression sur la partie latérale de M1 associée à une légère traction dans l’axe permet de réduire passivement la subluxation du 1er métacarpien. Celui-ci revient à la position initiale dès l’arrêt du mouvement. On note l’importance du déplacement et de la douleur ;


• le « grinding test » : il s’agit de mouvements de torsion imprimés au 1er métacarpien en compression sur son axe longitudinal. Ce test permet d’apprécier le retentissement douloureux du contact des surfaces entre elles mais aussi la laxité rotatoire de l’articulation ;


• le « pinch » : ce test permet d’évaluer la force de la pince pouce-index. On notera la force développée, le retentissement douloureux et le seuil d’apparition de la douleur, l’augmentation éventuelle de la saillie externe de la base de M1 lors de la manœuvre.

Stay updated, free articles. Join our Telegram channel

Jun 13, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 41: Rééducation de la rhizarthrose

Full access? Get Clinical Tree

Get Clinical Tree app for offline access